Archives quotidiennes : 31 janvier 2011

La crise de la sécurité publique… en 1 000 mots

Image Flickr par conner395

La première demande de l’individu en société est qu’on assure sa sécurité. Ce n’est pas d’hier, mais depuis toujours. On aurait dû apprendre à le faire. En fait, on l’a appris. Il y a des havres dans le monde, surtout en zone urbaine en Occident, où la sécurité est suffisante pour que l’on puisse marcher sur le trottoir en pensant à autre chose, ce qui n’a pas été le cas durant la plus grande partie de l’Histoire… Tout va bien. Où est la crise ? Elle est triple.

D’abord, on parle de havres. Le monde presque partout est encore une mer furieuse dont la violence n’est pas disparue. La crise, cependant, ce n’est pas qu’il faille se garder des brigands quand on traverse le Tanezrouft et des pirates quand on vogue sur la mer de Sulu ; c’est que les havres de sécurité dans le monde se font plus rares…

Il y a 50 ans, j’ai fait Paris-Delhi seul, par voie terrestre, sans arme et sans graves ennuis. Pratiquement sans risques. Toutes les frontières – Pakistan, Afghanistan, Iran, Irak, Syrie, Turquie et ce qui était la Yougoslavie se traversaient avec un passeport et/ou un petit cadeau. Le même périple aujourd’hui, exigerait une division blindée et un soutien aérien… On pouvait aussi faire l’Afrique à peu près partout il y a à peine 30 ans. Je ne suis plus volontaire.

Les havres se rétrécissent aussi sous nos yeux. Bien des villes sont maintenant entourées d’une zone de non-droit où il vaut mieux connaître le chef du gang local. D’autres, surtout aux USA, mais aussi dans le tiers-monde, sont devenues des beignes, avec au centre un trou dans la sécurité qu’on ne visite qu’à grand péril. Il faut mettre combien de baffes à une civilisation pour qu’elle comprenne qu’elle est en décadence ?

Deuxième aspect de la crise. De nouveaux dangers : les gangs, mais surtout l’individu. La bombe atomique chez les Russes, c’était le bon temps. Le plus grave problème n’est plus au niveau des États ; la technologie met maintenant un terrifiant pouvoir de nuire entre les mains non seulement de petits pays, mais de petits groupes et même des individus ! Je ne décrirai pas ces façons de nuire ou même de détruire un société, mais quiconque veut le faire y pensera tout seul.

Le plus grave problème n’est pas tant le révolutionnaire – il est visible et prévisible – que le pur cinglé. On disait, il y a quelques années, qu’une personne sur seize aux USA aurait dans sa vie au moins un épisode de désordre mental qui justifierait son institutionnalisation au moins temporaire…. Comment une société peut-elle se protéger contre 20 millions d’individus qui pourraient sans prévenir vous tirer dessus dans une école ou un centre d’achat ? Ou vous trancher la gorge dans le métro…

Troisième volet, le plus grave, une confusion des valeurs qui fait qu’on ne sait plus avec certitude ce qui est bien ou mal, ni donc qui est avec qui et contre quoi. L’injustice dans notre société nous donne à tous mauvaise conscience et l’on ne sait plus trop parfois s’il faut donner un croc-en-jambe au voleur qui fuit ou au gendarme qui le pourchasse. Quand un jeune Catalan fraude quelques banques de centaines de milliers d’euros, le clame partout et utilise l’argent pour financer Podem, un mouvement de contestation sociale, bien peu de gens que je connais en ont éprouvé une grande indignation.

Un escroc sans scrupules au Québec a ruiné des centaines de victimes à revenus modestes en leur prenant pour cent millions de dollars des épargnes de toute leur vie. Si l’une de ses victimes l’abattait froidement, à sa sortie de prison où il passera quelques mois, je continuerais, bien sûr, de défendre le principe qu’il ne faut pas se faire justice soi-même, mais est-ce qu’on pleurerait beaucoup dans les chaumières ?

