Il va sans dire, l’optimisme n’est pas de rigueur, par les temps qui courent, dans le monde de l’économie. Qu’il soit local ou mondial. Le Québec, par exemple, vit sa plus faible croissance économique depuis plusieurs années, selon la toute dernière Note de conjoncture métropolitaine du Conference Board du Canada. La croissance économique de Montréal atteindra 1,7% en 2008, la cadence la plus faible en cinq ans.
Fannie Mae et de Freddie Mac avaient pourtant été sauvées des eaux. En effet, pour d’aucuns, en optant pour une quasi-nationalisation des deux agences de refinancement Fannie Mae et Freddie Mac, Henry Paulson, le secrétaire au Trésor, avait montré dans son meilleur aspect le célèbre pragmatisme américain. Le gouvernement républicain, dont le parti est le plus farouchement opposé à l’interventionnisme de l’État, a mis en place un plan de sauvetage qui coûtera au minimum une dizaine de milliards de dollars aux contribuables du pays. Fannie Mae et Freddie Mac garantissent 5.200 milliards de dollars de prêts immobiliers, soit environ 40 % de l’encours de crédit hypothécaire des États-Unis.
Aux États-Unis, malgré les nombreuses assurances données par le président Georges W. Bush, Lehman Brothers s’écroule. Lehman Brothers existe depuis 158 ans. Dur coup pour les États-Unis, Et cela 14 mois après le début de la crise du crédit. Lehman a indiqué qu’au 31 mai, elle affichait des avoirs d’un montant de 639 milliards $ US, mais aussi 613 milliards de dollars $ US de dettes. La banque américaine Lehman Brothers, quatrième banque d’affaires américaines, doit se placer sous la protection du chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites après l’échec de négociations avec de potentiels repreneurs comme la britannique Barclays ou Bank of America et le refus de Washington de renflouer la banque. Et c’est bien la crise des subprime qui continue de faire trembler les marchés financiers. 25 000 emplois sont en question.
Le géant du courtage Merrill Lynch va être racheté par la Bank of America qui débourse, à cette fin, 50 milliards de dollars, soit environ 29 dollars par action contre 17 dollars en clôture. Mais c’est deux fois moins que le cours de Merrill Lynch en début d’année.
L’assureur AIG annonce devoir se défaire de nombreux actifs en vue de trouver des liquidités. Le titre de l’assureur américain se replie de 86% à la mi-séance. Le New York Times avait en effet annoncé que l’assureur américain s’apprêterait à annoncer la cession de pans entiers de son activité pour tenter de rassurer les investisseurs. La situation est encore plus grave que celle de Lehman Brothers, parce que la Fed (Banque centrale américaine) ne peut pas agir pour les assureurs. AIG devra, par exemple, mettre en vente son activité de financement de l’aéronautique, International Lease Finance Corporation (ILFC), le plus gros client d’Airbus et de Boeing.
Georges W. Bush n’a eu d’autre choix d’annoncer que le gouvernement fédéral n’interviendrait pas pour renflouer les firmes de Wall Street menacées. « Les décideurs politiques vont se concentrer sur la santé du système financier dans son ensemble ». Quel gâchis!
Les problèmes de fond persistent et mettent à mal l’économie américaine. L’intervention de l’État américain dans l’économie ne règle pas tout. Les investisseurs ont également infligé une correction sévère à l’indice Nasdaq des valeurs technologiques, qui a accusé une perte de 81,36 points, soit 3,60%, à 2179,91 points. Pour endiguer une possible crise internationale, dix grandes banques viennent de créer un fonds d’urgence de 70 milliards de dollars (49 milliards d’euros), dans lequel chacune d’entre elles pourra puiser – au cas où. Parmi ces dix institutions, la Deutsche Bank, la plus grande banque allemande.
De l’autre côté de l’Atlantique, par exemple, les banques de détail devraient se redresser plus rapidement mais elles doivent comprendre que la crise financière n’est pas terminée. Loin de là. La compagnie aérienne Alitalia est aux bords de la faillite. Ces exemples n’en illustrent que mieux la présente situation qui secoue durement l’économie mondiale.
