Igor et Grichka Bogdanov remettent ça une fois de plus. Ils écrivent un deuxième livre sur l’origine de l’univers. En fait, ce qu’ils présentent est leur recherche du sens à donner à cet univers où nous vivons. Ils ne sont pas les premiers à se poser la question, on le sait.
La question fondamentale est : Par quel « miracle » l’univers a-t-il surgit de rien il y a 13,7 milliards d’années?
Aujourd’hui, nous pouvons déceler trois propositions de réponse à cette question :
1) La plus simple – mais aussi la moins scientifique – consiste à défendre l’idée selon laquelle l’Univers, la conscience et la vie sont le résultat d’un formidable «hasard cosmique» et de rien d’autre. Dans ce cas, la vie est apparue «par hasard» et notre existence est parfaitement arbitraire. Comme l’affirmait en son temps, Jean-Paul Sartre, «le monde est absurde».
2) Deuxième proposition : celle des univers «parallèles». Selon les défenseurs de cette idée, l’univers dans lequel nous vivons ne serait que la version «gagnante» d’une infinité d’univers stériles. L’existence de l’univers «ordonné» dans lequel nous vivons n’aurait rien de remarquable puisqu’il serait perdu dans une multitude d’univers chaotiques. Disons-le sans détour; bien qu’à la mode, cette hypothèse n’est pas plus scientifique que la précédente et même, est moins logique, puisque les autres univers parallèles, étant « stériles » ne peuvent être viables, c’est-à-dire : « ne peuvent survivre ». Conséquemment, cette proposition représente l’équivalent d’un seul univers créé « complet et viable » depuis son début. Ce n’est pas du tout ce que nous observons, puisque l’univers continue d’évoluer encore aujourd’hui. Ce qu’il ne ferait pas s’il était déjà « complet et viable ».
3) Troisième proposition qui semble le plus en lien avec la science, celle d’un Univers unique et structuré par des lois physiques. Dans ce cas, l’évolution cosmologique ne laisse rien au hasard et la vie apparaît comme la conséquence inévitable d’un scénario dicté, avec la plus haute précision, par les lois de la physique. Remarquons tout de suite que la science s’est rattachée aux deux propositions précédentes, selon l’époque de leur apparition, avec autant de vigueur qu’elle le fait actuellement à cette troisième proposition. Ce « fait » nous indique l’une de deux possibilités : soit que la science évolue, ou, que les scientifiques se servent d’elle pour appuyer n’importe laquelle de leur proposition. De toute façon, le nom de « science » appliqué sans les données scientifiques en cause, n’a aucune valeur en soi. De plus, changer la source « Dieu » pré-existant pour une source « lois physiques » pré-existantes n’explique absolument rien de plus que ne le fait le « créationisme ».
La réponse la plus « prometteuse » me semble, quand même, être dans la troisième proposition. Par contre, elle a son petit défaut : Ce sont des mathématiciens qui se sont appropriés de cette explication. Par conséquent, il leur est indispensable que la prémisse initiale de l’univers soit « mathématique ». Pour que cela soit, puisque les mathématiques seraient des « lois de base », les mathématiciens sont circonscrits à l’époque primitive où existent déjà des « lois mathématiques de base » et ne peuvent reculer plus loin que cette époque.
De sorte que nous sommes encore loin de l’apparition de l’univers, puisque celui-ci est apparu au moment même où il n’y avait « rien », même pas de lois de base. Autrement dit, les mathématiques font partie de l’univers. Donc son apparition ne peut pas être une « complétude » mathématique mais plutôt une « potentialité » mathématique qui devra évoluer.
Mais avant d’aller plus loin, revenons aux questions philosophiques que se posent les scientifiques: Dieu avait-il le choix?
Vers les années 1925, Einstein avait affirmé : «En tout cas, moi, je suis convaincu que Dieu ne joue pas aux dés.» En 1951 son affirmation s’était transformée en question : «Est-ce que Dieu avait le choix lorsqu’il a créé l’Univers?» Sa réponse fut sans ambigüité : « Non il n’avait pas le choix! »
Quarante ans après Einstein, un savant anglais, sir Roger Penrose, de l’université d’Oxford, s’est posé la même question. Et là encore, sa réponse, très argumentée par des calculs savants, est la même que celle d’Einstein: le Créateur n’a aucune liberté de choix.
