Archives mensuelles : février 2010

Fragile planète financière 2

Yan Barcelo, 26 février 2010

La semaine dernière, je faisais état des échafaudages financiers qui sont inquiétés par la crise grecque. Je poursuis cette semaine avec un bref tour d’horizon, cette fois,  de l’endettement des pays.

À présent, voyons un peu la géographie d’endettement dans laquelle circulent tous ces actifs de la finance virtuelle. On nous parle de pays où le taux d’endettement est immense, par exemple en Italie, où la dette du gouvernement s’élève à 115% du PIB. Mais ces chiffres « officiels » qu’on nous lance à la figure sont passablement aseptisés. Car le vrai niveau de la dette en Italie n’accapare pas 115% du PIB de ce pays, mais bien plutôt 364%, comme le révèle une étude de 2009 du National Policy for Financial Analysis, à Washington (http://www.ncpa.org/pdfs/st319.pdf). Ce que les chiffres habituels négligent d’indiquer c’est tout l’endettement dénué de provisions que représentent en Italie les fonds de pension, les systèmes de santé et quoi encore. C’est ainsi qu’en Allemagne, l’endettement total atteint 418% du PIB, en France, 549%, en Grèce, 875%, en Pologne, 1500%! Aux Etats-Unis, l’endettement total, tel que le calcule la firme de Toronto Sprott Asset Management, s’élève à 110 trillions $US, soit environ 730% du PIB. Quel sera le prochain pays à ne pas pouvoir honorer la part de ses dettes venant à échéance à court terme?

Peut-être qu’un prochain choc ne viendra pas d’un pays souverain incapable d’honorer ses dettes. Peut-être que ce choc viendra de la Chine, par exemple, où plusieurs observateurs voient une bulle immobilière et financière de proportion homérique se gonfler depuis quelques années déjà. Et c’est sans compter la course d’investissement dans laquelle le gouvernement chinois a lancé son économie avec des rendements qui vont décroissant de plus en plus. C’est ainsi qu’on trouve en Chine une ville comme New Ordos, construite pour accueillir environ 1,5 million de citoyens, mais où personne n’habite. On trouve aussi le South China Mall, un centre commercial à peu près dix fois plus gros que n’importe quel centre commercial dans le monde – pratiquement désert. Toute cette frénésie de construction a contribué à tenir dans la stratosphère la croissance du PIB chinois, mais il viendra inévitablement un moment où les coûts de soutien de ces installation et infrastructures inutilisées vont faire imploser les finances chinoises. Ce jour-là, un choc venant d’Orient se répercutera dans des réseaux bancaires et gouvernementaux surendettés. Par exemple, la Chine n’achètera plus les bons du Trésor américain, forçant la Réserve fédérale à augmenter démesurément son taux directeur, un geste qui enfoncera l’économie américaine dans un gouffre plus profond encore.

Pour l’instant, ces montagnes de dette sont bien dissimulées, et peuvent le demeurer un bon moment encore. Mais un jour, elles ne pourront qu’éclater au grand jour. Le jour, par exemple, où quelques gouvernements, en Europe ou aux Etats-Unis, s’avéreront incapables de payer les versements de pension de leurs citoyens. Ou qu’ils devront hausser les taxes de façon prohibitive simplement pour continuer à faire fonctionner quelques services publics devenu rachitiques.

Allons-nous passer au travers de tous ces écueils qui s’accumulent à l’horizon? C’est possible. Mais très-très peu probable. Nos jours d’abondance sont comptés.

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La drogue dans les prisons

Chronique du prisonnier.

Jean-Pierre Bellemare, prison de Cowansville    Dossier Chronique du prisonnier

drogue-prison-crime Sans vin, ni bière, les détenus se rabattent sur les drogues que l’on trouve entre les murs. Ayant cessé toute consommation depuis vingt ans, je perçois la drogue d’un tout autre œil aujourd’hui.

Retour vers le passé. La recherche de la drogue était ma priorité absolue. Ma consommation n’était pas motivée par la recherche de plaisir. Au contraire, elle était un anesthésique essentiel. Ma souffrance était insupportable. L’effet recherché était toujours le même: oublier le présent.

Je tentais de fuir l’horreur qu’était devenue ma vie dans un pénitencier à sécurité maximale. Ma peur permanente d’être violé, battu ou tué ne pouvait être contrôlée qu’avec la drogue. Ce n’était certainement pas la consultation d’un psychologue qui pouvait palier mon drame quotidien. Le premier meurtre auquel j’ai assisté m’a fait vomir. Voir un homme patauger dans son sang est traumatisant. Être près de lui, mais incapable de l’aider par peur d’être tué à mon tour secoue profondément. La drogue servait à me donner l’impression que ce n’était qu’un rêve dont je me réveillerais bientôt. Ce réveil n’arriva pas.

Qui se ressemble s’assemble

La drogue est rassembleuse. Si au pénitencier certaines personnes de différentes origines, religions ou allégeances criminelles s’ignorent ou se provoquent, lorsqu’il y a une entrée de drogue dure, tous les différends semblent disparaître. Un caïd pourra ainsi fricoter, l’instant d’une consommation, avec un voleur de caps de roues. Un motard fraternisera pour sa part avec le clan ennemi le temps d’un shoot d’héroïne.

Le besoin de drogue est si fort, qu’une bonne partie d’entre nous consommons sans penser au lendemain. Au réveil, lorsqu’on constate que nos dépenses ont largement dépassées nos revenus, le retour à la réalité est brutal. Lorsque nous devenons incapables de régler nos paiements par la vente de nos avoirs personnels, c’est signe que les problèmes arrivent. Les détenus qui s’endettent en prison ne peuvent pas fuir les créanciers. Il n’y a pas beaucoup de solutions qui s’offrent à eux. L’administration de la drogue au pénitencier a sa logique particulière. Si les gens qui consomment sont incapables d’attendre pour se geler, ceux qui les collectent sont tout aussi incapables d’attendre les paiements. La raison en est fort simple, la plupart du temps, eux aussi sont des consommateurs invétérés.

Les détenus vendront alors leurs effets personnels, bijoux ou vêtements, jusqu’à épuisement des stocks. Lors-qu’ils n’arrivent plus à payer, ils sont contraints de devenir prostitué ou homme de main. Les créanciers trouvent toujours des solutions qui les avantageront, au détriment des clients, naturellement. Dans les cas d’endettement les plus graves, le suicide, le meurtre d’un autre détenu ou du vendeur lui-même peuvent être considérés comme des solutions pour s’en sortir.

Fuir ses dettes par le crime

Combien de fois ai-je vu des codétenus faire des overdoses? Ils disparaissent ainsi avec le peu de dignité qu’il leur restait. Il existe d’autres manières sordides de ne pas payer ses dettes. Si vous êtes pris dans une bagarre, une tentative d’évasion, ou si vous menacez verbalement un membre du personnel, vous serez mis en isolation, donc incapable de rembourser. Un séjour dans le «trou» vous évite alors de perdre la face.

Car perdre la face en prison est presque aussi grave que de perdre la vie. Pour préserver leur réputation, les gars sont prêts à sacrifier père et mère. L’image que l’on se fabrique à l’intérieur des murs est souvent la dernière possession qui nous maintient en vie. Ce qui explique tous les trésors d’imagination que les gars déploient pour la préserver.

Quelques textes de nos Chronique du prisonnier:

Sexualité dans les prisons

Un détenu ministre de la Justice …

Drogue et paradis artificiel en prison

Esquisse ensoleillée d’une petite prison

Le prisonnier et la religion

Prisonniers incapables de demander de l’aide

Illustrations Renart L’Éveillé.

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Classé dans Actualité, Raymond Viger

La route vers l’ignorance et la croissance

Par lutopium – Il est stupéfiant de constater comment le paysage politique québécois s’est transformé depuis la récente crise financière.  Les agents économiques, habituellement assez discrets, s’impliquent dans le débat avec une vigueur assez exceptionnelle.  Suite à la publication des trois fascicules du Ministère des Finances qui donnent le ton au contenu du prochain budget, voilà que Maître Lucien Bouchard revient à la charge avec son thème préféré: la productivité.  Car, non seulement nous prépare-t-on à une hausse substantielle des frais de scolarité pour les études universitaires, l’establishment québécois semble vouloir saisir l’occasion pour recadrer la mission fondamentale des écoles et tisser des liens intimes entre le système d’éducation et les besoins immédiats du patronat.

La croissance économique peut être enclenchée par une variation de l’emploi. On veut dire par là que la croissance économique peut provenir d’une augmentation de la proportion des travailleurs potentiels qui exercent effectivement un emploi. Il s’agit en fait de la définition du taux d’emploi. – Troisième fascicule du Ministère des Finances du Québec sur les consultations prébudgétaires 2010-2011

Le discours nous semble fort louable: voilà que les grands manitous de l’espace économique sont inquiets face au financement de nos universités.  À les lire, il y aurait péril en la demeure.  Pas de temps à perdre, il faut dégeler les frais de scolarité afin d’assurer la survie de nos institutions.

Exemples de mesures possibles concernant les revenus: hausse des frais de scolarité universitaire de 1,968 $ à 5,350 $ par année – ibid

Fait assez surprenant, dès le lendemain de la publication du Pacte pour le financement concurrentiel de nos universités, le quotidien La Presse, habituellement assez favorable aux idées néolibérales, publiait une mise au point afin de calmer les ardeurs de ces nouveaux lucides en replaçant les chiffres dans leur perspective actuelle:

Pendant le point de presse, l’ex-recteur de l’Université de Montréal Robert Lacroix a parlé des effets néfastes du sous-financement. Il s’est bien gardé de préciser que 10 des 15 universités ont renoué avec les surplus en 2008-2009. Le tableau n’est pas aussi noir que le prétend le club des ex. Mais il faut bien qu’ils le noircissent, le tableau, pour faire passer leurs idées.

Et les effets néfastes d’une hausse brutale des droits de scolarité? Même si le groupe Bouchard-Lacroix est prêt à consacrer 30% des sommes recueillies pour bonifier le programme des prêts et bourses, une hausse trop brutale aura probablement un effet négatif sur l’accessibilité.

Selon le Conseil supérieur de l’éducation, «les problèmes financiers expliquent le quart des abandons, ce qui en fait la raison la plus fréquemment observée dans l’ensemble des motifs évoqués». En 2003, Statistique Canada avait conclu que les jeunes issus de familles à revenu élevé étaient 2,5 fois plus nombreux à l’université.

