Archives quotidiennes : 14 février 2010

De Victor Jara à Guantanamo : la même CIA (49)

Le grand grief fait à la CIA ces dernières années est celui de la faillite de la traque de Ben Laden. Or, à ce propos, un individu détient l’explication depuis huit ans maintenant. Dans cette saga, au milieu des cow-boys du type Philip Sessarego ou Jack Idema, mercenaires manipulés et non membres de la CIA, un homme en effet émerge : Gary Berntsen, dont l’appartenance à l’organisation de renseignement est indubitable. Et un homme qui ne raconte pas le même discours, justement, que les pantins dressés à dire la même chose que l’administration Bush. La crédibilité de Berntsen ne fait aucun doute, et ce qu’il raconte résume toute l’affaire depuis décembre 2001. La CIA, depuis le 11 septembre, a exercé l’essentiel de ses efforts à traquer un fantôme, celui de Ben Laden, qu’elle aurait très bien pu arrêter dès 2001, lors de sa fuite de Tora Bora. Pourquoi ne l’a-t-elle pas fait, c’est bien là tout le nœud du problème. Quel intérêt à maintenir le mythe d’un Ben Laden dirigeant le monde par bouts de papiers, privé de téléphone repérable par satellite ou Awacs selon la légende entretenue ? A quoi donc était destinée l’opération Jailbraker (les opérations, il y en a eu cinq consécutives) destinée à le capturer exactement, et quelle est la part de responsabilité de Cofer Black dans son échec ? Berntsen a un avis avisé sur le sujet, et je vous propose d’en découvrir le détail.

Tout repose en effet, à propos de Ben Laden, sur les capacités qu’avaient les services de renseignement à retrouver sa trace. Or, il est de notoriété publique aujourd’hui qu’à Tora Bora où se cachait le fugitif le plus recherché au monde (*1), il s’est bien passé d’étranges choses. On a failli l’attraper, mais failli seulement. Je vous avais même montré les clichés des recherches menées quelques temps après par des médecins légistes au cimetière jouxtant Tora Bora (il y a trois clichés en bas de cet article sur le sujet). On y avait prélevé des doigts, parait-il, sur des cadavres. Mort ou pas, Ben Laden n’était plus là en tout cas, c’était la seule constatation à faire. L’homme avait échappé à l’armée la plus puissante du monde, et aux meilleurs services de renseignement : c’était assez incompréhensible.

Selon le rapport Kerry, un document indispensable désormais, paru il y quelques semaines seulement (le 30 novembre 2009) lorsque les forces spéciales se sont approchées de Ben Laden, à Tora Bora, elles ont contacté deux personnes sur place, près de Jalalabad (*2). Haji Hazarat Ali, un chef de guerre présenté comme un despote local, ayant combattu fort jeune les soviétiques avant de rejoindre les talibans. Et de devenir lui aussi trafiquant de drogue. « Aujourd’hui, Hazrat Ali est redevenu un baron de la drogue grâce à la mansuétude des Etats-Unis, dont les soldats sont stationnés sur l’aéroport de Djalâlâbâd. Selon Françoise Chipeaux, ses diverses activités de contrebande (drogue et bois notamment) lui rapportent 60 000 € par jour » indique le Monde du 11 septembre 2003.

Le second était un autre trafiquant de drogue connu, Haji Zaman Ghamsharik, qui s’était lui exilé en France à l’arrivée des talibans, selon les ordres reçus par la CIA avec laquelle il travaillait déjà. Les deux réunissaient environ 2000 mercenaires locaux… mais ne travaillaient pas ensemble, et visiblement passaient leur temps à annoncer la présence de Ben Laden à tel ou tel endroit contre rétribution. Un système lucratif, mais qui a enlisé la traque pendant des mois. A force, les américains les ont laissé tomber tous deux : aucun n’était en fait fiable. Ils recevront cependant 4 millions de dollars pour Hazrat Ali et 2 pour Ghamsharik , nous affirme aujourd’hui la BBC. En pure perte ! (*3)

