Invité à l’émission radio de Marginean, il y a quelques semaines, pour y parler de droit, j’ai reçu par la suite neuf (9) courriels de commentaires. Bien peu, mais quand on connaît la propension des auditeurs à ne PAS réagir, j’en ai déduit que la population aimerait bien que l’on change certaines choses dans le domaine de la justice.
Comme il n’est pas interdit d’apporter parfois des propositions constructives, ne serait-ce que pour souffler un peu entre les critiques, en voici une. Simple, facile, utile…
L’État pourrait créer un greffe virtuel. Tout citoyen recevrait un NIO (numéro d’identification officiel) qui lui permettrait de télécharger gratuitement sur ce site de l’État, en y joignant ses propres NIP et mot de passe, tout document dont la taille n’excède pas 10 M. Le document, dont on connaît alors le moment précis de téléchargement , serait réputé enregistré comme devant notaire au moment de cette inscription.
Il serait possible de faire ce qu’on veut de ce document. De le rendre public immédiatement ou plus tard, comme d’en limiter l’accès à ceux qui disposent du code que leur a donné l’auteur à cette fin. Il est possible de stipuler que ce document ne pourra être effacé, qu’il le sera à une date pré-déterminée, qu’il ne pourra être modifié sans l’autorisation d’un tribunal, etc.
Mieux, il est possible de donner des témoins à ce document, ceux-ci le contresignant alors de leur NIP et mot de passe. On peut augmenter encore la fiabilité du processus, en exigeant que le système retourne à l’expéditeur un accusé réception de la date et de l’heure de l’enregistrement (avec ou sans une copie du texte enregistré), le numéro de code de cet accusé réception devenant nécessaire pour avoir de nouveau accès au document si tel est le voeu du ou des signataires
Ce qui peut-être fait par une seule personne – pour un testament, par exemple – peut être fait par plusieurs, simultanément avec toutes les parties en ligne ou à tour de rôle, de sorte que des contrats peuvent ainsi être signés, même à distance, et être enregistrés sur le champ. Des contrats dont on pourra stipuler qu’il faudra l’intervention unanime des signataires pour les modifier ou dont on stipulera qu’ils ne peuvent PAS être modifiés. La possibilité de créer à bon compte et sans délais des actes authentiques et de les enregistrer à un greffe universel entraînera une accélération révolutionnaire du rythme des affaires.
Ce n’est pas tour. On aurait ainsi la possibilité d’établir facilement l’antériorité d’une publication ou d’une idée, puisque un texte téléchargé peut porter la contrainte que même l’auteur ne pourra plus y apporter de modifications. L’inscription au registre approprié ne permet donc pas seulement de déterminer sans contestation l’heure d’une hypothèque, mais aussi de faire la preuve enfin sans ambiguïté d’un copyright, puisque une copie est téléchargée du texte lui-même.
Ceci serait particulièrement pratique quand il s’agir d’un texte à diffusion restreinte ou qui n’a pas fait l’objet d’une publication formelle et ne sera donc pas en bibliothèque prochainement avec le ISBN approprié.
Le même principe s’appliquerait à un accord de non divulgation/non circonvention (NDNC), à l’ébauche d’une marque de commerce et, ce qui devient de plus en plus nécessaire, aux versions préliminaires des travaux de recherche universitaires ….
Naturellement, celui qui veut protéger un concept aura à faire un choix entre une publication ouverte à tous – qui établira sans aucun doute ses droits face à tout venant – et une diffusion restreinte qui le laissera vulnérable à une défense d’originalité subjective et de bonne foi. Un choix à faire, aussi, de permettre ou non l’accès des engins de recherche du Web au document téléchargé, selon que l’auteur veut ou ne veut pas attirer l’attention sur le fait qu’il s’intéresse au sujet dont traite le document.
On pourra en rendre intuitif le repérage, par auteurs, par dates et catégories traditionnelles, bien sûr, mais aussi par divers discriminants taxinomiques à définir, l’auteur ou les auteurs gardant en tout temps le droit de préciser que le document NE doit PAS être classifié.
Par delà l’usage du greffe universel pour des fins juridiques ou commerciales, ne négligeons pas la possibilité d’y inscrire aussi pour la postérité ce que l’on voudra bien. La petite histoire deviendra grande quand chacun, dans un siècle, pourra suivre document par document la vie de son trisaïeul comme celle d’un personnage historique. Nous sommes la première génération qui pourrait ne jamais être oubliée.
J’ai des centaines de propositions de ce genre à faire. S’il y a un intérêt. Que pensez-vous de celle-la ?
Pierre JC Allard