Archives quotidiennes : 1 août 2011

Claude Robinson et les Martiens

Si vous êtes Québécois, vous savez sans doute qui est Claude Robinson.   Sinon, disons simplement que Claude Robinson est un artiste québécois dont l’oeuvre a été plagiée… il y a 16 ans.   Si vous êtes étranger, vous vous étonnerez peut-être qu’on en parle encore.   Vous faites fausse route.  La question ici n’est pas qu’on en parle encore, mais qu’on en parle enfin…  Claude a vécu le parcours du combattant. Il a rencontré des Martiens.

Nous avons tous appris, la semaine dernière, qu’après 30 ans de va-et-vient dans la proche banlieue de la Terre, les navettes du programme d’exploration américain avaient été mises en veilleuse sans même retourner dire bonjour à la Lune, encore moins s’aventurer vers Mars. Dommage… J’espère qu’on aura laissé un bol de riz sur l’ISS pour ceux qui prendront la relève. Notre civilisation n’a plus la force d’explorer.

Je ne sais pas pourquoi nous ne voulons plus aller sur Mars, mais j’ai peur de le comprendre : les Martiens sont parmi nous et ça nous enlève le goût d’explorer, même le goût de vivre, parfois.  Les « Martiens», ce sont ces élites qui nous gouvernent et nous possèdent et qui ne pensent plus du tout comme nous.  Mais alors, pas du tout !  Ils sont si différents que, s’ils sont humains, on n’en voit plus la trace. On leur a déjà donné tous les noms d’oiseaux. Disons simplement « les Martiens »

Il y a plusieurs espèces de  Martiens.  Les Martiens milliardaires capitalistes, par exemple, les quelques milliers qui engrangent la moitié de la richesse du monde et défèquent dans le reste en pourrissant les systèmes de production, pendant que des milliards de gens souffrent et meurent. Ces Martiens peuvent prévoir à cinq ans une inflexion des cours de la Bourse, mais pas à plus de trois jours d’avis la plus grande famine en soixante ans dans la Corne de l’Afrique.

C’est que pour la famine, ils comptent que la charité populaire s’en chargera. Que les moins pauvres s’occuperont des plus pauvres, mais n’emmerderont pas les riches… Il vaut donc mieux organiser les collectes de fonds et jouer sur l’urgence en retardant la nouvelle. Ils ne pensent plus du tout comme nous, ces Martiens.  Faut-il vraiment leur garder une place parmi nous ?

Il y a aussi les Martiens-fonctionnaires…  L’armée d’occupation des exploiteurs, qui ne font généralement rien pour nuire, mais nuisent beaucoup en ne faisant rien. Assez de fric pour l’aisance, assez de loisir pour la santé, assez d’arrogance pour l’insolence. Je n’ai pas le courage ni le temps de faire la liste des organismes totalement inutiles où s’activent comme des hannetons ces Martiens-fonctionnaires qui se sont créés de petites niches dont ils tirent une rente, comme autant de fiefs d’Ancien Régime.

Les Martiens-fonctionnaires parlent entre eux un sabir qu’eux seuls comprennent et voient comme des victoires de l’esprit d’avoir mémorisé les numéros des formulaires dans lesquels ils enverront se perdre ceux qui ont des problèmes et ne connaissent pas les numéros magiques. Ici, on est Martien par apprentissage, au contact répété de l’insignifiance les uns des autres.

Pourquoi, par exemple, à l’hôpital, l’ordinateur ne peut-il pas obtenir tous les renseignements sur le patient à partir de sa carte de la RAMQ ?  Pourquoi faut-il lui poser des question administratives avant de le traiter ? Voyez la chronique de Lagacé dans la Presse du 21 juillet. (J’ai dénoncé il y a 20 ans, ces jaquettes «conçues pour l’humiliation »). Tout le système est inhumain. Étrange et étranger. Martien.