« C’est un choc structurel sans précédent depuis 1929 » explique tout simplement Alan Greenspan. Interviewé par la chaîne ABC, dimanche 14 septembre, l’ancien président de la Réserve fédérale américaine (Fed) de 1987 à 2006, considère la crise financière actuelle la plus grave depuis des décennies. « Il n’y a aucun doute, je n’ai rien vu de pareil et ce n’est pas encore fini et cela prendra encore du temps ». Sauf que ce même Greenspan est accusé par certains d’avoir alimenté la présente crise avec des taux d’intérêt trop bas! Greenspan estime maintenant à plus de 50% le risque de récession aux États-Unis. Selon lui, la crise financière va entraîner la chute de plusieurs institutions financières majeures. George Soros, le célèbre financier milliardaire américain, est d’avis que le président de la Fed « porte une lourde responsabilité » dans la « création de la bulle immobilière ».
En France, la ministre de l’Économie, Christine Lagarde, constate avec réalisme que, oui, c’est un choc. Mais en même temps, c’est le témoignage d’un certain équilibre. Le Trésor américain ne peut pas constamment aller au sauvetage de ceux qui sont en mauvaise posture. Elle rejoint l’avis de Greenspan : « le gouvernement fédéral ne pouvait pas mettre un filet de sécurité sous toutes les firmes financières faisant faillite ». La Fédération bancaire française(FBF) s’est voulue rassurante : les institutions financières françaises sont solides et assurent le financement de l’économie dans des conditions normales. Le dispositif adopté aux États-Unis correspond à une situation de crise qui n’a pas d’équivalent en France. Les banques centrales européennes suivent attentivement la situation : la BCE a injecté 30 milliards d’euros et la BoE 5 milliards de livres. En Asie, la Banque du Japon (BoJ) a injecté mardi 10 milliards d’euros dans le marché bancaire et a appelé les investisseurs au calme.
Une pareille crise n’était pas sans intervenir dans la campagne présidentielle américaine. Selon Barack Obama : « Huit ans de politique qui ont mis en lambeaux la protection des consommateurs, affaibli la surveillance et les régulations et encouragé les fortes primes pour les dirigeants d’entreprises, tout en ignorant les Américains de la classe moyenne, nous ont menés à la crise financière la plus grave depuis la Grande dépression ».
Les États-Unis n’ont pas les moyens de se payer des réductions d’impôts de la taille de celles proposées par le candidat républicain aux élections présidentielles, John McCain, a averti Alan Greenspan. Du moins, pas sans une réduction des dépenses gouvernementales du même ordre. « Je ne suis pas en faveur de l’idée de financer des réductions d’impôts en empruntant de l’argent », a soutenu l’ancien président de la FED lors d’une interview avec Bloomberg Television. « J’ai toujours lié les baisses d’impôts aux dépenses ». John McCain avait pourtant avoué qu’il lisait « The Age of Turbulence », les mémoires d’Alan Greenspan, pour s’éduquer dans le monde des finances. Le candidat républicain entend compenser les réductions d’impôts – dont la réduction du taux d’imposition des sociétés et l’élimination de l’impôt minimum de remplacement, lequel a nui aux familles de la classe moyenne – en mettant un terme aux dépenses injustifiées du Congrès, en abolissant des programmes gouvernementaux inutiles et en révisant des programmes d’admissibilité comme le régime d’assurance-maladie et de sécurité sociale.
« John McCain ne parviendra pas à compenser ses baisses d’impôts par l’élimination des dépenses en affectations spéciales du Congrès, lesquelles sont estimées à 17 milliards $ US annuellement », a expliqué la sénatrice démocrate Claire McCaskill.
Au Canada, le chef du Parti libéral du Canada, Stéphane Dion, soutient que le programme économique des conservateurs rapproche le pays d’une récession. Comme on peut le constater, les libéraux devraient orienter leur discours sur l’économie au cours des prochaines semaines de la campagne électorale. Selon Stéphane Dion, « Stephen Harper a permis à une économie jadis florissante de frapper un mur. Stephen Harper ne gouverne qu’au jour le jour, sondage après sondage. Il veut acheter le vote des Canadiens avec ses tours de passe-passe ».
Le chef conservateur, Stephen Harper, se veut rassurant. Pas de panique. Les fondements de l’économie canadienne restent forts. Le Premier ministre a même lancé un appel au calme. Très préoccupé par la situation économique aux États-Unis et dans le monde, il veut tout de même rassurer la population canadienne : les bases de l’économie canadienne sont solides à la fois pour les domiciles, les gouvernements et les institutions financières.
La chef du Parti vert, Elizabeth May, a relevé, sur un ton particulièrement alarmiste, « les politiques économiques désastreuses du premier ministre Stephen Harper », ajoutant que « l’effondrement de Wall Street en fin de semaine est une très mauvaise nouvelle pour l’économie » canadienne. Selon le Parti vert, l’économie du pays « dispose de peu de marge pour absorber un nouveau choc ». Pire. « Le manque de leadership de Stephen Harper nous entraîne peu à peu au bord du déficit. Son échec à gérer l’économie en des temps incertains doit avoir une fin ».
