Archives quotidiennes : 15 mai 2009

Décapiter la SRC pour mieux nous exterminer

Il n’y a pas si longtemps, nous apprenions que nos maîtres d’Ottawa avaient décidé de couper 800 têtes au sein du personnel de la société d’État qu’est Radio-Canada. Nous avions trouvé que le gouvernement Harpeur fessait très fort pour sabrer dans cette culture qui est le ciment unissant le peuple québécois.
Et voilà que, non content de son opération rejoignant les souhaits de Lord Durham, l’insignifiant premier ministre de ce pays dans lequel nous sommes assujettis, en remet cette semaine en annonçant de nouvelles compressions de 56 millions de dollars supplémentaires d’ici à l’an prochain.
Ces mauvaises nouvelles, qui suscitent en moi de nombreux souvenirs des anciennes belles soirées de Radio-Canada, me font aussi réaliser à quel point cette institution a façonné l’image de tout un peuple, avant qu’on ne décide, il y a quelques années, de diluer son contenu créateur et culturel et de la transformer ni plus ni moins en une copie un tantinet plus haut de gamme que TVA.
Les plus jeunes ne le savent peut-être pas, mais ce sont les émissions produites par le réseau public qui ont contribué à déclencher une prise de conscience collective de ce que nos sommes: un peuple distinct avec une culture unique dont la télé publique se faisait le miroir.
Les Roger Lemelin, Germaine Guèvemont, Pierre Gauvreau, Victor Lévy Beaulieu, Claude Meunier (et j’en oublie des dizaines) ont été des phares lumineux dans notre société qui, il y a à peine cinquante ans, se croyait encore née pour un petit pain parce qu’elle avait conservée la mentalité d’un peuple vaincu et à genoux.
Et que dire des ces « Beaux dimanches » qui ont bercé une bonne partie de ma vie et contribué à me faire aimer l’art dans ce qu’il a de plus sublime, tant par ses pièces d théâtre d’auteurs d’ici et d’ailleurs, que par ses opéras, ses concerts, enfin tout ce qui pouvait contribuer à nous élever.
Les Québécois ont commencé à s’intéresser d’une façon intelligente à la politique grâce au Point de Mire de René Lévesque, à la science grâce au talent de vulgarisateur de Fernand Séguin. Ce sont ces choses-là qui ont permis de nous déniaiser et de nous reconnaître tels que nous sommes et tels que nous voulons devenir.
Mais voilà que sous prétexte économique, on veut continuer à décapiter cette institution nationale qui, de toute façon, n’est plus que l’ombre de ce qu’elle fut car on y présente maintenant des pitreries, des plogues et des shows de complaisance au nom d’une certaine rentabilité. Les bonnes émissions d’intérêt public (car il en reste quelques-unes) sont présentées à des heures où presque personne ne regarde le petit écran. Elle ne servent que de caution morale à une entreprise de démolition systématique des valeurs québécoises.
Une télé publique de qualité devrait avoir un mandat culturel et ses dépenses devraient être entièrement défrayées par notre trésor collectif. S’il sont capables de trouver des milliards et des milliards pour faire couler du béton au profit des mafias de la construction, me semble qu’ils pourraient bien nous redonner ce qui nous appartient, i.e. notre dignité et notre droit à la culture.
Mais, pensez-y bien tout en gardant à l’esprit que Stephen Harper est un politicien diabolique:
Quoi de mieux que de trancher la tête de Radio-Canada pour contribuer à exterminer notre peuple et à réaliser le rêve de tout Canadian: un pays uni et anglophone d’une mare à l’autre.

PIERRE SCHNEIDER

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