Comment assurer la sécurité publique, si le citoyen ordinaire n’est pas INCONDITIONNELLEMENT du côté de l’ordre ? Combien de gens en France, au cours des récentes protestations contre la modification du système des retraites, souhaitaient qu’on mette les grévistes au pas… et combien regrettaient plutôt que la protestation ne soit pas plus musclée ?

On ne respecte plus l’ordre établi ; comment respecter un système qui permet les inégalités que nous voyons et dont la priorité est l’éradication du pavot plutôt que celle de la prostitution des enfants ? Les héros que la télévision nous montre faisant respecter la vraie justice sont souvent peints agissant hors des cadres du système ou même de la loi.

La sécurité est aussi en crise parce que le système actuel, conscient de ses inégalités, voit souvent le citoyen non pas comme celui que la police devrait protéger, mais comme un contestataire et donc un fauteur de trouble en puissance. Le citoyen lui rend bien ce manque de confiance et de soutien…

La solution n’est donc pas de mettre en place une force policière plus puissante ; ce serait de pouvoir compter sur l’appui omniprésent et sans réticence de la population pour prêter main-forte aux forces de l’ordre. Au palier de la vigilance, de la dénonciation des crimes, au besoin d’une intervention ponctuelle pour les prévenir.

Cet appui de la population n’est possible que si celle-ci est intimement convaincue que la loi est juste, percevant les forces de l’ordre comme une émanation d’elle-même appliquant une morale et de principes qui sont les siens, non pas comme un corps étranger de mercenaires à la solde d’une minorité et en protégeant les seuls intérêts.

C’est cette perception ce qui fait toute la différence entre un recrutement fascisant de la population pour qu’elle soutienne des mesures d’oppression et une conscription volontaire des citoyens pour défendre l’ordre contre le crime. C’est cette identification du citoyen à une police qui est à son service et non l’inverse, qui est la seule solution a une vulnérabilité telle de la société au crime que les mesures nécessaires pour s’en protéger rendraient notre liberté illusoire.

Pierre JC Allard
La crise de la sécurité publique… en 1 000 mots

La première demande de l’individu en société est qu’on assure sa sécurité. Ce n’est pas d’hier, mais depuis toujours. On aurait dû apprendre à le faire. En fait, on l’a appris. Il y a des havres dans le monde, surtout en zone urbaine en Occident, où la sécurité est suffisante pour que l’on puisse marcher sur le trottoir en pensant à autre chose, ce qui n’a pas été le cas durant la plus grande partie de l’Histoire… Tout va bien. Où est la crise ? Elle est triple.

D’abord, on parle de havres. Le monde presque partout est encore une mer furieuse dont la violence n’est pas disparue. La crise, cependant, ce n’est pas qu’il faille se garder des brigands quand on traverse le Tanezrouft et des pirates quand on vogue sur la mer de Sulu ; c’est que les havres de sécurité dans le monde se font plus rares…

Il y a 50 ans, j’ai fait Paris-Delhi seul, par voie terrestre, sans arme et sans graves ennuis. Pratiquement sans risques. Toutes les frontières – Pakistan, Afghanistan, Iran, Irak, Syrie, Turquie et ce qui était la Yougoslavie se traversaient avec un passeport et/ou un petit cadeau. Le même périple aujourd’hui, exigerait une division blindée et un soutien aérien… On pouvait aussi faire l’Afrique à peu près partout il y a à peine 30 ans. Je ne suis plus volontaire.

Les havres se rétrécissent aussi sous nos yeux. Bien des villes sont maintenant entourées d’une zone de non-droit où il vaut mieux connaître le chef du gang local. D’autres, surtout aux USA, mais aussi dans le tiers-monde, sont devenues des beignes, avec au centre un trou dans la sécurité qu’on ne visite qu’à grand péril. Il faut mettre combien de baffes à une civilisation pour qu’elle comprenne qu’elle est en décadence ?

