
Ceci est la 4ieme partie de mon Dossier Santé dans lequel j’explore divers systèmes de santé à travers le monde dans le but de démontrer comment notre système pourrait être amélioré en puisant des idées qui ont déjà fait leur preuve ailleurs. Cette semaine, je ferai une survol du système de la Hollande.
Pourquoi la Hollande?
La Hollande est un cas intéressant à étudier car elle partage certaines caractéristiques démographiques communes avec le Canada. Ce sont deux pays riches avec un âge médian et une espérance de vie similaires, et un taux de fécondité relativement bas qui fait les rend assez comparables au niveau du vieillissement de leurs populations respectives. En 2006, les hollandais ont entrepris une réforme en profondeur de leur système de santé qui a vu son gouvernement passer de gestionnaire principal du système au rôle de régulateur et qui a confié la gestion du financement, des coûts et de la prestation des soins par les assurances, les professionnels de la santé et les administrations d’hôpitaux. Leur système a beaucoup en commun avec celui de la Suisse. Il est devenu un marché contrôlé où les principaux acteurs sont les assureurs, les pourvoyeurs et les patients.
La Hollande en chiffres.
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Canada
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Hollande |
Population (2007) en millions
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32 876
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16 419
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Âge médian
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39
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4o
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PIB par habitant ($ PPA int.)
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35 310
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39 310
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Dépenses de santé % du PIB (2006)
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10,0
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9,4
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Dépenses de santé par habitant ($ PPA int.)
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3 673
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3 481 |
Espérance de vie à la naissance (2007)
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81
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80
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Nbre de Médecins par 10 000 habitants
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19
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37
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Nbre d’infirmières et sages-femmes par 10 000 habitants
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101
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146
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Nbre de lits d’hôpitaux par 10 000 habitants
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34
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48 |
(Source: OMS)
Les données de l’OMS de la Hollande se comparent favorablement avec les moyennes européennes, mais comme vous pouvez le constater, la Hollande surpasse de loin le Canada au niveau de la densité du personnel soignant et des lits d’hôpitaux. D’après mes lectures, il existerait des listes d’attentes dans certaines spécialités, mais elles deviennent de moins en moins longues. Malheureusement, puisque leur réforme est relativement récente, il n’existe pas de données assez récentes pour pouvoir constater s’il y a eu des améliorations, mais si on se fie aux résultats de la Suisse, on pourrait s’attendre à voir une différence.
Financement
Avant la réforme de 2006, le financement des soins était assuré par une mixité d’assurance publique obligatoire doublée d’assurances supplémentaires volontaires d’assureurs privés. La réforme de 2006 a tout changé. Les soins sont maintenant financés à 100% par des assureurs privés dans un marché régulé par l’état. Comme la Suisse, il existe une assurance de base obligatoire à tous et relativement peu coûteuse (90 euros/mois par adulte, gratuit aux moins de 18 ans). Contrairement à la Suisse, les Hollandais ont très peu à débourser de leurs poches, ce qui rend les soins très accessibles, mais augmente le risque moral. En n’étant pas exposés au coûts réel des soins, les hollandais ne seront pas aussi encouragés à changer certaines habitudes de vie, comme le font les suisses et les singapouriens et presque un hollandais sur deux est considéré comme obèse. Par contre, vu que le gouvernement ne s’est conservé qu’un rôle de régulateur de marché, les décisions médicales, les négociations des prix et des coûts sont maintenant entre les médecins, leurs patients et les assureurs.
L’assurance de base couvre:
- Tous les soins médicaux prodigués par des médecins généralistes, spécialistes et hôpitaux
- Les séjours dans un hôpital
- Les soins dentaires jusqu’à l’âge de 18 ans. (Après quoi vous n’êtes couvert que pour les soins dentaires spécialisés et les prothèses et couronnes)
- Appareils médicaux et orthopédiques
- Médicaments
- Soins pré-nataux
- Transport par ambulance
- Soins paramédicaux
En bref, presque tout. Les compagnies d’assurances ne peuvent refuser aucune application pour l’assurance de base. Par contre il est possible de souscrire à une assurance supplémentaire sous forme d’assurance-groupe ou personnelle pour couvrir ce qui n’est pas inclus dans le plan de base. Le gouvernement rembourse les frais encourus par l’achat de l’assurance de base par les moins nantis selon leurs revenus. Ce n’est pas une couverture mur à mur comme au Québec, mais ça assure l’universalité d’accès aux soins tout aussi bien. Les hollandais sont libre de souscrire avec l’assureur de leur choix et peuvent changer d’assureur une fois par an. Les assureurs ne peuvent imposer des tarifs basés sur l’âge et le niveau de risque, mais peuvent se faire compétition sur leur prix et la qualité de leur service. Soit dit en passant, 80% des assureurs en Hollande fonctionnent sur une base à but non-lucratif.
La prestation des soins.
Les soins primaires sont assurés par les médecins omnipraticiens en pratique privé dans des bureaux individuels ou en clinique groupée. Ils agissent en gardiens de barrière pour le reste du système. On ne voit de spécialiste que sur référence et ceux-ci sont généralement dans les hôpitaux. La plupart des hôpitaux à soins de courte durée en Hollande sont publics, tandis que ceux à soins de longue durée sont privés, dont plusieurs à but non-lucratifs. La Hollande possède aussi un réseau extensif de soins à domicile administré en grande partie par les municipalités. Seule ombre au tableau, la densité d’appareils sophistiqués de diagnostic comme les MRI et les CT Scan est relativement faible. L’accès au pharmaceutiques y est cependant excellente. Et ils n’ont certainement pas de problèmes de pénuries de médecins et d’infirmières.
Conclusion.
Le système de santé hollandais est un système à surveiller. Il sera intéressant de voir l’impact de leur récente réforme sur leurs statistiques. La nouvelle dynamique de leur système mets les décisions et les moyens dans les mains des gens sur le terrain, plutôt que dans les mains de bureaucrates et ça ne peut que le rendre plus efficace. Je m’attendrais à voir ce système rivaliser avec la Suisse à très court-terme.
Sources:
European Observatory on Health Systems and Policies Netherlands HiT (2010)
The Grass Is Not Always Greener: A Look at National Health Care Systems Around the World.
OMS: Statistiques Sanitaires Mondiales 2010
Autres articles dans ce dossier:
- Dossier Santé: Introduction
- Dossier Santé (1ere partie): La Suisse
- Dossier Santé (2ieme partie): Singapour
- Dossier Santé (3ieme partie): Cuba – L’apartheid médical