Dans leur deuxième livre, les frères Bogdanov décident, encore une fois, de baser leur recherche sur la notion du temps. Ils parlent de temps « de chez nous » et du temps « imaginaire ». Pour eux, le temps « imaginaire » est un temps « qui ne s’écoule pas »; donc, le temps AVANT… le temps « de chez nous ». Ils lui enlèvent l’énergie et le mouvement pour qu’il ne « s’écoule pas ». En fait, ils n’apportent rien de neuf à la question, puisqu’ils parlent, en réalité, du « temps figé » avant tout mouvement. Une sorte d’état (et non d’existence)« présent » continuel et statique.
La raison de leur approche biaisée sur le temps est assez simple à comprendre : ils n’osent pas aborder (ou peut-être le font-ils ailleurs) le fait prouvé que l’état de « temps figé » se manifeste à deux « endroits » ou deux « moments » complètement opposés dans l’histoire de l’univers. Le premier se trouve lorsque l’énergie est complètement absente et le deuxième, lorsque l’énergie est à son maximum. Autrement dit :
1) lorsque tout mouvement est totalement absent; tellement absent que même le temps est figé, et
2) lorsque le mouvement atteint sa vitesse maximale : la vitesse de la lumière, vitesse où le temps « se fige ».
Ils trichent une fois de plus lorsqu’ils représentent « l’instant zéro » comme étant la « singularité initiale » d’où émerge l’univers actuel (Ils ne sont pas les seuls à le faire en Astrophysique, évidemment).
Cet univers actuel est un univers ayant trois dimensions. De sorte que la « grosseur » minimale possible pour un univers ayant trois dimensions est un univers ayant un volume composée des longueurs les plus petites possible, c’est-à-dire, la longueur de Planck, soit : 10-35 m. et nous savons que cette longueur n’est pas possible avant le « temps de Planck », soit : 10-43 sec après l’instant zéro.
Conséquemment, la « singularité initiale » n’a aucune possibilité d’apparaître à l’instant zéro. C’est, là aussi, une confirmation que les lois mathématiques ne peuvent pas être à la base de l’origine de l’univers puisque toute mesure avant l’instant de Planck est inexistante. La seule implication mathématique possible à l’origine de l’univers, est le calcul « probabiliste » qui, lui, est basé (mais on ne le dit jamais) sur un mouvement évolutif : Potentialité->possibilité->probabilité-> et finalement, réalité. En gros, plus la somme du calcul probabiliste nous rapproche de UN, plus on se rapproche d’une réalité; plus cette somme du calcul se rapproche de ZÉRO, plus on se rapproche d’une impossibilité. Il devient évident qu’une somme tout juste « non nulle », c’est-à-dire positivement infime, comme simplement 0+ (zéro positif),n’est pas une impossibilité mais bien, une potentialité.
Ces deux petites « tricheries » dans le dernier livre des frères Bogdanov discréditent alors toutes propositions qu’ils peuvent faire sur l’origine de l’univers. Par contre, comme il y a du « bon » dans tout, ils nous indiquent là où il ne faut pas tricher. Ce qui dégage un peu plus, la piste qui mène vers la réponse visée.
Laissons les frères Bogdanov à leurs « convictions » interrogatives et reprenons le parcourt à partir du point où nous fumes détournés de la piste :
« Dieu ne joue pas aux dés! » et « Dieu n’a pas le choix de créer l’univers tel qu’il est ».
Adoptons, une fois (et non une Foi) pour toutes, la position du « raisonnement objectif » au lieu de celle d’une « objectivité raisonnable ». Car, tous le monde le comprendra, se contenter d’un raisonnement impartial strictement sur ce qui constitue un « objet », limite énormément les possibilités qui s’ouvrent à un raisonnement, tout aussi impartial, sur ce qui constitue un « sujet ».
Au départ, l’existence de Dieu ne peut pas être ni confirmée ni infirmée. Qu’on le veuille ou non, une absence de preuve est loin d’être une preuve. Alors soyons intellectuellement honnêtes et simplifions les deux énoncés en enlevant le facteur « Dieu ».
Nous nous retrouvons alors devant un raisonnement objectif qui dit: « L’univers n’a pas d’autre choix que de devenir ce qu’il est actuellement! ».