D’où provenait la certitude de la présence de Ben Laden à cet endroit ? Des prisonniers de Guantanamo, dont Awal Gul, qui s’était entraîné à l »usage des missiles Stinger US, dirigeant 10 ans de la base arrière de Jalalabad, celui qui contrôlait de fait la route désertique entre Jalalabad et Tora Bora dans les montagnes du Spinghar. Grâce à 250 hommes, appelés la « Taliban Unit Four« par les américains. Une opinion corroborée par son adjoint soudanais, Haji Jamal, qui se chargeait du ravitaillement de Ben Laden. Selon eux, une réunion s’était tenue à la mi-novembre 2001 à Jalalabad avec Ben Laden, Awal Gul et Younus Khalis (ici en 1985) et son fils Mujahid, l’ancien directeur de l’Islamic institute, siège officiel des talibans. Un ancien allié des USA pendant la guerre contre les soviétiques. On possède un superbe cliché de Younus Khalis, reconnaissable à sa barbe rousse, avec Ronald Reagan montrant que pendant longtemps il a été l’allié du système. Pris à la Maison Blanche elle-même ! Les 12 et 13 novembre, ce sont les membres de la famille Khalis qui auraient organisé la première fuite de Ben Laden vers Tora Bora. Selon l’intelligence US, 100 000 dollars auraient été versés par Ben Laden pour son « déménagement » et sa sécurité : pour l’apprendre il fallait des fuites, prouvant que la famille Khalis était toujours en contact direct avec l’organisation. Selon Peter Bergen, le dernier américain à avoir interrogé Ben Laden, ce dernier avait avec lui entre 1 000 et 1 500 soldats ou gardes du corps avec lui. Selon le yéménite Ayman Saeed Abdullah Batarfi, ils n’auraient été que 200, pas plus.

On peut raisonnablement penser que le moindre des satellites a dû voir ce mouvement de troupes, petite ou importante, même de nuit… une opinion confirmée par l’ambassadeur Crumpton, qui fera un rapport détaillé, images satellites à l’appui, sur l’arrivée de Ben Laden à Tora Bora à la Maison Blanche. Selon l’auteur Peter Suskind, lors de l’entretien, Bush aurait demandé  » peut-on avoir confiance dans les troupes afghanes sur place » ? Et Crumpton lui aurait répondu « en aucun cas, Mr le président, en aucun cas » (*4). Selon Suskind toujours, derrière eux se tenait un Dick Cheney étrangement silencieux, qui ne posera aucune question à Crumpton. Quand CNN fera en 2006 une émission sur la traque de Ben Laden... elle omettra de préciser que les USA avaient refusé d’envoyer davantage de troupes pour le capturer…. la propagande Bushienne avait alors fait son travail de sape.

Il n’y a donc que le général Tommy Franks, alors, pour ne pas savoir où se cache Ben Laden ! Alors que son plus proche adjoint, le Général DeLong, est persuadé de savoir où (*5) ! A peine arrivé sur place en décembre, les hommes de Gary Berntsen, très bien renseignés par la CIA, qui sait où se cache le fugitif, convergent tout de suite vers Tora Bora. Mais atterrissent à Kandahar d’abord, à la surprise générale. Pourquoi, nul ne le sait à ce jour. En demandant cependant le maximum d’hommes disponibles, à Kaboul, au Major Général Dell Dailey, le commandant des forces spéciales en Afghanistan à ce moment-là. Berntsen a reçu l’ordre de sa hiérarchie à la CIA (Cofer Black) de supprimer Ben Laden, et de ne pas même chercher à le capturer. Selon lui, c’est plutôt Haji Zaman Ghamsharik qui trahira leur confiance en laissant échapper Ben Laden entre deux bombardements intensifs, pendant un cessez-le-feu négocié par Ghamsharik en personne. Selon la BBC, c’est fort récent, Ghamsharik était aussi un agent du MI6, payé également par les anglais, ce qui peut s’entendre, l’homme ayant séjourné en France dans les années qui avaient précédées.

