Jean XXIII
Le pontificat de Pie XII avait été très long (19 ans), et marqué par une centralisation progressive et un exercice solitaire du pouvoir. Le pontificat monarchique de Pie XII avait éclipsé la présence de personnalités fortes au sein du Sacré Collège.
Son successeur : Angelo Giuseppe Roncalli fut élu pape le 28 octobre 1958 sous le nom de Jean XXIII. il mourut le 3 juin 1963, deux mois après avoir achevé l’encyclique Pacem in Terris. Béatifié par Jean-Paul II à l’occasion du Jubilé de l’an 2000, il est désormais le « bienheureux pape Jean XXIII » pour l’Église catholique romaine. En Italie, on lui donne le surnom affectueux d’Il Papa Buono « Le Bon Pape ».
En 1915, il est, comme sergent de l’armée royale italienne, incorporé dans le service des santés des armées, avant de devenir aumônier militaire, dans les hôpitaux.
Le cardinal Willem Marinus van Rossum lui propose de travailler au Vatican, aux œuvres pontificales missionnaires (Qui est le siège d’une partie du pactole du Vatican). Il est nommé par Benoit XV et, en 1921, se trouve à la curie romaine. Il travaille en particulier au motu proprio de Pie XI (Romanorum Pontificum) sur la coopération des missions (où se trouve un autre pactole du Vatican).
En 1943, même s’il approuve le sauvetage des Juifs de Rome, il indique un « trouble spirituel » à ce que ce soit le Vatican qui les envoie en Palestine leur permettant de reconstituer une « espérance messianique« . Il possède donc, lui aussi, une opinion sur les Juifs, semblable à celle de Pie XII. Dans son témoignage écrit envoyé pour le procès de Nuremberg, Roncalli prend la défense d’un nazi et affirme par ailleurs que Von Papen (avec qui Pie XII avait négocié le concorda en 1933) aurait permis le sauvetage de 24 000 Juifs qu’il aurait pu dénoncer.
Il accueille la fin du pouvoir de Mussolini en 1943 : « Ce geste du Duce, je le crois un geste de sagesse, qui lui fait honneur. Non, je ne lui jetterai pas la pierre… Selon lui, le grand bien qu’il a fait à l’Italie reste.
Une chose est maintenant évidente depuis au moins 3 Papes : Aux yeux de la Papauté, la politique est plus importante de la vérité nue.
En 1953, il est nommé à 72 ans et créé cardinal. Il ne prend pas de position divergente par rapport à Pie XII. Il condamne ainsi, en 1957, « les cinq plaies crucifiant aujourd’hui : l’impérialisme, le marxisme, la démocratie progressiste, la franc-maçonnerie et la laïcité » qui, politiquement, sont des menaces pour l’Église.
Il est élu pape le28 octobre 1958; probablement parce qu’il ne risque pas de placer des entraves au système organisationnel placé par Pie XII, au Vatican.
Il désigne Domenico Tardini, un prélat d’expérience (mais qui est plutôt contestataire), à la secrétairie d’État et rétablit le travail en coordination avec les dicastères.
En septembre 1962, un cancer de l’estomac est diagnostiqué. Le 11 avril 1963, il promulgue une encyclique qui est perçue comme étant son testament spirituel : Pacem in terris. Au-delà du monde catholique elle est adressée « à tous les hommes de bonne volonté », fait l’apologie de la démocratie, affirme que la guerre ne peut être un instrument de justice et préconise que ce soit désormais la « loi morale » qui régisse la relation entre les états, prônant la solidarité, la justice et la liberté. Il meurt en effet le 3 juin 1963.
Une partie des courants intégristes lui reprochent toutefois, ainsi qu’à son successeur Paul VI, d’avoir été victime d’une influence moderniste, allant pour certains groupes de caveristes jusqu’à contester la validité de son élection; soit qu’un autre pape ait été élu pendant le conclave de 1958, soit qu’il ait été franc-maçon, rumeurs sans appuis documentés. Contestation très étonnante au niveau de son élection et de sa légitimité.
