Archives quotidiennes : 9 février 2010

De victor Jara à Guantanamo : la même CIA (39)

Certains avaient pu s’étonner, à la lecture de mes épisodes, de l’opération visiblement menée par la CIA visant à importer des voitures neuves des Etats-Unis, ou des véhicules récents volés, pour les retrouver au milieu des explosions de Bagdad ou d’autres villes du pays. Opérations douteuses de « cover up » visant à déstabiliser le pays, en montant l’une contre l’autre les deux factions religieuses chiite et sunnite. Or, à tout bien regarder, on ne doit pas en être trop étonné : ces opérations de déstabilisation avaient commencé bien avant l’invasion du pays en 2003, et elles visaient à cette époque à tenter de pousser Saddam Hussein à se venger de ses propres généraux, qu’une habile opération secrète aurait rendu responsable d’attentats contre sa personne. Un Saddam rendu fou furieux n’aurait pas hésité à s’en prendre à ses propres cadres, on le sait. C’était bien là le plan prévu, qui comportait donc des contacts avec des dissidents parmi le staff de militaires de Saddam Hussein. Six ans après la capture de celui-ci, ses liens existent toujours, à n’en point douter. La CIA les a gardés, au cas où.

Le projet s’appelait Anabasis, avait été autorisé par Bush en février 2002, et avait été mijoté par Georges Tenet et des membres de la CIA, dont un surnommé Luis, et par John Maguire (un ancien des SWAT de Baltimore), l’homme à la tête de « l’Iraq Operations Group« . Maguire était en réalité un vétéran des opérations tordues, il avait trempé dans l’affaire des contras contre les sandinistes. On l’avait retrouvé un jour sous la couverture d’un vendeur de bateaux, à la Johnson Outboard Motor Repair Shop de La Union, au Nicaragua. La nuit venue, il utilisait ses bateaux de touristes pour transporter des mines flottantes pour empêcher les sandinistes de se ravitailler en armes. L’affaire, ébruitée avait provoqué un beau scandale : Barry Goldwater avait alors parlé de grave violation des droits internationaux. William Casey, directeur de la CIA avait dû faire machine arrière et arrêter les opérations de minage des ports nicaraguayens. Maguire avait été envoyé juste après en Afghanistan… pour aller expliquer à Massoud et à l’Alliance du Nord comment utiliser des mines terrestres, les fameuses IEDs contre les chars russes… avant de quitter officiellement la CIA et de devenir instructeur à « La Ferme » (The Farm), en Virginie… « La Ferme », le surnom de Camp Peary, le chef-lieu des Armed Forces Experimental Training Activity (AFETA), qui est aussi depuis toujours le camp d’entraînement privilégié de la CIA près de Williamsburg…. Maguire n’avait donc jamais quitté véritablement la CIA ! A Camp Peary, où on s’occupait de pas mal de choses… (que nous avons vues déjà ici).

Les techniques d’entraînement qui prévalaient à Camp Peary, qui allaient jusqu’à celles d’assassinats, ont été décrites dans le détail en 2004 par une femme, Lindsay Moran, d’origine bulgare, dans son ouvrage « Blowing My Cover : My Life as a CIA Spy ». Selon elle, les tactiques étaient dépassées, dataient de la guerre froide, et le recrutement d’espions aux cocktails d’ambassades un peu trop stéréotypé ! Selon elle également, en Irak, les actions de la CIA étaient… inadéquates. Surtout, pour elle, la CIA passait trop de temps à combattre les scandales la concernant au lieu de faire réellement dans la lutte contre le terrorisme. Au moins avait-elle appris les techniques pour résister à un interrogatoire, la spécialité de la CIA…programme SERE oblige, et avait clairement défini qu’espionner, c’est avant tout mentir… aux autorités.

Mentir, en affirmant comme le dira G.W Bush fin 2002 qu’il n’avait rien en vue contre Saddam, alors qu’il venait de signer les ordres autorisant les cover-ups en Irak (*1) . Des opérations préparées par John Maguire et « Luis », un exilé cubain, qui était l’assistant particulier de John McLaughlin, un des dirigeants de la CIA, successeur par intérim quelques mois de Georges Tenet, dont le père avait participé à l’opération de la baie des cochons. Pour l’opération envisagée, il fallait envoyer sur place une équipe de paramilitaires qui devaient contacter les généraux dissidents du dictateur. Le plan contenait l’assassinat de proches de Saddam, assassinats qui auraient été imputés à d’autres généraux pour que le dictateur se lance dans une épuration catastrophique pour son régime (il l’avait commencé par une purge magistrale, filmée et archivée).

Pour le déroulement de l’opération, une insurrection menée dans le sud du pays aurait été fomentée, près de Nukaib, où Saddam aurait dû se rendre en avion en violant la condition des vols interdits depuis la précédente opération militaire américaine : un tir sur cet avion imputé aux insurgés aurait servi de prétexte à l’invasion du pays (*2) . Coût estimé des opérations : 400 millions de dollars, y compris les liasses destinées au généraux « retournés ». Une réunion au QG de la CIA avec Dick Cheney , qui semblait selon certains observateurs « possédé par l’Irak » et avec Lewis Libby, surnommé « Scooter », avait scellé la directive : Libby y avait affirmé que Saddam avait acheté au Niger du Yellow Cake pour faire une bombe atomique : on découvrira bien après que c’était de l’intox pure, provenant… de la CIA. De même qu’on découvrira que l’informateur irakien de Colin Powell, le surnommé « Curveball » avait lui aussi tout inventé !!! Les camions épandeurs de gaz toxiques, c’était aussi du flan (*3) , comme nous l’avions exposé ici dans l’épisode N°6. A la réunion assistait aussi le sous secrétaire à la défense Douglas J. Feith, avec son staff, que Colin Powell appelait « le bureau de la Gestapo » !

En janvier 2003, « Curveball » présenté comme « fiable » par la CIA avait été littéralement démonté, pourtant, par un homme de la maison : Tyler Drumheller, (*4) a l’époque toujours en poste, qui avait rédigé une note ravageuse à l’intention de Powell. Dans cette note, il accusait « Curveball » d’être un « menteur » et un être « mentalement instable » qui ne devait en aucun cas être crû sur parole. un affabulateur, que Drumheller avait bien cerné. Il ne sera pas suivi. Les « laboratoires mobiles » inventés avaient été ajoutés à la dernière minute dans le discours de Powell : on sait ce qu’ils étaient, où plutôt qui en détenait : les américains, pour leurs essais du Nevada et en Utah, mais pas Saddam Hussein ! C’est ainsi que l’on apprit bien après que de stations mobiles on n’en n’avait aucune photo, et que les graphiques Powerpoint de l’exposé de Powell furent dessinés selon ses racontars… George Tenet, qui n’y croyait pas davantage sera quand même juste derrière Powell durant tout le speech à l’ONU. Entre menteurs, un pacte avait visiblement été passé : Tenet, s’i voulait garder sa place, n’avait pas à aller à l’encontre du pouvoir et de ses décisions, fussent-elles basées sur des mensonges.

En novembre 2007 la supercherie Curveball, alias Rafid Ahmed Alwan, qui n’avait jamais été physicien, contrairement a ce qu’il avait clamé, éclatait au grand jour, donnant une revanche tardive à Drumheller. Tout ce qu’il avait raconté été faux de bout en bout ! La CIA avait bien deux écoles désormais : celle des « classiques », loyaux et patriotes, de vrais hommes de l’ombre, et les « nouveaux venus », ou plutôt les parvenus véritables, prêts à s’acoquiner avec le pouvoir en place, contre l’échange d’une belle carrière. Le régime de Bush ayant misé sur les deux, en rappelant de vieux briscards de l’époque anti-castriste et de jeunes loups avides d’argent. Ceux ayant travaillé sous Carter ou Clinton furent mis sur une voie de garage, ce furent les anciens reaganiens qui regagnaient des postes en vue : une nette droitisation des services secrets fut mis en place. Le régime se durcissait et avait besoin de relais sur la même longueur d’onde.

Pour arriver à présenter une équipe qui se tienne, des entraînements eurent lieu en plein désert du Nevada, dans la zone connue des anciens essais nucléaires US (un lieu bien connu des agents de la CIA, voir les épisodes précédents). On pense qu’environ 80 irakiens ont participé à ces opérations., sous le nom de code de Scorpions 77 Alpha (selon le livre « Hubris« ), auxquels s’ajoutaient 15 égyptiens et libanais (pour contrecarrer les manques flagrants de personnes parlant la langue). Les mercenaires auraient été déposés à la frontière irakienne par les mêmes avions que ceux dont se servira la CIA pour ses « renditions flights ». « AirCia » amenait sur place les troupes ! A camp Peary, su le petit aéroport discret, le plus en vue étant le C-130 immatriculé N2189M (N2731G) de Tepper Aviation.

A New-York, en septembre 2002, un des leaders soufistes avait même été invité à participer aux préparatifs. Des généraux de Saddam Hussein, qui étaient soufistes auraient fait le lien. L’homme s’appelle Muhammad al-Kasnazani, c’est le leader de la confrérie soufie Casnazaniyya, branche de la Qadiriyya, un homme en cheville avec Izzat Ibrahim al-Douri, un informateur donc, devenu « Le pape » comme nom de code à la CIA, assisté de ses deux fils. « D’après des documents saisis par les Américains, au siège des services secrets irakiens en 2003, Muhammad al-Kasnazani et ses fils Nehru et Gandhi – au nom de code « Rockstars » – jouaient double jeu ». Avec la CIA, les rencontres se passaient parfois au Maroc, à Marrakech, dans un restaurant réputé, le Maroc où la branche boutchich de la confrérie était née au milieu du xviiie siècle. Selon certaines sources (le livre d’Isikoff et Corn), la CIA aurait alors proposé à al-Kasnazani le tarif de 1 million de dollars par mois contre des renseignements sur l’environnement proche de Saddam Hussein.