Selon le rapport Kerry, c’est bien Haji Zaman Ghamsharik en effet qui aurait laissé entendre un faux cessez-le-feu pendant lequel Ben Laden se serait échappé. Un appel radio datant du 11 décembre de Ben Laden aurait été intercepté par Ghamsharik donnant l’ordre à ses hommes de se rendre… un appel indiqué avoir été entendu également par Dalton Fury (un pseudo d’un responsable des forces spéciales), un autre homme de l’ombre interviewé par 60 minutes. Deux jours avant, les américains avaient lancé une des dernières Daisy Cutter qui leur restait au dessus de Tora Bora… enfin, juste à côté. L’explosion avait été abondamment filmée, et avait fait à vrai dire dans le démonstratif. Des mines Gator avaient été prévues mais ne furent pas utilisées. Or elles auraient été bien plus efficaces pour empêcher Ben Laden de s’échapper (*6) ! Quelque chose cloche dans le scénario, et dans l’attitude de Ghamsharik…

Car je vous ai déjà dit ici comment les bombardiers américains avaient signalé qu’ils ne bombarderaient pas durant la période : en traçant des huit dans le ciel au lieu de leurs ronds habituels, Ils indiqueraient la reprise des bombardements. Alors que les commandos de Berntsen ne demandent qu’ à se mettre en mouvement pour saisir Ben Laden.. le huit va apparaître dans le ciel, et Franks téléphoner juste avant à Berntsen pour lui dire d’annuler l’opération : l’ordre vient de Donald Rumsfeld en personne, via Cofer Black. Selon la BBC, c’est une révélation du jour, l’ensemble des opérations de Tora Bora était aussi supervisée par le chef des opérations de la CIA en afghanistan… or la BBC, sans hésiter, le désigne comme étant l’ambassadeur itinérant en Afghanistan Hank Crumpton ! Je vous ai toujours dit ici que les ambassadeurs US ne servent qu’à cela ! Encore une fois, comme en Albanie avec le dépôt d’armes de Gerdec où se servait le jeune Diveroli, et où l’ambassadeur avait été pris la main dans le sac, ça se confirme ! « Ambassadeur de la mort », titre à son propos un blog, en fournissant un très intéressant cliché qui ouvre ce dossier : celle du fameux Crumpton… posant dans une tenue plus décontracté que le costume habituel d’ambassadeur devant un superbe Mil-Mi8, un de ces fameux hélicoptères servant aux opérations douteuses… visiblement dénué de toute marque de reconnaissance. L’appareil qui venait de débarquer de Russie en décembre 2001… et dont je vous avais parlé ici-même en détail. Qu’est-il allé exactement faire à bord de cet appareil discret s’il en est ? Apporter les habituels dollars ? Et repartir avec l’opium ?

Un mensonge est en marche donc. Quelqu’un n’a pas voulu qu’on se saisisse de Ben Laden à ce moment là. Le sachant condamné médicalement, peut-être, ou pouvant aider la campagne électorale de 2004 s’il était encore vivant. Et c’est justement à quoi va s’occuper le général Tommy Franks, justement ! Le 14 juillet 2004, en pleine campagne électorale, en effet une fuite du New-York-Times risque d’embarrasser G.W. Bush. Elle affirme qu’un prisonnier de Guantanamo a vu partir en catimini Ben Laden de Tora Bora : c’est bien entendu Awal Gul qui le dit. Et ses précisions sont telles qu’il est estimé fort crédible. L’effet risque d’être désastreux pour Bush… si on apprend qu’on a sciemment laissé partir Ben Laden, alors que depuis trois ans, les américains en mangent, du Ben Laden, matin, midi et soir, et que leur bon président a même affirmé devant les caméras le ramener « mort ou vif’. C’est donc Tommy Franks qui est envoyé au créneau, pour débiter un énorme mensonge de plus. « Nous ne savions pas si Mr Ben Laden était oui ou non à Tora Bora en décembre 2001. Selon certaines sources de renseignements, il était indiqué qu’il était au Pakistan à ce moment là », énonce sans broncher le général fantôche, toujours aux ordres de ses anciens supérieurs (il a à ce moment là quitté l’armée pour faire campagne pour G.W.Bush). L’honneur du président est sauf, et personne n’aura connaissance de l’ordre reçu par Berntsen de ne pas intervenir. Un ordre venu via Cofer Black, le responsable de l’opération appelée JailBraker, qui consistait carrément à assassiner Ben Laden à Tora Bora.

