Archives mensuelles : octobre 2012

Les amours illicites!!!

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-Mes chers enfants, en ce jour du 24 janvier 1694, nous sommes réunis ici pour consacrer Jacques-François, né d’hier, au service de notre Dieu, le père tout-puissant dans sa sainte Église Catholique…

La grande Catherine Rivard âgée de 20 ans, marraine, fille de Nicolas Rivard, toujours capitaine de milice malgré son âge de 77 ans, tient dans ses bras le poupon bien emmitouflé qui ne réagit pas et regarde intensément le prêtre lorsqu’il lui verse de l’eau sur le front. Près d’elle se tient Jacques-François de Bourgchemin, lieutenant confirmé au service de sa majesté, commandant au fort St-François et manifestement heureux que ses amis Gabriel-Nicolas et Marie-Louise, l’aient choisi comme parrain de leur premier fils.

La cérémonie terminée, le prêtre emboîte le pas à la famille pour participer à la réception chez les Lefebvre de Batiscan. Le trajet se fait en raquettes et traînes sauvages; et la forêt résonne des chansons canayennes qui donnent le rythme à la marche.

Une bonne flambée brûle dans l’âtre où un ragout mijote dans un gros chaudron de fonte tiré en retrait du feu. Les femmes préparent la grande table pour nourrir la maisonnée.

-Mon cher Lefebvre, je dois dire que je suis quelque peu étonné que tu n’aies pas d’eau de vie dans ta maison.

-C’est une loi établie par ma femme. Elle ne supporte pas l’ivrognerie difficile à éviter si on a plein de boisson dans la maison. Et je suis pleinement de son avis, monsieur le curé.

-Par contre, interrompit le parrain, j’ai ici, avec la permission de la maîtresse de la maison, une bouteille de cognac qui nous permettra de boire un verre à la santé de mon filleul. Vous m’en donnerai des nouvelles mes amis.

Bourgchemin se lève, va demander des verres à Louise Duclos et sert le cognac à chacun des hommes présents. Le curé n’a pas quitté des yeux la bouteille, depuis que Jacques-François s’est levé. Il accepte avec un sourire entendu, le verre que lui présente Bourgchemin et en hume le nectar.

-Vous serez béni de Dieu jusqu’à la fin de vos jours mon cher commandant; merci beaucoup.

-J’espère que ce sera le cas, monsieur le curé. C’est vraiment ce que je m’efforce de mériter à tous les jours; soit avec du cognac, du rhum ou du madère. À votre santé messieurs.

Le Capitaine Rivard, Brouillet, Cadotte et tous les Duclos choquent les verres.-«  À la santé du jeune Jacques-François et à sa mère qui comprends si bien les hommes! » Dirent-ils en cœur.

Et leur curé! ajouta le prêtre.

C’est ainsi qu’est reçu officiellement dans sa famille, le premier fils de Gabriel Lefebvre et Louise Duclos. Les murs de la maison parviennent difficilement à étouffer les rires et les chants qui durent une bonne partie de la soirée.

Il n’est pas du tout assuré que le parrain du bébé, baptisé Jacques-François Lefebvre dit Lataille, fut béni jusqu’à la fin de ses jours. Car quelques semaines plus tard, des évènements hors de son contrôle, l’obligent à se lever contre le représentant officiel de Dieu lui-même, en Nouvelle France.

On se rappellera que, deux ans auparavant, nous avions tous remarqué, vous et moi, l’empressement que mettait François Desjordy de Cabanac à tourner autour de Marguerite Disy dit Montplaisir, lors du baptême de Marie Marguerite Lefebvre.

Le chat venait de sortir du sac officiellement et l’Évêque de Québec, Monseigneur de Saint-Vallier, venait de faire lire en chaire, un amendement condamnant les deux amants à ne plus se présenter aux offices religieux dans les deux Églises; c’est à dire celle de Batiscan et celle de Champlain.

Pour les amis « canayens » des amoureux, bien au fait de cette relation que ceux-ci ne cachaient aucunement, l’Église n’a rien à voir dans ce que tous considérent comme la « vie personnelle ».