Muhammad al-Kasnazani était en relation directe avec le général Izzat Ibrahim al-Douri, soufiste lui aussi, celui qui un jour avait hérité de la carte de « roi » parmi les personnages de haut rang recherché par les américains. Or, à l’évidence, ce personnage, à ce jour encore, a évité tous les écueils de l’après-bataille, continuant semble-t-il à diriger en sous-main la résistance irakienne sans jamais être arrêté. Annoncé à plusieurs reprises comme mort, notamment de leucémie en 2005, l’homme ne cesse encore aujourd’hui d’intriguer. Nous avions déjà parlé de ses étranges facultés à disparaître au bon moment : « sans nul doute, l’homme était informé des recherches le concernant. Un autre point avait mis la puce à l’oreille aux militaires de base américains : le 11 décembre dernier, un haut dignitaire du régime de Saddam Hussein, Izzat Ibrahim al-Douri, a échappé on ne sait comment aux soldats qui le pistaient. Il avait été repéré dans le village d’Al-Sada Al-Nuaim, près de Tikrit, à 180 km au nord de Bagdad. Washington avait offert en novembre 2003 une récompense de 10 millions de dollars pour sa mort ou sa capture », avait-on déjà écrit ici-même. Aurait-on fait de al-Douri, déjà contacté pour renverser Saddam, un interlocuteur privilégié ? En continuant à l’accuser de fomenter des actes de résistance… tout en discutant régulièrement avec lui ? C’est plus que probable en effet comme on le supposait déjà il y a plus d’un an déjà : « aujourd’hui, à l’heure de la « réconciliation » , certains évoquent déjà ce jour-là un coup de fil au bon moment… un échappé de haut rang qui se fait s’interroger tout le monde sur la rapidité à vouloir supprimer physiquement les hauts dirigeants du régime, mais pas tous. Un Saddam Hussein, dont le parti n’est donc plus considéré comme hors la loi, ou du moins ces anciens fidèles. Pour Paul Wolfowitz, c’était pourtant bien al-Douri le chef de la résistance baassiste, le roi de trèfle du jeu de cartes, et le 6e dirigeant le plus recherché. Régulièrement vu entre-temps en Syrie et au Yemen, l’homme à la moustache rousse y aurait rencontré en novembre 2007, des dirigeants américains pour parler non pas reddition, mais… reconversion et insertion professionnelle ! L’intermédiaire s’appelant… Tony Blair ( « Blair made Britain a satellite for the US »).

Une réunion se tenant le 31 janvier 2003 dans le salon ovale de la Maison Blanche avec ce même Tony Blair, avait précisé davantage encore le projet : pour arriver coûte que coûte à l’invasion de l’Irak malgré la seconde résolution de l’ONU l’en empêchant, le président des Etats-Unis avait élaboré un bon vieux coup de Golfe du Tonkin, version aérienne cette fois. Un U-2, peint aux couleurs de l’ONU (? ??) aurait été lancé au dessus de l’Irak, et se serait fait obligatoirement tiré dessus…(*5) donnant alors l’occasion d’intervenir. Une idée personnelle de W.Bush parait-il ! Il va sans dire que l’U-2 repeint en blanc aurait été préparé dans les ateliers de la CIA. Ces deux là étaient prêts à tous les mensonges pour arriver à leurs fins !! Blair ayant beau jeu aujourd’hui de minimiser l’entrée en guerre de l’Angleterre en affirmant par la voix de sa femme Cherie que ça s’est joué à 49-51% au sein du ministère ! Un Tony Blair qui avait reçu juste avant de prendre sa décision la visite de James Wosley, l’ancien patron de la CIA (de 1993 à 1995), dépêché sur place par Paul Wolfowitz, pour le convaincre. L’équipe de W.Bush n’était pas si sûr que cela de son allié préféré… Et Bush savait, dix jours avant l’attaque, que Saddam était dépourvu de toute arme chimlque ou nucléaire : des documents récemment ressortis le révèlent. Il savait ! Des documents qui révèlent par la même occasion que Blair a bien suivi Bush… comme un caniche. En 2005 ça avait déjà été dit, mais personne n’avait écouté.

GeorgeTenet, qui avait été convié à la réunion, interrogé sur les armes de destruction massives avait alors affirmé que le sujet était « un canard boiteux » : en résumé, Saddam Hussein n’en n’avait pas, très certainement, car la CIA n’avait pas réussi à prouver le contraire. Ce qui n’empêchera pas Colin Powell de clamer l’inverse deux mois après : menteurs, jusqu’au bout ! Un Tenet qui sera poussé à la démission le 3 juin 2004, aussitôt remplacé par un adjoint qui laissera sa place à Porter Goss, faucon parmi les faucons et vieux briscard des coups tordus : il était déjà dans celui de la Baie des Cochons ! A la fin du règne, les régimes se durcissent, on le sait. Tenet, écœuré, dira toute sa morgue dans un ouvrage, « At the Center of the Storm« , dans lequel il accusera surtout un homme : Dick Cheney de s’être servi comme de lui comme bouc émissaire dans l’affaire des armes de destruction massives. L’ouvrage lui rapportera quand même quatre millions de dollars…

Tenet avait pourtant appris, bien avant l’offensive, et de la bouche même du ministre de la défense irakienne, Naji Sabri, approché lui aussi par la CIA, que Saddam n’avait plus aucune arme nucléaire, et n’en n’avait jamais possédé non plus. En avril 2006, quatre ans plus tard, on en aura confirmation. Selon les services secrets français, qui avait eu vent de l’intermédiaire de Sabri vivant en France (et s’appelant « Murray ») Sabri avait reçu 100 000 dollars pour ses confidences dans un hôtel parisien (*6) . Les américains, comme les français et les anglais, savaient donc tous deux que Saddam était totalement démuni d’armes de destructions massives, selon une source crédible. On comprend mieux le discours de Dominique De Villepin… et encore moins l’attaque américaine ! Kofi Annan avait été lui aussi mis dans la confidence, et savait que Saddam ne mentait pas. Une fois l’Irak conquis, Sabri, qui n’avait pas non plus figuré sur le jeu de cartes des plus recherchés, ne fut jamais arrêté : on récompensait ainsi indirectement son entrevue de 2002. Il vit depuis tranquille au Proche-Orient, dans un lieu que la CIA ne veut pas divulguer… on comprend pourquoi. Avec Izzat Ibrahim al-Douri et Naji Sabri, on s’aperçoit que la CIA avait remonté loin dans l’organigramme des proches de Saddam, et que le premier, soi-disant toujours pourchassé, doit aujourd’hui connaître le même sort envieux que le second. Alors pourquoi donc officiellement continuer à le présenter comme l’organisateur de la résistance irakienne ? Pour servir de repoussoir pratique façon Ben Laden ?

Un projet de sabotage de voitures d’officiels irakiens se rendant en Jordanie avait été envisagé également, pour être rejeté car jugé « trop puéril ». Faire sauter des véhicules, depuis les attentats contres les proches de Salvador Allende, un travail fait pour la CIA ! Les troupes prévues, entraînées aux USA avaient été déposées en Jordanie, justement, et on ne voulait pas éveiller les soupçons. La totalité de l’opération avait été révélée tardivement en 2006 dans l’excellent livre de Michael Isikoff et David Corn, intitulé « Hubris« . Selon le livre encore, toute la Maison Blanche ne jurait aussi que par les écrits d’une lobbyste de la guerre contre Saddam, Laurie Mylroie, qui, par ses fausses informations, avait endoctriné jusqu’aux services secrets. Or, au début de sa carrière, la même avait fait dans l’apologie de l’œuvre de Saddam Hussein. A peine le Koweit envahi, elle affirmait tout l’inverse : la CIA avait remis à l’administration Bush un rapport préconisant de ne plus suivre ses avis, il n’avait pas été lu. Là encore, le service avait fait son travail consistant à fournir des notes sur des personnes dignes de foi ou non. Et encore une fois, ce rapport ne fut pas pris en compte. Bien au contraire, Paul Wolfowitz citait régulièrement des extraits d’articles de Mylroie (*7) , cette va-t-en-guerre extrémiste ! Tout se passait comme ci la CIA tournait à vide : elle avait beau émettre des avis, les politiques n’en faisaient qu’à leur tête. Pire, infiltrée par des hommes du président, la CIA produisit de plus des rapports n’allant plus que dans le sens présidentiel.

Au final, donc, quand ce n’était pas avec les mensonges débités par les faux militaires invités à la Fox, c’étaient les écrits de cette folle de Mylroie qui servait à appuyer leurs actions délirantes ! Une Fox vilipendée (enfin) par le nouveau pouvoir en place, qui y voit (enfin) une « aile supplémentaire » du parti républicain le plus réactionnaire ! Et tout cela pour rien, en ce qui concerne ce plan infernal de déstabilisation du régime irakien. Au final, en effet, le plan Anabasis fut arrêté à la dernière minute sur ordre du général Tommy Franks, à l’US Central Command de McDill. Ne laissant pas pour autant de répit à Saddam Hussein. Ce dernier, en 1990, à la suite d’une entrevue avec l’ambassadrice américaine April Glaspie avait cru comprendre que son invasion du Koweit ne verrait pas les Etats-Unis réagir. Il était tombé dans un beau piège, celui tendu par le père du Bush au pouvoir jusqu’en 2008 ! Cette fois, on irait inventer à l’ONU des allégations, celles de la détention d’armes destructrices pour pouvoir envahir le pays. Et comme peu de pays s’y opposeraient, dont la France, qui savait précisément elle aussi qu’il n’en avait pas mais ne pouvait indiquer sa source, la seconde chausse-trappe était en place. Anabasis n’avait pu lieu d’être, le piège du mensonge s’était refermé sur Saddam Hussein.

Selon Bob Woodward, qui s’y connaît, c’était donc bien la CIA qui avait manipulé tout le jeu pour la montée vers l’inéluctable invasion de l’Irak, en affirmant auprès des autorités que ses propres actions secrètes seraient quasi inefficaces, ou que l’inaction vis-à-vis de Saddam mettrait en grand danger son réseau d’informateurs, y compris les fameux « rockstars » !! ! Selon Woodward également, la relative amélioration de 2006 en Irak (« The Surge ») serait davantage due à des actions spéciales qu’aux renforts de troupe (in « La Guerre de l’intérieur : une histoire secrète de la Maison-Blanche, 2006-2008« ). Derrière la manipulation des informations en provenance de la CIA se profile également l’ombre de Karl Rove, autour duquel tournent tous les débats sur les failles de la CIA. Ce Machiavel raté avait accès à ces informations, et en a dispatché ou modifié comme bon lui semblait. En août 2007, pour protéger Bush des atteintes, Rove acceptait de démissionner. Sachant qu’on le surnommait « le cerveau de Bush« , on a une petite idée des derniers mois de ce dernier à la Maison Blanche… Rove n’a jamais révélé ses sources de la CIA. En partant, il limitait aussi les dégâts de ce côté là également. En démissionnant, il empêchait les enquêteurs de remonter plus haut au sein de la CIA, et de démasquer les liens entre la CIA et l’administration Bush. On a souvent dit que Rove avait été ce jour là le « fusible » de Bush, il conviendrait aussi de penser à ce qu’il ait pu être avant tout celui de la CIA.