Crumpton a joué bien d’autres rôles (*7 ) : au sein de la commission du 11 septembre, c’est lui le fameux « Mr Henry » qui pressait tant parait-il le gouvernement d’intervenir en Afghanistan avant que ce ne se produise le 11 septembre ! incroyable aveu du Washington Post du 12 septembre 2005 ! L’homme qui aurait « traqué » Ben Laden à Tora Bora (et le laisser fuir !) aurait été celui dont les rapports alarmants n’auraient pas été écoutés ? Quelque chose cloche là ! L’homme aurait joint la CIA dès 1981, un « vieux rêve d’enfant accompli » selon lui, et aurait plongé très vite en 1988 dans le contre-terrorisme en étudiant les attaques contre les ambassades US cette année-là, aurait donc découvert très vite à qui il avait affaire… et l’aurait laissé filé lui aussi ?

Dans un bon nombre d’articles, il était celui qui montrait la stratégie à suivre pour capturer Ben Laden, souvent de façon assez directive, sur et certain de l’attraper un jour. A chaque fois en présence de G.W. Bush et de l’inévitable Dick Cheney. Qui a bien pu prévenir Rumsfeld et Cofer Black que Ben Laden, qui était sur le point d’être rejoint, ne devait pas être arrêté ou tué ? On sait que c’est Cofer Black en personne qui avait poussé à l’assassinat ciblé, comme une rodomontade. Qui a fait d’un agent de la CIA faisant des rapports de la plus haute importance question sécurité, au président des Etats-Unis, son véritable jouet ? En lui laissant dire tout ce qu’il pouvait savoir sur la position du fugitif le plus recherché au monde ?

Personnellement je ne me pose plus trop de questions sur celui qui alimentait ou induisait en erreur la CIA dans ce pays, ou qui la manipulait ouvertement. On peut reprendre le problème par n’importe quel bout, on retombe toujours sur le même. Celui qui a utilisé les dires d’un prisonnier devenu fou à force de tortures pour arriver à ses fins . Le cas d’Abu Zubaydah est très significatif de la duplicité de Dick Cheney, prêt à tout pour arriver à ses fins : présenté comme un « top leader » d’Al-Quaida, ce n’était qu’un pâle lampiste, affirme Suskind. Rendu complètement fou, de surcroît. C’est aussi semble-t-il l’avis de Michael Scheuer, chef à la CIA de 1995 à 1999 et qui parle d’un vice-président « invisible », mais venant très régulièrement glaner des informations au sein de la CIA. Pour en faire quoi, sinon à sa guise, avec les éléments de la CIA qui lui étaient restés fidèles ? Qui a tiré les (grosses) ficelles à Tora Bora ? Qui a mené tout le monde en bateau en plein désert ? Un seul nom vient sur les lèvres. celui de Dick Cheney.

(1) « In the concluding passage assessing the battle of Tora Bora, the historians from the Special Operations Command wrote : ‘‘What has since been determined with reasonable certainty was that UBL was indeed at Tora Bora in December 2001. All source reporting cor- roborated his presence on several days from 9-14 December. The fact that SOF (special operations forces) came as close to capture or killing UBL as U.S. forces have to date makes Tora Bora a con- troversial fight. Given the commitment of fewer than 100 American personnel, U.S. forces provide unable to block egress routes from Tora Bora south into Pakistan, the route that UBL most likely took.’’

(2) « In the aftermath of bin Laden’s escape, there were accusations that militiamen working for the two warlords hired by the CIA to get him had helped the Al Qaeda leader cross into Pakistan. Mi- chael Scheuer, who spent 15 years working on Afghanistan at the CIA and at one point headed the agency’s bin Laden task force, was sharply critical of the war plan from the start because of its reliance on Afghan allies of dubious loyalty. ‘‘Everyone who was cognizant of how Afghan operations worked would have told Mr. Tenet that he was nuts,’’ Scheuer said later. ‘‘And as it turned out, he was. … The people we bought, the people Mr. Tenet said we would own, let Osama bin Laden escape from Tora Bora in eastern Afghanistan into Pakistan.’’