Quant à Marguerite Disy dit Montplaisir, elle est aussi furieuse contre les deux curés et l’Évêque, que son amant Joseph Desjordy de Cabanac. De Bourgchemin appuit sans restriction la position de son frère d’arme. À leur avis, personne, même l’Église, n’a à se mêler de la vie personnelle d’un officier de l’armée faisant partie de la noblesse. Même l’Église de France n’ose se lever contre les us et coutumes de la noblesse française; et ce n’est pas parce que nous sommes dans les forêts du Canada que l’Évêque peut se permettre un tel manque de savoir vivre.

Par contre, pour le peuple, les lois sur l’infidélité sont très sévères en France. La coupable est recluse dans un monastère pendant « seulement » deux ans, si son mari accepte de la reprendre par la suite. Sinon elle a la tête rasée et reste au couvent avec les religieuses.

L’homme coupable d’adultère doit payer une grosse somme à l’époux lésé et est banni de la région qu’il habite. Mais on n’ose pas vraiment appliquer ces lois drastiques en Nouvelle France; car les colons se rebelleraient ou disparaîtraient tous dans la forêt.

Le dimanche suivant la lecture de l’amendement, De Cabanac en compagnie de De Bourgchemin entrent dans l’Église de Champlain avec quelques soldats. Le curé cesse sa messe et ne la reprend que lorsque les « pécheurs » sont sortis. Mgr de St-Valier porte également une accusation à Frontenac, disant que Desjordy et Bourgchemin n’ont pas assisté à la messe le Dimanche où l’amendement a été lu. C’est ce qui oblige Frontenac à s’occuper du scandale. L’accusation est déboutée par des témoins.

Mais ce n’est pas le seul cas de bisbilles relatifs à l’Évêque de Nouvelle France. Il s’oppose à ce que Frontenac fasse jouer la Pièce de Molière : « Le Tartuffe ». Il accuse le Sieur Mareuil d’avoir proféré des paroles impies au sujet de Dieu, de Jésus et de Marie, de sorte que celui-ci passe quelques mois en prison. Quatre jeunes nobles, un soir de fête, se manifestent dans les rues de Québec en criant et vociférant des injures envers Mgr de Saint-Valier et brisent les fenêtres de deux marchands de la ville. Un peu plus tard, deux individus enfoncent la fenêtre de la chambre de l’Évêque de Québec, ce pourquoi on porte d’autres accusations envers Mareuil mais on ne trouve aucune preuve.

L’Évêque parvient même à se chicaner avec le Chevalier de Callières au sujet de son prie-Dieu qui, selon lui, est placé là où le prie-Dieu de l’Évêque doit être installé; et il le fait déplacer. Ce voyant, le Chevalier de Callières le fait remettre à sa place et y place une sentinelle pour le protéger. Comme vous le voyez, l’Église doit jouer du coude assez violemment pour se tailler une place dans la vie des Canayens et les riposte ne sont pas moins violentes.

Frontenac fait rapport de tous ces problèmes sociaux inutiles, au roi et Mgr Saint-Valier doit traverser en France pour se justifier. C’est ainsi que l’amendement contre nos deux amants de Batiscan tombe et le train-train quotidien reprend son cour.

La même année Jacques-François de Bourgchemin est accusé de vouloir empoisonner son épouse. Ce qui n’aide pas du tout à leur relation conjugale déjà tumultueuse. Frontenac sera obligé de renvoyer Bourgchemin en France l’année suivante, après lui avoir octroyé une seigneurie qui sera ratifiée par le roi en 1696. Il est cependant indéniable que l’affaire se résous puisque Bourgchemin est de retour au plus tard en 1697.

