Archives quotidiennes : 15 avril 2010

Les héritiers blasés

wealth

Philippe David.  Le Minarchiste Québécois.

Dans ces rares moments où j’ai le temps de m’asseoir et philosopher, je ne peux m’empêcher de constater comment la richesse est mal comprise par ceux qui la critique le plus. Au Canada et dans toutes les démocraties occidentales, nous sommes tous relativement riches comparativement au reste du monde. Très peu d’entre nous n’ont à se soucier de mourir de faim et même les pauvres qui dépendent de l’assistance sociale peuvent se permettre de posséder des biens dont au moins la moitié des gens sur notre planète ne peuvent que rêver. Cependant, comme nous ne sommes pas occupés par la survie quotidienne, comme le sont ceux qui n’ont pas notre chance, nous avons plus de temps de nous préoccuper justement de questions philosophiques comme par exemple des injustices et des inégalités. Peut-être est-ce un brin de culpabilité qui nous amène à nous apitoyer sur les moins fortunés et nous amène à nous questionner sur l’injustice du fait que nous sommes riches et eux pas. Aussi qu’il y en a qui sont encore plus riches. Et comme des héritiers blasés, nous venons à oublier tout ce que cela a pris pour que nous soyons si riches et à critiquer le système même qui nous a amené là. Jusqu’au point que nous ne pouvons pas reconnaitre que ce même systême est ce qui doit forcément rendre les autres moins fortunés à devenir riches, si on le laisse. Ainsi, nous en sommes venus à croire que nous devons redistribuer notre richesse, afin que les moins fortunés en aient une part, plutôt que de leur enseigner comment devenir riche par eux-même. Comme s’il n’y avait qu’une quantité très limitée de richesse dont on s’accapare une trop large part et qu’il était impossible d’en créer plus. De plus en plus, c’est cette incompréhension même de la nature de la richesse qui distortionne notre vision du monde.

Qu’est-ce que la richesse?

Si vous aboutissiez seul sur une île déserte avec une mallette contenant $100 millions, seriez-vous riche? Pensez-y deux secondes avant de répondre. Si vous avez répondu non, vous avez parfaitement raison. Si vous avez répondu oui, ne désespérez pas. Vous êtes loin d’être le seul à croire que la richesse se rapporte à la quantité d’argent qu’on possède et c’est une partie du problème. Pensez-y. Qu’est-ce que vos $100 millions peuvent bien vous acheter sur une île complètement déserte? Absolument rien. Votre argent est sans aucune valeur sur cette île parce qu’il n’y a rien à acheter avec. Peu importe la somme d’argent que vous aviez, vous ne seriez pas plus riche et vous mourriez de faim parce que l’argent n’est qu’un médium pour acquérir ce dont vous avez besoin pour vivre et il n’est précieux que par rapport à la quantité de biens qu’il peut vous fournir. C’est l’acquisition de ces biens qui vous rend riche et non l’argent que vous possédez. Ainsi, si la quantité de biens disponibles dans une économie est plus grande que la quantité d’argent, cela veut simplement dire que vous pourrez vous procurer une plus grande quantité de biens par unité monétaire. Ce n’est donc pas la quantité d’argent qui rend une société riche, mais la quantité de biens qu’elle produit. Il y a très longtemps que nous aurions éliminé toute pauvreté dans le monde, si la solution avait été de simplement imprimer plus d’argent. Malgré tout, trop de gens semblent y croire.

La productivité

Si l’accroissement de la richesse passe par la production de biens, tout ce qui augmente notre capacité de produire, nous rend plus riche. Si nous sommes plus riches que d’autres endroits dans ce monde, c’est que nous sommes plus productifs. Nous produisons plus de richesse pour la quantité de ressources (labeur+matières premières) utilisées. Si nous sommes riches maintenant, c’est que nous laissons libre-cours à notre imagination pour inventer de nouvelles façons d’augmenter notre productivité. Ces innovations peuvent provenir autant d’individus que de compagnies et chacune d’entre elles nous rend collectivement plus riches en rendant plus de biens disponibles à plus bas prix. Par exemple, lorque Henry Ford eut l’idée de produire des automobiles avec une chaine de montage, il a rendu un bien que n’était auparavant disponible qu’au super-riches, à la portée de tous et a révolutionné les transports. Cette simple innovation a rehaussé le niveau de vie de millions d’individus.

