Profilage racial: laissons les policiers travailler

La sortie d’un rapport prétendant démontrer que les policiers de Montréal font du profilage racial tombe à point. Près de deux ans après que Fredy Villanueva ait été abattu après avoir agressé un policier, plusieurs aimeraient mettre la police au banc des accusés, l’accusant de faire du profilage racial. Qu’importe si ce rapport a une méthodologie douteuse, et qu’importe si les personnes de race noire sont sur-représentées lorsque des crime sont commis: il faut défendre les gentils citoyens contre la « méchante police ».

Soyons sérieux une seule minute. Ce rapport constitue une vraie blague. Il compare le nombre d’interventions à la population totale. Cela signifie que si la majorité des individus traînant la nuit sont Noirs, mais qu’ils habitent dans un quartier majoritairement Blanc, la police ferait automatiquement du profilage racial en les abordant. Comme le souligne avec justesse le directeur adjoint Jean-François Pelletier, qui dirige l’équipe ayant produit le rapport, il aurait fallu comparer le nombre d’interventions visant des Noirs avec le total des interventions sur des individus dans une situation similaire. En d’autres mots: il ne suffit pas de dire que près de 30% des individus interpellés une nuit sont de race noire; il faudrait également tenir des statistiques sur l’origine ethnique de l’ensemble des individus qui étaient dans une situation justifiant de les aborder. Il faudrait également quantifier les crimes commis par des personnes de chaque race.

On fait également grand cas de l’importante augmentation des interpellations de personnes noires à Montréal-Nord entre les années 2001 et 2007. Cela constituerait une nouvelle preuve que le profilage racial serait en hausse dans le quartier. Dans les faits, cela ne prouve rien, sinon que l’immigration y est fortement en hausse (plus de 6530 nouveaux immigrants entre 2001 et 2006, et le pays d’origine le plus représenté est Haïti), que le crime l’est possiblement et que la police fait peut-être simplement face à davantage d’individus de race noire dans ses interventions.

Sur-représentation des Noirs concernant les crimes commis

Les statistiques sur les crimes en fonction de la race sont beaucoup plus difficiles à trouver au Québec et au Canada qu’aux États-Unis. Ici – surtout au Québec – on ne parle de race que lorsqu’il est question de crime haineux. Au niveau canadien, on tient quelques rares statistiques. On peut y voir ce graphique, par exemple, qui démontre que les Noirs représentent près de 2% de la population canadienne, mais que près de 6% sont emprisonnés et 7% sous supervision judiciaire. Chez les femmes, la situation est semblable: un rapport du Service correctionnel du Canada faisait état d’un pourcentage d’emprisonnement entre 5% et 7% pour les années 2001 à 2003.

Chez nos voisins du sud, par contre, de telles statistiques sont beaucoup plus élaborées. On y apprend que pour une population noire de près de 13%, celle-ci est responsable de près de 37% des homicides, 39% des crimes violents non-mortels, 30% des crimes contre la propriété et 30% des crimes à col blanc. Quand Patrick Lagacé affirme que les chiffres utilisés par l’étude sont les mêmes que ceux utilisés aux États-Unis, il oublie sciemment de souligner le fait que les personnes de race noire y sont largement sur-représentés.

Il faut agir intelligemment et politiquement

Ces données ne doivent pas servir à encourager le racisme ou la discrimination à l’égard des personnes de race noire. Elles doivent nous aider à prendre conscience d’une réalité: ces individus sont plus susceptibles de commettre des crimes et d’être emprisonnés que les Blancs. C’est une réalité, un fait. Être Noir, au Canada et au Québec, augmente la possibilité qu’on commette un crime ou qu’on finisse en prison. Au fait, y a-t-il beaucoup de Gagnon et de Tremblay dans les gangs de rue?

Évidemment, la couleur de la peau ne constitue pas une cause de ce problème. Il y a la pauvreté, il y a des différences culturelles, il y a une immigration trop importante pour notre capacité d’intégration, il y a des politiques économiques de droite favorisant les écarts de richesse et la paupérisation de nombreux quartiers. Les causes sont multiples, mais elles ont toutes une chose en commun: ce sont des enjeux politiques devant être adressés au niveau politique. Ce sont des politiciens – nos représentants – qui doivent s’occuper de ces enjeux. Ce sont nos élus qui doivent améliorer la cohésion sociale et prendre des positions courageuses pour améliorer l’intégration des immigrants déjà présents et réduire la pauvreté.