 » Military and intelligence officers at Tora Bora have provided ample evidence that bin Laden was there. Al Qaeda detainees have maintained that he was there. And the Pentagon’s own summary of evidence in the case against a former senior jihadi commander at Guantanamo Bay concluded the detainee helped bin Laden es- cape. But the most authoritative and definitive unclassified govern- ment document on bin Laden’s location in December 2001 is the of- ficial history of the United States Special Operations Command. »

(3) « Bin Laden himself later acknowledged that he was at Tora Bora, boasting about how he and Zawahiri survived the heavy bombing along with 300 fighters before escaping. ‘‘The bombardment was round-the-clock and the warplanes continued to fly over us day and night,’’ he said in an audio tape released on February 11, 2003. ‘‘Planes poured their lava on us, particularly after accomplishing their main missions in Afghanistan.’’

(4) « In the aftermath of bin Laden’s escape, there were accusations that militiamen working for the two warlords hired by the CIA to get him had helped the Al Qaeda leader cross into Pakistan. Mi- chael Scheuer, who spent 15 years working on Afghanistan at the CIA and at one point headed the agency’s bin Laden task force, was sharply critical of the war plan from the start because of its reliance on Afghan allies of dubious loyalty. ‘‘Everyone who was cognizant of how Afghan operations worked would have told Mr. Tenet that he was nuts,’’ Scheuer said later. ‘‘And as it turned out, he was. … The people we bought, the people Mr. Tenet said we would own, let Osama bin Laden escape from Tora Bora in eastern Afghanistan into Pakistan.’’

(5 ) « Franks’ second-in-command during the war, General DeLong, was convinced that bin Laden was at Tora Bora. In his memoir, In- side CentCom, DeLong described the massive, three-week bombing campaign aimed at killing Al Qaeda fighters in their caves at Tora Bora. ‘‘We were hot on Osama bin Laden’s trail,’’ he wrote. ‘‘He was definitely there when we hit the caves. Every day during the bomb- ing, Rumsfeld asked me, ‘Did we get him ? Did we get him ?’ I would have to answer that we didn’t know.’’ The retired general said that intelligence suggested bin Laden had been wounded during the bombings before he escaped to Pakistan, a conclusion reached by numerous journalists, too (…) DeLong amplified the reasons for not sending American troops after bin Laden. ‘‘The real reason we didn’t go in with U.S. troops was that we hadn’t had the election yet,’’ he said in the staff inter- view, a reference to the installation of Hamid Karzai as the interim leader of Afghanistan. ‘‘We didn’t want to have U.S. forces fighting before Karzai was in power. We wanted to create a stable country and that was more important than going after bin Laden at the time.’’

(6) « In his memoir, At the Center of the Storm, former CIA Director Tenet said it was evident from the start that aerial bombing would not be enough to get bin Laden at Tora Bora. Troops needed to be in the caves themselves, he wrote, but the Afghan militiamen were ‘‘distinctly reluctant’’ to put themselves in harm’s way and there were not enough Americans on the scene. He said that senior CIA officials lobbied hard for inserting U.S. troops. Henry Crumpton, the head of special operations for the CIA’s counterterrorism oper- ation and chief of its Afghan strategy, made direct requests to Franks. Crumpton had told him that the back door to Pakistan was open and urged Franks to move more than 1,000 Marines who had set up a base near Kandahar to Tora Bora to block escape routes. But the CentCom commander rejected the idea, saying it would take weeks to get a large enough U.S. contingent on the scene and bin Laden might disappear in the meantime. »

(*7) « He is the mysterious « Henry » in the Sept. 11 commission report, which notes he persistently pressed the CIA to do more in Afghanistan before Osama bin Laden’s terrorist spectaculars. Two key proposals to track al Qaeda were turned down. »

le document indispensable, dont je recommande fortement la lecture est ici :

http://foreign.senate.gov/imo/media…

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Classé dans Six de l'Hexagone, Stéphane Bouleaux

Yes, we can’t (3)

Yan Barcelo, 13 février 2010

Je poursuis cette semaine avec les changements législatifs, réglementaires et structuraux qu’il serait nécessaire d’effectuer, mais cette fois à l’échelle internationale d’un nouveau régime de taux de change, pour s’assurer qu’une crise financière et économique comme celle qu’on a connue ne se reproduise pas.

