Le président du Conseil de la souveraineté du Québec, M. Gérald Larose, a vigoureusement plaidé, cette semaine, pour que le Québec s’engage résolument dans le chemin qui mène à l’indépendance nationale. Et les États généraux prochains pourraient en donner l’occasion.
M. Larose estime que les États généraux devant se tenir vraisemblablement dans l’année qui vient (de janvier à juin) pourraient être l’instrument qui sortira les Québécois du désengagement politique et du cynisme qui caractérisent selon lui les attitudes actuelles. M. Larose s’exprimait devant les membres d’un petit groupe de réflexion, le Mouvement démocratie souveraineté, dans un restaurant du quartier Outremont.
L’ancien leader syndical ne s’est pas fait prier pour décrire la sombre situation politique des années qui courent et il a reconnu que l’avenir du peuple québécois est parfaitement précaire; et il a donné maints exemples d’une régression de l’État. Par exemple il a noté que le Québec est absent sur le plan international, que la vie sociale et celle des médias sont en phase de «marchandisation» et que la société se trouve «sans vision» économique. Par ailleurs l’État fédéral, lui, avec ses projets de revalorisation de la monarchie britannique et son approche répressive eu égard aux droits civils, produisent «un cynisme inégalé» qui ne promet rien de bon sur le plan collectif. Ceci sans parler de la langue qui est «malmenée» et de la gouvernance québécoise actuelle qui est celle de «tricheurs». Pour tout dire la vie politique se déroule «sans nous» et il nous vivons avec «un déficit d’intelligence stratégique».
L’attitude de retrait collectif est pour une part le résultat des politiques de Pierre Elliot Trudeau lesquelles, a-t-il indiqué, a favorisé l’individualisme forcené des jours présents; c’est Trudeau «qui a dénationalisé la langue» et cette politique est appuyée par le premier ministre du Québec actuel, M. Jean Charest, lequel «nous désapproprie» collectivement. Cette mentalité individualiste est fort ancrée dans l’esprit des Québécois actuels et elle ne sera pas facile à éradiquer reconnait-il.
Il résulte de ce sombre tour d’horizon que la révolution tranquille des années 60 n’a pas abouti et que cette révolution «reste à finir». Quant au temps celui-ci «est compté» si l’on veut que la collectivité française d’ici perdure : « 50 ans, 20 ans» peut-être?… Nous sommes «au dernier acte».
Mais alors que faire si l’on constate que la ville de Montréal s’anglicise rapidement? Faut-il songer à obliger les immigrants à poursuivre leurs études collégiales et universitaires en français, a demandé un participant? M. Larose répond à cela qu’on ne peut imposer aux immigrants de choisir le francais par ce moyen. Ceux-ci sont choisis par le Canada et ils viennent au Canada; ils choisissent donc la langue du Canada. Ce qu’il faut, dit-il, c’est de créer un pays et c’est par ce moyen que toute ambiguïté cesserait à cet égard. Notre posture, en l’instance doit être d’obtenir «toute la gouvernance, tout le pouvoir…». C’est ainsi croit-il, que les immigrants choisiraient la culture franco-québécoise ambiante.
Quoi qu’il en soit la posture à prendre c’est celle qui consiste à exercer «toute la gouvernance, tout le pouvoir», à passer au dernier acte. Les Etats généraux, pour y voir, examineront «le pourquoi et le quoi» de l’existence collective. Le pourquoi c’est de percevoir qu’il est «normal de se faire connaître et d’en être fier». Le quoi c’est d’établir que les citoyens sont tous égaux et que le pouvoir vient d’en bas, pas d’en haut comme dans une monarchie. Quant aux autochtones il sera impérieux, a-t-il insisté, sur la nécessité de procéder à leur émancipation. La politique actuelle – fédérale – d’apartheid est inacceptable. Par ailleurs il faut veiller à la protection du territoire québécois et proposer un développement économique «multipolaire» qui ne prend pas uniquement en compte les centres urbains de Montréal et de Québec.
Les États généraux a-t-il conclu, se dérouleront sur trois niveaux. Ceux de l’identité, du développement et de l’État. Des «chantiers» seront constitués qui se rapporteront à une «grande réunion» qui se tiendra vraisemblablement en juin prochain.
Jean-Pierre Bonhomme