Or, quand on demande aux policiers de jouer les intervenants sociaux et d’adapter leur façon d’agir en fonction de la couleur de la peau des gens avec qui ils font affaire, on réduit notre capacité à faire face à ces troubles. Quand un crime est commis, quand des gens louches traînent la nuit, quand des individus terrorisent leur voisinage, quand ils vendent de la drogue ou commettent d’autres délits, on ne veut pas que le policier commence à se demander si son intervention sera considérée comme du profilage racial. On ne veut pas qu’il se questionne quant à savoir si son ratio d’interpellations noires est trop élevé pour la nuit; on ne veut pas qu’il se mette à considérer les individus en face de lui comme étant, précisément, des gens de couleur noire. On veut qu’il agisse. On veut qu’il fasse respecter la loi, indépendamment de la race. Et si cela implique d’interpeller davantage d’individus Noirs parce que ceux-ci sont sur-représentés au niveau du crime ou parce qu’il suspecte qu’un crime risque d’être commis, qu’il puisse le faire l’esprit en paix.

La police, malgré ses imperfections, est là pour nous défendre. Ce n’est pas de sa faute si les individus de race noire commettent plus de délits que ne le justifie leur poids démographique. Ce n’est pas son rôle de faire de la politique et de cesser d’apostropher des individus sous prétexte que cela pourrait être mal interprété. Si, toute la soirée, elle reçoit des appels de commerces ou de résidants se plaignant de gangs de Noirs volant ou terrorisant la population, elle est justifiée d’utiliser cette information au même titre qu’elle aurait le droit d’arrêter un individu avec un tatouage en forme de demi-lune sur l’épaule gauche si cela constituait un des signes distinctifs. On doit la laisser travailler.

Au-delà du profilage racial, il y a le respect de la loi et des valeurs qu’elle protège. Si nous pouvons œuvrer collectivement à améliorer la cohésion sociale et à réduire la pauvreté des populations immigrantes, qu’on le fasse au niveau politique. En attendant, les policiers sont justifiés d’interpeller qui ils ont envie d’interpeller car, de toute façon, quand on n’a rien à se reprocher, on ne craint pas les forces de l’ordre.

Quand on est un honnête citoyen, les policiers sont nos alliés.

Qu’importe la « race ».

Au-delà du profilage racial, si on agissait pour mettre fin au profilage de profession, qui consiste à dénigrer et à stigmatiser les policiers qui travaillent, au quotidien, pour maintenir nos valeurs et notre démocratie intactes?

Louis Préfontaine

Publié aussi sur LouisPrefontaine.com

9 Commentaires

Classé dans Actualité, Louis Préfontaine

9 réponses à “Profilage racial: laissons les policiers travailler

  1. lbo

    Le travail de la police est parfois peu apprécié mais il faut reconnaitre qu’aujourd’hui nous pouvons assumer en toute sécurité toutes nos demarches sans craintes et ce grâce a eux.

  2. Aimé Laliberté

    Louis,

    Tu écris :

    ‘Au fait, y a-t-il beaucoup de Gagnon et de Tremblay dans les gangs de rue?’

    Je crois que cette question démontre tout le ridicule de ton article.

    Les Hell’s Angels, ça te dit quelque chose mon ti-Louis?

    Les Rock Machine, t’as en déjà entendu parler Louis?

    Combien tu penses qu’il y avait de noirs dans ces groupes de motards Louis?

    Pas beaucoup hein?!

    La guerre des motards qui a duré plus de 10 ans au Québec et qui a fait plus de 100 victimes, tu as oublié cela peut-être.

    Et tu en rajoutes :

    ‘En attendant, les policiers sont justifiés d’interpeller qui ils ont envie d’interpeller car, de toute façon, quand on n’a rien à se reprocher, on ne craint pas les forces de l’ordre.’

    Wow!

    C’est du grand n’importe quoi que tu écris Louis.

  3. Aimé Laliberté

    Le problème des gangs de rue existe vraiment, aucun doute là-dessus, mais un individu ne devrait pas être considéré comme un suspect ou un criminel potentiel uniquement en raison de la couleur de sa peau ou son appartenance ethnique. ou du fait qu’il/elle prend une marche dehors le soir.

