Archives quotidiennes : 29 mai 2011

Puerta del Sol. On brise la boussole…

Il y a dejà longtemps que je dis qu’aucune organisation révolutionnaire ne  pourra détruire  le Système, car aucune organisation ne pourra être mieux « organisée » ni disposer d’autant de ressources. Par la force ou la corruption, le Systeme peut triompher de toute organisation rivale.   Ce sont des INDIVIDUS  visant un même objectif, mais ne se constituant pas en groupes, qui abattront le Système en le sabotant, chacun à sa façon. Une société complexe est extraordinairement vulnérable. Dès que le citoyen lambda ne VEUT PLUS que le Systeme fonctionne, le Systeme s’effondre.  C’est ce qui se produit quand le ras-le-bol passe le seuil ou le citoyen lambda accepte le risque de l’anarchie.  Mai 68 apparait alors comme une répétition générale.

Sur la question des retraites, l’an dernier, la France a fait un pas… puis a reculé.. Ce qui se passe en Espagne va plus loin. Jusqu’où iront les INDIGNADOS  qui manifestent ? On ne sait pas encore. Tout peut basculer vers la violence armée ou se calmer  sous les matraques…  Mais il y a une chose qu’on ne souligne pas assez. Pendant que le peuple occupe la rue en mode insurrectionnel… il répudie la gouvernance socialiste  au pouvoir et vote massivement à DROITE ! Les Espagnols ont-ils perdu la boussole ? Sont-il a réclamer plus de pouvoir pour ceux qui les matraquent ?….

Il y a une autre hypothèse. Que les Espagnols n’aient pas voté POUR la Droite mais simplement CONTRE la Gouvernance.  Il appert que cette gouvernance se disait de Gauche, mais les Espagnols ont peut-être compris que la vieille boussole qui disait « Gauche »‘ et « Droite »  n’a simplement plus de sens.

Dans une société industrielle où il y avait encore pénurie, on a pu, pendant des décennies,  jouer le scénario de manipulation « démocratique » d’une société industrielle.   On identifie des pôles Gauche-Droite et les électeurs se situent sur une seule droite  avec un gonflement au centre, en forme de courbe de Gauss, passant dans une continuité souple d’un extreme à l’autre.

On oppose ainsi ceux du RSA, du SMIC et autres perdants  à gauche aux « nantis » a Droite qui gagnent 5 ou 6 fois leurs salaires et qu’on leur présente comme adversaires.  Ça marche , car s’il n’y en a pas pour tout le monde, on se bat pour les os… Par de petites manipulations  au centre, on pouvait faire basculer la majorité politique en alternance, d’une gauche molle a une droite molle…

Mais les choses ont changé.  On est dans une société tertiaire, postindustrielle d’abondance ou la pauvreté est un choix politique. On maintient l’illusion d’une courbe de Pareto avec des revenu en gradation continue, mais la réalité c’est que, depuis deux générations, une toute petite minorité ramasse TOUTE la plus value du progrès et de l’augmentation de la productivité.   Le pauvre qui entend parler milliards voit tout a coup que son  voisin « nanti »  n’est lui-même qu’une pauvre cloche.

Il comprend que l’adversaire qu’on lui désignait n’était la que pour servir de pare feu et de bouc émissaire, comme ces Indiens juste un peu moins maltraités que les Noirs, qu’on importait et qui servaient de contremaitres en Afrique durant la colonisation britannique. Ces Indiens qui ont été massacrés à l’Indépendance, alors que les maitres prenaient le paquebot en première classe et rentraient retrouver leur compte de banque dans la City.

Il voit que le vrai clivage n’est plus entre lui, smicard, et le petit professionnel ou rentier qui a quelques sous,  mais entre plus de 99% de la population « en bas » qui est manipulée pour se disputer des fonds d’écuelle, alors qu’une richesse colossale demeure virtuelle entre les mains d’une infime oligarchie… qui est « en haut »…

Les Espagnols du PSOE comme ceux du PP comprennent maintenant que la Gauche n’est qu’un autre nom pour la Droite. Ils brisent la boussole  et votent contre le gouvernement « de gauche » de Zapatero, tout aussi prêts à voter demain contre un gouvernement de droite. Ils ont saisi la totale hypocrisie et futilité du leurre démocratique: manipulation médiatique pour tous tout le temps et corruption ponctuelle pour les cas difficiles. La seule gouvernance qu’ils veulent, c’est celle qu’ils se bâtissent à la Puerta del Sol.  Ce qui est aussi près de l’anarchie qu’on peut l’être sans se dire anarchiste. Et tout près du seuil de cette « action individuelle » qui peut détruire le système.

Cette prise de conscience de la fumisterie démocratique peut amener de grandes surprise lors des prochaines élections en Espagne…  et en France aussi. Parler d’élections, d’ailleurs, est le « bon »‘ scénario, car tout va très vite. Le danger n’est pas nul que, tôt ou tard, les 99% de jocrisses bernés par leur patron, leur deputé, leur leader syndical, leur banquier et le journal de 20 heures se souviennent que l’on a guillotiné exactement 2780 personnes à Paris durant la Révolution, ce qui a résolu un probleme qui trainait depuis longtemps.

