Archives quotidiennes : 7 juin 2010

Netanyahou et les fauteurs de paix

On parle parfois – discrètement –  d’une « exception ashzkénaze ». Un segment de la population juive dont l’intelligence, mesurée par les tests conventionnels, serait significativement supérieure à celle des autres groupes humains qu’on peut identifier. Pourquoi discrètement? Parce que, compte tenu de l’envie bien ancrée dans la nature humaine, se faire dire qu’on est plus doué peut être gratifiant, mais peut être tout aussi nuisible que de se faire traiter de pauvre cloche.

Personne ne se presse donc au portillon aller vérifier si les Ashkénazes sont vraiment si intelligents… et ça reste une légende. Ce qu’on peut vérifier sans études complexes, toutefois, c’est que ceux qui se réclament de la culture juive ont apporté à l’humanité une contribution hors de toute proportion avec leur nombre. Sans remonter bien loin, avoir Marx, Freud et Einstein dans une même cuvée en fait indéniablement un crû exceptionell par ses effets, qu’on aime ou non le communisme, la psychanalyse et la bombe atomique…

Pourquoi le souligner ? Parce qu’il est improbable que les Israéliens soient bêtes, alors que le massacre de pasagers d’un flotllle de sympathisants pro-palestinins en haute mer au large de Gaza apparaît comme une évidente bêtise. Il y a donc une incohérence à résoudre. Dans quelle problématique plus large cette opération apparemment stupide peut-elle s’inscrire qui, à défaut de la justifier, la rendrait compréhensible ? Le plus vraisemblable, c’est qu’il s’agit d’un pion avancé dans une partie qui se joue entièrement aux USA. Beaucoup veulent voir Israel comme la queue qui meut le gros molosse USA, mais cette vision repose, à mon avis, sur deux fausses prémisses.

La première, c ‘est celle d’une population en Israel bénéficiant de lourds sacrifices financiers consentis par la diaspora juive américaine… La réalité, si on voit les choses plus objectivement, c’est qu’on a déplacé vers Israël une population qui y est assiégée, vivant depuis 60 ans dans l’équivalent de tranchées sur la ligne de feu. Les USA ont ancré au Moyen Orient un gros porte-avions « Israel » défendant les intérêts USA. On donne de l’argent aux Sabras, bien sûr, mais c’est peu pour les services qu’ils rendent.

Pourquoi peut-on se permettre de leur donner si peu ? Parce qu’ils sont surtout motivés par un message religieux… dont la crédibilité est celle de tout autre message religieux, c’est à dire objectivement nulle. Les Juifs déplacés vers Israel sont utilisés. Instrumentés par une légende. Il faut donc être de mauvaise foi pour s’étonner qu’il y ait tant de fanatiques en Israel. S’ils n’étaient pas fanatiques, bien peu seraient en Israel ; ils seraient à Grossinger et à Miami.

La deuxiàme fausse prémisse, c’est celle d’une diaspora juive en Amérique qui serait monolitiquement unie dans son soutien a Israel. Il n’est pas sûr du tout que Quidam Lambda de la diaspora juive aux USA soutienne vraiment Israel autant qu’on veut nous le faire croire. Ceux qui parlent au nom de cette diaspora, oui, soutiennent Israel, bien sûr, mais ils sont un establishment dont je doute fort de la ferveur religieuse. Ne joueraient-ils pas de leur judéité comme d’un atout, dans un pinochle dont les enjeux sont des contrats, de l’influence politique et du fric ?

C’est une partie qui se joue aux USA. Contrairement aux idées savamment entretenues, l’establishment juif américain est d’abord américain. Le Juif américain moyen aussi, d’ailleurs, qui est BIEN aux USA et s’y sent chez-lui. Il souhaite naturellement que l’Amérique reflète de plus en plus les valeurs juives qui sont les siennes, mais il ne voudrait sous aucun prétexte partir pour Israel ! Je parierais gros que son indéfectible souten à Israel est d‘abord une peur terrible de la pression sociale exercée par ses élites dominantes et qu’il serait bien soulagé que la paix en Palestine vienne enlever de sa chaussure cet ennuyeux grain de sable qui ne lui rapporte RIEN.

Obama et son équipe aussi, d’ailleurs… et c’est la que ça devient intéressant. La gouvernance américaine veut la paix en Palestine. Netanyahou, non: le pouvoir en Israel repose sur la guerre. Netanyahou rue donc dans les brancards quand on parle de paix et met Obama dans l’embarras, lui faisant sérieusement perdre la face… alors que la bataille politique contre les Républicains fait rage. Exaspérant.

Pour la première fois, il y a une divergence d’intérêt sérieuse entre la Présidence démocrate aux USA … et ceux qui gouvernent en Israel et leurs alliés d’un certain grand capital. Pas question pour les Démocrates d’affronter directement le lobby juif, mais on peut saper son influence. J-STREET – dont J-Call en Europe est le reflet médiatique – sort donc tout a coup sur la scène politique américaine, comme un lapin d’un chapeau.

Qu’est-ce que J-Street ? Des fauteurs de paix. Un mouvement qui met en lumière l’opposition jusque là muette des Juifs américains pacifistes aux bellicistes du lobby juif dominant.. J –Street est là pour rallier les éléments pacifistes de la diaspora qui voudraient assumer pleinement leur américanité, sans céder plus longtemps au chantage d’une faction au sein de la communauté juive qui s’enrichit d’une guerre qui est pour l’ensemble de cette communauté totalement néfaste.

Serait-il surprenant que ce soit Obama qui ait choisi de faire financer et organiser discrètement J-Street ? Si, apuyés par le pouvoir aux USA, les pacifistes de la diaspora n’ont plus peur de se manifester et découvrent qu’ils sont une majorité, les fanatiques d’Israel, Netanyahou en tête, pourraient devoir adopter une toute autre attitude. Une attitude de paix.

Grave menace pour ceux en Israel qui ne pensent que plaies et bosses. Quoi de mieux qu’une vague d’antisémitisme pour conjurer la menace des fauteurs de paix ? Une synagogue brulée, un cimetière profané… et hop, le reflexe de peur peut jouer pour ramener le Juif américain moyen dans le giron des fauteurs de guerre.

Massacrer quelques pro-palestiniens, n’est pas cher payer pour obtenir cette réaction antisémite… Quand on voit cette dynamique, on comprend pourquoi l’antisémitisme, qui est toujours un crime, serait aussi aujourd’hui une erreur. Un dossier bien délicat à gérer pour Obama… Mais tous les espoirs sont permis.

Pierre JC Allard

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