Sauver la langue Française???
Nous avons vu que lors de l’invasion américaine de 1775, les « Canayens » n’étaient pas « chauds » à l’idée de combattre sous les ordres des officiers Anglais. 37 ans plus tard, l’opinion des Canayens n’a pas du tout changé.
Il est, cependant, exact que la guerre de 1812 a contribué à façonner l’identité canadienne comme l’affirme notre Premier Ministre M. Harper. Ce qu’il omet de spécifier, est que, pour la première fois de l’histoire, ce sont les loyalistes du Haut-Canada qui ont cessé de se considérer comme des « exilés Anglo-américains ». Ce sont eux qui ont adopté la nationalité « Canadians » après la guerre de 1812. Par contre, pour se différencier des « Canayens » qui existaient déjà depuis plus de 200 ans, ils se donnèrent le nom de « Canadiens Anglais ». C’est ce qui fit que les « Canayens » devinrent des « Canadiens Français » par la bande. Ils deviendront Québécois, quelque temps plus tard, par décision des Anglais et l’appui du clergé.
M. Harper voudrait nous faire croire que c’est la guerre de 1812 qui est responsable de la naissance de l’identité canadienne. Pour accepter cela, il est indispensable d’effacer plus de deux cent ans d’histoire du Canada; cette histoire des « Canayens » qui ont ouvert le continent nord-américain aux blancs. La plupart des Anglo-saxons, qu’ils soient « Canadians » ou « Américans », ne s’en privent pas du tout, et ce, sans aucun malaise. On n’a qu’à revoir les noms français de plusieurs villes des USA, sans qu’on mentionne qu’ils étaient, à l’origine, des établissements « canayens », pour s’en rendre compte; mais n’insistons pas outre mesure.
M. Harper devrait, cependant, nous expliquer comment il se fait que lors des débats pour « créer le Canada » en 1869, on parle de plusieurs faits historiques incluant l’invasion américaine de 1775, mais on ne dit rien au sujet des « hauts fait d’armes » de la « guerre » de 1812?
Il est évident, qu’on le veuille ou non, que cette gé-guerre de 1812 n’a eu aucun impact sur l’esprit national des « Canayens »; malgré ce que voudrait faire croire M. Harper. On en verra plus loin la raison. Il est inutile d’y ajouter l’élucubration du ministre James Moore, qui répète depuis des mois que la guerre de 1812 a permis de PROTÉGER la langue française au Canada (comme si c’était les Anglais qui avaient empêché les Américains d’entrer dans le Bas-Canada en 1813). Cela est même, encore moins valable que de dire que cette guerre est également responsable de la présence des portraits de la Reine partout dans les établissements gouvernementaux.
Selon Donald Fyson, professeur d’histoire à l’université Laval et spécialiste de cette période de « guerre », il indique que « le Canada a rejeté la tentation républicaine », mais il qualifie réellement cette opinion de « mythe ». Je suis parfaitement d’accord avec lui au sujet de la guerre de 1812; mais ce refus avait été loin d’être un mythe chez les « canayens » en 1775. Par contre, encore une fois en 1813, les « Canayens » ont accepté de se battre contre les envahisseurs américains pour la seule et unique raison que ces envahisseurs étaient, à leurs yeux, non pas des libérateurs du joug Anglais, mais plutôt des « voleurs de territoires ». Et il n’était pas question que des aventuriers américains viennent voler les terres des « Canayens »; du moins pas dans le futur Québec.
En 1812, l’objectif avoué des Américains était d’envahir le Haut-Canada (dont la majorité de la population était exilée américaine, et dont on supposait qu’elle accueillerait positivement cette invasion). Comme en 1775, le gouvernement américain rêvait en couleur.
Il serait peut-être important de se demander pourquoi, les américains préféraient s’attaquer au Haut-Canada qu’au Bas-Canada. Si vous cherchez quelque peu, vous découvrirez que dans le Haut-Canada, les futur « Canadians » qui résidaient à York, ne se sont pas vraiment défendus. Comparez à ce qui s’est déroulé pendant la guerre de sept ans, tout autant qu’en 1775, et vous réaliserez que les Américains n’étaient jamais emballés de faire face à la milice canayenne. Que les historiens en fassent la remarque ou pas, les Américains souffraient du syndrome du « Chat échaudé craint l’eau froide ».
Je veux bien que l’on dise, aujourd’hui, que l’effort combiné des britanniques et des « Canayens » ont empêché l’invasion américaine de 1812; mais ce concept « d’effort combiné » n’existait pas du tout dans l’esprit des « Canayens », qui ont tout simplement fichu les Américains hors du Bas-Canada lorsque ce fut nécessaire. D’ailleurs la raison principale pour laquelle les historiens déclarent qu’il n’y eu aucun « vrai » vainqueurs lors de cette guerre, est simplement parce que les « Canayens » se sont contentés de rejeter les Américains chez eux. Aucune tentative de prise de territoire ne fut tentée par nous; sauf la petite vengeance d’aller brûler la Maison Blanche parce que les Américains avaient brulé York. C’est ce qui détermina, chez les Américains, le besoin d’écrire, dans l’entente de paix entre les deux pays, que dorénavant, ces deux pays ne s’affronteraient jamais plus, quelles que soient les raisons. En tant que « Canayen », cependant, je n’oublie pas que, sur 400 traités fait avec les Amérindiens, les Américains n’en ont pas respecté un seul.