M. Bouchard devrait se pencher sur ces chiffres avant de proposer des hausses à gogo. – La Presse, 24 février 2010

Il y aurait donc ici un discours qui en cache un autre.  Tout en appuyant les mesures annoncées par le gouvernement Charest qui vise à hausser la contribution des citoyens au financement des services publics, Me Bouchard, accompagné par la Fédération des Chambres de Commerce et du Conseil du Patronat, cherche peut-être à décourager les étudiants et familles à faible revenu d’accéder à la formation supérieure afin de les réorienter rapidement vers une formation professionnelle.  Depuis quelques années, les porte-parole de l’industrie et du commerce tiennent essentiellement le même discours: nos usines n’ont plus de bras et les têtes ne nous servent pas à grand chose…

Les entreprises, comme le gouvernement, doivent investir davantage en formation. Mais on peut faire un meilleur usage des budgets considérables qui y sont consacrés. Par exemple: éliminer les formations qui ne répondent plus aux besoins des emplois. – Fédération des Chambres de Commerce du Québec

Le résultat des analyses de pauvreté montre que, malgré l’amélioration générale, certains groupes sont toujours plus touchés que d’autres par la pauvreté. Il y aurait lieu de favoriser davantage l’accessibilité à la formation manquante et le développement des compétences en lien avec le marché de l’emploi par un mode de financement adéquat des ordres d’enseignement. On parle surtout de formation professionnelle (aux niveaux secondaire et collégial) offerte à temps partiel et de formation en entreprise adaptée aux réalités du milieu du travail. – Conseil du Patronat

Le gouvernement libéral, fier représentant de l’establishment québécois et de l’empire du commerce (équitable ou non), confirme qu’il y a consensus parmi ses membres: pas question de revoir la fiscalité des entreprises pour dégager de nouveaux revenus ou de demander aux plus riches de faire un petit effort additionnel.  Les prochaines hausses de tarifs (TVQ, tickets modérateurs, frais scolaires, électricité, etc…) seront imposées à tous les citoyens sans tenir compte de leur capacité de payer.  On viendra me faire croire que la société québécoise est préoccupée par l’enrayement de la pauvreté et par l’enrichissement des connaissances de ses citoyens…

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La racine de l’argent.

Par Philippe David.

Ce matin, j’ai décidé de faire un peu de philosophie. Le sujet est un peu pertinent car je crois que le peuple québécois a une attitude malsaine envers l’argent et la richesse en général. Atlas Shrugged , le roman d’Ayn Rand a été publié en 1957 et est toujours dans les tops sur la liste des Best-sellers aux États-Unis, malgré son âge. Il semble même y avoir un regain d’intérêt pour ce livre: les ventes ont plus que triplé en 2009 grandement dû aux similarités de la crise économique actuelle et le scénario du livre, ce qui le rend étrangement préscient. Le roman est en réalité plus qu’un roman, il est aussi une représentation imagée de la philosophie objectiviste de Rand dont les concepts sont expliqués à travers le discours de John Galt. Malheureusement, il n’existe pas encore de traduction « officielle » de ce livre en français. Une traduction pirate circulait il y a quelques mois, mais elle a dû être retirée. Il y a environ un an et demi, je m’étais amusé à traduire un extrait de ce livre portant sur la conception Randienne de l’argent : Le discours de Francisco d’Anconia. Je la reproduis ici pour votre bénéfice, mais si vous vous débrouillez bien avec la langue de Shakespeare, je vous encourage fortement à lire le livre (Disponible chez Archambault et Indigo/Chapters. Chez Renaud-Bray, ils ont jamais entendu parler).

Une petite mise en contexte: Francisco d’Anconia est un magnat des mines de cuivre et un des principaux personnages du livre. Lors d’une réception de mariage, il se tenait juste à coté d’un groupe qui menait une conversation quand l’un d’eux déclare que « l’argent est la racine de tout mal ». D’Anconia l’interpelle donc de cette façon:


Le discours de Francisco d’Anconia

Par Ayn Rand. Extrait du livre «Atlas Shrugged» et traduit en français par Philippe David

« Alors vous pensez que l’argent est la racine de tout mal? » dit Francisco d’Anconia. « Avez-vous déjà demandé quelle est la racine de l’argent? L’argent est un outil d’échange qui ne peut exister à moins d’avoir des biens produits et des hommes capables de les produire. L’argent est la forme du principe que les hommes qui veulent transiger entre eux doivent le faire par le commerce et donner valeur pour valeur. L’argent n’est pas l’outil des chapardeurs, qui réclament votre produit par les larmes, ou des pillards, qui le prennent par la force. L’argent est rendu possible par les hommes qui produisent. Est-ce cela que vous considérez comme le mal? »

« Lorsque vous acceptez de l’argent en paiement de vos efforts, vous ne le faites que dans la conviction que vous l’échangerez pour le produit de l’effort des autres. Ce ne sont pas les chapardeurs et les pillards qui donnent la valeur à l’argent. Pas un océan de larmes, ni tous les fusils du monde peuvent transformer ces bouts de papier dans votre portefeuille en pain pour vous laisser survivre demain. Ces bouts de papier, qui auraient dû être de l’or, sont un gage d’honneur– votre réclamation de l’énergie des hommes qui produisent. Votre portefeuille est l’expression d’espoir que quelque part dans le monde autour de vous il y a des hommes qui ne prendront pas à défaut ce principe moral qui est la racine de l’argent. Est-ce cela que vous considérez comme le mal? »

« Avez-vous déjà cherché la racine de la production? Examinez une génératrice électrique et osez vous dire qu’elle a été créée par l’effort musculaire de brutes écervelées. Essayez de faire croître une graine de blé sans le savoir laissé par les hommes qui ont dû le découvrir la première fois. Essayez d’obtenir votre nourriture par le seul moyen de mouvements physiques — et vous apprendrez que l’esprit de l’homme est la racine de tous les biens produits et de toute la richesse qui ait existé sur terre. »

« Mais vous dites que l’argent est fait par les forts aux dépens des faibles? De quelle force parlez-vous? Ce n’est pas la force des muscles et des fusils. La richesse est le produit de la capacité humaine de penser. Alors l’argent est fait par l’homme qui invente un moteur aux dépens de ceux qui ne l’ont pas inventé? Est-ce que l’argent est fait par l’intelligent au dépens du sot? Par le capable au dépens de l’incapable? Par l’ambitieux au dépens du paresseux? L’argent est fait — avant qu’il puisse être pillé ou chapardé — fait par l’effort de chaque honnête homme, chacun selon son habileté. Un honnête homme est celui qui sait qu’il ne peut pas consommer plus qu’il n’a produit. »

« De transiger par l’argent est le code des hommes de bonne volonté. L’argent repose sur l’axiome que chaque homme est propriétaire de son esprit et de ses efforts. L’argent n’alloue aucun pouvoir de prescrire la valeur de votre effort, excepté par le choix volontaire de l’homme qui veut l’échanger avec son effort en retour. L’argent vous permet d’obtenir pour vos biens et votre labeur ce qu’ils valent aux yeux des hommes qui les achètent, mais pas plus. L’argent ne permet aucune entente sauf celles par bénéfice mutuel avec le jugement non-forcé des commerçants. L’argent vous demande la reconnaissance que les hommes doivent travailler pour leur propre bénéfice, et non pour leur tort, pour leur gain et non pour leur perte — la reconnaissance qu’ils ne sont pas des bêtes de somme, nés pour porter le poids de votre misère — que vous devrez leur offrir des valeurs, et non des blessures. — que le lien commun entre les hommes n’est pas l’échange de souffrances, mais l’échange de biens. L’argent demande que vous ne vendiez pas votre faiblesse à leur stupidité, mais votre talent à leur raison; il demande que vous n’achetiez pas le pire qu’ils offrent, mais le meilleur que votre argent puisse trouver. Et lorsque les hommes vivent de l’échange — avec la raison et non la force comme arbitre final — c’est le meilleur produit qui gagne, la meilleure performance, l’homme avec le meilleur jugement et la meilleure habileté — et le degré de la productivité d’un homme est le degré de sa récompense. C’est le code de l’existence pour laquelle l’outil et le symbole est l’argent. Est-ce cela que vous considérez le mal? »

« Mais l’argent n’est qu’un outil. Il vous emmènera où vous voulez, mais il ne vous remplacera pas comme chauffeur. Il vous donnera les moyens de satisfaire vos désirs, mais il ne vous donnera pas de désirs. L’argent est le fléau des hommes qui tentent de renverser la loi de la causalité — les hommes qui cherchent à remplacer l’esprit en saisissant les produits de l’esprit. »

« L’argent n’achètera pas le bonheur à l’homme qui n’a aucune idée de ce qu’il veut: l’argent ne lui donnera pas un code de valeurs, s’il ne sait à quoi attribuer une valeur, et il ne lui donnera pas un but, s’il ne sait ce qu’il doit chercher. L’argent n’achètera pas l’intelligence au sot, ou l’admiration au trouillard, ou le respect à l’incompétent. L’homme qui tente d’acheter le cerveau de ses supérieurs pour le servir, avec l’argent pour remplacer son jugement, finit par devenir la victime de ses inférieurs. Les hommes d’intelligence le désertent, mais les tricheurs et les fraudeurs accourent à lui, attirés par une loi qu’il n’a pas découverte: qu’aucun homme ne peut être plus petit que son argent. Est-ce la raison pour laquelle vous dites que c’est le mal? »

« Seul l’homme qui n’en a pas besoin, est digne d’hériter la richesse — l’homme qui ferait sa fortune peu importe où il a commencé.Si un héritier est l’égal de son argent, il le servira; sinon, il le détruira. Mais vous le regardez et vous criez que l’argent l’a corrompu. Vraiment? Ou a-t-il corrompu son argent? N’enviez pas un mauvais héritier; sa richesse n’est pas la vôtre et vous n’auriez pas fait mieux avec. Ne pensez pas qu’elle aurait dû être distribuée entre vous; chargeant le monde de cinquante parasites au lieu d’un, ne ramènerait pas la vertu morte qu’était la fortune. L’argent est une puissance vivante qui meurt sans sa racine. L’argent ne servira pas l’esprit qui ne peut l’égaler. Est-ce la raison pourquoi vous dites que c’est mal? »

