Archives quotidiennes : 16 septembre 2010

La laideur comme élément discriminatoire

On peut aussi contester les critères liés à l’apparence s’ils sont discriminatoire­s. Pour cela, il faut montrer qu’ils excluent des employés sur la base de leur âge, de leur sexe, de leur origine ethnique, de leur religion, de leur handicap ou d’un autre facteur de discrimination prévu par la Charte des droits et libertés de la personne. « L’apparence physique et le poids n’en font pas partie. Si on refuse de vous engager parce que vous êtes très laid, c’est injuste ; mais ce n’est pas un motif interdit de discrimination. Par contre, si votre image dérange parce que vous êtes en fauteuil roulant, grand brûlé, amputé ou obèse morbide, vous pourriez invoquer le motif du handica­p », explique Hélène Tessier, avocate spécialisée en droits de la personne, psychanalyste et professeure à l’Université Saint-Paul, à Ottawa. Si on vous rejette parce que vous avez l’air trop vieux, vous pourriez porter plainte pour discrimination selon l’âge.

(Source : L’actualité, « Code vestimentaire : que dit la loi québécoise ? » de Noémie Mercier, paru le 19 août 2010 – merci à Nicolas Roberge de m’avoir doublement pointé l’article sur Twitter.)

Donc, voilà, comme me le spécifiait Nicolas, « Ils ont limité la discrimination à l’âge, le sexe et la religion. Les bars pourront encore embaucher que des pitounes. » Je lui ai spécifié, en d’autres mots, qu’il reste que les bars « vendent » un peu ça, quand même, des employés d’apparence agréable, pour accompagner les alcools. Mais j’aurais voulu étayer un peu plus ma pensée, surtout la développer, mais les 140 caractères maximums de Twitter sont un carcan trop mince pour y arriver… (Voilà aussi pourquoi les blogues ne mourront pas de sitôt!)

On le sait tous que dans n’importe quel emploi (qui ne demande pas de préalable d’apparence), à compétence égale on choisira même sans s’en rendre compte le candidat le plus beau, c’est dans la nature humaine. (S’il s’agit d’un homme et d’une femme et non de deux candidats du même sexe, la femme aura beau être superbe, c’est moins sûr que la balance penchera de son côté… Mais bon, c’est un autre débat.) Alors, il est bien évident qu’il y a de la discrimination en jeu pour la personne moins belle, malgré ce trou dans la loi! Voilà où se trouve la limite de la Charte pour aplanir les différences.

La Charte des droits et libertés de la personne proscrit la discrimination « fondée sur la race, la couleur » et pourtant le concept même de « race humaine » est scientifiquement fortement contesté. Ce qu’on appelle communément « race » est en fait le résultat d’une évolution de proximité génétique à très long terme. Quoi qu’il en soit, il est question de juger quelqu’un sur des considérations hors de son contrôle, soit son hérédité, sa génétique. Tout comme la personne laide en fait, même si le résultat est dû à une loto génétique qui concerne plus particulièrement la parenté immédiate.

Je crois donc qu’il faudra revoir un jour cette question, si on veut conserver une certaine logique dans cette charte. Un beau projet pour activer grandement les méninges des gens qui pensent et rédigent ces lois!

(Photo – modifiée : ventanazul)

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Dossier Santé (4ieme partie): La Hollande


Ceci est la 4ieme partie de mon Dossier Santé dans lequel j’explore divers systèmes de santé à travers le monde dans le but de démontrer comment notre système pourrait être amélioré en puisant des idées qui ont déjà fait leur preuve ailleurs. Cette semaine, je ferai une survol du système de la Hollande.

Pourquoi la Hollande?

La Hollande est un cas intéressant à étudier car elle partage certaines caractéristiques démographiques communes avec le Canada. Ce sont deux pays riches avec un âge médian et une espérance de vie similaires, et un taux de fécondité relativement bas qui fait les rend assez comparables au niveau du vieillissement de leurs populations respectives. En 2006, les hollandais ont entrepris une réforme en profondeur de leur système de santé qui a vu son gouvernement passer de gestionnaire principal du système au rôle de régulateur et qui a confié la gestion du financement, des coûts et de la prestation des soins par les assurances, les professionnels de la santé et les administrations d’hôpitaux. Leur système a beaucoup en commun avec celui de la Suisse. Il est devenu un marché contrôlé où les principaux acteurs sont les assureurs, les pourvoyeurs et les patients.


La Hollande en chiffres.

Canada

Hollande

Population (2007) en millions

32 876

16 419

Âge médian

39

4o

PIB par habitant ($ PPA int.)

35 310

39 310

Dépenses de santé % du PIB (2006)

10,0

9,4

Dépenses de santé par habitant ($ PPA int.)