Intéressant. Moi je ne vois pas cela nécessairement d’un mauvais oeil. Il y a un message très clair dans la crise qui s’en vient.
On ne va pas se le cacher, nous avons une économie contrôlé par les banques et leur crédit. En ce sens, c’est une économie fondé sur les dettes que nous avons, rien de moins. Rien que le fait que ce soit les banques qui contrôlent l’économie et que la Réserve économique Américaine soit une entité PRIVÉ, moi je trouve cela assez tordue.
Deuxièmement, je crois qu’on est en train d’assister à une prise de conscience qui nous montre que la croissance à tout prix et le profit au dépend des autres ne peut plus fonctionner. J’ai vu un documentaire l’autre jour qui expliquait que des compagnies pharmaceutiques Américaine avaient breveté certain gènes humain. Cela empêchait évidement à d’autres chercheurs de développer des antidotes pour des maladies graves à cause du fait que leurs antidotes agissaient sur les gènes brevetés et qu’il est donc impossible de mettre en marché un tel médicament sans se faire poursuivre. Vous voyez où on est rendu?
La mort de notre système, capitalisme remodelé en néo-libéralisme au moment du New Deal, était inscrite dans ses gênes. On a choisi a Bretton Woods une façon agréable de le laisser s’acheminer, vers son heure dernière, en misant tout sur le crédit et en faisant fi de toute réalité. Ceux qui ont eu le pouvoir ont choisi de simplement reporter au-dela de LEUR horizon les inévitables rétributions. Tout le reste était prévisible.
http://nouvellesociete.org/H.html
Il semble bien que la prochaine étape sera la prise en charge du système bancaire USA. Ensuite, un contrôle des changes et la non-convertibilité du dollar… puis un gouvernement autoritaire aux USA pour faire accepter a la population un encadrement de l’économie qui sera l’antithèse de la libre entreprise.
Le reste du monde – qui a fait confiance è l’Amérique, en faisant du dollar sa monnaie de réserve – va se voir refiler la plus grande partie de la note et n’appréciera pas… De nouvelles alliances vont se former.
Votre site web est une mine d’or, merci beaucoup! C’est une inspiration pour mon jeune blogue que je commence à alimenter!
Remi
Évidemment, toute société de consommation pure et dure fait une large place à l’endettement. Acheter à crédit. Ce qui est regrettable au bout de la ligne est le fait que ce sont les consommateurs les moins fortunés qui paiement chèrement la note. Je vous souhaite tout mes vœux de succès pour votre blogue que j’irai consulter avec plaisir.
Pierre JC
L’élément le plus intéressant réside dans le fait que ce sont les pays en émergence qui vont venir en aide aux États-Unis. Viendra le jour où par exemple le BRIC (le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine) deviendra une force incontournable. Viendra également le jour où le Mercosur (Amérique latine) changera complètement l’environnement économique : la donne économique mondiale des dix prochaines années fera en sorte qu’elle sera bien différente de celle que nous avons connue ou que nous connaissons aujourd’hui. Les grands bouleversements sont d’ores et déjà en place. À suivre.
Pierre R.
Bonjour Pierre,
Réduire les impôts, pourquoi faire? Plus rien de positif? C’est le sang qui coule dans les veines d’un état.
« L’Amérique, présidence pragmatique » (URL) ai-je écrit.
J’ose le faire pour les avoir coudoyer pendant de nombreuses années, ces Américains que j’aime bien par certains côtés et que je déteste par d’autres.
Ils n’ont jamais connu une crise comme celle-ci et quand on voit qu’ils se retrouvent à la rue dans le cauchemar de leurs rêves à vouloir avoir leur maison.
La douche écossaise deviendra peut-être la douche américaine dans le langage de demain.
L’Europe a repris des couleurs. Espérons que ce soit celle de l’arc en ciel.
On parle toujours du dollar américain. Et le vôtre, je ne prends pas le temps de le suivre. Qu’est-il devenu?
L’enfoiré
Je crois bien que nous sommes partagés de la même manière entre d’une part admirer l’Amérique et d’autre part la conspuer sous certains égards. Il faut dire que le président actuel est l’artisan d’une désaffection mondiale à l’égard de cette Amérique multiculturelle qui faisait, à une certaine époque, l’objet d’une certaine convoitise en raison de sa diversité et de son ouverture au monde.
Pierre R.