Qui est cet ego dont on parle tant, mais qu’on ne peut voir ni toucher? Existe-t-il vraiment? Il me fait penser aux petits rongeurs qui entrent sournoisement dans nos maisons, qu’on ne voit pas, mais qui laissent leurs excréments dans le bas des armoires. L’ego agit de cette façon : c’est par les traces destructrices qu’il laisse dans notre vie qu’on peut attester de sa réalité.
Quelques définitions provenant de diverses sources
Avant de poursuivre, jetons un coup d’œil sur quelques définitions provenant de diverses sources.
A) LE PETIT LAROUSSE
Sujet conscient et pensant
Le moi
B) WIKIPEDIA – description générale
L’ego est un substantif tiré du pronom personnel grec (eyo) – le JE-MOI. Il désigne généralement la représentation et la conscience que l’on a de soi. Il est tantôt considéré comme le soutien de la personnalité OU comme une entrave à notre développement spirituel.
C) PHILOSOPHIE
L’ego serait l’équivalent psychologique de la conscience au sens philosophique. Mais un ego est un JE au sens cartésien, un JE qui perçoit des informations, les traite et les exprime. Dans une conception PLATONICIENNE de la conscience de soi, l’ego est un JE sans la conscience.
D) CONCEPT PSYCHANALYTIQUE
L’ego en tant que concept psychanalytique, cette notion est au cœur de l’ego. Doctrine psychanalytique développée aux Etats-Unis par Ernst Kris, Heinz Hartmann et Rudolph Loewenstein. Précisons que Anna Freud a fait de l’ego le centre de la réalité du sujet.
E) L’EGO DANS LA SPIRITUALITÉ
L’ego serait une représentation fausse qu’un individu se ferait de lui-même et ferait écran à sa vraie nature. Certains auteurs parlent de l’ego comme d’une fausse personnalité constituée de souvenirs et d’expériences, qui diffère de la personnalité originale de tout être humain, un produit de sa naissance et de son héritage génétique. Cette confusion produirait une illusion qui prive ceux qui en sont prisonniers, d’une vraie liberté et les enchaînerait à des schémas de souffrance (ego central, orgueil, amour-propre, perceptions erronées du monde …). Une personne libérée de son ego connaîtrait l’éveil spirituel.
F) DANS LE CHAMP DU TRANSPERSONNEL
L’ego est souvent utilisé en distinction du SOI (moi supérieur). En anglais, on dit SELF ou HIGHER-SELF. Pour certains enseignements spirituels, l’ego n’a pas réellement de réalité. Il ne serait qu’un COMPLEXE produit par des constructions mentales et des dysfonctionnements psychologiques.
G) SELON LE BOUDDHISME
Le bouddhisme perçoit l’ego comme une construction mentale ne correspondant à aucune réalité tangible. Il s’interroge : «OÙ L’EGO PEUT-IL ÊTRE SITUÉ? DANS LES BRAS, LES JAMBES?» L’objectif – selon le bouddhisme – est de réaliser qu’il n’est ni dans le corps ni dans l’esprit.
H) SELON MATTHIEU RICARD, DOCTEUR EN BIOLOGIE MOLÉCULAIRE À L’INSTITUT PASTEUR À PARIS AVANT DE DEVENIR BOUDDHISTE
Il parle de la confusion mentale comme le voile qui empêche de percevoir clairement la réalité – et obscurcit la compréhension de la nature véritable des choses. Sur le plan pratique, c’est l’incapacité de discerner les comportements qui permettent de trouver le bonheur et d’éviter la souffrance. La plus perturbatrice des confusions est celle qui consiste à s’attacher à la notion d’une identité personnelle : l’ego. Le bouddhisme distingue un JE instinctif inné – lorsqu’on pense par exemple J’AI FROID ou JE ME RÉVEILLE – du moi conceptuel de l’ego formé par la force de l’habitude que l’on se représente comme le noyau de notre être.
I) LE PHILOSOPHE BOUDDHISTE HAN DE WIT
L’ego est une réaction affective à notre champ d’expérience. Un mouvement de recul, basé sur la peur. Cette peur nous fait nous retrancher dans une bulle pour nous protéger. L’ego est le résultat d’une activité mentale qui crée et «MAINTIENT EN VIE» une entité imaginaire dans notre esprit.
J) DÉFINITION DU DR DEEPAK CHOPRA
De l’avis du Dr Deepak Chopra, auteur de plusieurs livres sur l’être humain et ses possibilités, nous serions confrontés à deux réalités distinctes, à deux étiquettes opposées.
Qui sommes-nous?
- un corps matériel, un MOI PERSONNEL et EXTÉRIEUR, confronté aux objets et aux autres, et qui a besoin d’approbation. C’est le petit moi, ou l’ego, dont il faut prendre soin, qui a besoin de s’épanouir. Nous avons la responsabilité de l’aider à se développer, mais il nous faut éviter de tomber dans le nombrilisme;
- le GRAND SOI, le MOI INTÉRIEUR ET IMPERSONNEL, qui provient de l’esprit, qui est immatériel et invisible;
*Il n’est pas toujours facile et simple de gérer ces deux réalités qui semblent tellement opposées l’une à l’autre. En résumé, nous serions faits d’une référence au SOI, en tant qu’esprit, et d’une référence à l’objet – des objets extérieurs qui nous influencent et qui nous font demander l’approbation des autres. De plus, nos concepts FIGENT les choses en entités artificielles et nous font perdre la liberté intérieure, comme l’eau perd sa fluidité lorsqu’elle se transforme en glace.