Deuxième aspect de la crise. De nouveaux dangers : les gangs, mais surtout l’individu. La bombe atomique chez les Russes, c’était le bon temps. Le plus grave problème n’est plus au niveau des États ; la technologie met maintenant un terrifiant pouvoir de nuire entre les mains non seulement de petits pays, mais de petits groupes et même des individus ! Je ne décrirai pas ces façons de nuire ou même de détruire un société, mais quiconque veut le faire y pensera tout seul.

Le plus grave problème n’est pas tabt le révolutionnaire – il est visible et prévisible – que le pur cinglé. On disait, il y a quelques années, qu’une personne sur seize aux USA aurait dans sa vie au moins un épisode de désordre mental qui justifierait son institutionnalisation au moins temporaire…. Comment une société peut-elle se protéger contre 20 millions d’individus qui pourraient sans prévenir vous tirer dessus dans une école ou un centre d’achat ? Ou vous trancher la gorge dans le métro…

Troisième volet, le plus grave, une confusion des valeurs qui fait qu’on ne sait plus avec certitude ce qui est bien ou mal, ni donc qui est avec qui et contre quoi. L’injustice dans notre société nous donne à tous mauvaise conscience et l’on ne sait plus trop parfois s’il faut donner un croc-en-jambe au voleur qui fuit ou au gendarme qui le pourchasse. Quand un jeune Catalan fraude quelques banques de centaines de milliers d’euros, le clame partout et utilise l’argent pour financer Podem, un mouvement de contestation sociale, bien peu de gens que je connais en ont éprouvé une grande indignation.

Un escroc sans scrupules au Québec a ruiné des centaines de victimes à revenus modestes en leur prenant pour cent millions de dollars des épargnes de toute leur vie. Si l’une de ses victimes l’abattait froidement, à sa sortie de prison où il passera quelques mois, je continuerais, bien sûr, de défendre le principe qu’il ne faut pas se faire justice soi-même, mais est-ce qu’on pleurerait beaucoup dans les chaumières ?

Comment assurer la sécurité publique, si le citoyen ordinaire n’est pas INCONDITIONNELLEMENT du côté de l’ordre ? Combien de gens en France, au cours des récentes protestations contre la modification du système des retraites, souhaitaient qu’on mette les grévistes au pas… et combien regrettaient plutôt que la protestation ne soit pas plus musclée ?

On ne respecte plus l’ordre établi ; comment respecter un système qui permet les inégalités que nous voyons et dont la priorité est l’éradication du pavot plutôt que celle de la prostitution des enfants ? Les héros que la télévision nous montre faisant respecter la vraie justice sont souvent peints agissant hors des cadres du système ou même de la loi.

Las sécurité est aussi en crise parce que le système actuel, conscient de ses inégalités, voit souvent le citoyen non pas comme celui que la police devrait protéger, mais comme un contestataire et donc un fauteur de trouble en puissance. Le citoyen lui rend bien ce manque de confiance et de soutien…

La solution n’est donc pas de mettre en place une force policière plus puissante ; ce serait de pouvoir compter sur l’appui omniprésent et sans réticence de la population pour prêter main-forte aux forces de l’ordre. Au palier de la vigilance, de la dénonciation des crimes, au besoin d’une intervention ponctuelle pour les prévenir.

Cet appui de la population n’est possible que si celle-ci est intimement convaincue que la loi est juste, percevant les forces de l’ordre comme une émanation d’elle-même appliquant une morale et de principes qui sont les siens, non pas comme un corps étranger de mercenaires à la solde d’une minorité et en protégeant les seuls intérêts.

C’est cette perception ce qui fait toute la différence entre un recrutement fascisant de la population pour qu’elle soutienne des mesures d’oppression et une conscription volontaire des citoyens pour défendre l’ordre contre le crime. C’est cette identification du citoyen à une police qui est à son service et non l’inverse, qui est la seule solution a une vulnérabilité telle de la société au crime que les mesures nécessaires pour s’en protéger rendraient notre liberté illusoire.

Pierre JC Allard

http://nouvellesociete.wordpress.com/ordre-securite/

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