Archives quotidiennes : 29 septembre 2010

Vive le hockey libre

Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans le monde le la rondelle québécoise et montréalaise. Un important député de notre Assemblée nationale, Pierre Curzi, nous le signalait clairement et calmement il y a deux ou trois semaines : l’équipe de hockey de Montréal, avançait-il sur cette glace mince, pose problème parce qu’elle ne reflète pas l’identité québécoise. Il y a là, selon lui, un «problème identitaire». C’était une manière polie, presque universitaire – de dire que l’équipe, nommée «canadien» ne représente pas la population où elle évolue et qui la paye.

C’est pourtant une évidence. Jusqu’à tout récemment l’équipe «canadien» (cela voulait dire jadis canadien-francais) – la seule de la ligue principale sur le territoire national – était le symbole sportif fort des Québécois.

La direction et la propriété du Club étaient anglaises, c’est vrai, mais il y avait assez de joueurs québécois pour que la population puisse avoir l’illusion de se trouver chez elle, de «s’identifier» à «son» équipe.

Maintenant les Québécois ne peuvent même plus se faire d’illusion. L’équipe «canadien» est devenue complètement «canadian». Il n’y a pratiquement plus de joueurs du pays d’ici dans cette formation; ils viennent d’un peu partout au Canada anglais et dans le reste de l’Amérique. Il n’y a qu’un pas à faire pour extrapoler; cela signifie que les propriétaires ont choisi, consciemment ou non, de faire de Montréal une ville «canadian» plutôt que québécoise. Et si on leur pose la question ils répondent que les Québécois ne sont intéressés qu’à «gagner» un point c’est tout. Comme si des joueurs québécois – qu’on trouve dispersés un peu partout en Amérique – ne pouvaient pas «gagner». C’est comme si l’équipe de foot du Mexique ne comptait pas de Mexicains et qu’on insistait pour que ceux-ci trouvent cela «normal».

Il y a un mot pour cela : c’est du colonialisme; un point c’est tout!

Il est vrai que la population de Montréal – en son centre – est portée sur l’anglais; les immigrants s’y mettent à loisir; il est aussi vrai que les familles françaises de Montréal vivent plus près de Terrebonne et de Repentigny que de la Place d’Armes, mais, tout compte fait, le Grand Montréal reste majoritairement français; pourvu que ca dure!

Et la métropole est encore québécoise.

Notre Assemblée nationale nous a donc mis la puce à l’oreille… Que faire?  Il faudrait commencer par prendre conscience du fait et s’en indigner. Les Québécois n’ont pas l’indignation facile, il est vrai… mais tout de même! il n’y a pas lieu de se féliciter de cette sorte de déconfiture.

Lors de la première partie du Canadian, cette année, le gardien de but Carey Price s’est fait copieusement huer; on a dit que cette déconvenue est due au fait que le joueur n’a pas bien performé. Peut-être bien. Mais n’est-ce  pas aussi, au fond, que ce joueur, originaire de la Colombie britannique, n’est pas de chez nous? N’était-il pas devenu le symbole d’un ailleurs auquel il est devenu impossible de s’identifier? Moi je pense que oui.

Et que font les journalistes dits «sportifs», ceux de La Presse notamment?  Ils se portent au secours de M. Price par des entourloupettes magiques, sans même mentionner qu’il y a un problème fondamental en l’instance; sans mentionner le débat ouvert par nos députés. Ces journalistes sont-ils si désincarnés qu’ils ne peuvent percevoir la nécessité pour un peuple de savoir se représenter, de prendre sa place dans l’univers ludique comme dans les autres?

Pour ma part je désire que les Québécois ne se divisent pas les uns contre les autres. Ils sont déjà assez fragilement pourvus comme ils le sont maintenant. Un club de hockey «canadian» de Montréal contre un club de hockey plus francais à Québec ce ne serait pas bon pour notre nation; cela briserait son âme en deux!

L’équipe de hockey «canadian» devrait appartenir à une société sans but lucratif et alors elle deviendrait vraiment canadienne et québécoise.  Actuellement ce club de hockey ne me représente pas; ce n’est pas «mon» équipe.

Jean-Pierre Bonhomme

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