« L’argent est votre moyen de survie. Le verdict que vous prononcez sur la source de votre gagne-pain est le verdict que vous prononcez sur votre vie. Si la source est corrompue, vous avez damné votre existence. Avez-vous obtenu votre argent par la fraude? En jouant sur les vices ou la stupidité des hommes? À servir les sots en espérant recevoir plus que votre habileté ne mérite? En abaissant vos standards? En faisant un travail qui vous écœure pour des acheteurs que vous méprisez? Si c’est le cas, votre argent ne vous apportera pas un moment ou la valeur d’un sou de joie. Alors tout ce que vous achèterez ne deviendra pas un tribut, mais un reproche; pas un accomplissement, mais un rappel de honte. Alors vous crierez que l’argent est mauvais. Mauvais, parce qu’il ne remplace pas votre respect de vous-même? Mauvais, parce qu’il ne vous laisse pas jouir de votre dépravité? Est-ce cela la racine de votre haine de l’argent? »

« L’argent demeurera toujours un effet et refuse de vous remplacer en tant que la cause. L’argent est le produit de la vertu, mais il ne peut pas vous donner la vertu et il ne rachètera pas vos vices. L’argent ne vous donnera pas ce qui n’est pas mérité, ni en matériel, ni en spirituel. Est-ce cela la racine de votre haine de l’argent? »

« Ou disiez-vous que c’est l’amour de l’argent qui est la racine du mal? Aimer quelque chose, c’est connaître et aimer sa nature. Aimer l’argent est connaitre et aimer le fait que l’argent est la création de la meilleure puissance en vous, et la clef pour échanger votre effort pour l’effort du meilleur d’entre les hommes. C’est l’homme qui vendrait son âme pour une pièce de cinq cents, qui proclame le plus fort sa haine de l’argent — et il a de bonnes raisons de l’haïr. Ceux qui aiment l’argent ont la volonté de travailler pour. Ils savent qu’ils peuvent se le mériter. »

« Laissez-moi vous livrer un indice au caractère des hommes: L’homme qui maudit l’argent, l’a obtenu déshonorablement; l’homme qui le respecte, l’a gagné. »

« Sauvez-vous de quiconque vous dit que l’argent est mauvais. Cette phrase est la clochette de lépreux qui sonne l’approche d’un pillard. Aussi longtemps que les hommes vivront ensemble sur terre et auront besoin de transiger un avec l’autre — leur seul substitut, s’ils abandonnent l’argent, est la bouche d’un fusil. »

« Mais l’argent vous demande les plus hautes vertus, si vous voulez en faire ou le garder. Les hommes qui n’ont aucun courage, aucune fierté ou estime de soi, les hommes qui n’ont pas le sens moral de leur droit à leur argent et qui n’ont pas la volonté de le défendre comme s’ils défendaient leur vie, les hommes qui s’excusent d’être riches — ne demeureront pas riches pour longtemps. Ils sont l’appât naturel des foules de pillards qui se cachent sous les roches depuis des siècles, mais qui rampent hors de leur cachette à l’odeur de l’homme qui demande pardon pour la culpabilité de posséder de la richesse. Ils se dépêcheront de lui prendre sa culpabilité — et sa vie, comme il le mérite. »

« Alors vous verrez la montée des hommes au double standard — des hommes qui vivent par la force, mais qui comptent sur ceux qui vivent de la traite pour donner de la valeur à leur butin — des hommes qui sont au crochet de la vertu. Dans une société morale, ils sont les criminels, et les statuts sont écrits pour vous en protéger. Mais lorsqu’une société établit des criminels-de-droit et des pillards-en-loi — des hommes qui utilisent la force pour saisir la richesse de victimes désarmées — alors l’argent devient le vengeur de son créateur. De tels pillards croient qu’il est sûr de voler des hommes sans défense, une fois qu’ils ont passé une loi pour les désarmer. Mais leur butin devient l’aimant des autre pillards, qui l’obtiennent d’eux de la même façon. Alors la course ne va pas à ceux qui sont les plus adeptes à la production, mais à ceux qui sont les plus impitoyables à l’usage de la brutalité. Lorsque la force est la norme, le meurtrier gagne sur le pickpocket. Et alors que la société disparaît, dans une propagation de ruines et de boucherie. »

« Souhaitez-vous savoir si ce jour arrive? Surveillez l’argent. L’argent est le baromètre de la vertu d’une société. Lorsque vous voyez que les échanges sont faits, non par consentement, mais par la contrainte — quand vous voyez que pour produire, vous devez obtenir la permission de gens qui ne produisent rien. — lorsque vous voyez que l’argent coule vers ceux qui traitent non pas en biens, mais en faveurs — lorsque vous voyez que les hommes s’enrichissent plus par la corruption et l’influence que par le travail, et que vos lois ne vous protègent pas contre eux, mais les protègent contre vous — lorsque vous voyez la corruption récompensée et que l’honnêteté devient un sacrifice — vous saurez que votre société est condamnée. L’argent est un médium si noble qu’il n’accepte aucune concurrence avec les armes et n’accepte aucun termes avec la brutalité. Il ne permet pas qu’un pays puisse survivre mi-propriété, mi-butin. »

« Lorsque des destructeurs apparaissent parmi les hommes, ils commencent par détruire l’argent, puisque l’argent est la protection des hommes et la base de leur existence morale. Les destructeurs saisissent l’or et laissent aux propriétaires une pile de papier trafiqué. Ce qui détruit toute norme objective et qui livre les hommes au pouvoir arbitraire d’un régulateur de valeurs arbitraire. L’or était une valeur objective, un équivalent de richesse produite. Le papier est une hypothèque d’une richesse qui n’existe pas, soutenu par une arme pointée vers ceux qui sont supposé le produire. Le papier est un chèque tiré par des pillards légaux d’un compte qui n’est pas le leur: sur la vertu de leurs victimes. Surveillez le jour où il rebondira, marqué «compte à découvert». »

« Lorsque vous faites du mal le moyen de survie, ne vous attendez pas à ce que les hommes restent bons. Ne vous attendez pas à ce qu’ils restent moraux et perdent leurs vies pour devenir la proie des immoraux. Ne vous attendez pas à ce qu’ils produisent alors que la production est punie et le pillage récompensé. Ne demandez pas «Qui détruit le monde?». C’est vous. »

« Vous vous tenez au milieu des plus grands accomplissements de la plus grande et productive civilisation et vous vous demandez pourquoi elle s’écroule autour de vous, alors que vous maudissez son essence de vie — l’argent. Vous considérez l’argent comme les sauvages avant vous, et vous vous demandez pourquoi la jungle se resserre autour de vos villes. À travers l’Histoire, l’argent a toujours été saisi par des pillards d’un type ou l’autre, dont les noms ont changé, mais dont les méthodes sont restées les mêmes: saisir la richesse par la force et garder les producteurs liés, humiliés, défâmés et privés d’honneur. Cette phrase au sujet du mal de l’argent que vous babillez avec imprudence, vient d’une époque ou la richesse était produite par le travail des esclaves — esclaves qui répétaient les mouvements déjà découverts par l’esprit de quelqu’un et laissés sans amélioration pendant des siècles. Aussi longtemps que la production était dominée par la force et que la richesse était obtenue par la conquête, il y avait peu à conquérir, pourtant à travers les siècles de stagnation et de famine, les hommes ont exalté les pillards, comme aristocrates d’épée, aristocrates de naissance, ou aristocrates de bureau, et méprisé les producteurs comme esclaves, traiteurs, marchands — et industriels. »

« À la gloire de l’humanité, il y avait, pour la première et seule fois de l’Histoire, un pays d’argent — et je ne peut donner de tribut plus élevé ou plus révérend à l’Amérique puisque ça veut dire: un pays de raison, justice, liberté, production, accomplissement. Pour la première fois, l’esprit et l’argent de l’homme ont été libérés, et il n’y avait plus de fortunes par conquête, mais seulement des fortunes par le travail, et au lieu d’hommes d’épée et d’esclaves, il est apparu le véritable créateur de richesse, le plus grand travailleur, le plus valeureux type d’être humain — le parvenu — l’industriel américain. »

« Si vous demandez quelle est la plus fière distinction des américains, je choisirait — parce qu’elle inclue toutes les autres — le fait qu’ils sont le peuple qui a créé l’expression «faire de l’argent». Aucun autre langage ou nation n’a jamais utilisé ce terme avant; les hommes ont toujours considéré la richesse comme étant une quantité statique — à saisir, mendier, hériter, partager, piller ou obtenir en guise de faveur. Les américains furent les premiers à comprendre que la richesse doit être créée. Les mots «faire de l’argent» contiennent l’essence de la moralité humaine. »

« Pourtant ce sont les mots pour lesquels les américains ont été dénoncés par les cultures pourries des continents de pillards. Maintenant le crédo des pillards vous a amené à considérer vos plus grands accomplissements comme une marque de honte, votre prospérité comme culpabilité, vos plus grands hommes, les industriels, comme des abuseurs, et vos magnifiques usines comme le produit et la propriété du travail musculaire, le labeur des esclaves sous le fouet, comme les pyramides d’Égypte. La fripouille qui minaude qu’il ne voit pas de différence entre le pouvoir du dollar et le pouvoir du fouet, devrait apprendre la différence sur sa propre peau — comme, je crois, il le fera. »

« Jusqu’à ce que et à moins que vous ne découvriez que l’argent est la racine de tout bien, vous demandez votre propre destruction. Quand l’argent cesse d’être l’outil avec lequel les hommes transigent entre eux, alors les hommes deviennent les outils des hommes. Le sang, les fouets, les fusils — ou les dollars. Faites votre choix — il n’y en a pas d’autre — et votre temps tire à sa fin. »

Dans ce texte, il y a deux paragraphes que j’aime particulièrement et qui sont très pertinents dans le contexte d’aujourd’hui:

« Alors vous verrez la montée des hommes au double standard — des hommes qui vivent par la force, mais qui comptent sur ceux qui vivent de la traite pour donner de la valeur à leur butin — des hommes qui sont au crochet de la vertu. Dans une société morale, ils sont les criminels, et les statuts sont écrits pour vous en protéger. Mais lorsqu’une société établit des criminels-de-droit et des pillards-en-loi — des hommes qui utilisent la force pour saisir la richesse de victimes désarmées — alors l’argent devient le vengeur de son créateur. De tels pillards croient qu’il est sûr de voler des hommes sans défense, une fois qu’ils ont passé une loi pour les désarmer. Mais leur butin devient l’aimant des autre pillards, qui l’obtiennent d’eux de la même façon. Alors la course ne va pas à ceux qui sont les plus adeptes à la production, mais à ceux qui sont les plus impitoyables à l’usage de la brutalité. Lorsque la force est la norme, le meurtrier gagne sur le pickpocket. Et alors que la société disparaît, dans une propagation de ruines et de boucherie. »

Belle dénonciation du corporatisme, non? Et il y a encore celui-ci:

« Lorsque des destructeurs apparaissent parmi les hommes, ils commencent par détruire l’argent, puisque l’argent est la protection des hommes et la base de leur existence morale. Les destructeurs saisissent l’or et laissent aux propriétaires une pile de papier trafiqué. Ce qui détruit toute norme objective et qui livre les hommes au pouvoir arbitraire d’un régulateur de valeurs arbitraire. L’or était une valeur objective, un équivalent de richesse produite. Le papier est une hypothèque d’une richesse qui n’existe pas, soutenu par une arme pointée vers ceux qui sont supposé le produire. Le papier est un chèque tiré par des pillards légaux d’un compte qui n’est pas le leur: sur la vertu de leurs victimes. Surveillez le jour où il rebondira, marqué «compte à découvert». »

Ce qui résume assez bien ma position sur la monnaie fiduciaire.