C’est un peu pourquoi, je préfèrerais que nous ayons encore une milice au Québec et que je suis contre l’abolition des armes de chasse. Il nous faudrait garder nos qualités de « Francs tireurs ». Par contre, tous ne sont pas du même avis; alors… Mais, c’est comme pour le hockey; les meilleurs joueurs québécois sont engagés par les clubs américains. Il doit y avoir une raison obscure à tout cela? (C’est pas possible comme je m’amuse à gauche et à droite lorsque j’écris un article 🙂 )
Pour réviser la situation de 1812 au Canada, nous devons parler d’un vrai Héros britannique (une fois n’est pas coutume) nommé Isaac Brock. Pour décrire son caractère, rien de mieux que ce duel auquel il fut obligé de se soumettre, en Angleterre. Ayant le choix des armes, à l’encontre des conseils de ses amis, il choisit le pistolet malgré que son opposant fût l’un des meilleurs tireurs de cette arme. Étant l’offensé, lorsque « l’arbitre » lui demanda à quelle distance il choisissait de faire feu, il répondit : « À la distance d’un mouchoir ». Son adversaire se désista, ce qui mit un terme au duel. Ai-je besoin de vous dire que j’aime ce genre de caractère?
Il fut nommé en charge de la défense du territoire canadien. Il prépara l’armée britannique du Canada, composée de 1600 soldats, et s’enrichit d’une armée de miliciens canayens, sans oublier les Amérindiens dirigés par Tecumseh. Isaac Brock connaissait l’importance des francs-tireurs dans une armée, depuis qu’il avait reçu une balle au cou en 1799; et comme il était responsable de la défense du Haut et du Bas-Canada, il ne se gêna pas pour attirer le plus de miliciens « canayens » possible. Ce furent les coureurs de bois/voyageurs des grands lacs qui répondirent à son appel. Il faut comprendre que leur commerce des fourrures était menacé par les Américains. Les coureurs de bois prirent le fort de Michilimakinac aux premières journées de la guerre, avant même l’arrivée de Brock. Pour les autres miliciens canayens, ils ne répondirent que lors de l’appel d’un « Canayen » : Charles de Salaberry.
Brock gagne deux batailles importantes malgré l’infériorité en nombre de ses soldats; celle de Détroit et celle de Queenston Heights. Il fut malheureusement tué lors de ce dernier engagement. Ce qui, par la suite, résultat que le combat pour les grands lacs passa à l’avantage des États-Unis. Mais cette porte sur le Bas-Canada n’allait pas avoir le temps de servir contre lui.
Quant à l’attaque des Américains sur le Bas-Canada, par le Richelieu, ce fut une farce monumentale. J’y reviendrai à la fin de l’article.
Pour le Haut-Canada, quoi qu’en dise M. Harper, ce fut beaucoup moins drôle.
Les Américains s’emparent de Fort Georges à l’embouchure du Niagara; mais ils ne poursuivent pas le général John Vincent et son armée en fuite. Ceux-ci se retournent contre leur poursuivant à Stoney Creek où, après un combat acharné les Anglais parviennent, de peines et de misères, à déloger les Américains. Trois semaines plus tard, les Américains essuient une autre défaite à Beaver Dam face aux Amérindiens de Tecumseh.
Sur les Grands Lacs une guerre navale se déroule au profit des Américains qui s’étaient emparé du matériel naval des Anglais lors de leur invasion de York, où ils n’avaient rencontré presqu’aucune résistance. L’allié Amérindien des Anglais, Tecumseh, que le Général Procter n’écoute pas en décidant de fuir à la bataille de Put-in-Bay, est tué lors de la bataille de la Thames. L’armée anglaise est éparpillée et le major-général Henry Procter prend définitivement la poudre d’escampette.
Voilà pour les Anglo-saxons qui deviendront bientôt des « Canadiens anglais ». On ne doit pas conclure que leur identité nationale est basée uniquement sur la « fuite » pour autant; parfois il arrive une trêve. Par exemple; en 1814, les Américains traversent à nouveau le Niagara, à Buffalo. Ils s’emparent facilement du Fort Érié le 3 juillet, et remportent haut- la -main une attaque téméraire lancée par les Britanniques, dirigés par Phineas Riall, à Chippawa, le 5 juillet. Par contre, et là se présente la trêve dont je parlais, le moment le plus marquant de toute cette campagne du Niagara fut la bataille de Lundy’s Lane, le 25 juillet. C’est là, la plus amère des batailles de toute cette guerre.