Il possède maintenant un fief sur le Richelieu. Il décède cette même année, on ne sait comment. Il a soudainement disparu; pfouitt!!! Sa veuve, Élisabeth Disy dit Montplaisir se remarie le 26 janvier 1698.  Constat : Il est faux de croire que le Cognac, le Rhum et le Madère sont des incitations à la bénédiction divine. « Ça ne marche pas!!! »

Les deux Hertel, que l’on croyait mort aux mains des Iroquois depuis deux ans, réapparaissent en compagnie d’un chef Iroquois qui veut une entente de paix avec Frontenac. Le chef emmène avec lui 11 autres prisonniers qu’il a également délivré. Par contre, la majorité des Iroquois ne veulent pas la paix et le vieil intendant le sait très bien. Frontenac dit donc au chef de répandre la nouvelle que si les Iroquois ne font pas la paix rapidement, il se rendra chez eux pour les exterminer.

Il décide, finalement, de frapper plutôt les gens de la Nouvelle Angleterre, sachant très bien qu’ils sont les vrais responsables du retard de la paix iroquoise. En juin, c’est le massacre de Oyster river, au New Hampshire, où Mercy Adams, entre autres, est fait prisonnière et ensuite adoptée par le commandant Charles Plagnol qui la fait baptisée du nom d’Ursule. Celle-ci épouse alors Charles Dubois dit Brisebois. Ce sera leur fille, Marie-Ursule Dubois, qui épousera Louis-Alexis Lefebvre, fils de Gabriel et Louise Duclos. Ce qui permettra que je puisse écrire un jour, le récit que vous lisez actuellement. Sans le massacre de Oyster river, vous n’auriez qu’une page blanche, ou encore, peut-être, un autre article sur une histoire complètement différente de la vie des Canayens.

À suivre

André Lefebvre

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Encore des combats contre les Iroquois!!!

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Jacques-François de Bourchemin accoste aux pieds de la terre de son ami Lataille. Son épouse Élisabeth Disy saute du canot, ramasse un paquet qui se trouve dans la pointe de l’embarcation et prend le sentier vers la maison. Bourgchemin tire le canot sur la plage et lui emboîte le pas.

La maison est vide.

-Ils ne sont pas là? Demande Bourgchemin.

-Ils doivent être au champ; vas les chercher, je te prie.

Bourgchemin sort son pistolet de sa ceinture et tire un coup en l’air. Sa femme qui lui tournait le dos, fait volte-face et rouge de colère rugit :

-Espèce de sans cervelle! Tu va me faire mourir d’apoplexie! Ne peux-tu donc pas te servir de ton cerveau, sinon de tes jambes? C’est trop te demander de te déplacer au lieu de me tirer un coup de feu dans les oreilles?

-Madame! Contenez-vous! Vous ne devez pas employer ce langage qui ne sied pas du tout à une femme de la noblesse. Vous allez m’obliger de vous corriger et j’en serais marri.

– -De un, nous sommes seuls; et lorsque nous somme seuls, tu n’as pas l’habitude de faire tellement preuve de cette fameuse noblesse, toi-même . Et de deux, ne t’avise jamais de me « corriger »  parce que lorsque tu dormiras, je t’assomme, je te tranche les couilles et je te scalpe. Tiens toi-le pour dit!

Bourgchemin éclate de rire et rengaine son pistolet.

 -Bien dit, ma douce hirondelle; je vais chercher Lataille.

Il n’eut pas à aller très loin, le couple Lefebvre-Duclos arrivait des champs, Gabriel tenant son fusil armé et Louise portant son bébé dans un panier indien, sur son dos.

-C’est bien comme ce que je t’avais dit Louise. C’est bien Bourgchemin; et il n’aime pas marcher pour rien.

Louise ne semblait pas très contente; elle fit presqu’une génuflexion devant le jeune noble en disant :

-Votre Seigneurie nous excusera de ne pas passer nos journées près de la rivière en attendant votre visite, messire;… mais si tu t’avises encore une fois de tirer du pistolet pour signifier ton arrivée, je te fous une bastonnade que ton épée ne saura jamais parer. Tu m’as bien compris Jacques-François Hamelin de Bourgchemin… et de l’Hermitière!

-Toi, tu es bien l’amie de l’autre. Viens ici que je t’embrasse; je te promets de ne jamais répéter cela lorsque tu es enceinte. Il prend Louise dans ses bras, la soulève du sol et lui plaque deux baisers résonnants sur les joues.  