« Mauvais » scénario, triste et brutal, mais 2780 personnes, ce n’est même pas le nombre de victimes d’une petite bataille qui ne fait pas la Une, dans une de ces petites guerres de rien du tout que fomentent presque tous les mois ceux encore moins nombreux, banquiers et autres exploiteurs, qui causent tous les problèmes.

C’est une idée dérangeante et il vaut mieux parler d’élections. Mais ne nous imaginons pas trop que la vieille rengaine gauche-droite va faire florès cette fois.  Un consensus est à se créer contre « ceux d’en haut », ceux que j’ai appelés « cette mince pellicule de moisissure à la surface de la France ».

Si tout va bien et que la démocratie perdure et joue son rôle, c’est ceux qui comprendront ce rejet de « ceux d’en haut » qui seront portés par le zeitgeist de ce consensus et adoubés par le peuple au prochain scrutin. En Espagne, en France, même aux USA ! …  On fera quelques changements sans trop de dommages.  Mais si la démocratie est empêchée de s’exprimer et que les individus chacun pour soi décident de passer à l’acte il pourrai y avoir des dommages collatéraux.  Dans le monde où nous vivons et les injustices qu’il recèle, 2780 têtes de banquiers et d’exploiteurs pourraient ne pas peser bien lourd

Pierre JC Allard

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Le pari de Pascal revu, annoté et ajusté

Yan Barcelo, 28 mai 2010

« Pesons le gain et la perte, en prenant croix que Dieu est. Estimons ces deux cas: si vous gagnez, vous gagnez tout; si vous perdez, vous ne perdez rien. Gagez donc qu’Il est, sans hésiter. »  – Blaise Pascal (1623-1662)

 Le fameux « pari de Pascal » se veut une formule habile pour inciter les athées, incroyants et agnostiques à croire en Dieu, tout au moins à admettre qu’il s’avère nettement plus avantageux de croire en Lui. Mais les termes du pari, tout en conservant le postulat fondamental d’un pari, doivent définitivement être revus. Tout d’abord, il n’est pas certain que la « foi » et le monde de la chair et du plaisir sont antithétiques, comme Pascal l’implique ; ensuite, en cette époque où ne nombreux courants religieux balaient la société, le choix de « Dieu » n’est pas nécessairement le plus indiqué.

Le pari, formulé par ce génie protéiforme du XVIIe siècle Blaise Pascal, est une tentative de démontrer qu’il est infiniment préférable de croire en Dieu que de ne pas croire en lui. Présentons rapidement les termes de l’argument: ou je crois en Dieu ou je n’y crois pas. Si je crois en Lui, cela entraîne de renoncer aux plaisirs terrestres, mais je gagnerai en contrepartie un bien infini, la béatitude. Si je ne crois pas en Lui, alors ma mort débouchera sur un néant pur et simple. Pascal dit que je n’aurai rien perdu, mais c’est une erreur par laquelle il ne fait que démontrer son préjugé janséniste : j’aurai perdu quelques plaisirs souvent fort agréables quoique, convenons-en avec Pascal, fort fugaces et très fragiles.

Le propos de Pascal n’est pas seulement d’inciter les gens à croire en Dieu. On peut croire qu’il veut aussi faire valoir qu’il est inutile de tenter de faire reposer la découverte de Dieu sur un acte de la seule raison. Croire en Dieu tient à une opération obscure qui relève davantage de l’intuition, de la sensibilité et de l’affectivité que de la raison. Pour preuve, je gage qu’on pourrait compter sur une main le nombre d’incroyants que ce pari a convertis.

Mais le choix de Dieu que propose Pascal est trop large : après tout, on peut à juste titre demander qui est Dieu et comment choisissons-nous de le caractériser. Est-il personnel, transcendant et justicier, comme dans la Bible ? Personnel, transcendant et aimant, comme dans les Évangiles ? Impersonnel et immanent, comme dans l’hindouisme ? Ou simplement mis hors jeu, comme dans le bouddhisme ?

La question théologique de « Qui est Dieu ? » est tout simplement trop large pour emporter l’assentiment aujourd’hui. Ou, plus exactement, demander de faire le passage à Dieu impose un trop grand saut qui relève d’une intuition trop particulière. Pour être valable aujourd’hui, le pari de Pascal devrait se poser en termes d’une question préliminaire, plus accessible pour la plupart à une intuition intime. Cette question, la voici : y a-t-il quelque chose qui survit après la mort physique, une « âme » en quelque sorte, qui est appelée à vivre un destin « cosmique » au-delà du temps de vie du corps physique ? Ou la mort physique est-elle radicale ? Après elle, il n’y a rien, rien du tout.

Tout d’abord, cette question pose le véritable problème de toutes les grandes religions, qui sont toutes des sotériologies, c’est-à-dire qu’elles se soucient du salut individuel. Toutes affirment que la nature humaine est en chute ou pervertie, oublieuse de sa nature divine ou paradisiaque originelle, et toutes proposent de renouer avec cette nature divine. Pour toutes les grandes religions, l’exercice essentiel de cette vie est la purification, le nettoyage des passions, de façon à assurer que l’après-vie soit le moins éprouvante possible et que l’individualité puisse poursuivre son cheminement vers le divin.

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