AJOUT:

Un lecteur a été assez gentil de m’envoyer une copie électronique de la traduction non-officielle de Atlas Shrugged. Pour ceux qui sont intéressés, vous la trouverez ici.

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Classé dans Actualité, économie, Philippe David

De Victor Jara à Guantanamo : la même CIA (51)

Qui dirige réellement les Etats-Unis, sommes nous tenté de dire à la fin de cette enquête : à voir en effet les louvoiements et les tergiversations de l’administration de Barack Obama, on est en droit de se poser la question. Et très vite, on va en trouver la réponse, en la personne de l’homme sans conteste le plus intelligent du lot. Et très certainement aussi le plus dangereux pour le pouvoir en place. Le secrétaire à la Défense, Robert Gates, qui a réussi à ce jour une rare prouesse, celle de réussir à travailler avec des présidents démocrates ou républicains, à force de s’être rendu indispensable aux deux. Gates est en effet incontournable depuis des années. Et pour une raison qui n’est pas due à ses seules capacités intellectuelles. Gates est tout simplement un ancien de la CIA, dont il a forgé depuis des années le portrait actuel : à savoir qu’il est particulièrement au courant de ses dérives récentes ou passées, et qu’il continue, aujourd’hui encore à en tirer les ficelles, en se heurtant chaque jour qui passe à celui nommé à la tête de l’organisation, Léon Panetta, dont on est en droit déjà de poser la question de sa place à ce poste, tant il paraît dépassé par l’ampleur de la tâche. Retour sur le deus ex machina de l’Amérique, l’homme qui possède un pouvoir immense et sait en jouer avec un réel talent, à vrai dire.

L’importance de Robert Gates se mesure à un exemple simple : lors du serment de prise de pouvoir de Barack Obama, le 20 janvier 2009, le Figaro nous ressort une énième histoire d’attentat possible, émanant de Somaliens cette fois. Une histoire plutôt vague, ressortie comme par hasard après la tentative abracadabrantesque de l’homme au slip piégé. Et au coin de cet article sentant fort le storyteller, une pépite : « Comme le veut le protocole, le remplacement du chef de l’Etat a été prévu en cas d’assassinat : le secrétaire à la Défense Robert Gates, nommé par George Bush et maintenu à son poste par Barack Obama, a été été mis à l’abri, dans un endroit tenu secret, pour succéder au président, au cas où ce dernier serait assassiné« . Le vice-président Joe Biden a dû apprécier : mais il est vrai qu’il devait aussi être sur place. Mais cette anecdote précise bien le fait indubitable que le vrai second personnage du pays, c’est bien lui. Biden, le roi de la gaffe, étant juste bon, on le sait, à poser avec des pique-assiettes ! Ce jour-là, l’homme le mieux caché des Etats-Unis était Gates ! Quant à Obama lui-même, laissons-lui le loisir au moins de découvrir les règles journalières de ce fichu protocole… En tout cas, on veille sur lui, semble-t-il… selon les infos du FSB (enfin, qui semblent en provenir !). Il est vrai qu’il vaut mieux se méfier de ce N46F.. sachant d’où il vient habituellement (« The Farm »). Ce jour-là sans trop prévenir…

Pour expliquer l’importance du personnage, il faut retourner en arrière. On a souvent historiquement relié le soutien aux Moudjahidine afghans à une date ultérieure à l’invasion russe, dont la date exacte est le 24 décembre 1979. « C’est faux« , nous apprend fort tardivement (en 2007) Zbigniew Brzezinski, conseiller à la sécurité nationale du Président des États-Unis Jimmy Carter, de 1977 à 1981. Selon lui en effet, « c’est le 3 juillet 1979 que le président Jimmy Carter a ordonné les opérations clandestines aux opposants du régime prosoviétique de Kaboul« . Selon Brzezinski toujours, et c’est plutôt une révélation, ce seraient mêmes ces actions de la CIA qui auraient déclenché l’invasion !

Historiquement, pourtant, tout le monde s’était engouffré dans ce qui était perçu comme un mensonge soviétique, qui affirmaient avoir dû intervenir en raison d’actions d’espionnage et de tentatives de déstabilisation américaine ! Il aura fallu plus de 29 ans pour que la vérité éclate ! Or qui va venir au secours de cette déclaration explosive ? Robert Gates, le « soviétologue » qui à la sortie de son livre de mémoires « From the Shadows : The Ultimate Insider’s Story of Five Presidents and How They Won the Cold War » , affirme bel et bien que « nous avons pensé à créer une légion arabe contre les Soviétiques ». L’armée de Ben Laden, chargée de saboter l’avancée russe ! En 1979, Gates est déjà la CIA depuis 13 années, et en qualité de grand spécialiste de L’URSS a été obligatoirement consulté sur la question. Cela, tous les faits le prouve, y compris notre phénomène qu’était Ali Abdul Saoud Mohamed, l’homme clé du système Ben Laden dont je vous ai conté l’incroyable histoire : un jour à Fort Bragg, le lendemain avec Ben Laden ! L’homme qui est bien une créature de la CIA (*1) !

Dans son livre, Gates prend la défense de manière inattendue de…. Jimmy Carter, affirmant qu’il avait trouvé le talon d’Achille des russes, qui n’était pas du tout d’ordre militaire : c’était la question des droits de l’homme dans le pays ! Et le magnifie, pour avoir provoqué par sa décision de les attirer par des provocations, dans le piège afghan. Automatiquement, il faut le reconnaître, cela remet doublement les pendules à l’heure : l’homme qui détient aujourd’hui les rênes du Pentagone affirme haut et clair que ce sont bien les USA qui sont à l’origine de Ben Laden, et que la guerre en Afghanistan est ingagnable, puisque c’était là, en tablant sur leur défaite, que la CIA avait attiré les russes !

Or cette opinion n’est pas du tout perçue de la même façon par Counter Punch et John Chuckman (*2) : « Si vous voulez une bouffée de la nature inévitablement bureaucratique et politique du « grand service intelligence’, allez donc chercher quelques un des mémos sur les interventions écrits par Robert Gates, qui a servi de directeur de 1991 à 1993 » écrit l’auteur. Selon le même, le gouvernement actuel de l’Irak est similaire à ceux que l’agence a installé dans les dictatures d’Amérique du Sud (on ne saurait lui donner tort à voir sa corruption endémique), et rien d’autre, et les troupes entraînées avec leur matériel fourni par les américains ont alimenté les terroristes à la base du 11 septembre, pas moins ! Et ça on ne peut le nier non plus, quand on connaît la saga d’Ali Mohamed par exemple ! Et tout cela avait un coût énorme. L’auteur finissant sa charge par un « avec tout l’argent dépensé dans la CIA pour les opérations spéciales on aurait pu rééquiper toutes les classes ou mis à jour en quelques années… » Robert Gates aurait-il une nature à tirer la couverture à lui et à s’attribuer des exploits qui n’en seraient pas ? Sans nul doute : sous des aspects charmants (c’est le préféré des journalistes car il ponctue tous ses interviews d’anecdotes et de vannes pendables), cet homme est un carnassier de grande envergure !

Car en Afghanistan, il y a une belle contradiction que relève CounterPunch : le calcul fait était biaisé, et Robert Gates, qui a participé à son élaboration s’était trompé. Les russes partis, le pays allait obligatoirement tomber dans le chaos des factions talibanes et des déchirements des chefs de guerre entre eux. C’était avoir vu à court terme, et l’auteur, John Chuckman n’est vraiment pas tendre avec Gates qu’il rend largement responsable de se fiasco. Et d’autres, qui avaient précédé. Selon Melvin Goodman qui fut membre de la CIA pendant 24 ans, Robert Gates a également fabriqué aux petits oignons une lutte reaganienne contre les russes digne de la guerre froide, avec assassinats ciblés ou opérations de contre-terrorisme. L’auteur cite la manipulation de l’auteur de la tentative d’assassinat de Jean Paul II (le 13 mai 1981) par les services secrets de l’Est (Bulgares) en exemple : c’est la digne poursuite de l’assassinat de Lumumba, et une continuité évidente chez la CIA. En 1991, lors de son audition au Senate Armed Services Committee, en qualité de DDI (« deputy director for intelligence ») 31 sénateurs démocrates lui avaient fait le reproche, comme ils avaient levé le lièvre de son implication directe dans l’Irangate. La CIA était alors sous la direction du faucon William Casey, mais Gates était là depuis longtemps. Melvin Goodman affirme surtout avoir intercepté un mémo signé Gates donnant des directives dans ce sens : or en 1983, Gates avait déclaré que les russes n’étaient absolument pas impliqués dans la tentative d’assassinat ! En citant une source de l’armée russe, alors que s’ils étaient intervenus, c’eut été via le KGB. Robert Gates en sait bien plus qu’il n’en dit dans ses mémoires ! Robert Gates a de lourds secrets derrière lui… et sa constance aux plus hautes fonctions de l’état ne peut qu’intriguer : serait-il un Hoover bis ?

Après huit mois d’attente et d’incertitudes, Obama le choisit au Pentagone, là où il est déjà depuis 2006, où il avait été nommé par G.W. Bush. Une nomination à la surprise générale ou faute de candidats compétents (ou qui ne sont pas rongés par l’ambition comme Petraeus (*3), se mettant à dos ceux qui s’y croyaient déjà, dont Petraeus, chez qui on découvrait récemment un cancer de la prostate, et qui continue à rêver de Maison Blanche, et ce, même au plus haut niveau. L’homme avait travaillé avec quatre présidents, chacun ayant loué sa malléabilité et son sens de la négociation. Le choix surprend, donc, mais on le comprend très vite : Robert Gates s’était déjà montré chaud partisan d’un changement de doctrine en armements : selon lui, les projets démarrés il y a vingt ans ne correspondaient plus aux guerres modernes. Et on ne peut que constater la chose : il a entièrement raison.