Son successeur Paul VI
Paul VI fut pape du 21 juin 1963 à sa mort, le 6 août 1978. Il est né près de Brescia, quatrième place-forte bancaire d’Italie, le 26 septembre 1897 sous le nom de Giovanni Battista Enrico Antonio Maria Montini. Il est décédé le 6 août 1978 à Castel Gandolfo.
Il a deux frères : l’aîné, Lodovico, devint sénateur, et le puîné, Francesco, médecin.
Giovanni Battista commence sa scolarité au collège Cesare Arici de Brescia, tenu par des jésuites.
Son état de santé demeurant fragile, le supérieur du séminaire et l’évêque de Brescia acceptent d’emblée que le jeune homme ne soit pas soumis à la vie d’internat. Assistant d’abord aux cours en habits civils, rapidement, il ne peut plus venir au séminaire. S’ensuit alors une formation solitaire, à la maison, où quelques prêtres viennent l’assister. Avouons que cela sent la « préparation » à plein nez.
Montini est ordonné prêtre le 29 mai 1920. Une dérogation avait dû lui être accordée du fait de son âge, le Code de droit canonique disposant alors que le candidat devait avoir vingt-quatre ans révolus. Remarquons des études discontinues et une ordination précoce. On appelle ça : « l’appel du Seigneur ».
Montini arrive à Rome le 10 novembre 1920. Il y étudie dans deux universités : à la Grégorienne (chez les jésuites) et à la Sapienza (Université d’État, laïque). Cette double formation lui ouvre la porte vers le monde laïc; autrement dit : la Politique et la finance.
Il aide en outre son père à mener sa campagne électorale pour la XXVIe législature du royaume d’Italie. Le PPI n’y obtient que 107 sièges. Pour la première fois, 35 fascistes (dont Mussolini) y sont élus.
En 1921, Montini est reçu au Vatican en compagnie de Longinotti par Mgr Giuseppe Pizzardo, substitut à la secrétairerie d’État. Il se voit proposer une inscription à l’Académie des nobles ecclésiastiques, institution de haut niveau pour former les clercs destinés au service diplomatique du Saint-Siège.
En mai 1923, Montini apprend qu’il est affecté à la nonciature de Varsovie. De la Pologne, il suit la politique italienne et dénonce dans ses lettres le rapprochement de certains membres du PPI avec le parti de Mussolini. Il s’occupe définitivement de politique, on ne peut le nier.
Alors qu’il n’a que vingt-sept ans, Montini reçoit une lettre de Mgr Pizzardo l’informant que le pape Pie XI l’autorise à le faire entrer à la secrétairerie d’État. Il semble que cette entrée importante est organisée par ceux qui le satellisent et le dirigent.
Après plusieurs mois d’apprentissage, on le nomme minutante à la section des Affaires ordinaires. Il est chargé de rédiger les brouillons, instructions et circulaires envoyés par la section. Il est alors au courant de tous les dossiers.
La montée du fascisme inquiète Montini, qui émet la plus grande réserve au moment de la conclusion des Accords du Latran.
Le 12 mar 1933, un article anonyme d’Azione fucina annonce la démission de Mgr Montini de sa charge d’aumônier national des associations universitaires catholiques. Beaucoup pensent qu’il s’agit là d’une démission forcée.
Lors du consistoire du 13 décembre 1937, le Pape Pie XI crée cardinal Mgr Pizzardo. Ce dernier est remplacé aux Affaires extraordinaires par Mgr Tardini, lui-même remplacé à sa charge de substitut aux Affaires ordinaires par Mgr Montini.
Montini quitte alors le Palais du Belvédère pour loger au Palais apostolique, sous les bureaux de la Secrétairerie d’État. En tant que substitut aux Affaires ordinaires, Montini devient un proche collaborateur du Pape et il a en charge les relations du Saint-Siège avec les grands organismes de l’Église ; il peut transmettre des recommandations et des directives de la part de l’autorité supérieure, en plus d’un rôle d’intermédiaire où il fait part notamment du point de vue du Saint-Siège à des personnalités venant le visiter. Sa journée-type commence par une étude des dossiers, puis une réception par le secrétaire d’État Pacelli, avant la réception de cardinaux, évêques ou diplomates lors des audiences qu’il accorde.