Un simple constat sur le principe à la base même de l’évolution, nous donnera la clef pour comprendre pourquoi l’univers est tel qu’il est, sans avoir la possibilité de devenir autre chose que ce qu’il est. Cette loi de base de l’évolution, que nous constatons partout, est que « seul ce qui est viable peut continuer d’évoluer ; ce qui n’est pas « viable » meurt et est recyclé dans la nature ».
On parle ici, évidemment, des systèmes organiques (organismes) composés de ses éléments de base. On perçoit le principe facilement dans l’histoire de la vie qui se transmet d’une « génération » à l’autre, pour ne jamais disparaître en soi. La mort n’est pas le contraire de la vie mais un simple recyclage des composés de base. La mort n’appartient qu’à un arrangement, ou un agencement, qui n’est plus « viable » et n’a aucun lien réel avec la vie elle-même; sauf celui qui fait que la vie en est indépendante puisqu’elle est, en soi, continuelle et donc immortelle. La vie n’apparaît pas « ex nihilo »; elle est apparue à un moment donné comme conséquence de l’évolution et continue de se transmettre depuis cette époque.
Par contre, on constate cette loi de base de l’évolution « disparition/recyclage » au tout début de l’apparition de l’univers. Effectivement, on observe que les particules fondamentales de l’univers évoluent continuellement parce que le mouvement d’expansion de l’univers change l’environnement de ces particules. Celles-ci doivent nécessairement s’adapter pour « survivre » dans chacun des nouveaux environnements évoluant (ayant de moins en moins de chaleur et de pression). C’est ce qui fait changer, par exemple, un quark Top en les autres quarks successifs; ou les neutrons, qui ne peuvent pas supporter leur « nullité zéro » plus longtemps que quinze minutes avant de se transformer en proton. Ou encore, les neutrinos Tauiques en neutrinos muoniques pour ensuite se transformer en neutrinos électroniques. L’évolution est une conséquence de changements environnementaux qui, eux, sont à l’origine, une conséquence de l’expansion de l’univers.
Une fois que ce constat est établi, qu’arrive-t-il si nous allons jusqu’à accepter la possibilité que cette loi de base de l’évolution apparaisse tout simplement à l’instant zéro?
Aussi surprenant que cela puisse paraître, il arrive que nous trouvons alors la réponse à la question de l’origine de l’univers :
L’instant zéro est un état à énergie manifestée « nulle », qui a cette caractéristique unique, de ne pas être « néant », même s’il est « rien »…… pour l’instant. Le zéro de cet « instant » est positif. C’est un « 0+ ». Autrement dit : cet état est « rien » mais peut « devenir » quelque chose. C’est un « instant » à énergie potentiellement « non nulle ». Et c’est là où on abandonne les mathématiques « dures » pour aborder les mathématiques « soft » du calcul probabiliste.
Lorsque nous reculons jusqu’à l’état de potentialité (tout premier stage après celui de « néant » (zéro impossible) du calcul probabiliste), alors là, nous pénètrons dans le monde des « mathématiques philosophiques » et nous sommes obligés de prendre en considération un philosophe appelé Shakespeare. Celui-ci, démontrant un maximum d’empathie, s’installe à la place de l’univers et se pose la question : « Être ou ne pas être? ».
On se rend tout de suite compte que c’est là, la seule « incertitude » (question) existante pour l’état « instant zéro», avant le début de l’univers. Rien d’autre ne peut s’appliquer à un état de « potentialité » initiale non manifestée. Et cette question ne peut donc être autre, que la seule source et la seule cause possible de la manifestation initiale de l’énergie primordiale qui a fait apparaître notre univers.
On peut facilement le comprendre quand on compare notre propre réaction face à une petite question personnelle à laquelle on n’a pas de réponse. Plus cette question est existentielle, plus elle s’amplifie d’un instant à l’autre pour nous amener à une fébrilité de plus en plus importante jusqu’à ce que nous obtenions la réponse. L’intensité de la fébrilité causée par une inquiétude existentielle peut même atteindre, chez certains, le point de ne plus vouloir exister.