Pour le F-22 dont le premier prototype remonte à 1990, ça sonnait le glas de ses espérances….. Gates est surtout le seul à pouvoir faire passer une énorme pilule aux militaires, spécialement dans l’US Air Force ou il va se permettre de sabrer dans les grandes largeurs le programme F-22 et mettre au rencart des projets dispendieux, au grand dam de ce surpuissant lobby militaire. L’Amérique a besoin de piétaille, de drones pour assassinats ciblés, pas de merveilles technologiques inadaptées aux guerres modernes, martèle Gates depuis des années maintenant. Des avions parfois particulièrement mal pensés : le F-22 consomme trop, ne communique ni avec le sol ni avec les autres avions, ses trappes de largage sont trop petites et il faut donc créer de nouvelles bombes et de nouveaux missiles (un super plan pour vendre du matos qu’il faut construire spécialement !), des trappes se corrodent, son cockpit coince, etc. L’Air Force en demandait 482, Gates en accordera 187… et en traînant des pieds ! La Navy voulait des destroyers DDG-1000 Zumwalt partout, elle en aura 3 seulement ! Les joujoux de l’armée ne seront pas livrés aux militaires.

Or, malgré les réticences, le discours de Gates passe ! Pour quelle raison ? L’homme est fort adroit : il sabre le F-22 mais conserve le F-35 dont le programme est en train de partir en quenouille avec des prix qui grimpent et des délais qui ne pourront plus être respectés : à chacun son A-400M ! Car Robert Gates, contrairement aux apparences, doit sa place au lobby industriel lié aux armements et aux militaires. Ce qu’il reste en effet en travers de la gorge des généraux US, c’est la décision de Rumsfled de privatiser la guerre. Les mercenaires coûtent moins cher en assurance-décès, certes, mais les mercenaires sont payés des fortunes : les généraux US ont abreuvé pendant des années le Pentagone de mémos sur les énormes disparités qui fabriquent des vases communicants ne fonctionnant que dans un seul sens (les anciens militaires passent chez Blackwater en masse), où évoquent l’indiscipline chez les contractuels. Les mercenaires sont par définition incontrôlables. La base râle, et cela n’est pas bon. Or les généraux US sont aussi fidèles à leurs troupes, qu’elles défendent, ce qui n’aura jamais été le cas de Donald Rumsfeld. Qui avait aussi demandé l’abandon de l’Osprey, dont le coût faramineux de développement à nourri des milliers de familles ! Mais dont la finalité est toujours douteuse et le coût d’exploitation une tare fondamentale. Le V-22 est à lui seul un scandale.

Car Gates est surtout l’anti-Rumsfeld : les soldats américains n’avaient pas du tout apprécié ses réponses évasives et dédaigneuses sur l’équipement déplorable dont ils disposaient aux premières heures du conflit, notamment l’envoi de « kits » ridicules d’améliorations véritables galères à monter malgré la propagande officielle qui en montrait l’installation : les soldats de Rumsfeld ont payé un lourd tribu à l’impréparation chronique de leur armée. Leur amélioration n’est que bricolage. Qui ne sert à rien. Inutile d’imaginer en faire un véhicule sûr. Les Humvees à fond plat se sont révélées de véritables tombeaux pour des centaines d’entre eux. La première décision de Gates et d’augmenter la cadence d’envoi des nouveaux véhicules à fond en V, et même de poser en photo fièrement devant. Celui-là à tout compris depuis longtemps. Cet homme gère parfaitement son image : dans les revues d’aviation il se fait photographier au bord du fameux Doomsday Aircraft… le Boeing E4-B, en affirmant qu’il s’y sent comme dans son bureau. Or cet appareil singulier n’est autre que celui qui faisait des cercles au dessus du Pentagone… en étant l’avion le plus susceptible d’intercepter ou de créer les communications téléphoniques au sol… l’avion qu’utilise le plus Robert Gates survolait le désastre le 11 septembre… avec qui à bord ce jour là ? Rumsfeld était dans l’aile opposée de l’impact, au Pentagone, Cheney resté à la Maison Blanche… et G.W. Bush perdu dans le ciel de Floride. En train de recevoir une menace « le prochain sera l’ange« , le code secret de l’avion présidentiel… provenant d’où ?

Politiquement, Gates assure donc une continuité : en 1989, Gates change à peine de chapeau, il est nommé conseiller adjoint du président George Herbert Walker Bush au sein du Conseil national de sécurité où il travaille avec Condoleezza Rice. Engagé sous Reagan, apprécié par Carter, promu par Bush père… il devient en 1991 le directeur de la CIA, jusque 1993 a-t-on déjà dit. L’année où il entre en fonction, justement, les télévisions montrent les prêches anti-américains d’un jeune barbu nommé Ben Laden. L’homme vient juste d’être expulsé d’Arabie Saoudite, suite à l’invasion du Koweit et du débarquement US qui suit. Deux avant, il a fondé son organisation et créé ses camps d’entraînement avec notre « ami » Ali Mohamed ... membre éminent de la CIA, proche d’Ayman Zawahiri. L’année suivante l’ambassade du Yemen explose, en 1993 le WTC subit sa première attaque : Robert Gates est aux premières loges.. son organisation a financé les troupes de Ben Laden jusqu’au départ des russes de 1989 et bien plus tard encore : elle soutenait l’Alliance du Nord de Massoud, certes, mais gardait aussi un œil sur les talibans. Ce n’est qu’en février 1996 que les américains s’aperçoivent que cela peut être gênant, et encore : à propos de la prise de Kaboul, Madeleine Albright déclare en effet à ce moment là que « c’est un pas positif » !!! Ben Laden fait sa première déclaration anti-américaine ce jour-là… en lançant son célèbre appel à « attaquer les intérêts américains partout dans le monde « Tim Osman« , le surnom qu’il avait eu de la CIA s’est bien moqué d’eux. Ou travaille davantage avec eux. Un Ben Laden totalement « made in USA« …

En résumé, durant toute la période où Robert Gates est directeur de la CIA, Ben Laden est un de ses employés… parmi les plus efficaces ! Et Robert Gates n’est pas le seul à provenir de ce sérail de dirigeants de la CIA, toujours en train de magouiller quelque part dans le monde : le conseiller Brent Scowcroft, cet autre faucon, l’accompagne, or lui aussi provient… de la CIA, ayant travaillé depuis 1980 sous les deux William, Casey et Webster… sous les auspices du père Bush. De tous, Robert Gates est celui qui aura duré aussi longtemps que … Dick Cheney. C’est un proche en fait de Rumsfeld, alors qu’il est tout son contraire : lors des bombardements des premières heures de la guerre en 2003, il raconte que la « Maison Blanche priait et brûlait des cierges pour que Saddam soit tué. » Or, ça, pour le savoir, il fallait être auprès de Marc Garlasco… toujours aux premières loges, Robert Gates.

Alors, quand le 6 décembre dernier Robert Gates vient annoncer devant les caméras que « cela fait plusieurs années que les USA ne savent pas où est Ben Laden« , on se dit qu’il est temps, maintenant d’abaisser les masques. Le pouvoir précédent en a fait un chiffon rouge à agiter quand il le fallait : or c’était déjà Robert Gates qui tenait le fanion, et qui nous disait que c’était pour bientôt, son arrestation, pour sûr. Aujourd’hui, on se prépare à expliquer aux gens qu’on ne sait pas où il est passé, exactement comme on ignore où est passé Mohamed Ali. Avec la téléphonie, les américains ont toujours su où il était, pourtant. Maintenant qu’ils disent ne plus savoir, il ne reste que deux solutions : où ils le protègent, ou il est mort. Et ça, celui qui suit toutes les opérations spéciales le sait. Mais peut-être pas son propre président. Barack Obama a nommé l’individu le plus dangereux pour lui en espérant le contrôler. Il faut se rendre aujourd’hui à l’évidence : on ne contrôle pas la CIA. Et aux dernières nouvelles, l’homme le plus puissant de la planète prendra sa retraite dès l’année prochaine (*4) : le casse-tête de sa succession va reprendre et mettre Obama dans l’embarras, sinon en grand danger. Des attentats tortueux, on risque d’en voir apparaître d’autres dans les mois à venir (*5).

(1) « Not only was the Soviet Union already beginning to unravel during those years—again, momentous developments of which the CIA as an institution remained ignorant—but the training, money, arms, and incitement the CIA contributed to Afghan rebels virtually created the groups associated with 9/11. The CIA’s practice of bringing shadowy characters back and forth by the hundreds to the United States on visas American embassies were forced to issue without examination unquestionably helps explain how nineteen suicide-bombers entered the country on legitimate visas. The shoulder-held anti-aircraft missiles the CIA supplied wild mountain men to shoot down Soviet helicopters found their way later to various places for attacks on civilian airliners. How’s that for a return on your tax dollar ? »

(2) « Many of the CIA’s most costly operations appear successful when viewed superficially. Its operation in Afghanistan during the 1980s, where it spent billions to help drive out the Soviets, is a good example. Eventually, the Soviets left and were embarrassed by their failure, but if you examine the operation over a longer time-horizon, you see that it was in fact a catastrophic failure. If you want a whiff of the unavoidably bureaucratic and political nature of Big Intelligence, go find some of the op-ed pieces written by Robert M. Gates who served as Director from 1991 to 1993. »

(3) « Gen Petraeus, head of Central Command or Centcom of the US Armed Forces,said on Sunday that Iran could « certainly be bombed » if necessary. « The level of effect would vary with who it is that carries it out, what ordnance they have, and what capability they can bring to bear, » he said in an interview with CNN. Most significantly, Washington has also revealed that the key « bunker-buster » weapon that would be needed to destroy all Iran’s nuclear facilities, some of which are buried underneath mountainsides and in tunnels, will not be ready until the end of this year ».