Dès l’été 2002, Bush accordait 700 millions de dollars à l’armée pour se pré-positionner aux frontières de l’Irak… en présentant au Congrès une « rallonge » pour mener la guerre en Afghanistan ! Ce sont bien les faucons au sein de la CIA, emmenés par Cheney et Rove qui ont poussé à l’intervention en Irak, tous en sachant qu’il n’avait rien à voir avec Ben Laden et qu’il ne possédait aucune arme dangereuse ! Et dans ce théâtre malsain, la CIA n’a pas fait que de la figuration !

(1) « In the summer of 2002, Bush approved $700 million worth of « preparatory tasks » in the Persian Gulf region such as upgrading airfields, bases, fuel pipelines and munitions storage depots to accommodate a massive U.S. troop deployment. The Bush administration funded the projects from a supplemental appropriations bill for the war in Afghanistan and old appropriations, keeping Congress unaware of the reprogramming of money and the eventual cost. »

(2) « At the core of the plan was a classified training camp established in 2002 somewhere on the Nevada Test Site. Using a fleet of so-called rendition airplanes, the same ones used by the CIA to kidnap and transport terror suspects, dozens of former Iraqi soldiers were smuggled into the U.S. and then taken to the test site for special training. The Iraqis adopted a nickname — The Scorpions ».

(3) « On March 10 we got a report saying that the chemical weapons might have remained disassembled and that Saddam hadn’t yet ordered their re-assembly and he might lack warheads capable of effective dispersal of agents.” « Powell and I were both suspicious because there were no pictures of the mobile labs, » Wilkerson said. The drawings were constructed from Curveball’s accounts.

(4) « The German official declined but then offered a startlingly candid assessment, Drumheller recalled. « He said, ’I think the guy is a fabricator,’  » Drumheller said, recounting the conversation with the official, whom he declined to name. « He said : ’We also think he has psychological problems. We could never validate his reports.’

(5) « During a private two-hour meeting in the Oval Office on Jan. 31, 2003, he made clear to Prime Minister Tony Blair of Britain that he was determined to invade Iraq without the second resolution, or even if international arms inspectors failed to find unconventional weapons, said a confidential memo about the meeting written by Mr. Blair’s top foreign policy adviser and reviewed by The New York Times…. (…) Mr. Bush talked about several ways to provoke a confrontation, including a proposal to paint a United States surveillance plane in the colors of the United Nations in hopes of drawing fire… »The U.S. was thinking of flying U2 reconnaissance aircraft with fighter cover over Iraq, painted in U.N. colours, » the memo says, attributing the idea to Mr. Bush. « If Saddam fired on them, he would be in breach. »

(6) « The CIA came close to recruiting Saddam Hussein’s foreign minister, Naji Sabri, to be an American spy. Through a Lebanese journalist, Sabri passed word to the CIA’s station chief in Paris that Iraq had no active nuclear or WMD programs. But senior CIA and White House officials dismissed the intelligence and opposed the effort to recruit Sabri, fearing it would undercut the case for an invasion. The chief of the CIA’s Iraq Operations Group told the Paris station chief, « One of these days you’re going to get it. This is not about intelligence. This is about regime change. ».

(7) « An obscure academic, derided as a virtual crackpot by U.S. law enforcement and the intelligence community, greatly influenced top Bush administration officials, who adopted her farfetched theory that Saddam was the source of most of the terrorism in the world, including the 9/11 attacks. But, oddly, this researcher, Laurie Mylroie, had once been a Saddam apologist and had engaged in secret, back-door diplomacy aimed at brokering a peace accord between Israel and Iraq. After Saddam invaded Kuwait, Mylroie developed bizarre allegations about Saddam and terrorism. Her theories were debunked by the CIA and FBI, yet Deputy Defense Secretary Paul Wolfowitz embraced them, cited them in official meetings, and repeatedly pressed the agency and bureau to come up with evidence to substantiate Mylroie’s work. »Certains avaient pu s’étonner, à la lecture de mes épisodes, de l’opération visiblement menée par la CIA visant à importer des voitures neuves des Etats-Unis, ou des véhicules récents volés, pour les retrouver au milieu des explosions de Bagdad ou d’autres villes du pays. Opérations douteuses de « cover up » visant à déstabiliser le pays, en montant l’une contre l’autre les deux factions religieuses chiite et sunnite. Or, à tout bien regarder, on ne doit pas en être trop étonné : ces opérations de déstabilisation avaient commencé bien avant l’invasion du pays en 2003, et elles visaient à cette époque à tenter de pousser Saddam Hussein à se venger de ses propres généraux, qu’une habile opération secrète aurait rendu responsable d’attentats contre sa personne. Un Saddam rendu fou furieux n’aurait pas hésité à s’en prendre à ses propres cadres, on le sait. C’était bien là le plan prévu, qui comportait donc des contacts avec des dissidents parmi le staff de militaires de Saddam Hussein. Six ans après la capture de celui-ci, ses liens existent toujours, à n’en point douter. La CIA les a gardés, au cas où.

Le projet s’appelait Anabasis, avait été autorisé par Bush en février 2002, et avait été mijoté par Georges Tenet et des membres de la CIA, dont un surnommé Luis, et par John Maguire (un ancien des SWAT de Baltimore), l’homme à la tête de « l’Iraq Operations Group« . Maguire était en réalité un vétéran des opérations tordues, il avait trempé dans l’affaire des contras contre les sandinistes. On l’avait retrouvé un jour sous la couverture d’un vendeur de bateaux, à la Johnson Outboard Motor Repair Shop de La Union, au Nicaragua. La nuit venue, il utilisait ses bateaux de touristes pour transporter des mines flottantes pour empêcher les sandinistes de se ravitailler en armes. L’affaire, ébruitée avait provoqué un beau scandale : Barry Goldwater avait alors parlé de grave violation des droits internationaux. William Casey, directeur de la CIA avait dû faire machine arrière et arrêter les opérations de minage des ports nicaraguayens. Maguire avait été envoyé juste après en Afghanistan… pour aller expliquer à Massoud et à l’Alliance du Nord comment utiliser des mines terrestres, les fameuses IEDs contre les chars russes… avant de quitter officiellement la CIA et de devenir instructeur à « La Ferme » (The Farm), en Virginie… « La Ferme », le surnom de Camp Peary, le chef-lieu des Armed Forces Experimental Training Activity (AFETA), qui est aussi depuis toujours le camp d’entraînement privilégié de la CIA près de Williamsburg…. Maguire n’avait donc jamais quitté véritablement la CIA ! A Camp Peary, où on s’occupait de pas mal de choses… (que nous avons vues déjà ici).

Les techniques d’entraînement qui prévalaient à Camp Peary, qui allaient jusqu’à celles d’assassinats, ont été décrites dans le détail en 2004 par une femme, Lindsay Moran, d’origine bulgare, dans son ouvrage « Blowing My Cover : My Life as a CIA Spy ». Selon elle, les tactiques étaient dépassées, dataient de la guerre froide, et le recrutement d’espions aux cocktails d’ambassades un peu trop stéréotypé ! Selon elle également, en Irak, les actions de la CIA étaient… inadéquates. Surtout, pour elle, la CIA passait trop de temps à combattre les scandales la concernant au lieu de faire réellement dans la lutte contre le terrorisme. Au moins avait-elle appris les techniques pour résister à un interrogatoire, la spécialité de la CIA…programme SERE oblige, et avait clairement défini qu’espionner, c’est avant tout mentir… aux autorités.

Mentir, en affirmant comme le dira G.W Bush fin 2002 qu’il n’avait rien en vue contre Saddam, alors qu’il venait de signer les ordres autorisant les cover-ups en Irak (*1) . Des opérations préparées par John Maguire et « Luis », un exilé cubain, qui était l’assistant particulier de John McLaughlin, un des dirigeants de la CIA, successeur par intérim quelques mois de Georges Tenet, dont le père avait participé à l’opération de la baie des cochons. Pour l’opération envisagée, il fallait envoyer sur place une équipe de paramilitaires qui devaient contacter les généraux dissidents du dictateur. Le plan contenait l’assassinat de proches de Saddam, assassinats qui auraient été imputés à d’autres généraux pour que le dictateur se lance dans une épuration catastrophique pour son régime (il l’avait commencé par une purge magistrale, filmée et archivée).

Pour le déroulement de l’opération, une insurrection menée dans le sud du pays aurait été fomentée, près de Nukaib, où Saddam aurait dû se rendre en avion en violant la condition des vols interdits depuis la précédente opération militaire américaine : un tir sur cet avion imputé aux insurgés aurait servi de prétexte à l’invasion du pays (*2) . Coût estimé des opérations : 400 millions de dollars, y compris les liasses destinées au généraux « retournés ». Une réunion au QG de la CIA avec Dick Cheney , qui semblait selon certains observateurs « possédé par l’Irak » et avec Lewis Libby, surnommé « Scooter », avait scellé la directive : Libby y avait affirmé que Saddam avait acheté au Niger du Yellow Cake pour faire une bombe atomique : on découvrira bien après que c’était de l’intox pure, provenant… de la CIA. De même qu’on découvrira que l’informateur irakien de Colin Powell, le surnommé « Curveball » avait lui aussi tout inventé !!! Les camions épandeurs de gaz toxiques, c’était aussi du flan (*3) , comme nous l’avions exposé ici dans l’épisode N°6. A la réunion assistait aussi le sous secrétaire à la défense Douglas J. Feith, avec son staff, que Colin Powell appelait « le bureau de la Gestapo » !

En janvier 2003, « Curveball » présenté comme « fiable » par la CIA avait été littéralement démonté, pourtant, par un homme de la maison : Tyler Drumheller, (*4) a l’époque toujours en poste, qui avait rédigé une note ravageuse à l’intention de Powell. Dans cette note, il accusait « Curveball » d’être un « menteur » et un être « mentalement instable » qui ne devait en aucun cas être crû sur parole. un affabulateur, que Drumheller avait bien cerné. Il ne sera pas suivi. Les « laboratoires mobiles » inventés avaient été ajoutés à la dernière minute dans le discours de Powell : on sait ce qu’ils étaient, où plutôt qui en détenait : les américains, pour leurs essais du Nevada et en Utah, mais pas Saddam Hussein ! C’est ainsi que l’on apprit bien après que de stations mobiles on n’en n’avait aucune photo, et que les graphiques Powerpoint de l’exposé de Powell furent dessinés selon ses racontars… George Tenet, qui n’y croyait pas davantage sera quand même juste derrière Powell durant tout le speech à l’ONU. Entre menteurs, un pacte avait visiblement été passé : Tenet, s’i voulait garder sa place, n’avait pas à aller à l’encontre du pouvoir et de ses décisions, fussent-elles basées sur des mensonges.

