Archives quotidiennes : 16 novembre 2010

Le cataplasme de l’autobus

La semaine dernière un journaliste représentant un grand journal a donné sa solution au problème de la contamination environnementale : les autobus. Selon son argumentation l’augmentation du nombre des autobus faisant la navette entre la lointaine banlieue et le centre-ville réglerait bien des problèmes, notamment ceux de la contamination de l’air, du désengorgement des grandes autoroutes et de la diminution de la surface des terres agricoles ; rien que cela! La multiplication des autobus permettrait ainsi aux banlieusards de réduire leur dépendance à la voiture automobile, l’instrument le plus polluant de l’histoire de l’humanité.

Comme dans tout débat il y a du vrai dans cette thèse : certains citoyens seraient vraiment tentés de prendre ces transports communautaires au lieu de la voiture privée… Mais rappelons-nous cette remarque cynique : «les citoyens de Laval ou de Repentigny sont en faveur du métro ou de l’autobus parce que cela inciteraient leurs voisins à prendre ces moyens collectifs et que cela leur permettrait à eux-mêmes de se rendre plus rapidement au centre ville avec leurs propres voitures. Mais passons.

Au fond des choses toute la question environnementale relative à la dispersion urbaine relève de la planification des ville; elle est tributaire des sciences de l’aménagement urbain et de l’architecture. En définitive s’il y a problème de contamination ou d’engorgement c’est à l’État de le régler, d’y remédier.

Au Québec l’État – l’organisme qui veille au bien commun – a été d’une négligence coupable. D’abord il n’a pas créé de ministère ou d’organisme qui veillerait au bon usage du sol (hormis une modeste protection de certains sols agricoles) et il a laissé l’aménagement des villes entre les mains des petits maires liés à des intérêts pécuniaires douteux. Il en résulte que toutes les familles québécoises d’ancienne souche sont partis vivre dans les champs de patates; oui presque toutes. Et dans des maisons qui ne gagneront pas toutes, loin de là, des prix d’architecture. Ces maisons, du reste, s’étendent de plus en plus loin autour de la métropole et de la capitale (oui la «vieille» capitale) et il y en a qui commencent à s’approcher de Trois-Rivières! Le gouvernement du Québec, responsable en l’instance, ne se formalise pas, il regarde le train passer; oui, certes, lui qui n’a pas de ministère de l’aménagement. L’aménagement urbain, au Québec, c’est le profit des promoteurs!  Un professeur d’architecture me soufflait à l’oreille, l’autre jour, qu’il n’a personne à qui parler, au gouvernement, s’il veut discuter de la bonne planification du territoire! La barque de l’État n’a pas de gouvernail!

Signalons ici qu’en bien des pays la protection des paysages est prise en charge par l’État.

Si les paysages français sont si attachants, s’il y a 70 millions de touristes dans ce pays-là, c’est parce qu’il y a un ministère de la Ville, et que maints organismes régionaux agissent pour empêcher la dispersion.

Personne ne s’en souvient, mais le premier ministre René Lévesque, avait proposé l’adoption d’une mesure qui aurait réglé bien des choses urbaines. Il avait proposé, dans son premier programme, la municipalisation des sols sur le territoire national. Une des raisons de la dispersion urbaine pernicieuse au Québec c’est le prix du sol. Le sol périphérique coûte peu, ce qui attire les acheteurs, et qui les nourrit d’illusions sur la rentabilité de leur achat. Si le prix des sols en milieu urbain central était mieux contrôlé il serait possible, avec une bonne architecture, d’intéresser les familles à rester en ville et à vivre dans la civilisation…

Or les politiques actuelles n’ont que pour effet de faciliter l’explosion urbaine. Les trains de banlieue aident les banlieusards à s’enfuir.  Et l’on voudrait régler toute cette question environnementale d’importance capitale en multipliant le nombre d’autobus? Vraiment!

C’est comme si le gouvernement voulait laisser les centre-ville à l’usage des sans domicile fixe; dans certaines parties de la rue Sainte-Catherine c’est déjà fait!

Est-il trop tard pour faire des Québécois de vrais urbains? Sont-ils destinés à tous vivre dans des «nowhere» culturels, dans des «no man’s land» insignifiants? On ne saurait le dire. La gangrène du désordre est avancée.

En tout cas il n’est pas trop tard pour l’État de créer des institutions – un ministère de l’aménagement par exemple – dont la vocation serait de protéger, de favoriser l’art de vivre en ville. Ce ne sera pas facile, car les députés, surtout ceux de la gauche «modérée», très modérée, représentent la banlieue et veulent se faire réélire. Ce sont eux qui réclament des autobus, des trains de banlieue, des métros périphériques. C’est le maire de Laval qui réclame des stations de métro; il s’en est déjà fait donner trois alors que nous savons fort bien que, pour être rentable, un métro doit desservir une quarantaine de demeures à l’acre et qu’à Laval il n’y en a que trois ou quatre (dans le meilleur).

Le chef d’un parti politique, Mme Marois, signalons le, possède un manoir en milieu agricole, comme un seigneur d’antan. Cette dirigeante, nous annonce qu’elle veut se construire une maison dans les champs de Charlevoix, supposément pour se faire réélire.

Comment pourra-t-elle corriger la situation d’une manière crédible en cette circonstance?

En tout cas il faudra certes lui demander quelle est sa politique à cet égard du désordre urbain national.

Poster un commentaire

Classé dans Actualité, Jean-Pierre Bonhomme