Le 10 février 1939, le pape Pie XI meurt ; son successeur, le cardinal Pacelli, est élu le 2 mars suivant et prend le nom de Pie XII. Une fois élu, Pie XII nomme le cardinal Luigi Maglione secrétaire d’État, mais il garde les deux substituts. Montini et le pape se voient tous les jours avant la guerre et pendant celle-ci, multipliant les audiences et les productions de documents.
Rapidement, Mgr Montini est au centre de deux incidents diplomatiques entre l’Italie fasciste et le Saint-Siège. D’une part, fin avril 1941, il est accusé par le ministre Galeazzo Ciano d’avoir diffusé un tract antifasciste à des étudiants romains, mais aucun tract n’est retrouvé ; d’autre part, une note envoyée au Saint-Siège l’accuse d’avoir organisé une réunion antifasciste dans les appartements du Vatican, avec des diplomates étrangers : l’information est vite démentie par le secrétaire d’État.
En novembre 1941, le substitut préside la nouvelle « Commission pour les secours », chargée d’envoyer des aides financières et des médicaments aux prisonniers, alliés ou non. On se rend compte ici que l’aide au nazi d’après guerre est dans la politique de Pie XII. C’est également dans la philosophie chrétienne de secourir les éprouvés, évidemment.
Le 24 juin 1942, le nonce apostolique à Berlin Cesare Orsenigo informe Mgr Montini que les démarches tentées en faveur des Juifs « ne sont pas bien accueillies ; au contraire, elles finissent par indisposer les autorités ». À partir de ce moment, le Saint-Siège, et en particulier le pape Pie XII, réagit discrètement face aux atrocités nazies, de peur des représailles.
À partir de septembre 1942, Montini se trouve au cœur d’un complot visant à renverser Mussolini. La princesse Marie-José de Belgique, belle-fille du roi Victor-Emmanuel III, est reçue en audience le 3 septembre 1942 par Mgr Montini. Elle explique au substitut que le peuple italien est prêt à abandonner le régime fasciste, que des hommes sont prêts à assurer la relève et qu’une paix séparée peut être conclue avec les Alliés. Montini, que sa fonction lui permet de rencontrer les diplomates alliés, fait donc part de ce projet aux Alliés, qui font preuve de bonnes dispositions. Néanmoins, ils mettent en œuvre leur propre stratégie : ils commencent par débarquer en Afrique du Nord le 8 novembre 1942, se rapprochant ainsi de l’Italie.
À l’issue du bombardement de Rome par les Alliés le 19 juillet 1943, Montini accompagne Pie XII dans les rues de la ville afin de prier et de secourir les pauvres. L’approche des Alliés ébranla le gouvernement fasciste ; le 24 juillet 1943, le Grand Conseil du fascisme vote les pleins pouvoirs au roi Victor-Emmanuel III. Le 25 juillet au matin, l’un des membres du Conseil qui vota les pleins pouvoirs, Alberto De Stefani, demande à Montini que le Saint-Siège serve d’intermédiaire entre les Alliés et le nouveau gouvernement à venir. Le lendemain, le roi demande au maréchal Badoglio de former un ministère et ce dernier fait arrêter Mussolini. Le 13 août 1943, un nouveau bombardement allié survient sur Rome : Montini accompagne à nouveau le pape Pie XII sur les lieux touchés afin de réconforter la population. Le lendemain, le gouvernement Badoglio proclame Rome « ville ouverte ».
Jusqu’à la fin de la guerre, Montini est témoin des différents événements qui touchent Rome, notamment l’occupation de la ville par les Allemands à partir du 10 septembre 1943, puis sa libération par les forces alliées le 4 juin 1944. Cette guerre fut aussi pour lui le temps des épreuves : ses parents meurent en 1943, et plusieurs de ses amis furent déportés dans des camps de concentration ; enfin, son ami Longinotti qui l’avait fait entrer à l’Académie des nobles ecclésiastiques, meurt dans un accident de voiture en 1944.
Le pape Paul VI meurt le 6 août 1978 d’une crise cardiaque. Le conclave à l’issue duquel sera désigné son successeur s’ouvre le 25 août 1978. Son successeur sera Jean-Paul 1er.
À suivre
André Lefebvre