3 673

3 481

Espérance de vie à la naissance (2007)

81

80

Nbre de Médecins par 10 000 habitants

19

37

Nbre d’infirmières et sages-femmes par 10 000 habitants

101

146

Nbre de lits d’hôpitaux par 10 000 habitants

34

48

(Source: OMS)

Les données de l’OMS de la Hollande se comparent favorablement avec les moyennes européennes, mais comme vous pouvez le constater, la Hollande surpasse de loin le Canada au niveau de la densité du personnel soignant et des lits d’hôpitaux. D’après mes lectures, il existerait des listes d’attentes dans certaines spécialités, mais elles deviennent de moins en moins longues. Malheureusement, puisque leur réforme est relativement récente, il n’existe pas de données assez récentes pour pouvoir constater s’il y a eu des améliorations, mais si on se fie aux résultats de la Suisse, on pourrait s’attendre à voir une différence.

Financement

Avant la réforme de 2006, le financement des soins était assuré par une mixité d’assurance publique obligatoire doublée d’assurances supplémentaires volontaires d’assureurs privés. La réforme de 2006 a tout changé. Les soins sont maintenant financés à 100% par des assureurs privés dans un marché régulé par l’état. Comme la Suisse, il existe une assurance de base obligatoire à tous et relativement peu coûteuse (90 euros/mois par adulte, gratuit aux moins de 18 ans). Contrairement à la Suisse, les Hollandais ont très peu à débourser de leurs poches, ce qui rend les soins très accessibles, mais augmente le risque moral. En n’étant pas exposés au coûts réel des soins, les hollandais ne seront pas aussi encouragés à changer certaines habitudes de vie, comme le font les suisses et les singapouriens et presque un hollandais sur deux est considéré comme obèse. Par contre, vu que le gouvernement ne s’est conservé qu’un rôle de régulateur de marché, les décisions médicales, les négociations des prix et des coûts sont maintenant entre les médecins, leurs patients et les assureurs.

L’assurance de base couvre:

  • Tous les soins médicaux prodigués par des médecins généralistes, spécialistes et hôpitaux
  • Les séjours dans un hôpital
  • Les soins dentaires jusqu’à l’âge de 18 ans. (Après quoi vous n’êtes couvert que pour les soins dentaires spécialisés et les prothèses et couronnes)
  • Appareils médicaux et orthopédiques
  • Médicaments
  • Soins pré-nataux
  • Transport par ambulance
  • Soins paramédicaux


En bref, presque tout. Les compagnies d’assurances ne peuvent refuser aucune application pour l’assurance de base. Par contre il est possible de souscrire à une assurance supplémentaire sous forme d’assurance-groupe ou personnelle pour couvrir ce qui n’est pas inclus dans le plan de base. Le gouvernement rembourse les frais encourus par l’achat de l’assurance de base par les moins nantis selon leurs revenus. Ce n’est pas une couverture mur à mur comme au Québec, mais ça assure l’universalité d’accès aux soins tout aussi bien. Les hollandais sont libre de souscrire avec l’assureur de leur choix et peuvent changer d’assureur une fois par an. Les assureurs ne peuvent imposer des tarifs basés sur l’âge et le niveau de risque, mais peuvent se faire compétition sur leur prix et la qualité de leur service. Soit dit en passant, 80% des assureurs en Hollande fonctionnent sur une base à but non-lucratif.

La prestation des soins.

Les soins primaires sont assurés par les médecins omnipraticiens en pratique privé dans des bureaux individuels ou en clinique groupée. Ils agissent en gardiens de barrière pour le reste du système. On ne voit de spécialiste que sur référence et ceux-ci sont généralement dans les hôpitaux. La plupart des hôpitaux à soins de courte durée en Hollande sont publics, tandis que ceux à soins de longue durée sont privés, dont plusieurs à but non-lucratifs. La Hollande possède aussi un réseau extensif de soins à domicile administré en grande partie par les municipalités. Seule ombre au tableau, la densité d’appareils sophistiqués de diagnostic comme les MRI et les CT Scan est relativement faible. L’accès au pharmaceutiques y est cependant excellente. Et ils n’ont certainement pas de problèmes de pénuries de médecins et d’infirmières.

Conclusion.

Le système de santé hollandais est un système à surveiller. Il sera intéressant de voir l’impact de leur récente réforme sur leurs statistiques. La nouvelle dynamique de leur système mets les décisions et les moyens dans les mains des gens sur le terrain, plutôt que dans les mains de bureaucrates et ça ne peut que le rendre plus efficace. Je m’attendrais à voir ce système rivaliser avec la Suisse à très court-terme.

Sources:

European Observatory on Health Systems and Policies Netherlands HiT (2010)

The Grass Is Not Always Greener: A Look at National Health Care Systems Around the World.

OMS: Statistiques Sanitaires Mondiales 2010

Autres articles dans ce dossier:

  1. Dossier Santé: Introduction
  2. Dossier Santé (1ere partie): La Suisse
  3. Dossier Santé (2ieme partie): Singapour
  4. Dossier Santé (3ieme partie): Cuba – L’apartheid médical

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