En novembre 2007 la supercherie Curveball, alias Rafid Ahmed Alwan, qui n’avait jamais été physicien, contrairement a ce qu’il avait clamé, éclatait au grand jour, donnant une revanche tardive à Drumheller. Tout ce qu’il avait raconté été faux de bout en bout ! La CIA avait bien deux écoles désormais : celle des « classiques », loyaux et patriotes, de vrais hommes de l’ombre, et les « nouveaux venus », ou plutôt les parvenus véritables, prêts à s’acoquiner avec le pouvoir en place, contre l’échange d’une belle carrière. Le régime de Bush ayant misé sur les deux, en rappelant de vieux briscards de l’époque anti-castriste et de jeunes loups avides d’argent. Ceux ayant travaillé sous Carter ou Clinton furent mis sur une voie de garage, ce furent les anciens reaganiens qui regagnaient des postes en vue : une nette droitisation des services secrets fut mis en place. Le régime se durcissait et avait besoin de relais sur la même longueur d’onde.

Pour arriver à présenter une équipe qui se tienne, des entraînements eurent lieu en plein désert du Nevada, dans la zone connue des anciens essais nucléaires US (un lieu bien connu des agents de la CIA, voir les épisodes précédents). On pense qu’environ 80 irakiens ont participé à ces opérations., sous le nom de code de Scorpions 77 Alpha (selon le livre « Hubris« ), auxquels s’ajoutaient 15 égyptiens et libanais (pour contrecarrer les manques flagrants de personnes parlant la langue). Les mercenaires auraient été déposés à la frontière irakienne par les mêmes avions que ceux dont se servira la CIA pour ses « renditions flights ». « AirCia » amenait sur place les troupes ! A camp Peary, su le petit aéroport discret, le plus en vue étant le C-130 immatriculé N2189M (N2731G) de Tepper Aviation.

A New-York, en septembre 2002, un des leaders soufistes avait même été invité à participer aux préparatifs. Des généraux de Saddam Hussein, qui étaient soufistes auraient fait le lien. L’homme s’appelle Muhammad al-Kasnazani, c’est le leader de la confrérie soufie Casnazaniyya, branche de la Qadiriyya, un homme en cheville avec Izzat Ibrahim al-Douri, un informateur donc, devenu « Le pape » comme nom de code à la CIA, assisté de ses deux fils. « D’après des documents saisis par les Américains, au siège des services secrets irakiens en 2003, Muhammad al-Kasnazani et ses fils Nehru et Gandhi – au nom de code « Rockstars » – jouaient double jeu ». Avec la CIA, les rencontres se passaient parfois au Maroc, à Marrakech, dans un restaurant réputé, le Maroc où la branche boutchich de la confrérie était née au milieu du xviiie siècle. Selon certaines sources (le livre d’Isikoff et Corn), la CIA aurait alors proposé à al-Kasnazani le tarif de 1 million de dollars par mois contre des renseignements sur l’environnement proche de Saddam Hussein.

Muhammad al-Kasnazani était en relation directe avec le général Izzat Ibrahim al-Douri, soufiste lui aussi, celui qui un jour avait hérité de la carte de « roi » parmi les personnages de haut rang recherché par les américains. Or, à l’évidence, ce personnage, à ce jour encore, a évité tous les écueils de l’après-bataille, continuant semble-t-il à diriger en sous-main la résistance irakienne sans jamais être arrêté. Annoncé à plusieurs reprises comme mort, notamment de leucémie en 2005, l’homme ne cesse encore aujourd’hui d’intriguer. Nous avions déjà parlé de ses étranges facultés à disparaître au bon moment : « sans nul doute, l’homme était informé des recherches le concernant. Un autre point avait mis la puce à l’oreille aux militaires de base américains : le 11 décembre dernier, un haut dignitaire du régime de Saddam Hussein, Izzat Ibrahim al-Douri, a échappé on ne sait comment aux soldats qui le pistaient. Il avait été repéré dans le village d’Al-Sada Al-Nuaim, près de Tikrit, à 180 km au nord de Bagdad. Washington avait offert en novembre 2003 une récompense de 10 millions de dollars pour sa mort ou sa capture », avait-on déjà écrit ici-même. Aurait-on fait de al-Douri, déjà contacté pour renverser Saddam, un interlocuteur privilégié ? En continuant à l’accuser de fomenter des actes de résistance… tout en discutant régulièrement avec lui ? C’est plus que probable en effet comme on le supposait déjà il y a plus d’un an déjà : « aujourd’hui, à l’heure de la « réconciliation » , certains évoquent déjà ce jour-là un coup de fil au bon moment… un échappé de haut rang qui se fait s’interroger tout le monde sur la rapidité à vouloir supprimer physiquement les hauts dirigeants du régime, mais pas tous. Un Saddam Hussein, dont le parti n’est donc plus considéré comme hors la loi, ou du moins ces anciens fidèles. Pour Paul Wolfowitz, c’était pourtant bien al-Douri le chef de la résistance baassiste, le roi de trèfle du jeu de cartes, et le 6e dirigeant le plus recherché. Régulièrement vu entre-temps en Syrie et au Yemen, l’homme à la moustache rousse y aurait rencontré en novembre 2007, des dirigeants américains pour parler non pas reddition, mais… reconversion et insertion professionnelle ! L’intermédiaire s’appelant… Tony Blair ( « Blair made Britain a satellite for the US »).

Une réunion se tenant le 31 janvier 2003 dans le salon ovale de la Maison Blanche avec ce même Tony Blair, avait précisé davantage encore le projet : pour arriver coûte que coûte à l’invasion de l’Irak malgré la seconde résolution de l’ONU l’en empêchant, le président des Etats-Unis avait élaboré un bon vieux coup de Golfe du Tonkin, version aérienne cette fois. Un U-2, peint aux couleurs de l’ONU (? ??) aurait été lancé au dessus de l’Irak, et se serait fait obligatoirement tiré dessus…(*5) donnant alors l’occasion d’intervenir. Une idée personnelle de W.Bush parait-il ! Il va sans dire que l’U-2 repeint en blanc aurait été préparé dans les ateliers de la CIA. Ces deux là étaient prêts à tous les mensonges pour arriver à leurs fins !! Blair ayant beau jeu aujourd’hui de minimiser l’entrée en guerre de l’Angleterre en affirmant par la voix de sa femme Cherie que ça s’est joué à 49-51% au sein du ministère ! Un Tony Blair qui avait reçu juste avant de prendre sa décision la visite de James Wosley, l’ancien patron de la CIA (de 1993 à 1995), dépêché sur place par Paul Wolfowitz, pour le convaincre. L’équipe de W.Bush n’était pas si sûr que cela de son allié préféré… Et Bush savait, dix jours avant l’attaque, que Saddam était dépourvu de toute arme chimlque ou nucléaire : des documents récemment ressortis le révèlent. Il savait ! Des documents qui révèlent par la même occasion que Blair a bien suivi Bush… comme un caniche. En 2005 ça avait déjà été dit, mais personne n’avait écouté.

GeorgeTenet, qui avait été convié à la réunion, interrogé sur les armes de destruction massives avait alors affirmé que le sujet était « un canard boiteux » : en résumé, Saddam Hussein n’en n’avait pas, très certainement, car la CIA n’avait pas réussi à prouver le contraire. Ce qui n’empêchera pas Colin Powell de clamer l’inverse deux mois après : menteurs, jusqu’au bout ! Un Tenet qui sera poussé à la démission le 3 juin 2004, aussitôt remplacé par un adjoint qui laissera sa place à Porter Goss, faucon parmi les faucons et vieux briscard des coups tordus : il était déjà dans celui de la Baie des Cochons ! A la fin du règne, les régimes se durcissent, on le sait. Tenet, écœuré, dira toute sa morgue dans un ouvrage, « At the Center of the Storm« , dans lequel il accusera surtout un homme : Dick Cheney de s’être servi comme de lui comme bouc émissaire dans l’affaire des armes de destruction massives. L’ouvrage lui rapportera quand même quatre millions de dollars…

Tenet avait pourtant appris, bien avant l’offensive, et de la bouche même du ministre de la défense irakienne, Naji Sabri, approché lui aussi par la CIA, que Saddam n’avait plus aucune arme nucléaire, et n’en n’avait jamais possédé non plus. En avril 2006, quatre ans plus tard, on en aura confirmation. Selon les services secrets français, qui avait eu vent de l’intermédiaire de Sabri vivant en France (et s’appelant « Murray ») Sabri avait reçu 100 000 dollars pour ses confidences dans un hôtel parisien (*6) . Les américains, comme les français et les anglais, savaient donc tous deux que Saddam était totalement démuni d’armes de destructions massives, selon une source crédible. On comprend mieux le discours de Dominique De Villepin… et encore moins l’attaque américaine ! Kofi Annan avait été lui aussi mis dans la confidence, et savait que Saddam ne mentait pas. Une fois l’Irak conquis, Sabri, qui n’avait pas non plus figuré sur le jeu de cartes des plus recherchés, ne fut jamais arrêté : on récompensait ainsi indirectement son entrevue de 2002. Il vit depuis tranquille au Proche-Orient, dans un lieu que la CIA ne veut pas divulguer… on comprend pourquoi. Avec Izzat Ibrahim al-Douri et Naji Sabri, on s’aperçoit que la CIA avait remonté loin dans l’organigramme des proches de Saddam, et que le premier, soi-disant toujours pourchassé, doit aujourd’hui connaître le même sort envieux que le second. Alors pourquoi donc officiellement continuer à le présenter comme l’organisateur de la résistance irakienne ? Pour servir de repoussoir pratique façon Ben Laden ?

Un projet de sabotage de voitures d’officiels irakiens se rendant en Jordanie avait été envisagé également, pour être rejeté car jugé « trop puéril ». Faire sauter des véhicules, depuis les attentats contres les proches de Salvador Allende, un travail fait pour la CIA ! Les troupes prévues, entraînées aux USA avaient été déposées en Jordanie, justement, et on ne voulait pas éveiller les soupçons. La totalité de l’opération avait été révélée tardivement en 2006 dans l’excellent livre de Michael Isikoff et David Corn, intitulé « Hubris« . Selon le livre encore, toute la Maison Blanche ne jurait aussi que par les écrits d’une lobbyste de la guerre contre Saddam, Laurie Mylroie, qui, par ses fausses informations, avait endoctriné jusqu’aux services secrets. Or, au début de sa carrière, la même avait fait dans l’apologie de l’œuvre de Saddam Hussein. A peine le Koweit envahi, elle affirmait tout l’inverse : la CIA avait remis à l’administration Bush un rapport préconisant de ne plus suivre ses avis, il n’avait pas été lu. Là encore, le service avait fait son travail consistant à fournir des notes sur des personnes dignes de foi ou non. Et encore une fois, ce rapport ne fut pas pris en compte. Bien au contraire, Paul Wolfowitz citait régulièrement des extraits d’articles de Mylroie (*7) , cette va-t-en-guerre extrémiste ! Tout se passait comme ci la CIA tournait à vide : elle avait beau émettre des avis, les politiques n’en faisaient qu’à leur tête. Pire, infiltrée par des hommes du président, la CIA produisit de plus des rapports n’allant plus que dans le sens présidentiel.