(4) « Le principal collaborateur de George W. Bush recyclé dans le gouvernement Obama, le secrétaire à la Défense Robert Gates, restera à son poste au moins une année de plus, a appris l’Associated Press. »

(5) Nor can we dismiss out of hand the analysis offered by the World Socialist Web Site that the failed Christmas Day airline plot was a maneuver by extreme right-wing elements deeply embedded in the U.S. National Security State « to destabilize and undermine the Obama administration. » To this can be added Richard Wolffe’s provocative statement that factions within the secret state may have had their own « alternative agenda, » and thus failed to act.

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Classé dans Six de l'Hexagone, Stéphane Bouleaux

Grâce aux produits dérivés

Jean Gagnon Dossier Actualité économique

Fin des années 70, début des années 80. Une période économique qui s’annonçait difficile, et qui le sera. Les gouvernements étaient tombés dans la spirale des déficits depuis 1976, et l’inflation explosait, conséquence du premier choc pétrolier. L’impact sur les taux d’intérêt allait être dramatique.

Pour favoriser le développement de l’industrie porcine, le gouvernement du Québec offrit de garantir les prêts consenties par les banques pour la construction de porcherie. Les instigateurs de cette mesure étaient probablement loin de se douter qu’ils ouvraient alors la porte à l’utilisation de produits dérivés financiers dans la grande région agricole entre St-Hyacinthe et Granby.

Les agriculteurs faisaient alors affaires principalement avec les caisses populaires de leur municipalité ou de leur village. Plusieurs se présentèrent à leur caisse pour obtenir un prêt et se lancer dans l’élevage de porcs étant donné la demande des abattoirs concentrés dans cette région.

Titrisation

Mais ces petites caisses n’avaient pas suffisamment de liquidités pour répondre à cette demande soudaine de leurs sociétaires. Elles se tournèrent donc vers l’Union régionale des caisses (à l’époque le Mouvement Desjardins était décentralisé et comptait 10 organismes qui agissaient comme fédération régionale). L’Union régionale leur suggéra de consentir tous les prêts pour le financement des porcheries et leur assura qu’elle leur fournirait les liquidités nécessaires grâce à sa capacité d’effectuer des transactions entres les sociétés membres du réseau des caisses, et la possibilité de lever des fonds sur les marchés des capitaux. Bien que le terme n’était à peu près utilisé pas à l’époque, il s’agissait bien de titrisation, c’est-à-dire un regroupement de créances revendu à des investisseurs.

Swap de taux d’intérêt

Mais cette croissance des prêts dans les caisses allaient les exposer à un risque énorme. Les caisses utilisaient des fonds (dépôts des membres et liquidités obtenues de l’Union régionale) dont l’échéance était relativement courte, soit environ un an en moyenne. Mais elles prêtaient l’argent aux agriculteurs pour des périodes de 5 ans et plus. L’environnement économique de l’époque nous annonçait une hausse importante des taux d’intérêt. Certains parlaient même de taux à 20 ans. Et ils eurent raison.

Comme les caisses allaient devoir renouveler les dépôts à chaque année à des taux de plus en plus élevés, mais qu’elles n’allaient recevoir que le même taux sur les prêts consenties, elles auraient à subir des pertes énormes. Un produit dérivé, le “swap de taux d’intérêt ”, allait leur permettre de se mettre à l’abri de ces fluctuations de taux. Le “swap de taux d’intérêt” est un contrat par lequel l’institution s’engage à payer un taux fixe et à recevoir un taux variable. En contractant un “swap de taux d’intérêt”, les caisses purent neutraliser l’effet pervers du déséquilibre entre l’échéance moyenne de ses dépôts et de ses prêts.

Le résultat. L’industrie porcine prospéra. Le Québec devint un chef de file dans l’exportation du porc jusqu’au Japon. Abattoirs et porcheries firent de bonnes affaires et créèrent de nombreux emplois dans la région. Quant aux caisses, la croissance, autant des actifs que des bénéfices, s’accéléra, ce qui permit de faire de nouveaux prêts pour développer d’autres secteurs d’activité et de distribuer aux membres des ristournes de plus en plus élevées. Et tout ça, grâce aux produits dérivés.

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Classé dans Actualité, économie, Jean Gagnon

Dalaï-lama: Un moine de la CIA & Relations US-Chine qui dégénèrent

(Photographer: Pete Souza/The White House via Bloomberg)

François Marginean

La version hollywoodesque du Dalaï-lama a conduit des millions de personnes autour du monde à croire que cet homme est un Saint. Pourtant, la vérité est loin de là. Ce moine tibétain a participé et même dirigé un régime féodal répressif contre le peuple tibétain dans les années ’50, alors qu’il organisait une insurrection contre la Chine avec le soutient de la CIA. Il a avoué lui-même recevoir annuellement des millions de dollars de la CIA pour entrainer ses troupes de guérillas pour se séparer de la Chine. Il appartenait alors à la classe riche et dominante tibétaine, mais lorsqu’il s’aperçut que l’insurrection ne fonctionnerait pas dû au manque de soutien populaire de la masse, il décida de s’enfuir avec cette caste d’aristocrates tibétains en Inde en 1959.

Oui, un moine tibétain créé en partie par Allen Dulles qui est sur la liste de paye de la CIA, vous avez bien lu, sans oublier l’argent des George Soros de ce monde et de leurs révolutions colorées financées par le cheval de Troie de la CIA qu’est la NED, etc… Pas ce qu’il a de plus spirituel.

Dans le contexte où Obama a reçu le Dalaï-lama à Washington, cela sert de provocation directe à la Chine. Cela, combinée à l’affaire Google, des armes vendues à Taïwan par le Pentagone (114 missiles Patriot (2,81 milliards de dollars), de 60 hélicoptères Black Hawk (3,1 milliards), d’équipements de communication pour les chasseurs F-16 taïwanais et de navires chasseurs de mines sous-marines, pour un montant global de 6,4 milliards de dollars), des troubles au Xinjiang avec le mouvement séparatiste des Ouïgours, on peut s’apercevoir que les États-Unis ont peur de la Chine qui est en passe de devenir la plus grande puissance industrielle et économique du monde.

Les États-Unis n’y peuvent rien pour empêcher cette émergence et tentent donc de jouer la carte de la déstabilisation et essaient ainsi de contenir les efforts chinois de mettre la main sur les ressources et le pétrole des régions avoisinantes, dont le précieux pétrole iranien. Ils espèrent ainsi couper les routes d’alimentation en énergie, de briser et éviter les accords commerciaux que la Chine tisse avec plusieurs pays du monde ainsi que de ternir ses liens diplomatiques grandissants avec ses voisins.

Cela explique bien pourquoi les États-Unis sous Obama sont en train de déplacer la guerre afghane vers le Pakistan, le nouveau théâtre militaire américain, qui sert de transit au pétrole iranien vers la Chine. La même chose peut être dite du cas du Yémen, le nouveau front de la « guerre contre le terrorisme » du Pentagone, combiné à la guerre silencieuse menée en Somalie. Le but étant évidemment de contrôler le détroit d’Ormuz, où 40% du pétrole transporté par voie maritime transige, ce qui représente 20% des échanges de pétrole mondiaux.

Voici un passage révélateur des enjeux dans la région du Xinjiang:

Le Xinjiang est limitrophe de six pays où l’on trouve une forte majorité musulmane: l’Afghanistan, le Pakistan, le Kazakhstan, la Kirghizie, le Tadjikistan et l’Ouzbékistan. En compagnie du Turkménistan, ces quatre derniers pays forment le groupe de cinq pays de l’Asie centrale qui, jusqu’en 1991, ont fait partie de l’Union soviétique et constituent un pont entre la Chine et la Russie.

Depuis 1759, la province du Xinjiang a appartenu à la Chine sans interruption, sauf entre 1932 et 1934 et entre 1944 et 1948, quand, en raison de la guerre, le pays avait été frappé par le chaos.

Dans cette province du Xinjiang, les gens d’origine ouïgoure constituent 45 pour cent de la population. Les Chinois han, le plus important groupe de population de la Chine, représentent 40 pour cent. Les 15 pour cent restants sont composés d’autres groupes ethniques minoritaires, comme les Chinois hui.

Xinjiang est sans doute la province la plus vulnérable du pays. Elle a 5.000 kilomètres de frontières communes avec des pays qui sont tout, sauf stables. Depuis trente ans, les États-Unis essaient d’assurer leur contrôle sur cette région. C’est pourquoi, depuis 1979, la guerre y sévit en permanence. Celui qui dominera cette région dominera en même temps le bas-ventre de la Russie et, plus important encore, le chainon entre l’Europe et l’Asie. L’Afghanistan, le Pakistan, la province du Xinjiang et les cinq républiques de l’Asie centrale sont cruciales pour le contrôle de la région du monde la plus vaste, la plus riche et la plus peuple : l’Eurasie.

En 1997 est sorti aux États-Unis un bouquin qui a fait beaucoup de bruit. Il a été rédigé par Richard Bernstein et Ross Munro et s’intitule « The Coming Conflict with China » (Le conflit à venir avec la Chine). À la page 5, on peut lire ceci : « Depuis un siècle déjà, les États-Unis tentent d’empêcher qu’un seul pays asiatique puisse dominer la région. C’est précisément ce que la Chine est occupée à faire aujourd’hui. Les intérêts américains sont ici en jeu. »

Le vieux stratège américain Henry Kissinger déclarait, deux ans plus tard : « Le domination sur l’une des parties eurasiatiques – l’Europe et l’Asie – par un seul pays constitue un danger stratégique pour les États-Unis. Car, ainsi, ce pays aurait la capacité de dépasser les États-Unis économiquement et militairement. Et, quoi qu’il en soit, nous devons combattre ce danger. »

Un autre vieux briscard dans ce domaine n’est autre que Zbigniew Brzezinski. Il est aujourd’hui conseiller du président Barack Obama. Dans son fameux ouvrage, « Le grand échiquier », il écrit : « Tous les défis politiques et économiques potentiels de l’Amérique sont eurasiatiques. »

Dans une interview accordée à l’hebdomadaire Le Nouvel Observateur, Brzezinski admettra en 1999 qu’en 1979, lui et le président Jimmy Carter avaient provoqué la guerre de l’Union soviétique en Afghanistan. Brzezinski : « C’était quand même une idée brillante ! Les Russes sont tombés dans le piège afghan et vous voudriez que j’en éprouve du regret ? »

Trente ans et des millions de morts plus tard, on peut regarder en arrière. La guerre contre l’Afghanistan a été le début d’une cascade de conflits : la guerre contre l’Union soviétique, la lutte post-djihadique pour le pouvoir en Afghanistan, la guerre civile au Tadjikistan, l’agitation terroriste en Asie centrale, dont la province chinoise du Xinjiang reçoit également sa part.