Quant à toi, Lataille, si tu avais marché comme je l’ai fait les quatre derniers mois, tu ne dirais pas un mot. J’ai apporté à boire et je te raconte tout ça lorsque nous aurons des verres. Louise, Élisabeth est à l’intérieur. Elle a très hâte de te raconter les ragots de Québec.

-Ne t’avise surtout pas de t’enivrer chez moi Monsieur de Bourgchemin; car alors, tu sais ce qui t’attend.

-Ma chère Louise!  Élisabeth surgit de l’entrée de la maison. Quel plaisir d’enfin te revoir! Les deux femmes se sautent au cou et se font la bise. Distraitement Élisabeth laisse deux verres et une bouteille sur le sol, attrape la petite Catherine dans son panier, prend Louise par le bras et les deux amies retournent dans la  maison. Il faut que je te raconte ce que Monsieur de Frontenac a fait lors de….

On ne saura jamais ce qu’a fait Frontenac, ni à quelle occasion, car la porte se referme sur les deux femmes.

Bourgchemin ramasse les deux verres et la bouteille.

-Quant on pense que cette femme sait parfaitement bien recevoir les grands de l’aristocratie française et qu’aussitôt arrivée chez des Canayens, elle redevient instantanément celle que j’adore. Viens Lataille, on va s’assoir au pied de l’arbre; j’ai un tas d’aventures à te raconter.

Jacques-François sort son épée, fait sauter le goulot de la bouteille et s’assoit après avoir rempli les deux verres.

-Je vois que tu es devenu Lieutenant. Félicitation mon ami.

-Ouais; le vieux est très satisfait de mes actions de l’hiver dernier. Ça augmente un peu ce qui tombe dans mon escarcelle; ce qui n’est pas à dédaigner.

-As-tu des difficultés financières?

-Non; pas du tout. Les pelleteries rapportent très bien et je tire mon épingle du jeu lors de mes missions.

-Dans ce cas, santé! Mon cher Jacques-François. Gabriel leva son verre et le porta à sa bouche.

– Santé Gabriel. Tu as ouï-dire de notre expédition chez les Iroquois au mois de février dernier?

-Pas vraiment; vous êtes allé dans quel coin?

-Dans la région d’Albany.

-J’ai un frère Mohawk qui vit dans cette région; j’espère qu’il n’a pas été tué.

-Toi? Un frère Mohawk? Qu’est-ce que tu me racontes là?

Et Gabriel-Nicolas lui raconte son aventure de l’année précédente avec Loup gris.

-Je n’ai pas entendu parler d’un dénommé Loup gris qui soit mort et je crois bien connaître tous les noms des chefs que nous avons tué. D’ailleurs, nos « sauvages » qui avaient promis à Frontenac de ne faire aucun quartier des Iroquois mâles durant le combat, n’ont pas voulu tenir parole et on s’est retrouvé avec un trop grand nombre  de prisonniers. Ce qui nous a causé un tas de problèmes; mais laisse-moi te raconter l’histoire à partir du début.

Le vingt-cinq janvier dernier, nous sommes parti avec 625 hommes sous les ordres de Nicolas  d’Ailleboust de Manthet, de Zacharie Robutel de La Noue et d’Augustin Le Gardeur de Courtemanche. De fameux commandants, je dois te dire.

– Oui; je les connais. Il vaut mieux être de leurs amis.

– La troupe se compose de 100 soldats, d’un bon groupe de Canayens et surtout de nos sauvages dont, entre autres, nos Iroquois du Sault St-Louis. Comme je te le disais, Frontenac avait fait promettre aux chefs sauvages de ne pas faire de quartier et de tuer tous les Iroquois ennemis, en âge de porter les armes. Ils devaient faire prisonniers les femmes et enfants pour regarnir leurs deux bourgades du Sault St-Louis.