La réalité de l’ego tiendrait à l’identification personnelle
Même si l’ego n’a pas de réalité concrète, il agit comme s’il était réel, essentiellement parce que nous nous identifions à lui. Je dirais même que l’ego, c’est de croire que nous sommes le mental. Ce qui nous amène à nous poser la question suivante : «Ma valeur dépend-elle de ce que je fais ou de ce que je suis?» L’ego nous fait faire un usage abusif du JE, ME, MOI, MES. Pourquoi? C’est une façon de marquer notre territoire, notre valeur et notre force. Nous devenons alors des MADAME J’AI, des MONSIEUR J’AI. Voici quelques exemples : MES amis, MA maison, MES arbres, MES fleurs, MON argent, MA pensée, MA vision, MA rue, MA femme, MON mari, MES enfants, MA femme de ménage, MON homme à tout faire, MON contracteur, MA secrétaire, MES employés. Et d’autres expressions hautement ridicules lorsqu’utilisées par des gens d’affaires en réunion : MES terrains … MES locataires…MON budget… MON personnel… MES ÉDIFICES… MES administrateurs, etc. Ces expressions – en apparence inoffensives – sont des appropriations de ce qui appartient à d’autres, et ne font que donner du poids à l’ego. Ces expressions ont aussi tendance à enfler la tête de ceux qui l’utilisent, un peu comme le personnage qui apparaît dans l’image ci-dessus.
Ces notions du MIEN se cristallisent dans l’esprit, engendrent un sentiment de dualité qui va former la base des afflictions mentales, soit désir aliénant, jalousie, haine, orgueil, ce qui va nous faire percevoir le monde dans le miroir déformant de nos illusions. Un exemple pour illustrer l’attachement au sentiment du MIEN donné par le Dalai Lama. Vous contemplez un magnifique vase de porcelaine dans une vitrine. Un vendeur maladroit le fait tomber. Vous vous dites «Quel dommage, un si beau vase!» En revanche, si vous venez d’acheter ce vase, que vous l’avez fièrement placé sur votre cheminée et qu’il tombe en se brisant en mille morceaux, vous vous exclamerez avec horreur : «MON vase est cassé!» Et vous serez profondément affecté. L’unique différence entre les deux exemples est l’étiquette du MIEN attachée au vase.
Un homme qui revenait il y a quelques années de l’Inde racontait avoir vécu une expérience révélatrice en visitant une famille indienne où il constata que les gens se présentaient différemment qu’en Occident. Au lieu de dire «Voici ma femme, voici mon mari. Ils disaient Je SUIS la femme de … je SUIS le mari de … JE SUIS le fils de … » Je crois que cette distinction dans le langage fait une grande différence dans la perception que l’on peut avoir de soi-même. Une façon de s’exprimer mettant immédiatement l’attention sur le sens des responsabilités plutôt que sur la possession.
Devons-nous nous libérer de l’ego, le détruire, s’en défaire?
Non. Nous sommes pris avec. Nous devons faire avec. Il fait partie de nous. Dès que nous nous incarnons dans le monde de la matière, il y a dualité dans nos perceptions, d’où un constant sentiment de séparation et de comparaison. L’objectif n’est pas de se défaire de l’ego, mais d’y accorder moins d’importance, de ne pas lui donner la place d’honneur. Nous en reparlerons dans la deuxième partie.
Les faiblesses et caractéristiques de l’ego
À mon avis, l’ego ne s’aime pas et vit dans une perpétuelle rage. Ou un roman d’amour de soi qu’un rien extérieur peut faire vaciller. Il y a un instinct de destruction chez l’ego – l’instinct du tueur. Les tyrans, entre autres, possèdent cet instinct du tueur jusqu’à outrance. Cependant, il n’y a pas qu’eux. On peut paraître gentil, et avoir des secteurs dans notre vie où cet instinct de destruction se manifeste hypocritement. Par des petites pensées mesquines, une joie de voir l’autre tomber, etc. L’ego est comparable à un masque. Il juge facilement, condamne, et est constamment à la recherche d’un coupable à l’extérieur : les autres, les circonstances, le destin, la mauvaise température. Il aime attaquer. Ah! Qui n’a pas senti ce frisson de justification quand sur la route un conducteur fait une mauvaise manœuvre? On s’empresse de klaxonner, de se tourner pour le regarder de travers, pour voir QUI peut-être assez bête pour conduire de la sorte. L’ego voit le manque en soi, et chez les autres. Il peut facilement devenir arrogant. Souvent, il abaisse les autres, car il a besoin de se sentir mieux que les autres, et de voir les autres plus bas. On dirait qu’il se prend pour un athlète à la barre. Il veut prouver aux autres sa valeur personnelle. Il recherche l’approbation. L’ego ne se voit pas, il pourrait même penser : «Moi, je suis toujours de bonne humeur. Ce sont les autres qui me mettent de mauvaise humeur.»
La partie 2 suivra la semaine prochaine
Tout n’a pas été dit sur l’ego, loin de là. Une deuxième partie suivra la semaine prochaine, sur le bon et le mauvais ego, sur ce que les autres n’aiment pas en nous, sur le centre du cœur, sur la confusion qui existe entre un ego fort et la confiance en soi, et la liberté d’être.
En toute humilité, j’apprécierais vos commentaires sur votre perception de l’ego.
Au plaisir de vous lire,
CAROLLE ANNE DESSUREAULT