Le terrorisme, l’arme des Américains

L’«idée brillante» de Brzezinski consistait dans le soutien militaire et logistique de ceux qui, plus tard, deviendraient les Taliban et qui, aujourd’hui, s’appellent toujours «al-Qaïda». Le Nouvel Observateur posait à Brzezinski la question que voici : «Mais vous avez soutenu l’intégrisme musulman. Vous avez donné des armes à de futurs terroristes. Vous n’en éprouvez aucun regret ?» Réponse de Brzezinski : «Et pourquoi donc ? Qu’est-ce qui s’avérera comme la chose la plus importante, dans l’histoire : les Taliban ou l’effondrement de l’empire soviétique ?»

La tactique des Américains consistait donc à armer les intégristes musulmans. Non seulement en ne tenant pas que l’Afghanistan à l’œil. En 1999, l’écrivain et spécialiste de l’islam Dilip Hiro résume la chose dans le journal The Nation: «L’intention est de créer un mouvement qui, avec un mélange de nationalisme et d’extrémisme religieux, doit être en état de gagner toute l’Asie centrale.» À partir du milieu des années 80, pour accélérer ce processus, des unités de moudjahidine quittent l’Afghanistan pour gagner les républiques voisines de l’Ouzbékistan et du Tadjikistan. On peut le lire à la page 170 de l’ouvrage très encensé, «L’ombre des Taliban», d’Ahmed Rashid. Les Américains confient la direction de cette opération à Gulbuddin Hekmatyar, un proche ami d’Osama Bin Laden.

Leur mission : déstabiliser via des attentats terroristes. Dès la fin des années 80, c’est ce qui se produit aussi dans la province chinoise voisine, le Xinjiang.

(Source: http://www.infochina.be/fr/node/318)

La déstabilisation via le terrorisme est une vieille arme politique utilisée par tous les empires que ce monde a connus pour faire avancer leur agenda. Elle est employée sans cesse par les États-Unis et Israël de nos jours.

La crise dans le Caucase est étroitement liée au contrôle stratégique des oléoducs de ressources énergétiques et les couloirs de transport. Il est évident que l’attaque géorgienne du 7 août 2008 en Ossétie du Sud avait été soigneusement planifiée. Des consultations de haut niveau ont été tenues avec les États-Unis et l’OTAN dans les mois qui ont précédé les attaques. Les attaques contre l’Ossétie du Sud sont survenues une semaine après que les États-Unis et la Géorgie aient terminé leurs imposants exercices militaires (du 15 au 31 juillet 2008). Les attaques ont également été précédées par d’importantes réunions au sommet organisées sous l’égide du GUAM, une alliance régionale militaire parrainée par les États-Unis et l’OTAN. (Source: http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=10025)

La Géorgie est un avant-poste des États-Unis et des forces de l’OTAN, aux frontières immédiates de la Fédération Russe et à proximité du théâtre de guerre du Moyen-Orient, en Asie Centrale. L’Ossétie du Sud est aussi au carrefour stratégique de l’itinéraire des pipelines pétrolier et gazier. (Source: http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=9798)

La rhétorique pour une guerre contre l’Iran provenant des États-Unis et d’Israël augmente en crescendo, à laquelle font écho les médias corporatifs occidentaux, alors que l’Iran est considérée comme étant la principale source de pétrole pour la Chine. Les préparatifs de guerre en Israël ont été en cours depuis la fin 2004 et les États-Unis, eux, ont un plan militaire déjà préparé depuis longtemps, baptisé du nom de code TIRANNT, «Theater Iran Near Term» («Échéance proche théâtre Iran»), par ses planificateurs militaires US. Ce plan a déjà identifié des milliers de cibles en Iran dans le cadre d’un Blitzkrieg (guerre-éclair) du type «Shock and Awe» («choc et effroi») qui en est à sa phase finale de préparation. (Source: http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=4905) Les préparatifs et les pratiques militaires sont continuellement mises à jour depuis au moins 2007.

Dans un document confidentiel du Pentagone (Nuclear Posture Review) présenté au Sénat au début de l’année 2002, l’administration Bush a mis en place des plans pour une «première attaque offensive» avec des armes nucléaires, non seulement contre l’«axe du mal» (l’Irak, l’Iran, la Libye, la Syrie et la Corée du Nord), mais aussi contre la Russie et la Chine.  (Source: http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=7146)

Est-ce que l’OTAN, Israël et les États-Unis pourraient mettre le feu aux poudres et ainsi déclencher une Troisième guerre mondiale? Cette menace est bien réelle, considérant que la Deuxième guerre mondiale a été issue d’une série de petites occupations culminant en une attaque sous faux pavillon sur la Pologne (false flag attack) et que la Première guerre mondiale démarra suite à un seul assassinat politique dans un contexte d’empires en compétition. Il se pourrait alors que les « joueurs d’échec » derrière la scène politique aient plus en tête qu’une simple visite entre le président Obama et un exilé religieux. Toutes les étapes de provocations sont en place.

Si une guerre était pour être initiée, une opération sous faux pavillon pour tuer des Américains et blâmée sur le dos de l’Iran serait un scénario fort probable. Ce scénario pourrait mener à une conflagration de tout le Moyen-Orient qui est déjà à feu et à sang, avec plusieurs pays sous occupations militaires. La question qui se pose est la suivante: combien faut-il de pays sous attaques militaires avant que l’on considère cela comme étant une guerre mondiale? Avec des fronts militaires contre l’Irak, l’Afghanistan, le Yémen, la Somalie, le Pakistan, la Palestine, et l’occupation militaire d’Haïti, la question se pose de soi.  Considérant le fait que des provocations et des plans d’attaques contre l’Iran, le Liban, la Syrie sont en place, que le Vénézuela soit dans la mire du Pentagone, que la Chine soit visée et que la Russie soit l’objet d’une menace directe par le déploiement de missiles Patriot américains en Pologne, à moins de 56 km de la frontière russe et de Kaliningrad, la question est hautement légitime et d’une importance particulière à considérer.


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Classé dans Actualité, François Marginean

Quand la nation n’est plus

820 intellectuels québécois viennent de signer le « Manifeste pour un Québec pluraliste ». C’est peu, mais c’est beaucoup. Peu, parce qu’on en trouvera certes vite tout autant pour dire le contraire; beaucoup, parce qu’il a toute de même fallu les trouver, les grouper, les convaincre de lancer ce pavé dans la mare.

Le lancer, sachant bien qu’on déplacerait la vase et qu’on dérangerait les brochets, mais qu’il n’en sortirait rien d’autre. Rien d’autre de constructif, s’entend, car il en sortira assez de querelles, d’insultes, de hargne et de vociférations pour nous faire gagner du temps. Gagner tout ce temps qu’on veut perdre, pour NE PAS régler les problèmes.

Je ne veux même pas discuter du pluralisme sur le fond, car le « fond », ici, est presque anodin. Le fond dont on voudrait discuter n’est que paroles, arguments, arguties, expression des mêmes préjugés, de part et d’autre, qui sont les motifs des vrais convaincus. Personne ne changera d’opinion suite à ce Manifeste. Pour ou contre, les jeux sont faits.

Le sens comme les effets du « pour » comme du « contre », d’ailleurs, semblent de bien peu importance à côté du fait FONDAMENTAL qu’ils sont irréductibles. Le fondamental, c’est que cette bataille du pluralisme ne sera jamais gagnée, car elle n’est qu’une facette d’une guerre qui ne finira jamais. Elle durera une éternité, pendant laquelle nous serons tous perdants. Ce débat sur le pluralisme ne changera rien. Il ne sera qu’un épisode, une péripétie de la preuve récurrente que le Québec n’est PAS une nation.

Pas une nation, car ce ne sont pas les similitudes qui font une nation; c’est la priorité qu’on leur accorde. Une nation est là, s’il existe sous les partis, les dogmes et les intérêts, un sentiment d’identité et d’appartenance qui transcende les différences : le germe d’une union sacrée. Or, il n’y a pas au Québec un consensus sur ce que nous sommes, ni sur ce que nous voulons être. Il n’y en a plus.

On ne parle pas ici de divergence sur les moyens, mais sur les objectifs fondamentaux de la société québécoise. Deux référendums l’ont prouvé et, s’il y en avait un troisième, il confirmerait certainement ce clivage. Pluralisme ? Quoi d’autre pour dépasser la dualité ? Comment aurions-nous un consensus sur l’opportunité ou la manière de défendre une identité, alors que la moitié d’entre nous en mettent l’existence en doute ?

Il ne faut pas penser, surtout, que « gagner » un référendum résoudrait le problème. Le problème n’est pas que le Québec soit, ou ne soit pas, dans la fédération canadienne ; le problème est que nous soyons irrémédiablement divisés entre nous. Le désaccord qui tue n’est pas entre « Québécois » et « Canadiens », mais entre deux factions de Québécois pour qui ce qui les sépare est plus important que ce qui les unit.

Il ne semble plus y avoir de socle identitaire qu’on pourrait atteindre en creusant. Pas de drapeau ni de Marseillaise qui nous ferait tous bondir ensemble. Tous les symboles ont été instrumentés. Ils sont devenus partisans. Feuille d’Érable, Fleur-de-lys, n’apparaissent pas pour nous rassembler, mais pour nous dresser les uns contre les autres.

Dans ce pays de factieux, tous les clivages prennent une importance démesurée. Tous les conflits sont insolubles, car c’est à l’opposition à l’autre qu’on s’identifie. C’est la désunion qui est sacrée. On préfère que le Québec ne soit pas, plutôt que de penser qu’il pourrait être autre chose que ce qu’on l’a rêvé. C’est pour ça que la nation québécoise n’existe pas.

J’ai fait mon deuil du Québec. Il ne sera ni laïque, ni missionnaire, ni pluraliste, ni vraiment français. Il ne sera rien. Juste une barque sans barreur, dans un espace tiède, entre chaud et froid, dérivant au gré des vents qui le feront changer de cap, mais sans avoir la force de gonfler ses voiles. Le Québec ne veut pas vraiment naviguer et, si certains voulaient briser ses amarres, il se trouverait toujours 820 lucides pour les retenir… et des milliers d’autres pour les applaudir

Notre révolution bien tranquille, qui avait cru faire l’économie de trancher quelques têtes, nous a laissé un pays décapité où il ne semble plus rester un seul chef qui pense, qui espère et qui ose. Nous sommes devenus un pays équivoque, veuf d’une nation, divisé contre lui-même. Un pays sans projet de société et qu’on pourra maintenant faire dessiner au jour le jour, pour des desseins qu’on dira « pluralistes », par des gouvernants sans desseins.