Au final, donc, quand ce n’était pas avec les mensonges débités par les faux militaires invités à la Fox, c’étaient les écrits de cette folle de Mylroie qui servait à appuyer leurs actions délirantes ! Une Fox vilipendée (enfin) par le nouveau pouvoir en place, qui y voit (enfin) une « aile supplémentaire » du parti républicain le plus réactionnaire ! Et tout cela pour rien, en ce qui concerne ce plan infernal de déstabilisation du régime irakien. Au final, en effet, le plan Anabasis fut arrêté à la dernière minute sur ordre du général Tommy Franks, à l’US Central Command de McDill. Ne laissant pas pour autant de répit à Saddam Hussein. Ce dernier, en 1990, à la suite d’une entrevue avec l’ambassadrice américaine April Glaspie avait cru comprendre que son invasion du Koweit ne verrait pas les Etats-Unis réagir. Il était tombé dans un beau piège, celui tendu par le père du Bush au pouvoir jusqu’en 2008 ! Cette fois, on irait inventer à l’ONU des allégations, celles de la détention d’armes destructrices pour pouvoir envahir le pays. Et comme peu de pays s’y opposeraient, dont la France, qui savait précisément elle aussi qu’il n’en avait pas mais ne pouvait indiquer sa source, la seconde chausse-trappe était en place. Anabasis n’avait pu lieu d’être, le piège du mensonge s’était refermé sur Saddam Hussein.

Selon Bob Woodward, qui s’y connaît, c’était donc bien la CIA qui avait manipulé tout le jeu pour la montée vers l’inéluctable invasion de l’Irak, en affirmant auprès des autorités que ses propres actions secrètes seraient quasi inefficaces, ou que l’inaction vis-à-vis de Saddam mettrait en grand danger son réseau d’informateurs, y compris les fameux « rockstars » !! ! Selon Woodward également, la relative amélioration de 2006 en Irak (« The Surge ») serait davantage due à des actions spéciales qu’aux renforts de troupe (in « La Guerre de l’intérieur : une histoire secrète de la Maison-Blanche, 2006-2008« ). Derrière la manipulation des informations en provenance de la CIA se profile également l’ombre de Karl Rove, autour duquel tournent tous les débats sur les failles de la CIA. Ce Machiavel raté avait accès à ces informations, et en a dispatché ou modifié comme bon lui semblait. En août 2007, pour protéger Bush des atteintes, Rove acceptait de démissionner. Sachant qu’on le surnommait « le cerveau de Bush« , on a une petite idée des derniers mois de ce dernier à la Maison Blanche… Rove n’a jamais révélé ses sources de la CIA. En partant, il limitait aussi les dégâts de ce côté là également. En démissionnant, il empêchait les enquêteurs de remonter plus haut au sein de la CIA, et de démasquer les liens entre la CIA et l’administration Bush. On a souvent dit que Rove avait été ce jour là le « fusible » de Bush, il conviendrait aussi de penser à ce qu’il ait pu être avant tout celui de la CIA.

Dès l’été 2002, Bush accordait 700 millions de dollars à l’armée pour se pré-positionner aux frontières de l’Irak… en présentant au Congrès une « rallonge » pour mener la guerre en Afghanistan ! Ce sont bien les faucons au sein de la CIA, emmenés par Cheney et Rove qui ont poussé à l’intervention en Irak, tous en sachant qu’il n’avait rien à voir avec Ben Laden et qu’il ne possédait aucune arme dangereuse ! Et dans ce théâtre malsain, la CIA n’a pas fait que de la figuration !

(1) « In the summer of 2002, Bush approved $700 million worth of « preparatory tasks » in the Persian Gulf region such as upgrading airfields, bases, fuel pipelines and munitions storage depots to accommodate a massive U.S. troop deployment. The Bush administration funded the projects from a supplemental appropriations bill for the war in Afghanistan and old appropriations, keeping Congress unaware of the reprogramming of money and the eventual cost. »

(2) « At the core of the plan was a classified training camp established in 2002 somewhere on the Nevada Test Site. Using a fleet of so-called rendition airplanes, the same ones used by the CIA to kidnap and transport terror suspects, dozens of former Iraqi soldiers were smuggled into the U.S. and then taken to the test site for special training. The Iraqis adopted a nickname — The Scorpions ».

(3) « On March 10 we got a report saying that the chemical weapons might have remained disassembled and that Saddam hadn’t yet ordered their re-assembly and he might lack warheads capable of effective dispersal of agents.” « Powell and I were both suspicious because there were no pictures of the mobile labs, » Wilkerson said. The drawings were constructed from Curveball’s accounts.

(4) « The German official declined but then offered a startlingly candid assessment, Drumheller recalled. « He said, ’I think the guy is a fabricator,’  » Drumheller said, recounting the conversation with the official, whom he declined to name. « He said : ’We also think he has psychological problems. We could never validate his reports.’

(5) « During a private two-hour meeting in the Oval Office on Jan. 31, 2003, he made clear to Prime Minister Tony Blair of Britain that he was determined to invade Iraq without the second resolution, or even if international arms inspectors failed to find unconventional weapons, said a confidential memo about the meeting written by Mr. Blair’s top foreign policy adviser and reviewed by The New York Times…. (…) Mr. Bush talked about several ways to provoke a confrontation, including a proposal to paint a United States surveillance plane in the colors of the United Nations in hopes of drawing fire… »The U.S. was thinking of flying U2 reconnaissance aircraft with fighter cover over Iraq, painted in U.N. colours, » the memo says, attributing the idea to Mr. Bush. « If Saddam fired on them, he would be in breach. »

(6) « The CIA came close to recruiting Saddam Hussein’s foreign minister, Naji Sabri, to be an American spy. Through a Lebanese journalist, Sabri passed word to the CIA’s station chief in Paris that Iraq had no active nuclear or WMD programs. But senior CIA and White House officials dismissed the intelligence and opposed the effort to recruit Sabri, fearing it would undercut the case for an invasion. The chief of the CIA’s Iraq Operations Group told the Paris station chief, « One of these days you’re going to get it. This is not about intelligence. This is about regime change. ».

(7) « An obscure academic, derided as a virtual crackpot by U.S. law enforcement and the intelligence community, greatly influenced top Bush administration officials, who adopted her farfetched theory that Saddam was the source of most of the terrorism in the world, including the 9/11 attacks. But, oddly, this researcher, Laurie Mylroie, had once been a Saddam apologist and had engaged in secret, back-door diplomacy aimed at brokering a peace accord between Israel and Iraq. After Saddam invaded Kuwait, Mylroie developed bizarre allegations about Saddam and terrorism. Her theories were debunked by the CIA and FBI, yet Deputy Defense Secretary Paul Wolfowitz embraced them, cited them in official meetings, and repeatedly pressed the agency and bureau to come up with evidence to substantiate Mylroie’s work. »

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Classé dans Six de l'Hexagone, Stéphane Bouleaux

De victor Jara à Guantanamo : la même CIA (38)

Et puis la CIA ne s’est pas seulement occupée de l’Amérique du Sud (sa priorité de toujours, tant les USA ont peur de la contagion « communiste » à leur porte), elle s’est aussi penchée sur l’Europe. Avec de grands moyens, dont le débauchage de personnalités, dont les plus notoires ici même ont été… un ministre de la défense française, à savoir Charles Hernu (qui avait une double casquette) ou François de Grossouvre (qui se « suicidera » en 1994, après avoir été un des fameux « Stay Behind »). De Grossouvre, entre autres, sera le premier en France à obtenir la licence pour fabriquer du Coca-Cola (jusqu’où va donc se nicher la CIA !). A ses obsèques, tout le monde remarquera la présence d’Amine Gemayel… on retombe sur notre épisode Carnaby... Grossouvre et bien d’autres. En Italie et en Belgique, la CIA a nettement penché vers le camp de l’extrême droite. Beaucoup ont vu dans le Gladio ou les Tueurs du Brabant la main de la CIA, et ce n’est pas à tort, l’histoire l’a démontré (et l’actualité en reparle). Le sujet continue à passionner. Tous utilisaient le fameux émetteur Harpoon, codé, pour communiquer avec la CIA . Mais aujourd’hui, c’est en Europe du Nord que je vous invite, dans un ex-satellite russe, la Lituanie. Ce qu’on vient tout juste d’y découvrir est tout simplement fort évocateur de ce que je vous raconte ici depuis quelques semaines. Peut-être bien aussi qu’avec ce seul bâtiment, on va retomber sur le soupçon que j’évoquais à propos de notre allumé notoire Jack Idema : à 40 km à peine de la capitale, Vilnius, et à quelques kilomètres à peine d’une base russe, on vient de découvrir en effet un centre de torture assez original, ma foi. Dans un pays qui a signé les conventions contre l’usage de la torture, ce qui devient encore plus intéressant. Mieux encore : la République de Lituanie est membre de l’Union européenne depuis le 1er mai 2004 : voilà qui conduit directement G.W. Bush comme responsable de tortures sur le sol de l’Union… ce qui n’est pas non plus sans intérêt : les tortures y ont eu lieu essentiellement en 2005. C’est peut-être bien de la Lituanie que viendra le déclic européen contre l’administration Bush, fort mise à mal en ce moment en Angleterre avec l’enquête Chilcot (*1). Blair a autant menti que Bush, et le MI6 autant torturé que la CIA. Et les deux ont tenté de faire disparaître les preuves de leurs exactions. Le cas de Binyam Mohamed est exemplaire en ce sens.a

Bizarrement, ce qui a permis de découvrir que cette ferme fort discrète se présentant extérieurement comme un banal centre équestre, ce n’est pas que les chevaux y étaient plutôt rares et les palefreniers inexistants. Non, ce sont la présence d’imposants véhicules 4×4 noirs, qui arrivaient toujours de nuit, qui ont éveillé les soupçons, la présence de chauffeurs noirs (en Lituanie c’est plutôt une rareté ! (*2) ), mais aussi et surtout équipement fort particulier, dénoncé par un électricien d’entretien, fort surpris par ce qu’il a découvert lors d’une intervention de routine : dans cette ferme, en effet, tout fonctionnait au 110 volts, alors que le pays entier est sous 220/230 comme en Europe (il n’y a que le Maghreb à être en 110, et Cuba, ou le Mexique (127 volts !) le Brésil en partie aussi encore, comme l’Arabie Saoudite- le détail est ici-). Or, ça, il n’y a que les américains pour le souhaiter. A croire que la gégène, chez eux, tourne sous ce voltage ! Ça, et l’incroyable construction proprement dite, avec une « maison dans une maison » comme l’ont constaté avec effarement les observateurs. Extérieurement, une ferme de briques, qui ne dépareille pas le paysage local, à l’intérieur, sous un mur double, une prison de béton, équipée de geôles étroites (*3) . Une façade véritable, un camouflage parfait, et la dernière des huit prisons européennes découvertes, après des années de suspicion. Les travaux importants et le ballet des bétonneuses qui avait précédé l’édification du centre avaient bien inquiété les riverains (*4) il y a quelques années, tant ils semblaient démesurés par rapport à l’édifice final. Mais le phénomène le plus bizarre est bien l’absence totale de plan cadastral : ce bâtiment, administrativement… n’existe pas (*5).