Les prix

Il nous est impossible de discuter de la richesse sans discuter l’impact des prix sur celle-ci. Sans considérer les prix, on pourrait confondre l’argent et la richesse encore et nous induire en erreur quand vient le temps de juger l’efficacité d’une politique économique. Nous considérons généralement les revenus en termes nominaux. C’est-à-dire en quantité d’argent. Le revenu réel d’un individu est le rapport entre son revenu nominal et les prix des biens dont il a besoin. Un individu peut gagner $50 000 par an, mais si les prix diminuent de 50%, son revenu réel aura doublé, même s’il demeure le même en termes nominaux. De même si son salaire réel double, mais que les prix doublent également, son revenu réel demeure inchangé, même s’il semble avoir augmenté. Une diminution générale des prix entraine donc nécessairement une augmentation de la richesse. Si nous ne considérons que les revenus nominaux, nous ne regardons qu’un côté de l’équation.

Le capital (ou Das Kapital?)

Il y a deux façons d’utiliser la richesse. Nous pouvons l’utiliser en consommation personnelle où nous pouvons l’utiliser afin de produire plus de richesse. Par exemple, on peut manger des graines de tournesol, ou on peut les planter afin de produire encore plus de graines. En les mangeant, nous les faisons disparaitre, alors qu’en les plantant, nous en produisons encore plus pour pouvoir en avoir à consommer plus tard. Lorsque nous consommons, nous employons la richesse pour une gratification immédiate. Lorsque nous l’utilisons pour la production, nous sacrifions la gratification immédiate pour avoir une plus grande richesse dans le futur. Toute richesse consommée pour la gratification immédiate l’est au détriment de la richesse future. La richesse qui est employée pour la production dans des entreprises afin de créer de la richesse future est appelé « capital ».

Contrairement à ce que croient les critiques du capitalisme, les entrepreneurs capitalistes ne gardent pas leur richesse sous forme de piles d’argent pour se rouler dedans. Leur richesse existe surtout sous forme de capital comme des terrains, des bâtisses, de l’outillage, des véhicules, etc. Sans capital, nous ne pourrions pas produire plus que ce que nous pouvons cueillir de nos propres mains. Depuis que l’homme a découvert qu’en utilisant des outils pour labourer et en semant des graines qu’il peut se nourrir plus facilement qu’en chassant et en cueillant des fruits sauvages que l’accumulation de capital a démontré sa valeur. Mais ce n’est que depuis la révolution industrielle que nous avons réalisé son plein potentiel. Contrairement à la croyance populaire, le capitalisme repose sur la production à l’aide de l’accumulation de capital et non la consommation. (Retenez ça la prochaine fois qu’on vous dira qu’il faut stimuler la consommation pour faire rouler l’économie.) C’est d’ailleurs pour ça qu’on appelle ça du capitalisme et non du « consommatisme ». Nous sommes devenus des héritiers blasés le jour ou nous avons décidé que la gratification immédiate de la consommation est plus importante que la richesse future générée par l’accumulation de capital. Et c’est pour ça que notre niveau de vie ne cesse de se dégrader depuis plusieurs décennies. Nous gaspillons notre richesse en consommation immédiate.

Tout comme un individu peut gaspiller sa richesse en consommant trop et en économisant et en investissant pas assez, une économie entière peut également gaspiller sa richesse de la même façon. La grande majorité des salariés consomment la plus grande partie de leurs revenus (et ils sont fortement encouragés à le faire) alors que les entrepreneurs et leurs entreprises consacrent la plus grande partie de leurs revenus dans l’accroissement de leur capital et de leur production. Lorsque les critiques du capitalisme exigent de prendre la richesse des entreprises pour la redistribuer aux salariés, ils veulent en fait prendre la richesse consacrée à des fins productives pour le distribuer à ceux qui ne feront que le consommer. C’est comme prendre les graines de tournesol à celui qui voulait les replanter, faisant grandir le stock de graines disponibles à tous et donner ces graines à ceux qui ne font que les manger. Si on laisse les producteurs produire, il y aura suffisamment de graines pour tout le monde, si nous redistribuons leur richesse, nous nous appauvrirons tous. C’est une vérité que peu comprennent et les opposants du capitalisme feront tout pour vous la cacher.