Au sein des Martiens-fonctionnaires, il faut pointer du doigt une catégorie encore plus martienne que les autres et leur réserver une place à part : les Martiens du système judiciaire.  C’est à eux que vient de se frotter Claude Robinson.  Quand on regarde  ce qui s’est passé, il est de plus en plus évident que le système judiciaire ne pense pas du tout comme nous. Il est un vestige d’une autre époque et d’une autre façon de penser. Un temps où connaître la loi devait conférer un avantage à celui qui savait sur le pauvre mec qui ne savait pas. On a donc mis l’accent sur le formalisme, le rituel, les délais, les procédures, tout ce qui peut permettre de faire triompher le droit sur le bon droit. Mais ce n’est plus ce que nous, humains, souhaitons. Nous ne voulons plus qu’on apprivoise l’injustice, mais qu’on lui brise les reins.

Un tribunal humain avait accordé des dommages exemplaires à Claude Robinson. En appel on décide que c’est trop. Les Martiens sont intervenus. La population du Québec ne pense pas qu’il soit juste de réduire les dommages que doivent payer des fraudeurs à Robinson. Elle le voit comme une autre ignominie.

Elle a tort. Ce n’est que pour le vulgaire que le jugement a l’apparence d’une ignominie. Ce n’est en fait qu’une injustice découlant d’une pusillanime et donc stupide observance d’une jurisprudence bâtie sur des décisions en retard sur la réalité. Il reste qu’il faudrait mettre aux archives cette jurisprudence malfaisante et à la retraite ceux dont l’expertise consiste à s’en être nourris.

Ce qui OUI, est bien une ignominie, c’est que le système ait pris 15 ans pour juger de l’affaire Robinson, ce qui est au mieux inepte et au pire malhonnète, puisque Robinson, toutes ces années durant, n’a pu avoir accès au système judiciaire qu’en payant des montant colossaux aux Martiens du Barreau, une sous espèce particulièrement inhumaine qui en contrôle l’entrée.

En réduisant les dommages qu’il touchera pour s’ajuster à des précédents sans pertinence – car chaque cas est différent – et en ne considérant pas les dépenses que lui impose un système voyou – car s’il faut payer pour obtenir justice, on n’est pas dans un État de droit – le tribunal en est arrivé a un quantum qui ne compense pas les dommages qu’a subi Robinson et ne punit pas vraiment les fripouilles qui l’ont dépouillé. Une décision inhumaine.

Les Québécois ne se reconnaissent pas dans ces Martiens du judiciaire, grassement payés, qui retardent la justice ou tardent tant à la rendre qu’ils la rende impossible et renvoient Robinson ruiné. Et ce n’est que le dernier de ces désaccords. Ils ne sont pas NOUS. Ce n’est plus NOTRE justice, mais la leur, et elle ne  nous satisfait pas.

La vaste majorité des Québécois ne se reconnaissent pas dans les simagrées d’un procès qui pourraient remettre en liberté Guy Turcotte, le fou homicide qui a tué ses enfants. Ils ne se reconnaissent pas davantage dans cette affaire Bastarache, que la population considère largement comme un enfumage pour couvrir le favoritisme du gouvernement et détourner l’attention de la demande populaire pour une enquête sur l’industrie de la construction.

La population est en profond désaccord, aussi, avec la sentence légère qu’on a donnée à l’escroc Lacroix qui a ruiné des milliers de pauvres gens, pendant qu’on joue sur les mots et qu’on fait tout pour ne pas reconnaitre les erreurs du système et ne pas en compenser les victimes, comme un certain Dumont dont on nous fera oublier qu’il existe. NE PAS reconnaître les erreurs qui se multiplient au rythme du laisser aller des Martiens-fonctionnaires et de la négligence des Martiens du judiciaire au moment de leur faire corriger leurs erreurs.

La population ne se reconnaît pas dans un système judiciaire issu des élites de notre société et qui ne reflète pas les valeurs du monde ordinaire. Elle se sent trahie, méprisée, en pays conquis et occupé par des Martiens. Je crois que sont de plus en plus nombreux ceux qui n’attendent plus de justice de ce système. On commence à rendre à nos élites le mépris pour le mépris… et on pourrait un jour leur rendre le mal pour le mal.
Pierre JC Allard

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