Menée par une nuit noire et suffocante qui empêche les soldats, épuisés, de distinguer l’ami de l’ennemi, la bataille se termine dans l’impasse totale. Après s’être retiré à Fort Érié, l’invasion américaine reprend avec plus de force. Les troupes américaines infligent une cuisante défaite aux lieutenant-général Gordon Drummond, quand celui-ci tente une attaque dans la nuit du 14 au 15 août. Avec des troupes de part et d’autre complètement exténuées, une trêve de trois mois s’ensuit. Enfin, le 5 novembre, les Américains se retirent de nouveau, et traversent le Niagara, mettant officiellement fin à la guerre dans le Haut-Canada. Résultat: Aucun gagnant lors de cette guerre entre les deux partis Anglo-saxons; l’un est aussi « efficace » que l’autre.
Revenons, maintenant, à Charles de Salaberry, parce qu’on n’en parle pas beaucoup dans l’histoire officielle du Canada. Voici un résumé de ce que j’ai déjà raconté à ce sujet.
Au début de la guerre, le président américain, James Madison, allègue que la prise du Canada ne sera qu’une promenade jusqu’à Montréal. Il réitère ainsi l’opinion du président précédant, Thomas Jefferson. Ce sont certainement les deux seuls présidents qui firent ce genre d’erreur de jugement. Il faudrait vérifier dans l’histoire des USA. Madison se rendra rapidement compte de son erreur de jugement.
Parmi les habitants du Bas-Canada, l’élite anglaise supporte les Britanniques. Les « Canayens », quant à eux, ne sont pas très « chaud » pour cette guerre; en fait, pas plus « chauds » qu’en 1775. Par contre l’élite « Canayenne » et le Clergé craignent le protestantisme et la démocratie républicaine. Les Canayens eux, craignent la mauvaise habitude des colons américains d’envahir et de s’approprier la terre des « vaincus » sans tenir dompte des « ententes » d’un traité. C’est d’ailleurs ce qui se déroule dans l’Ouest américain à cette époque.
Les « Canayens » décident donc que les Américains ne s’empareront pas du Bas-Canada.
En 1813, deux généraux américains, Wilkinson et Hampton, sont envoyés « prendre » le Bas-Canada. Les deux généraux en question ne s’aiment pas tellement et Hampton n’est pas enclin à aider Wilkinson. Celui-ci se présente à Chateauguay le 25 octobre. Charles de Salaberry qui a recruté des « Canayens », leur donne le nom de « Voltigeurs ». Ils sont 300 « Canayens » plus 22 amérindiens venus de Kanawake, d’Akasasne et de Wendake.
Salaberry installe un abattis qui servira de ligne de front à son « armée ». 1000 américains attaquent cet abattis, 1000 autres contournent la position, et, 1000 s’occupent du campement et protègent les 2 canons qu’ils ont traîné jusque là.
Les 1000 américains contournant la position de l’abattis, dirigés par Robert Purdy, se perdent dans les bois. Sans guide canayen, c’est habituellement ce qui vous arrive. Ils croisent un petit groupe de 90 « Canayens » dirigé par Jean Baptiste Brugière. On ne dit pas si tous les 90 volontaires « canayens » prirent part au combat, mais j’imagine que oui. Brugière, manquant de munitions, donne l’ordre de charger à la baïonnette. Les américains tentent alors de les contourner eux aussi. Avouez que si les Américains ne cessent pas de « contourner » tous les « Canayens » qui leur font face dans nos forêts, ils vont finir par se retrouver de retour chez eux. C’est facile à comprendre.
Salaberry, posté à l’abattis, fait en sorte de donner l’impression d’avoir une grande armée avec lui. Il ordonne le feu à volonté, demande aux sauvages de crier, en courant partout dans les bois et fait sonner les clairons comme s’ils annonçaient des renforts. Ses 300 « Voltigeurs » paraissent être 3,000 soldats. Les américains sont, finalement, pris dans un feu-croisé entre Salaberry et le groupe de Brugière, qui s’est approprié des munitions des américains tombés lors du premier combat. C’est alors que les « héros américains » de 1812 adoptent une tactique beaucoup plus radicale. Le 29 octobre 1813, ils décident de cesser de toujours « contourner » et prennent, sans ambigüité… la direction de la maison.
Déjà, c’est la fin de cette « promenade » pour envahir le Bas-Canada. Qu’on raconte cette histoire comme on le voudra, les faits réels sont que 300 « Canayens » avec 22 Mohawk ont stoppé 3000 soldats américains. Et voilà, ils sont partis. Merci, bonsoir!
Pour nous, la guerre de 1812 a débuté le 25 octobre 1813 et s’est terminée le 29 octobre 1813, après une durée de… je vous laisse compter. Vous devriez comprendre, maintenant, pourquoi personne n’en parle beaucoup.
On peut aussi comprendre aisément pourquoi M. Harper tient mordicus à ce que tous les Canadiens, de toutes nationalités confondues, s’unissent en un seul bloc identitaire; mais il devrait revoir son histoire du Canada et trouver les 4 jours dont je viens de parler, pour bien peser les faits en causes. Cela pourrait changer un peu la qualité du traitement qu’il réserve actuellement au Québécois.
Quant à la protection de la langue française, laissez-nous ça entre les mains, et contentez-vous de suivre la loi 101. Il n’y aura pas de problème. Vu?
Amicalement
André Lefebvre