Pierre JC Allard

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Classé dans Actualité, Pierre JC Allard

Fragile planète financière 1

Yan Barcelo, 20 février 2010

L’économie donne des signes de vie, clame-t-on partout. C’est tant mieux. Mais gare au vampire financier, prêt, à la première occasion, à sucer tout le sang possible du convalescent économique.

La crise grecque a été l’occasion pour moi de refaire un petit tour du jardin financier et d’en constater toute la flore vénéneuse. Tout d’abord, on a vu à l’œuvre dans cette crise les jeux de dérivés financiers dont on a abondamment parlé, tous des swaps dette-contre-devise que Goldman Sachs a mis en place pour le gouvernement grec et qui ont contribué à masquer la pleine ampleur de cette dette. Rien là de très étonnant, les dérivés financiers ayant été créés dans une grande mesure pour contourner les lois et règles et maquiller tout détail financier qu’on pourrait considérer quelque peu déplacé ou… obscène.

Et il y a eu les jeux de CDS (credit default swaps ou swaps sur défaillance) auxquels se sont livrées les banques de Wall Street et quelques autres géants financiers. Voilà une des créatures les plus originales et pernicieuses de la pharmacie financière contemporaine. N’entrons pas dans le fin détail physiologique de ces créatures et contentons-nous de savoir qu’il s’agit d’un produit d’assurance tout à fait inouï : on peut acheter un CDS pour assurer un actif financier qu’on ne détient pas et qu’a n’a jamais détenu! C’est un peu comme si on détenait une assurance sur la vie d’un voisin. Un telle assurance est une invitation à l’assassinat!

Et c’est à un tel jeu d’assassinat les banques se sont livrées avec les obligations de la Grèce pour en écraser la valeur. Elles ont acheté des CDS en masse auprès d’une foule d’acteurs financiers (fonds de pension, fonds mutuels, fonds de couverture, etc.) et, disposant de ceux-ci en poche, ont attaqué systématiquement les obligations du gouvernement grec, faisant ainsi augmenter la valeur de leur « assurance ». Évidemment, une foule de gens à Wall Street y gagnent… tandis que le gagne-petit en Grèce verra ses taxes et son coût de la vie augmenter.

Mais la crise grecque m’a permis de rafraîchir le sens du mot « contagion » tel qu’il s’applique dans le monde financier. Au niveau le plus superficiel, il y a eu contagion dans les marchés obligataires où, dès que le président grec a annoncé que son pays pourrait faire défaut en avril et mai sur le remboursement de dettes venant à échéance, les investisseurs se sont mis à vendre en bloc les obligations d’autres pays présentant des risques de défaut : les fameux autres PIGS européens (Portugal, Irlande, et Espagne). À ce niveau, la contagion s’est donc propagée très rapidement et le rhume grec a réussi à contaminer les obligations des autres PIGS.

Mais il y a bien d’autres risques de contagion qui flottent dans l’air financier. À l’Est, la crise grecque risque d’obliger les banques de ce pays de retirer les sommes qu’elles ont prêté à des pays d’Europe de l’Est. Ça pourrait faire mal, très mal, surtout quand on sait que les prêts grecs de 19 milliards $US en Roumanie représentent environ 16% du marché de capitaux dans ce pays, selon la Banque des règlements internationaux, alors que les 10,5 millions prêtés en Bulgarie y accaparent 30% du marché des capitaux. Toute la stabilité économique de l’Europe de l’Est, déjà très précaire, pourrait être ébranlée.

Les problèmes sont pires à l’Ouest. Les banques allemandes et françaises détiennent entre 40 et 50% de la dette grecque, alors que la part qui incombe aux banques suisses représente 11,5% du PIB de l’Helvétie (selon un étude de Morgan Stanley). On peut comprendre que ces banques – par leur pays interposés – poussent très fort pour que l’Union européenne vole au secours de la Grèce. Évidemment, les choses ne se résument pas à la Grèce. Les banques espagnoles détiennent 51% de la dette du Portugal, tandis que les banques allemandes et françaises détiennent respectivement 32% et 25% des 748 milliards de dettes du gouvernement espagnol. Et n’oublions pas que l’Espagne touche à cet autre chaudron où se gonfle une super bulle, le Brésil, essentiellement par le biais de la banque Santander, principale banque d’Espagne qui est aussi première banque au Brésil. Ah, ces délicats tentacules de la pieuvre financière!

Mais on ferait erreur de voir la contagion s’arrêter aux portes des banques européennes. Car, la menace de défaut de la Grèce s’infiltre via les banques européennes dans tous les échafaudages de prêts titrisés qu’ont diffusé ces banques aux quatre coins du monde. Et la forme que prennnent toutes ces titrisations sont la pléthore des dérivés financiers de genre CDO, CLO, ABMS et PCAA qui ont mis à terre nos économies au plus fort de la crise du subprime. Bien sûr, tous ces circuits obscurs des transactions interbancaires résident totalement dans l’ombre, de telle sorte qu’on n’a parlé nulle part des risques de contagion qui logent dans leurs replis. Mais le plus grand danger de contagion, c’est là qu’il se tapit.

(Suite la semaine prochaine…)

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Classé dans Actualité, Yan Barcelo

Le graffiti et les Jeux olympiques de Vancouver

Raymond Viger Dossiers Jeux Olympiques , Graffiti

jeux-olympiques-vancouver-2010-olympic-winter-games La cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Vancouver vient de se terminer. Déjà les graffiteurs de la scène de Montréal sont choqués et frustrés envers les organisateurs des Jeux olympiques de Vancouver. Une controverse vient d’éclater concernant des murales en direct pendant les compétition « free style » de ski et de snowboard.

Graffiti et Jeux olympiques

Un appel de candidature a été lancé pour présenter, du 13 au 27 février 10 graffiteurs pendant 14 jours au Cypress Mountain, soit une possibilité de 140 graffiteurs. Ces graffiteurs auront l’occasion de réaliser une oeuvre en direct, devant les spectateurs des Jeux olympiques et les caméras qui couvriront les compétitions « free style » de ski et de snowboard.

Sous le nom de 2010 Winter Olympic Street-style Art Demonstration, on pourrait s’attendre à y voir les meilleurs graffiteurs canadiens, sinon internationaux. Et c’est là que la controverse débute. Les graffiteurs de Montréal se questionne. Qui va les représenter dans leur art? Comment seront-ils perçus après cette présentation?

Montréal, capitale nationale du graffiti

murale-graffiti-francofolies-de-montreal-muralistes-evenementiels-animation-de-foule-peinture-en-direct1 Montréal est la capitale du graffiti au Canada. Les meilleurs graffiteurs canadiens se retrouvent à Montréal, en quantité et en qualité. Pour différents événements d’animation graffiti à travers le Canada, ce sont des graffiteurs de Montréal qui ont été sélectionnés pour faire l’animation et des murales en direct lors d’événements tels que le Kokanne Crankworx à Whistler, une compétition de BMX ou encore au Lake Louise pour une compétition de snowboard.

Vancouver et la répression graffiti

Vancouver est une ville où la répression envers les graffiteurs est très grandes. Les meilleurs graffiteurs ont un dossier pour des graffitis illégaux qu’ils ont déjà réalisés. Dans l’appel d’offre pour offrir la possibilité aux graffiteurs de se montrer pendant les Jeux olympiques 2010, il est stipulé que ceux qui veulent participer ne doivent pas avoir de dossier. Cela a dû être la raison qui a éliminé les graffiteurs les plus reconnus de Vancouver.

Qui va représenter le graffiti aux Jeux olympiques?

photos_contrat_hiphop_murales_graffiti_artistes_du%20cafe_maison_simon6 Les graffiteurs de Montréal se demande bien qui va les représenter dans leur art à la face du monde? Ils connaissent les meilleurs graffiteurs du Canada et aucun ne serait présent aux Jeux olympiques! Les graffiteurs de Montréal se demandent pourquoi ils n’ont pas reçu l’invitation de se présenter aux Jeux Olympiques de Vancouver pour montrer le meilleur d’eux-mêmes. Dans l’appel de candidature, on n’exigeait pas que les graffiteurs soient exclusivement de Vancouver, mais d’être citoyen canadien. La question lancée par les graffiteurs: est-ce que les graffiteurs du Québec sont considérés comme des Canadiens?

Sans réponse du 2010 Winter Olympic Street style art demonstration

Nous avons voulu poser la question à la responsable du 2010 Winter Olympic Street-style Art Demonstration et du CYPRESS MOUNTAIN GRAFFITI EXPOSITION, Mme Rachel Rosengarten. Malheureusement, la ligne téléphonique publiée a été fermé, ainsi que son adresse courriel et les pages du site Internet concernant l’appel de candidature de cet événement. Les moyens pour rejoindre Rachel Rosengarten ont été fermé le 29 janvier dernier, date limite pour déposer sa candidature.

Le Québec a-t-il été boycotté par les Jeux olympiques de Vancouver?

Autre question que les graffiteurs posent. Puisque c’est au Québec que nous retrouvons le plus de graffiteurs professionnels, qu’ils voyagent partout à travers le Canada pour réaliser leurs oeuvres, pourquoi l’information ne s’est pas rendu dans le réseau?

Pour rejoindre les graffiteurs du Québec, ce n’est vraiment pas difficile. À Montréal, nous avons deux conventions internationales. Underpressure et Meeting of Styles. Connu de la ville de Montréal, tout comme le Café-Graffiti, personne n’a eu l’information.

Est-ce que les organisateurs des Jeux olympiques de Vancouver ont volontairement boycotté le Québec dans cette prestation? Est-ce que les organisateurs des Jeux Olympiques sont conscients de l’impair qu’ils sont en train de commettre pour la réputation des artistes graffitistes?

Un communiqué de presse provenant des organisateurs des événements pour les Jeux Olympiques titrait:

Annonceurs, DJ et artistes dans les gradins de renommée internationale enflamment les Jeux olympiques d’hiver de 2010 et inspirent les spectateurs.

Les graffiteurs auraient bien aimé que leur art et leur culture soient inclus dans cette énumération.

Histoire à suivre…

Autre textes sur la destruction de murales à Vancouver en préparation des Jeux Olympiques.

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Jeux de Vancouver 2010: jeunes journalistes francophones recherchés

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Classé dans Actualité, Raymond Viger