Les usines à « mains invisibles »

Image: abblobuzz

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Dans le domaine socio-économique, la main invisible évoque l’idée que des actions guidées par notre seul intérêt peuvent contribuer à la richesse et au bien-être commun.

Wiki, Main invisible

L’ennemi dispose d’un arsenal superraffiné, fourni par la Science à son service, il la paye.       Conditionnement systématique, psychologie appliquée, psychothérapie, psychiatrie, biochimie, psychochirurgie s’il faut, telles sont les armes qui en escalade prendront le relais de l’autorité défaillante et faillible. Et l’État s’en occupe lui-même. ecolesdifferentes

Les hommes s’imaginent faire des enfants, alors qu’ils ne font que d’autres hommes.

San Antonio

Toutes guerres sont enfantines et livrées par des enfants.

Herman Melville

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Le jour où mon père m’annonça que je n’irais pas à l’école cette année-là, j’en fus attristé. Pain obligeant, nous devions aller passer l’hiver dans un camp de bûcherons en Abitibi. Je regardais ma mère lire, le nez « trempé » dans son livre, et j’imaginais le plaisir qu’elle en retirait… J’étais en âge d’aller à l’école, mais…

Pourtant, après toutes ces années, il me reste de  souvenirs divins de cette période  où j’étais le seul enfant du camp. J’ai dû apprendre la nature s’exprimer… Je suis encore imprégné de ce dur hiver, de cet ours qui s’est approché de moi pour me renifler – je pensais que c’était un gros chat, ou je ne sais quoi,  et d’un bûcheron attaqué par un orignal, et du printemps…

Qu’est-ce donc que ce mot « apprendre » si ce n’est d’apprendre la vie?

L’année suivante, à mon arrivée à l’école, j’ai appris à lire très vite… Et je me souviens de la fierté d’avoir appris mon premier mot de 5 syllabes : locomotive.

Au point où chaque jour – étant donné que nous habitons près d’une voie ferrée – je peste contre ce long cinq syllabes. On m’a appris à être moins patient. Et les écrits sont les écrits. La vie, c’est tout  autre chose…

Le train a perdu ses cinq syllabes… C’est devenu un juron… Le plus court…

Les petits bouts de choux

Comme disait Pennac, ce sont des « énigmes lumineuses »… Soit. Mais quand arriva l’émancipation de la femme – celle qui devint « l’égale  de l’homme », avec tout ce qui s’ensuit, élever des enfants a fini par être une un clair-obscur… La démocratie s’est déplacée dans la famille : tout le monde a le droit à la parole… Et tout le monde a raison…

Le film « Famille » devint un film sans casting… On ne sait plus trop qui est le boss et tous les sujets sont « à discuter ».

Et voilà que la famille devient… une entreprise.

Après avoir fécondé « in  cabanon », – certains à 200,000$ –  les bouts de choux, les deux carriéristes doivent mettre des bains à l’agenda et faire le taxi pour les choux qui doivent se cultiver ou devenir des vedettes.

Ça use…

C’est la raison pour laquelle on a créé une émission de télévision où l’on « retrousse » les couples pour une soirée : coiffure, habillage, sortie.  Ils arrivent à l’émission comme si un tsunami leur était passé dessus et « jouent à ce qu’ils étaient »….Pour se rappeler  qu’ils s’aiment.

À se demander si l’émancipation de la femme n’a pas été une conspiration de l’État pour faire deux esclaves au lieu d’un…

Et à créer deux demi-parents…

Pelletier inc.

À un moment donné de la vie, avec deux ou trois enfants, on dirait que le nom de famille n’est plus qu’une compagnie à numéro. Surtout qu’il faut faire la lecture, jouer avec eux … en attendant les vacances pour se reposer et revenir plus fatigués encore.

C’est cette impression qui m’est restée des premières années ou nous étions devenus des   Bruny Surin exangues , un peu détroussés de cellules rouges, à force de courir du matin au soir. Blêmes, blafards, bien habillés, mais l’âme en lambeaux…

La compagnie à numéro était devenue une greffe de l’État.

Que fait l’État?

Elle les prend jeunes, les enfants.

À quatre ans, ce sont tous des génies : ils savent qui est Einstein, mais ils ne savent pas s’habiller seuls. Papa et maman font comme dans l’émission de télé : ils les habillent. C’est à ce moment que vous vous rendez compte qu’une main a dix doigts, et qu’on comprend l’utilité de la mitaine : ça « vous »  va comme un gant. Pourvu qu’on trouve le pouce. De toute manière, on fait tout sur le pouce… Même l’amour…

La nécessité du « génie »

Il en est qui ont des ambitions pour leurs enfants. Einstein ou Guy Lafleur, peu importe. Du grand…

Ce qui me rappelle une anecdote savoureuse racontée par une compagne de travail :

«  Tu as eu trois enfants?