    Je suis également d’accord que le travail des policiers est difficile et que, de façon générale, les agents font du bon travail.

    Mais le problème est aussi politique, car les policiers demandent du renfort depuis plusieurs années pour combattre les gangs de rues, tandis que le gouvernement préfère dépenser des milliards dans des mesures inefficaces comme le registre des armes à feu, et coupe maintenant dans les programmes de réhabilitation et de réinsertion sociale pour lancer une ‘guerre contre la criminalité’ (c.-à-d. construire des nouvelles prisons, allonger les sentences, obliger les juges à imposer des sentences minimum etc…)

    Pourtant, les données de Statistiques Canada démontrent que depuis 20 ans, le crime est en baisse au Canada.

    Tout ça pour dire que les gens se comportent relativement bien, dans la très grande majorité des cas, et que c’est une petite minorité (toutes races et couleurs confondues) qui cause les problèmes.

  4. bobov

    Puisque M. Préfontaine semble être un friand amateur de statistiques, je serai bien curieux de savoir le fond de sa pensée par rapport au fait que les Noirs ont un taux de scolarité plus élevé que la population blanche québécoise, mais que le taux de chômage chez les Noirs est presque deux fois plus élevé. En effet, une dépêche de l’agence La Presse Canadienne publiée en avril 2006 indiquait que le taux de chômage dans la communauté noire se situe à 17,1 %, contre une moyenne québécoise de 8 %. Et alors que 14,3 % de la population québécoise détient un diplôme universitaire, cette proportion est légèrement supérieure dans la communauté noire, soit 14,7 %.

    La foi de M. Préfontaine dans les statistiques sur la criminalité semble inébranlable, et ce, même s’il n’existe aucune statistique sur le nombre d’actes criminels qui ne seront jamais rapportés, ni sur le nombre d’auteurs d’actes criminels qui ne seront jamais identifiés parce que ceux-ci ont plus de talent à ne pas attirer l’attention des policiers que les jeunes de couleur qui fument des pétards dans les parcs.

    De même, il n’existe aucunes statistiques sur le nombre de nombre de fraudes et d’arnaques financières en tout genre qui ne seront jamais répertoriés comme des actes criminels parce que leurs auteurs ont été poursuivis en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières, et non pas en vertu du Code criminel.

    D’ailleurs, j’imagine que M. Préfontaine sera sûrement d’accord pour dire que si les statistiques rapportent moins d’actes criminels à Westmount, c’est sûrement parce que les bourgeois s’enrichissent en respectant scrupuleusement les lois. Ce n’est sûrement pas que les multimillionnaires sont mieux protégés contre les poursuites judiciaires que le jeune chômeur d’un quartier défavorisé. Dans le même ordre d’idée, il n’y a sûrement aucune leçon à tirer du fait que ce sont les autorités américaines, et non canadiennes, qui ont fait emprisonner Conrad Black.

    Au fait, M. Préfontaine pourrait-il nous expliquer comme Fredy Villanueva si est-il prit pour agresser un policier ? Je pose la question parce que quand l’agent Jean-Loup Lapointe a témoigné à l’enquête publique, il n’était pas sûr si Fredy l’avait agrippé par sa chemise ou par le cou. Peut-être que M. Préfontaine le sait-il plus que l’agent Lapointe ?

  5. Jean-Marie De Serre

    Monsieur Louis Préfontaine , je n’ai pas encore eu le temps de relire , mais ce que j’ai retenu et que je suis d’accord avec vous à 200% , c’est quand vous dites que quand on n’a rien à se reprocher , on ne craint pas les forces de l’ordres.=== Vous dites aussi : quand on est un honnête citoyen , les policiers sont nos alliés , qu’importe la race et C’EST VRAI PREUVE À L’APPUI.===Je l’ai déjà écrit : Quand le policier te dit ‘STOP’ , fais-le.=== De plus Charest , je te le dis , ça leur prend un ‘TASER GUN » aux policiers et un pour moi aussi. Si le policier en avait eu un , Freddy , ne serait pas mort quoique toute cette histoire est un sacrament de show pour essayer de salir les policiers.=== Arrêtez cela les noirs , vous distrayez le gouvernement qui devrait se concentrer sur l’enquête de la contruction === Je vous le dis : tapez Taser Gun et voyez vos droits.
    J.M.D.S.