A côté, une ancienne base russe de bombardement, celle de Rūdininkai, à 22 k peine de Vilnius et à 16 seulement de la Biélorussie. Pas éloignée de l’aéroport de Vilnius où ont été vus à plusieurs reprises des avions bien connus des lecteurs d’Agoravox : le célèbre N8213G (vu ici aux Açores), ce bon vieux C-130 de Richmor Aviation (Prescott Support), venu le plus souvent de… Pologne, autre pays de torture, ou bien le non moins connu Gulfstream N379P, aperçu sur l’aéroport de Vilnius, comme sur le minuscule aéroport de Szymany, en Pologne, avec ces plaques de béton carrées comme piste, sur le modèle russe. Là, ou un dénommé Khalid Sheikh Mohammed semble être passé. Lors de son interrogatoire, je vous l’avais déjà dit, il avait entrevu une bouteille de Vodka auprès de ses tortionnaires, avec une étiquette marquée .PL comme adresse web (pour « Poland »). Rappelons qu’il avait subi jusqu’à huit fois par jour le supplice du waterboarding, ce qui en fait le recordman toutes catégories de ce genre de sport. Sheik Mohammed semble de robuste constitution, mais quand même. Pour construire la fausse ferme, les avions C-130 avaient acheminé d’Allemagne des éléments préfabriqués : on retombe sur le rôle de Kyle Foggo (voir épisode précédent ici), l’homme chargé d’édifier des prisons en Europe. En Europe, c’est la huitième et dernière révélée aujourd’hui, en août dernier seulement, celle qui manquait jusqu’ici.

Parmi les pays cités, on note la Roumanie, la Pologne, le Maroc, l’Afghanistan et la… Thaïlande. Où végète toujours depuis le 6 mars 2008 Viktor Bout… ancien transporteur zélé des américains. Un pays capable de construire une prison pour torturer au profit des américains a bien dû lui aussi lui montrer allégeance en succombant à sa demande fortuite d’arrestation. On saura peut être un jour ce que fichaient exactement ses avions de la British Gulf ou les Ilyushin 18 d’Air Bas en Irak : ils ont à coup sûr eux aussi transporté des prisonniers… vers la Thaïlande ! Bout en sait beaucoup trop sur les transferts d’armes de la CIA. Le 11 août dernier, la Thaïlande refusait de l’extrader vers les USA : lui évitant un procès trop embarrassant pour l’équipe de G.W.Bush, qui s’en est abondamment servi. L’homme en sait bien trop. Le retournement de l’associé de Bout, Andrew Smulian, citoyen anglais, par la CIA est la seule charge qui plane sur lui aujourd’hui. Elle demeure floue : ce serait pour avoir tenté d’armer les Farcs. L’homme a été arrêté à New-York le 12 mars 2008 : bizarrement, après l’arrestation de son associé : pour donner le change, très certainement ! Bout a surtout un ami encombrant : Issayas Afeworki, le président de l’Erythrée. Un Kim Jong II bis. Un homme qui vilipende la CIA de façon bien trop visible, dirons-nous. Son anti-américanisme est de façade, et ses poignées de main avec Rumsfeld en 2002 encore trop visibles. Viktor Bout sait tout cela… et c’est aussi pour ça qu’il reste en prison.

Si la présidente actuelle de la Lituanie, Dalia Grybauskaite, semble avoir été surprise par la découverte de cette prison dans son propre pays, il ne semble pas en être de même de son prédécesseur. Pour une raison simple : l’ancien président Lituanien, Valdas Adamkus (élu de justesse en 1998 avec 50.4% des voix et réélu par surprise en 2004), a vécu la plus grande partie de sa vie aux Etats-Unis, à Chicago, où le président Nixon l’avait nommé à la tête de l’Environmental Protection Agency, un des nouveaux fleurons de la CIA destiné à surveiller les américains eux-mêmes. En 2003 c’est cet organisme qui avait fait pression pour qu’on ne mesure surtout pas la qualité de l’air autour des vestiges du WTC : allez donc savoir pourquoi, personnellement j’ai bien ma petite idée (déjà que Guliani avait interdit les compteurs Geiger !). Elle s’était aussi emparée du dossier de l’Anthrax. Adamkus, américain davantage que Lituanien, n’a donc pas dû hésiter longtemps quand G.W. Bush lui a proposé de créer une prison sur son territoire, en échange de l’incorporation facilitée dans l’Otan. Cet échange de mauvais procédés ne fait aucun doute aujourd’hui (*6). La Lituanie, dans le passé avait déjà montré un comportement à part, il est vrai, de ses voisins : à peine trois mois après l’invasion allemande de juin 1941, 95% des juifs lituaniens avaient déjà été exterminés. Et pas par les allemands, qui n’en attendaient pas tant comme allégeance à un pouvoir fort qui semble depuis toujours séduire les Lituaniens. Un antisémitisme rampant réside toujours dans le pays. Ce qui n’avait pas eu l’air d’ennuyer Donald Rumsfeld, venu visiter le pays en 2005… au plus fort des interrogatoires.. mais la décision avait dû être prise bien avant, lors de la visite de G.W.Bush du 22 novembre 2002 (*7).

En Pologne, c’est sur l’ancienne base aérienne polonaise du temps des soviétiques que la prison se tenait. A Stare Kiejkuty, déjà utilisé pendant la guerre par les allemands pour y héberger leurs services secrets. A 12 miles d’un aéroport devenu civil en 1996 sous le nom de Mazury-Szczytno. Selon certains, dont Mariola Przewlocka, le responsable de l’aéroport, les vols provenaient d’Afghanistan, du Maroc, d’Uzbekistan et de Guantanamo Bay (*8) selon des plans aujourd’hui connus. (via Baneasa en Roumanie souvent, pour un arrêt essence). Les prisonniers étaient embarqués dans de grosses limousines noirs direction Stare Kiejkuty, où des polonais ou des… anglais du MI-6 questionnaient les arrivants. Comme appareils, on cite des Gulstream (Gulfstream N379P, le fameux « Guantanamo Bay Express » de chez Premier Executive Transport Services ou PETS) mais aussi le 737 bien connu, l’autre fameux N313P (*9). A ce stade aussi, l’Europe a donc fermé les yeux. Et c’est bien ça qui pose aussi question.

Le magazine télévisé US ABC News avait fait une très bonne enquête sur les détenus interrogés en Europe, notamment les douze principaux responsables répartis à Guantanamo ou dans les huit prisons (*10) européennes ou du Maghreb : la majeure partie avait transité par la Pologne en fait, et tous avaient subi des tortures, à l’étranger. Un en est mort, en Libye :
Abu Zubaydah : détenu en Thailande puis en Pologne. Il a été torturé, par John Kiriakou, qui a beaucoup servi à la CIA pour tenter de légitimer médiatiquement le waterboarding.

– Ibn Al-Shaykh al-Libi : Détenu en Pologne, en provenance du Pakistan et de l’Afghanistan. Renvoyé en Libye,il y a été torturé à mort.

-Abdul Rahim al-Sharqawi : (Riyadh the Facilitator) détenu en Pologne. Aurait été emmené ensuite à Ichemmimène, près du désert du Sahara en Mauritanie. Un autre épisode peu connu des « renditions ».

Abd al-Rahim al-Nashiri : détenu en Pologne, ramené à Guantanamo pour y être waterboardé.

-Ramzi Binalshibh (Ramzi Omar) : détenu en Pologne, arrêté à Karachi en 2002. Il s’était rendu chez Huffman Aviation pour y être pilote, mais n’avait pas pris de cours.

Mohammed Omar Abdel-Rahman (Asadullah) : détenu en Pologne : un égyptien, qui aurait commandé le camp d’entraînement de Darunta (Tora Bora). En 1993, il aurait été du premier attentat contre le WTC. Il a été arrêté en 2003.

Khalid Sheikh Mohammed : détenu en Pologne (voir article ici). Qui se souvenait parfaitement d’avoir vu de la neige sur les routes le conduisant à son centre de tortures (*11). Il serait arrivé en Pologne via la Roumanie (*12).

Waleed Mohammed bin Attash : détenu en Pologne, responsable de l’attaque en 2000 de l’USS Cole.
-Hambali (mouvance indonésienne) ou Encep Nurjaman, aussi connu sous le nom de Riduan Isamuddin, détenu aux Etats-Unis après l’avoir été en Jordanie.

Hassan Ghul : détenu en Pologne quelque temps, mais son cas reste une énigme. C’est un des « fantômes » détenus on ne sait où.

Ahmed Khalfan Ghailani : détenu en Pologne, responsable des attentats contre les ambassades US .

Abu Faraj al-Libbi (Dr. Tawfiq,) : le lybien détenu en Pologne après son arrestation en 2004 à Lahore, où i la été torturé par l’ISI, et ramené ensuite à Guantanamo.

Au total, on le voit, il ne reste que peu de responsables des attentats contre le WTC, à part l’incroyable Sheikh Mohammed, et son score de waterboarding. Mais aussi la révélation d’un partage des compétences entre la CIA et les autres services secrets, notamment le MI5 anglais, fort sur la sellette aujourd’hui avec l’enquête en cours et le cas de Binyam Mohamed, qui avait eu la présence d’esprit de noter les numéros des avions qui l’embarquaient. Et là encore, l’administration anglaise a réagi : en cherchant avant tout à supprimer les documents compromettants. Un remarquable document filmé fait le tour des prisonniers détenus à Guantanamo, torturés un peu partout dans le monde, il permet de se faire une idée du décalage de ce qu’ils sont, de ce qu’ils faisaient et des conditions de leur détention. Tous libérés sans aucune condamnation… et sans aucune compensation financière pour erreur de la personne. Le compte rendu de Moazzam Begg un anglais originaire de Birmingham, est un des plus représentatifs.