Abolir l’argent fiduciaire à réserves fractionnaires pour rétablir une monnaie de crédit réel – C’est une telle idée que proposait Minarchiste en commentaire à mon article d’il y a deux semaines, et c’est ce que d’autres intervenants proposent également ailleurs. Il est certain que le régime virtuel qui prévaut partout dans le monde, et tout particulièrement aux États-Unis avec la Réserve Fédérale, est à la source de l’inflation systématique des actifs financiers et de toutes les bulles financières auxquelles on a assisté aux Etats-Unis depuis 1987.

Le champion sans conteste de cette exubérance irrationnelle est Alan Greenspan. En adoptant une politique systématique de bas taux d’intérêt, ce tristement célèbre banquier a noyé de liquidités les marchés pendant plus de 20 ans, liquidités qui ont servi à alimenter une bulle spéculative après l’autre. En rétablissant une monnaie de crédit national (dont je n’ai toutefois pas étudié la mécanique d’opération, je dois admettre), il est certain qu’on enlèverait la vapeur monétaire virtuelle qui nourrit les bulles. Ces bulles qui, depuis 20 ans, se multiplient de façon systématique et cyclique. Dans un article du Atlantic Monthly, l’économiste Eric Jansen parlait de notre régime économique prévalent comme d’une bubble economy.

Toutefois, je juge que l’implantation de régimes monétaires d’étalon s’avérerait insuffisante à une échelle uniquement nationale. Une mesure qui pourrait et devrait à mon idée prendre le dessus – servant du coup à discipliner la tendance des banques centrales de chaque pays à imprimer de l’argent – serait l’instauration d’un nouvel ordre monétaire mondial, comme on l’a fait à la conférence de Bretton Woods en 1944…

Abolir le régime de taux de changes flottants qui règne à l’international et le remplacer par un régime de taux à la fois fixes et flexibles. – Voici quelques signes éclatants du désordre monétaire actuel. Les flux monétaires de la planète s’élèvent quotidiennement à plus de 2000 milliards $US. Or, la valeur de tous les échanges commerciaux dans une année atteint environ 2500 milliards $US. C’est dire que la part strictement financière des flux monétaires, essentiellement liés à la spéculation, est plus de 300 fois supérieure aux flux liés aux mouvements de l’économie réelle.

Une étude de 2007 d’Alan Auerbach, professeur d’économie de l’Université de Californie à Berkeley, a trouvé qu’en 1983, les entreprises financières ne représentaient que 5% de tous les revenus de taxation corporatif aux Etats-Unis. À partir de 1991, ils en accaparaient environ 25%.

En ces temps de volatilité monétaire extrême, la moindre PME qui fait des affaires à l’international est obligée de se protéger à l’aide de contrats à terme et d’options sur les changes. Pour plusieurs, il s’agit d’une activité particulièrement coûteuse. Il suffit de penser au responsable financier qui a acheté des contrats à l’été 2008, quand le cours du dollar canadien était à 1,10$ et qui a dû honorer ses contrats à la fin d’octobre quand le dollar était tombé, après seulement trois mois, à 0,84$.

Un système à taux de change stable et flexible éliminerait d’un coup les jeux financiers les plus populaires du casino financier global qui expliquent ces flux monétaires démesurés. Plus de carry trade, plus de montages sophistiqués de dérivés qui arbitragent des écarts d’indices partout sur la planète, plus d’incalculables contrats à terme sur les changes.

Pendant toute la décennie 1950, l’échange entre le dollar canadien et le dollar américain a été remarquablement stable, légèrement au-dessus de la parité. Il l’a été encore plus dans les années 1960, légèrement sous la parité. Ce fut une époque de prospérité économique jamais égalée depuis pendant laquelle les entreprises pouvaient planifier des projets d’envergure sans craindre de voir leurs marges détruites par un brusque mouvement de change.