La pauvreté

Les ennemis du libre-marché tentent toujours de se faire passer pour les amis des soi-disant « pauvres » et essaient continuellement de faire passer les entrepreneurs et les « méchants capitalistes assoiffés de profits » comme leurs ennemis. Mais la réalité est tout le contraire. Au Canada, comme dans tous les démocraties occidentales, la vraie pauvreté n’existe plus. À peu près personne n’y meurt de faim. La plupart des gens vivant sous le seuil de pauvreté ont l’eau courante, chauffage, climatisation, une cuisinière, un réfrigérateur et possèdent un téléviseur, un magnétoscope, un lecteur DVD, une chaine stéréo etc. Plusieurs des ces biens n’étaient disponibles qu’au riches il n’y a pas si longtemps. La seule raison pour laquelle ils sont maintenant disponibles même aux plus pauvres, c’est que des entrepreneurs ont travaillé continuellement pour augmenter la production de ces biens et d’en faire baisser les prix. Si les prescriptions des opposants du capitalisme étaient toutes suivies, tout ça ne se serait jamais produit.

Ces opposants ignorent complètement que les méchants capitalistes sont ceux qui sont responsables de cette augmentation de la richesse collective et que les plus pauvres de la société en sont les premiers bénéficiaires. En fait, ils semblent incapables de comprendre qu’il est possible d’augmenter la richesse totale. Ils se foutent éperdument de toutes les améliorations de la productivité que le libéralisme a apporté et leur effet sur la qualité de vie de tous. Ils croient que tout individu ou compagnie qui s’enrichit s’accapare d’une part trop grande d’une quantité limité de richesse et donc doivent obligatoirement s’enrichir au dépens des autres. Ils ne réalisent pas que ces individus et ces compagnies ne peuvent s’enrichir sans enrichir tous les autres. Comme ils sont incapables de concevoir qu’on peut créer de la richesse, ils réagissent avec une rage jalouse. Leur seule solution pour le désir de quiconque d’acquérir plus de richesse est de la saisir par la force de ceux qui la produise pour la donner à d’autres. Non seulement cette pratique n’enrichit pas notre société, mais elle détruit notre richesse et notre habileté à produire plus de richesse. Elle nous appauvrit tous.

Mes grand-parents ont dû quitter l’école très jeunes pour travailler et aider leurs familles et travaillaient de longues heures. Mes parents ont pu poursuivre leurs études et ont rarement dû travailler plus de 40 heures par semaine (et ma mère ne travaillait pas du tout avant le divorce de mes parents). Je ne travaille pas plus de 40 heures par semaine, mais nous avons besoin de deux salaires pour vivre confortablement. Alors que de la génération de mes grand-parents à celle de mes parents le niveau de vie augmentait, il diminue maintenant. Je suis né dans les années 60. Cherchez le changement social qui a eu lieu à cette époque un peu partout dans l’occident et vous saurez pourquoi.

Conclusion

Nous sommes tous à un certain degré coupables d’être des héritiers blasés si nous commençons à croire ce que les critiques du capitalisme veulent nous faire croire. Que nous devrions avoir honte de ce qui nous a rendu riches et que nous devrions gaspiller cette richesse pour expier notre soi-disant péché.

Nous devrions plutôt en être fiers et résister toute tentative de diminuer notre capacité de produire et enrichir les masses et exporter notre savoir vers ceux qui sont plus défavorisés que nous afin qu’ils puissent un jour nous rejoindre.

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Classé dans Actualité, économie, Philippe David