C’est le cas également de Lakhdar Boumediene, détenu huit ans comme membre groupe des dit des « six Algériens de Bosnie ». Incarcéré de force, sans preuve aucune. Le récit de ses tortures est assez sidérant. Lui, ce qui l’avait sidéré est de n’avoir jamais été interrogé sur ce pourquoi il avait été emmené à Guantanamo (*13) ! A Guantanamo, il était devenu… un simple numéro. Le matricule 10 005. Il n’était pas le seul dans ce cas. Un documentaire étonnant de l’ACLU, « Voices From Guantanamo » fait le point sur la question de façon fort explicite en interrogeant plusieurs accusés libérés sans aucune charge contre eux : sept années éloignés de leur famille, avec des enfants qui ne les reconnaissent pas. Comment a-t-on pu en arriver là ? Et à enfermer autant de personnes sans charges sérieuses à part pour une poignée ? A la liste des pays aux tortionnaires, il faut ajouter outre la Roumanie (*14) , et l’Ouzbékistan, où l’on torturait allègrement également : « les chargements de prisonniers atterrissaient sur l’aéroport international de Tachkent, pas à la base militaire Us, proche de l’aéroport. Les détenus provenant d’escales européennes étaient remis aux agents des services secrets ouzbeks qui les transportaient ensuite dans leur quartier général pour être soumis aux interrogatoires et torturés ». Ce pays, l’un des pire question traitement des détenus, et qui affiche ailleurs une toute autre image, et l’Italie donc, qui a servi à autre chose sur laquelle nous reviendrons : « Je suis certain que le gouvernement Berlusconi était au courant. Abou Omar a été enlevé par des agents de la CIA à Milan pour être transféré en Egypte. En tant que diplomate je sais comment fonctionnent ces liaisons dangereuses (en français dans le texte, ndt) entre gouvernements »

Et quand donc l’Union Européenne va-t-elle déposer plainte pour ce qui s’est passé dans certains de ses états ? Selon un ancien ambassadeur britannique en Ouzbékistan de 2002 à 2004, Craig Murray, auteur des deux extraits précédents, « l’Angleterre et l’Italie, les alliés « fidèles » de Bush, sont des gouvernements européens et membres de l’Union européenne au courant, sans aucun doute, des pratiques de torture appliquées dans les prisons secrètes de la CIA, qui fait partie du programme de « extrême renditions » (enlèvement de citoyens étrangers suspectés de terrorisme et leur transfert dans des pays tiers, NDR). Les gouvernements européens, officiellement, ont promis de fournir leurs données et informations à l’enquête sur les prisons secrètes lancée par l’UE. En fait, ils sont en train de faire tout ce qu’ils peuvent pour bloquer et entraver l’enquête qui révèlerait leur complicité dans les crimes de guerre commis par l’administration Bush ». Ce que dit l’ancien diplomate anglais se vérifie dans son propre pays en effet . Il y a trois ans que le premier ministre a avoué un soir à la télévision que c’était un désastre que cette entrée en guerre, mais on l’a déjà oublié et l’homme est parti depuis se dorer la pilule ailleurs. En effaçant soigneusement avant les fichiers compromettant.

Comme le signalait si justement « La République des lettres », avec ces vols de la CIA, nous avons assisté en fait à un remake de l’Operation Condor : voilà qui nous ramène aux épisodes du début de notre saga, et qui montre une nouvelle fois qu’il y bien filiation et continuité… à la CIA. « En plein XXIe siècle, presque vingt ans après la chute du mur de Berlin et la très hypothétique fin de la Guerre Froide, il est question de vols, de plus de mille vols clandestins et fantomatiques organisés dans le ciel nocturne de l’Europe par les services secrets d’une puissance étrangère, non-européenne, avec l’accord tacite et non-divulgué aux instances élues des autorités de plusieurs Etats européens. D’un très étrange ballet aérien, orchestré en flagrante contravention de la Convention sur l’aviation civile de Chicago, non seulement à des fins policières ou de sécurité, mais de moins en moins invraisemblablement à des fins d’enlèvement, de mise à discrétion, de séquestration et de torture de prisonniers non-identifiés, de « combattants ennemis » et autres « suspects terroristes », suivant la méthode dite des extraordinary renditions ».

Nous sommes bien d’accord avec ce rappel du mur de Berlin : rien n’a vraiment changé dans la conduite de la CIA, et nous conclurons par une phrase du même auteur : « mais une chose est sûre et certaine, tant que nous ne l’aurons pas attrapé en plein vol et exposé à la grande lumière du jour, le Condor passe, passera et repassera. » Car s’il y avait bien un but, à cette série, c’est bien celui-là : vous informer, pour être davantage méfiant, la prochaine fois ou le Condor reprendra son envol …

(1) « It would be so psychologically convenient if the committee declared the Iraq war to be a unique and terrible mistake, rather than one sorry, bungled chapter in a long saga involving Islamist networks, global terror, rogue states and the spread of WMD : a saga that began on September 11, 2001 and will go on for decades to come. Convenient, but a lie. There is no closure to be had. Whatever Chilcot decides, the Bad Stuff will not go away ».

(2) Les riverains sont loin d’être étonnés. « Il y avait un va-et-vient incessant de camions, de personnes qui parlaient anglais, des Noirs qui travaillaient, mais aucune production visible », raconte Ruta Boreikiene, une retraitée qui habite le secteur depuis 1980.

Très peu d’Africains vivent en Lituanie et la présence de ces hommes avait attiré l’attention des riverains.

(3) -According to ABC News, a concrete wall was built inside the stable block by English-speaking contractors to create a « building within a building » and on-site generators supplied electricity at 110 volts – used in the US – rather than Lithuania’s 230-volt supply.

-According to sources who saw the facility, the riding academy originally consisted of an indoor riding area with a red metallic roof, a stable and a cafe. The CIA built a thick concrete wall inside the riding area. Behind the wall, it built what one Lithuanian source called a « building within a building. »

-On a series of thick concrete pads, it installed what a source called « prefabricated pods » to house prisoners, each separated from the other by five or six feet. Each pod included a shower, a bed and a toilet. Separate cells were constructed for interrogations.

(4) « Vue la quantité de terre extraite et les tonnes de béton apportées, je pouvais en conclure que les travaux étaient importants. Je sais que les bétonneuses entraient sur le terrain, mais les conducteurs n ’étaient pas admis sur le site », raconte Viaceslavas, la quarantaine’.

(5) « Le cadastre ne mentionne aucune demande de permis de construire sur ce site depuis 2002, mais les riverains se souviennent de travaux d’envergure. »

(6) « According to a former intelligence official involved in the program, the former Soviet Bloc country agreed to host a prison because it wanted better relations with the U.S. Asked whether the Bush administration or the CIA offered incentives in return for allowing the prison, the official said, « We didn’t have to. » The official said, « They were happy to have our ear. »

(7) « I recently visited your beautiful city for important discussions with President Adamkus, Prime Minister Brazauskas, and other senior Lithuanian leaders. During our talks, we discussed a variety of security issues as well as the warm relationship between the United States and your nation. Vilnius provided a fine venue for our conversations ».

(8) « Jerry M., age 56 at the time, probably sat at the controls of the plane chartered by the CIA. The trained airplane and helicopter pilot had been hired by Aero Contractors, a company that transferred prisoners around the world for US intelligence agencies. According to documents from Eurocontrol, the European Organization for the Safety of Air Navigation, Jerry M. had taken off from Kabul at 8:51 a.m. that morning. Only hours after landing in Poland, at 7:16 p.m., he took off again, headed for Washington ».

(9) « There is now no doubt that the Gulfstream N379P landed at least five times at Szymany between February and July, 2003. Flight routes were manipulated and falsified for this purpose and, with the knowledge of the Polish government, the European aviation safety agency Eurocontrol was deliberately deceived. »

(10) « Former CIA officials tell ABC News that the prison in Lithuania was one of eight facilities the CIA set-up after 9/11 to detain and interrogate top al Qaeda operatives captured around the world. Thailand, Romania, Poland, Morocco, and Afghanistan have previously been identified as countries that housed secret prisons for the CIA ».

(11) « On arrival the transfer from the airport to the next place of detention took about one hour. I was transported sitting on the floor of a vehicle. I could see at one point that there was snow on the ground. Everybody was wearing black, with masks and army boots, like Planet-X people. »

(12) « The cars were seen traveling to and from the Stare Kiejkuty intelligence facility, where British and Polish intelligence officials say US agents conducted short-term interrogations before shuffling prisoners to other locations. »

(13) « Lorsque j’étais en Bosnie, on m’avait accusé de fomenter un attentat contre l’ambassade américaine de Sarajevo, mais à mon arrivée à Guantanamo, on ne m’a jamais plus posé de question à ce propos. Quand je leur demandais : « Mais pourquoi vous ne me posez pas la question sur les accusations de Bosnie-Herzégovine ? », on me répondait : « Tu oublies ces questions sur l’ambassade américaine, on ne vous a pas ramenés ici pour ça ».

(14) « The drop-off in Romania could not be explained, says Mr Marty, by any need to refuel. « The most likely hypothesis is that the purpose of this flight was to transport one or several detainees from Kabul to Romania, » he concludes. He adds that although he has not uncovered definitive evidence of a secret detention centre in Romania, his findings justify further investigation.Mr Marty also highlights a number of flights from Afghanistan to Poland at times when it is now known that terrorism suspects were being transferred from Kabul to unknown destinations. His suspicions were fuelled by the Polish authorities’ failure to cooperate : while EuroControl’s records detailed a series of flights into the country, including a number to the Szymany air base, north east of Warsaw, local officials claimed they had no records of the visits. Mr Marty describes that as « highly unusual », and adds : « Poland cannot be considered to be outside the rendition circuits simply because it has failed to furnish information corroborating my data from other sources. »


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Classé dans Six de l'Hexagone, Stéphane Bouleaux

Ma mobylette à l’oignon

Gaëtan Pelletier

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En remplacement, cette semaine, de François Marginean, présentement en Asie.