Mais à partir de 1971, quand les Américains ont brisé le lien du dollar américain à l’étalon-or, les rapports entre les deux monnaies ont commencé à ressembler à des montagnes russes. Aujourd’hui, cette volatilité est plus extrême que jamais. Et les crises financières se multiplient à un rythme accéléré, tant aux Etats-Unis que partout ailleurs (crise du peso mexicain, crise asiatique, bulle techno de 2000, bulle immobilière; bientôt, bulle des infrastructures et des crédits de carbone.)

Le problème fondamental, dit Wilhelm Henkel, professeur d’économie à l’Université de Frankfurt, c’est que nous traitons l’argent comme s’il était un denrée égale à ce qu’il mesure. Laisser les forces du marché déterminer la valeur de l’argent, c’est comme si on les laissait décider de la longueur du mètre. Un jour il mesurerait 925 mm, deux mois plus tard, 1012 mm. À cause de cette idiotie, nous pouvons voir le problème que nous avons aujourd’hui, constate l’économiste.

Il est certain qu’on ne peut pas revenir au vieil étalon-or, qui a pourtant assuré une stabilité économique jamais égalée tout au long du 19e siècle jusqu’à la première guerre mondiale. Il ne faut pas non plus apparier les monnaies à une monnaie nationale forte, notamment celle des États-Unis. Nous devons dénationaliser la monnaie maîtresse; c’est la grande leçon de l’étalon-or. Il n’est pas non plus question de créer une monnaie mondiale unique – ce qui est encore utopique à ce moment.

Que faire alors? Wilhelm Henkel propose de remettre à l’honneur l’idée des droits spéciaux de tirage, ou le Bancor, soumise par l’économiste John Maynard Keynes à la conférence de Bretton Woods. Il s’agirait d’une monnaie rationnelle, émise par une banque centrale mondiale, qui ne circule nulle part, que seules les banques centrales du monde  verraient et contre laquelle elles mesureraient et ajusteraient leurs monnaies nationales.

Un tel « or rationnel » devrait permettre aux pays et au système entier de se protéger à la fois de l’inflation et de la déflation. C’est pourquoi il ne faut pas donner cours à un système de taux de change nominalement fixes, comme c’était le cas pour celui mis en place à Bretton Woods qui a mené à une surenchère d’inflation, mais réellement fixe. De plus, cette banque centrale des banques centrales aurait la responsabilité, comme le voulait Keynes, de tenir une comptabilité d’équilibre entre pays débiteurs et pays créditeurs, de tel sorte que tout déficit trop accentué d’un côté ou de l’autre obligerait chaque pays à ré-évaluer ou dévaluer sa monnaie.

Un tel projet est-il faisable? Tout-à-fait. Mais il y a encore très loin de la coupe aux lèvres. Chaque pays veut encore tirer tout la couverture de son côté, les Etats-Unis en premier lieu qui ont le privilège démesuré de posséder LA monnaie de référence, mais aussi des pays émergents comme la Chine et l’Inde. Entre temps, on va sans probablement procéder à toutes sortes d’ajustements mineurs au système de taux flottants actuels. Par exemple, apparier plus solidement les monnaies nationales à une monnaie centrale forte, ou encore multiplier des monnaies régionales sur le modèle de l’Euro, créant un « Asiro » en Asie ou un « Latiro » en Amérique latine.

Mais à long terme, le plan de Keynes que remet à l’honneur Henkel, s’avère incontournable – et il le sera de plus en plus. Bien sûr, d’autres variantes autour d’un modèle de taux de change fixe existent. Je n’ai donné le projet de Henkel qu’à titre d’exemple, parce qu’il me semble sensé. Mais nous devrons obligatoirement nous déplacer vers un régime international à taux fixe. Car, tant que les pays ne conviendront pas d’un système monétaire unifié, on ne fera qu’aller de crise en crise et elles seront de plus en plus fortes.

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Classé dans Actualité, Yan Barcelo