La question intellectuelle posée est, sans contredit, de nature énergétique et ne peut qu’être une énergie qui s’amplifie au pro rata de la prise de conscience de l’incertitude de la réponse. L’évolution de la question débute par une simple remarque pour s’amplifier rapidement en une inquiétude insupportable d’une énergie incroyable. Remarquons également, qu’au départ, lors de l’apparition du questionnement, nous assistons à l’émergence d’une infime conscience « non nulle » qui est loin d’être « omnisciente ». Elle n’est qu’une « inquiétude« ; mais elle est fondamentale. Par contre, l’univers n’a pas besoin de plus.
L’énergie du questionnement, ou de l’inquiétude, au sujet « d’être ou ne pas être », prenant de l’intensité, devient insupportable et surtout incontrôlable. L’énergie, amplifiée à son maximum, explose dans une manifestation d’une recherche factuelle de la « preuve de sa réalité » existentielle. Ce qui résulte en l’explosion du Big-bang. L’univers se doit de commencer à manifester sa « recherche existentielle » parce que s’il ne le fait pas, il devient « néant » au lieu de « rien »; et comme « néant » ne peut pas « être », même là, l’univers n’a pas le choix. L’univers s’est manifesté parce qu’il voulait « survivre » pour « être réellement ». Il ne pouvait pas continuellement « n’être que potentiellement ». Tout comme le neutrino qui ne peut pas n’être que « zéro » pendant plus de 15 minutes; il se doit d’exprimer sa « réalité » UN en devenant proton.
Ce que nous observons scientifiquement dans les faits, c’est qu’au temps de Planck (10-43 sec après l’instant zéro) il se produit une explosion d’énergie inconcevable qui fait apparaître notre univers tridimensionnel. Il devient alors indiscutable que c’est durant cette « ère de Planck », qui a duré 10-43 sec, que l’énergie nulle de l’instant zéro, est passé à un état « non nulle » pour ensuite s’amplifier, au point d’être impossible à être contenue dans l’univers de Planck (ère de Planck). C’est à ce moment-là, à 10-43 sec après l’instant zéro, que tout a explosé. En fait, « l’univers de Planck » a explosé pour devenir notre univers tridimensionnel et c’est aussi là, à cet instant précis, que se situe le Big-bang.
Quant à la question au sujet de l’implication du choix ou du hasard? Elle ne se pose même pas, puisque le hasard et le choix s’éliminent d’eux-mêmes suite à la condition « sine qua non » d’être « viable » pour survivre et continuer son évolution. La condition de « viabilité » pour évoluer, élimine le choix, puisque toutes les « possibilités » doivent être tentées. Elle rend impossible le hasard, également, puisqu’elle détermine progressivement, une seule voie possible de cette évolution. Quoi de plus identique à la prémisse de la troisième proposition plus haut?
L’augmentation de l’entropie que nous constatons est simplement le résultat de la spécificité progressive du trajet évolutif accompli, par l’univers, dans sa recherche de « viabilité » de plus en plus pointue, afin de parvenir à une viabilité future, complète et indiscutable. L’entropie n’est pas une évolution de l’ordre vers le désordre, mais plutôt une évolution de la simplicité vers la complexité, ou encore, d’une généralité vers une spécificité. J’aurais pu dire, également, l’évolution d’une potentialité vers sa réalité.
Un résumé du processus serait : Ce qui ne fait que simplement « être » un état primordial, développe un « esprit » (conscience) dont l’inquiétude énergétique s’amplifie au point qu’il soit obligé d’agir pour éviter de « ne pas être ».
On observe également que la « conscience » primordiale « non nulle » acquiert constamment, de plus en plus d’informations issues de l’expérience évolutive en cours. La somme actuelle d’informations n’est qu’une conséquence de la loi de viabilité, indispensable au cheminement de l’évolution vers la « réalité » finale. De sorte que toutes les informations accumulées antérieurement sur le sujet « viabilité », se retrouvent dans ce qui est issu de la dernière évolution. Celle-ci fournira d’autres informations plus précises qui se « concrétiseront » dans l’évolution (ou la génération évolutive) suivante.
Je ne sais évidemment pas qui est cet « état primordial »; tout ce que je sais, c’est qu’aujourd’hui, nous sommes tous : « Je suis ».
Ce dernier constat du « Nous sommes tous: Je suis! » est celui de la situation qui se retrouve à l’avant-dernier stage évolutif qu’on appelle: la probabilité; y suivra, inévitablement, cette réalité finale dont je viens de parler.
Amicalement
André Lefebvre