  6. Bonjour,

    Il est vrai que les forces de l’ordre sont particulièrement atteintes, dans nos sociétés occidentales, car on les utilise un peu trop de manière politique.
    Cependant, j’ai moi-même été sauvée deux fois par des gendarmes. Il m’arrive de rencontrer un de ceux qui m’a sauvée. Il est heureux de voir que je m’en suis sortie.

    Il faut savoir que la paix civile ne se fait qu’au prix de quelques excès. Il est vrai aussi que l’immigration, chez nous en France, est de plus en plus forte. Il en résulte beaucoup de quiproquos. Le réflexe communautarisme est très fort, beaucoup plus fort que notre propre individualisme. Un sixième de la population française est musulmane. Vous pouvez imaginer les problèmes qui se créent alors. Pourtant, les gens sont sympathiques. Alors, que se passe t’il pour que les gens se méprisent au point de s’entre-déchirer ?

  7. Aimé Laliberté

    Voici un article publié aujourd’hui même dans le Toronto Star, qui met en évidence le fait que dans la majorité des cas, les policiers sont au-dessus de la loi, en Ontario en tout cas.

    Heureusement, la grande majorité des policiers sont des hommes et femmes respectueux de la loi, mais ceux qui ne le sont pas sont très majoritairement exonérés de toute responsabilité par les organismes chargés d’enquêter leurs écarts de conduite, et les tribunaux.

    http://www.thestar.com/news/article/882189–are-these-cops-above-the-law

  8. Shawn Mac Farlane

    Ce qui est grave, c’est qu’on ouvre la porte au totalitarisme par des arguments comme: Quand on a rien à se reprocher, on ne craint pas la police. Ah non? Et le jour ou, se servant de son beau pouvoir que vous n’aurez pas su contester, l’État décidera qu’exprimer une idée politique est un crime, alors on n’aura qu’à fermer notre gueule? Et quand on décidera que vouloir voter est un crime? Et quand on décidera qu’être noir ou gay est un crime. Alors seuls ceux qui sont dans la bonne gang n’auront rien à craindre. Le fait de donner à la police plus de pouvoir qu’au citoyen est déjà une grave erreur que tous ceux qui ont connu une dictature connaissent et que nous connaitront un jour, mais le fait de ne pas en plus surveiller étroitement ces gens à qui on donne le pouvoir de vie ou de mort sur leurs semblables est de la pure bêtise.

  9. Steve Harvey-Fortin

    Je suis en accord avec vos idées en tant que résident de Montréal-Nord depuis que l’immigration des noires est arrivé (1980) au point que la criminalité appartiennent seulement aux noirs en majorité. Personnellement, j’ai été agressé à plusieurs reprises depuis quelques années et dans chaque cas ce fut par des personnes d’origine haïtienne.

    Je suis un adepte de la liberté individuelle et de la Charte canadienne, mais je ne préconise pas qu’il faille lier les mains des policiers en profitant de l’erreur et du manque de jugement de quelques uns pour mettre au même niveau tous les policiers. Il va de soi qu’on tente de calmer le jeu depuis l’affaire Villanueva en passant par le truchement d’un rapport politique et du même coup miner le pouvoir des policiers. Cet état de culpabilisation des policiers aura pour effet de ralentir leur réflex et de mettre en danger leur vie dans l’accomplissement de leur travail. La police ne fera que figure d’autorité en ce qui concerne l’application de la loi dans la rue et ne fonctionnera que sur la peur d’être réprimander dans le cas ou elle devra agir.

    Un fait à retenir concernant l’immigration des communautés noires est de les avoir laissé se regroupé sur des territoires comme Montréal-Nord et ville St-Michel et de les avoir laissé agir trop longtemps concernant la criminalité. C’est une des raisons qui fait que nous en sommes rendu là aujourd’hui. Dans ces territoires se sont créer des noyaux criminalisés reprensentant des communautés noires. D’ou maintenant, la raison de la constetation du travail des policiers dans ces secteurs devenus à risque pour les citoyens et la police.

    Tous nous devons nous éfforcer de respecter la loi et l’ordre selon l’empreinte de la culture à laquelle nous sommes associer dans un État. Se conformer à ses lois en tant que citoyen s’est s’admettre dans la société, et non pas remettre en cause le travail de l’autorité et des policiers.

    Steve Harvey-Fortin

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