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Le cheval qui mange la pomme est pareil à l’arbre.
Ramtha, Enseignements choisis
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Dans l’Etat d’Oaxaca, au Sud du Mexique, des multinationales européennes tentent d’implanter de gigantesques fermes éoliennes pour compenser leurs émissions de CO2. Ces projets estampillés écologiques se font au détriment des populations locales et menacent leurs ressources alimentaires. Betina Cruz Velásquez raconte la résistance à ce néocolonialisme vert. Un exemple des dérives du business vert induit par le marché des droits à polluer. Quand le « développement vert » se transforme en néocolonianisme

Les athées qui prient

Il y a le vert Vert : ceux qui luttent contre les abus des gouvernements (gisements bitumineux, etc ), et le vert vert brun, ceux qui en profitent pour nous flibuster par la fibre sensible. Mais à grande échelle…

Et le vert recyclé par les gens au pouvoir comme carte de visite, comme si le X de votre vote était une clef dont ils veulent s’approprier pour entrer dans un parlement… Non prorogé…

Les intentions sont bonnes. En dernier recours, les athées se mettent à prier…

Je me méfie du Vert comme l’église de scientologie…

Les gazés de la bio : pas d’hélicoptère pour les restes  de table

On vient d’annoncer le projet biogaz de Rivière-du-Loup :

Selon M. Trépanier, des études démontrent que 50 % du contenu du bac à ordures est composé de matières organiques. Le mode de cueillette sera étendu à 11 des 12 municipalités de la MRC, excluant l’île Notre-Dame-des-Sept-Douleurs –  «où il aurait été compliqué de cueillir les déchets en hélicoptère», illustre M. Lagacé. C’est donc 33 000 citoyens qui seront mis à contribution. Une analyse des coûts par rapport aux bénéfices de différentes méthodes de collecte est en cours. Déchets transformés en biogaz, Marc Larouche

Je ne sais si vous avez cliqué sur le lien de ce Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, située sur  L’Île-Verte  où habitait le cinéaste Gilles Carle…

62 habitants.

Aller  chercher des restes de tables en hélicoptère…

C’est une idée… En plus, ça pourrait créer un emploi : un pilote. Peut-être deux… Un pilote qui sort de son hélicoptère pour ramasser des déchets, ça ne court pas les airs.

Je me prépare à me trafiquer  une mobylette qui roulera aux gaz-on, ( pelouse), aux pelures de pommes de terre, aux rognures d’oignons, aux cotons de rhubarbe, et peut-être aux feuilles mortes…

Fini les petites tomates-cerise pour madame…

Pour le projet de Rivière-du-Loup, j’ai consulté trois articles du même auteur :

22 novembre : 7.8$ millions

12 janvier :  15$ millions

On a sans doute oublié d’inclure un projet. Ou j’ai mal lu…

Ça  ne vous rappelle pas un certain  centre hospitalier de Montréal ?

Crédits carbone

Le gaz naturel produit pourra servir à chauffer des bâtiments, à produire de l’électricité ou comme carburant pour les véhicules. Dans ce dernier cas, il devra être purifié. «Nous allons nous servir avant tout le monde. Nous entendons convertir nos différents véhicules publics au biogaz», poursuit M. Lagacé. Plus encore, la conversion au biogaz permet d’aller chercher des crédits carbone, d’où un revenu supplémentaire.

Et on précise que cette « production » pourrait faire fonctionner l’usine F.F Soucy…. Qui doit réduire ses dépenses de 15$ millions…. Rationalisaton, F.F. Soucy

Si ce n’était que de rêver à Rivière-du-Loup, ça pourrait aller… Sauf que l’on est déjà en branlebas à Montréal pour ce genre d’opération : la course aux restes de tables, et tout ce qui peut se gazéifier.

J’ai bien dit « crédits carbone », car l’expression revient sans cesse. Ce concept vaporeux,  quasiment devenu une nouvelle pollution pour l’esprit. Et plus encore… À la fin, ce nouveau « moyen d’extorsion », est encore un revenu pour la classe spécialisée dans l’investissement et la bastonna de de paysans de sociétés peu ou mal organisées.

Si, ici, nous sommes bien organisés et avons le luxe de crier « Bingo » pour les niaises  opérations de charme, il n’en est pas de même dans les pays pauvres, ou le travailleur n’a pas de réel choix.

Manger pour demeurer en vie est différent de ne plus savoir que faire de ses restes de tables…

L’expérience mexicaine

Dans  Les hypothèques de tous les zapotèques , je faisais référence à cette nouvelle forme d’esclavage et de viol des terres, au nom du « vert » pour la nouvelle « devise » du crédit-carbone.

Ces entreprises, en collusion avec le gouvernement mexicain, manipulent les pauvres, pour la plupart des Indiens non-hispanophones de ma communauté, pour qu’ils signent des contrats de location. Ces contrats signifient en réalité l’abandon de leurs terres pour 30 ans. Un abandon compensé par des sommes ridiculement basses : les propriétaires Indiens reçoivent 150 pesos (environ huit euros) par hectare et par an. Ils reçoivent également un versement unique de 1000 pesos (environ 50 euros) quand ils signent le contrat. Ces accords ont été présentés à notre peuple en espagnol, alors que dans la plupart des cas les gens ne parlent que le zapotèque.

Ces accords sont également trompeurs parce que les firmes ont promis que les propriétaires pourraient continuer à cultiver leurs terres. Mais le contrat inclut comme restriction que les cultures de plus de deux mètres ne peuvent être plantées. Or le maïs peut pousser plus haut. De leur côté, les firmes n’ont aucune restriction dans leur utilisation de la terre. Les baux sont de 30 ans, mais ils peuvent être automatiquement renouvelés pour 30 années. Et seules les firmes peuvent mettre fin au contrat. Néocolonianisme et développement durable

Il s’agit d’éoliennes… Une autre « idée verte » ,  gérée par de grandes firmes qui n’ont pas de pays, mais bien des pauvres à soudoyer.

Et revoilà le roulement de tambour du CO2  et du crédit-carbone.

Ce projet s’intègre dans le marché des droits d’émissions de CO2 et peut générer des « crédits réduction certifiée des émissions ». Il bénéficiera ainsi de la vente de crédits carbone « d’une quantité totale de 600 000 tonnes d’émissions de CO2 évitées par an ».

Mais pas le droit de faire pousser des plantes de plus de deux mètres… Le maïs…

Les deux solitudes

Un peu insolite que dans certaines parties du monde on vend du gaz pour manger et que dans les sociétés « développées »  on vend ses restes de table pour faire du gaz. Et que les pauvres éparpillés finissent par se rejoindre dans un même et vaste projet : faire rouler une voiture,  une économie. Une économie pour qui?  Je vous laisse trouver la réponse…

J’ai comme l’impression que l’on cherche à calfeutrer le Titanic avec du chewing-gum. Car si quelqu’un s’attardait à nous fournir les vrais chiffres de la rentabilité finale de telles opérations, je crains que la balance du crédit et du débit se mette à trembler comme un épileptique sur une table d’acier.

Je ne suis pas économiste, mais si l’on calcule le développement accéléré de la Chine, de l’Inde, de l’Amérique latine, et de d’autres pays,  la faim de goûter aux excès – ajoutée aux malheurs des excès – indissociables  de la corruption encore plus boulimique,  de la complexité des relations État-Affaires, non seulement nous n’avons pas le temps de sortir du bois, mais il n’y aura plus de bois…

Mais moi je vais continuer de rouler en mobylette…

Comme dirait le gars de la voirie : ça ne tient pas  la route.

Ce que nous consommons n’est rien. C’est ce que l’on va consommer qui s’annonce  dangereux. Plus on alimentera la machine à consommer, plus elle aura besoin de …besoins. Mais, encore plus, de désirs…

Vivre de bateaux morts

Le plus bel exemple de recyclage est au Bengladesh.  Chittagong est le plus grand cimetière à bateaux au monde. Des pétroliers, des cargos et des paquebots aux dimensions titanesques sont échoués à perte de vue, d’un côté et de l’autre de la plage.

1$ par jour

Pas de gants, pas de souliers

1 blessé grave par jour

1 mort par semaine

Pourquoi cet exemple? Parce que cette industrie de l’acier est importante pour le pays.

On ne parle pas de restes de table… On brasse de grosses affaires :

Les informations ci-dessus sont basées sur les données de Fairplay weekly sales.
Fairplay signale que 469 navires ont étés vendus pour la casse entre le 1er mai 2001 et le 1er mai 2002. Ils ont été vendus pour un montant total de 936 millions de dollars. Les compagnies maritimes ont reçu un prix moyen de 2 millions de dollars par bateau vendu pour la casse. Le prix le plus bas payé pour un navire vendu pour la casse répertorié par Fairplay est de 0,15 million de dollars, le plus haut s’élève à 10,99 millions de dollars.

Fairplay ne couvre pas toutes les affaires de mise à la casse. Les ventes à la Turquie ne sont pour ainsi dire pas répertoriées. En plus des 80 vaisseaux vendus au Bangladesh (d’après Fairplay) 49 autres ont trouvé leur chemin vers ces plages (d’après les informations de l’association des casseurs du Bangladesh.). Le montant réel est donc probablement très supérieur à 936 millions de dollars et beaucoup plus élevé qu’un million de dollars. Greenpeace

On achète, on démantèle. Mais les coûts sociaux ne sont pas inventoriés – surtout à long terme – dans ces opérations. L’organisation, hélas!,  n’a aucune réglementation, n’offre aucuns avantages sociaux.

Pour nous : les restes de table

Pour le reste : les nègres  a- colores  couleur   de la mondialisation s’en occuperont.

Le poivre de Cayenne  rose

On peut bien nous jeter du « vert » aux yeux, mais dans une économie basée sur la « croissance ( limitless) », ce mouvement vert  ne sert  que trop souvent  à créer des Lazare et des clones de Lazare.  Voilà une file d’aveugles qui vous montrent le chemin de la réussite…

Au bout de la chaîne, le produit final se confond parfois à la victime.

Ce qui me rappelle la période pendant laquelle, enfant, j’ai passé un hiver en Abitibi dans un camp de bûcherons. Mon père était cuisinier. Après  chaque repas, il lançait les restes de table sur la neige à – 15 degrés.   Il en sortait un fumet étrange et quelques vapeurs qui dansaient dans l’air pour nourrir le cochon.

Je me suis longtemps demandé où était passé le cochon. Je dois me promener avec quelques atomes résiduels  de cochons de l’Abitibi depuis…

J’ai une grande méfiance envers les  cuisiniers de la mondialisation.

Plusieurs études sur les éoliennes[65] montrent que le nombre d’oiseaux tués par les éoliennes est négligeable par rapport au nombre qui meurt en raison d’autres activités humaines. Par exemple, au Royaume-Uni, où il y a quelques centaines d’éoliennes, il y a environ chaque année un oiseau tué par une éolienne et 10 millions par les voitures.

Wiki, Énergie Éolienne

Tiens! On fait des rapports en s’intéressant aux oiseaux.

Pas d’humains  en vue. Rien que des oiseaux…

Mais si les humains volaient, on continuerait de planter des éoliennes, consciencieux de compter les victimes.

Mais comme le dit la réplique d’un film : « Faut pas pleurer! ».

Non. Dans trois ans je roulerai à mobylette mue à l’oignon…

Politicien, déguisé par humilité, livrant ses subventions

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Classé dans Actualité, Gaëtan Pelletier