– Ouais! Deux filles, un gars…

– Qu’est-ce qu’ils font maintenant?

– J’en ai une qui fait de la recherche en laboratoire pour une grande société pharmaceutique.

– Ouah!  Et l’autre…

– Elle a 31 ans… Elle termine un doctorat en chimie moléculaire…

– Et le fils?

– Il est plombier.. Par chance qu’on l’a pour vivre… »

Pour le bien de l’État…

À se demander si « les obligations » de l’État ne passent pas avant celles de la famille?
Difficile d’avoir une famille « soudée » quand deux travailleurs sont devenus les conjoints d’une compagnie «importante », jouant un rôle « important », dans une société toujours la plus importante. Le monde à l’envers…

Dans une vie antérieure, ils étaient habillés  en lambeaux et on les endimanchait  pour aller à la messe et pour se recueillir en famille dans un jour « férié »,  et manger un poulet sans hormones. Le grand luxe… On mangeait bio sans le savoir… Aujourd’hui, on le sait, mais il faut être bien nanti et suspicieux…

L’expression « besoin essentiel » s’est répandue partout…Tout est devenu urgent. On n’est pas des humains, on est des pompiers de l’État.  Alors, tout le monde travaille sous le régime de « besoins essentiels ». Les « services essentiels » : les magasins, les usines, bref, tout le roulement de la production.

Et les enfants finissent par faire partie de la chaîne.

Pause cimetière

Pendant une ballade, Juliette et moi sommes arrêtés devant une église qui nous a menés à un cimetière. On y distingue les pauvres des riches… Mais il y a une place pour le « juste milieu » : les riches comme les pauvres perdaient énormément d’enfants en bas âge.

Les cimetières font réfléchir… Supposons que vous ne pouviez  qu’emporter 21 grammes d’ici-bas… Comme dans Si c’état vrai… Qu’emporteriez-vous?

Une année en Abitibi… Ou un poème Les abeilles de lumière

Imaginez que vous êtes assis sur la lune et que vous regardez les morts et les vivants sortir et entrer en des points lumineux. C’est pareil à une ruche… Quelqu’un  parmi vous a déjà capturé des lucioles dans un bocal? … Ils s’éteignent, s’allument… Pareil à la Vie…

Après l’élevage du cheptel

Bon! Nous allons pouvoir nous reposer… Les enfants sont partis faire leur vie… Liberté!

Bang!

Le gouvernement découvre la « non-productivité ». Et le vieillissement de la population… La retraite? Pas question… Il vous flanque alors un nouveau programme pour inciter les gens à travailler jusqu’à 67  ans. Et vous avez payé toute votre vie… Ils vous accusent de vivre trop vieux…

Peut-être que l’État a trop investi dans les avions?  Ou dans la peur? Ou d’autres, ces « créateurs d’emplois »,  dans le détournement des « abris fiscaux »… Les gros…

Avant, on avait peur de la mort…

Maintenant, on a vraiment, mais vraiment peur de la vie…

L’école de la magie

Parce que la mort n’en fait plus partie. Les abeilles  en voie de disparition. Comme dans la vraie vie…

La « réalité » est un cadavre… Déjà… Comme dans le livre Déjà Dead de Kathy Reichs.  La famille?  Trop décomposée pour être autopsiée …

Ce sont les enfants de l’État. Lessivés au luxe des carrières sur papier glacé qui sont en kiosque  dans les écoles. Ce qu’on leur enseigne? Une Histoire trafiquée… Comme la longue marche des peinturés dans le coin du parlement d’Ottawa.

La piscine hors terre et la piscine hors prix des G…

Ne reste plus qu’à vivre à la « philosophie » profonde des gouvernements en chambre, et demeurer optimiste, comme eux …

Dans un jeu de mots candide, mais confirmé et  étriqué  : « Après l’appui c’est le beau temps… »… C’est bon pour un You Tube de 1,26 minute.

Les parents « accordéon »

L’État – dans ses « grandes valeurs »-  ne nous a-t-elle pas refilé son grand costume d’orgueil et d’ambition? Mais comment?

Les parents sortent  de la vie fripés comme des accordéons après avoir élevé deux ou trois enfants…

Avant, on en élevait en moyenne 8 ou 9…  L’État les a en main…  Et nous sommes devenus la main de l’État.

On est lentement devenus des usines à mains invisibles…

Comme le disait cet africain – et j’y reviendrai :

« C’est comme voler une chemise, et rendre seulement un bouton à son propriétaire », (Ken Saro-Wiwa. )

Je viens de vous le dire… La main invisible?

On vit sur le pouce…

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Gaëtan Pelletier

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