Partis de Chambly en raquettes, nous avons fait des bivouacs, toutes les nuits, par groupes de douze ou quinze. Nous creusions la neige jusqu’au sol,  y placions des branches de sapins pour, finalement, fumer nos pipes autour d’un petit feu central. C’était un peu macabre de voir nos Canayens, le capuchon de leur capot cachant leur visage, en train de parler de choses et d’autres, la pipe  au coin de la bouche, sortant du capuchon .

Nous sommes arrivés dans le pays des Iroquois le 16 février. Personne ne s’est rendu compte de notre présence. Il y a, en tout, quatre villages Iroquois. Trois d’entre eux seulement sont près, les uns des autres. C’est ceux-là que nous visions les premiers.

Un prisonnier hollandais, nommé Jean Baptiste Van Eps, que nous avions amené avec nous de Montréal, s’est enfui pour aller prévenir les Anglais d’Albany, de notre expédition. Nous ne pouvions plus retarder et devions passer à l’action au plus vite.

Sous les ordres de De La Noue, mon groupe se charge du premier village sans rencontrer de résistance. Un quart de lieu plus loin, De Courtemanche et De Manthet réussissent également à s’emparer du deuxième retranchement. Nous avons, maintenant, tellement de prisonnier que nous les rassemblons dans l’un des deux villages et laissons De Courtemanche en prendre la garde. Nous brûlons, ensuite, l’autre village avec tous ses vivres.

La nuit du dix-huit, nous approchons du troisième village, la capitale des Iroquois. On les entend chanter la guerre, inconscients que nous sommes autour d’eux. Un de nos indiens franchit la palissade et vient nous ouvrir le portail. La bataille est intense mais très courte.  Une trentaine de Mohawks sont tués et près de 300, faits prisonniers incluant femmes et enfants. Parmi eux restent 40 Mohawks qui envisageaient de rejoindre, le lendemain, une troupe d’Onneyouths et deux cents anglais qui se proposent tous, de venir vous attaquer, ici, sur le fleuve St-Laurent.

C’est alors qu’on se rend compte que nos sauvages refusent d’exterminer les Iroquois comme ils l’ont promis. Nous avons maintenant beaucoup trop de prisonniers pour effectuer une retraite rapide. Et tous savent qu’on se lancera rapidement à notre poursuite, après ces trois coups.

Au bout de deux jours de retraite, on rencontre des éclaireurs Mohawks qui nous apprennent que les anglais sont à nos trousses, mais pas pour se battre. Ils nous affirment que la guerre contre l’Angleterre est terminée et que les Anglais veulent négocier.  Nos Iroquois du Sault St-Louis, apparentés à ceux de la région, décident de se retrancher pour attendre nos poursuivants. Ne pouvant pas nous y opposer on s’installe dans un fort en abattis.

Nous avons attendu deux jours avant qu’ils n’arrivent. Ils étaient les Onneyouths dont je t’ai parlé plus haut. Heureusement qu’ils n’avaient pas attendu les Anglais avant d’entreprendre la poursuite. Nous les avons chargé trois fois de suite avant de parvenir à percer leur ligne. Huit de nos Canayens sont tués ainsi que huit de nos sauvages. Nous avons douze blessés, dont le lieutenant Robutel de la Noue, mon commandant. L’ennemi n’a pas plus de pertes que nous, mais prend la fuite. Ils se sont contentés, ensuite, de nous suivre pendant trois jours.

Par la suite nous avons appris qu’il y avait bien une troupe de  miliciens d’Albany avec eux, sous les ordres de Peter Schuyler, mais on ne leur a jamais vu le bout du nez. Il parait qu’ils n’étaient pas assez nourris et trop faibles pour se battre.

Lorsqu’on est arrivé à la rivière Hudson, la glace ne nous supportait plus. Heureusement, nous avons pu traverser sur un embâcle un peu plus bas. Arrivés au lac Champlain on découvre que nos provisions, dans les caches, sont gâtées. Nous avons mangé du « mocassin à la sauce de lac » et quelques noisettes qu’on trouvait en grattant la neige. Certains ne peuvent aller plus loin et les autres leur font parvenir du secours dès leur arrivée à Montréal avec les prisonniers. Par la suite, après s’être nourris un peu, les retardataires retournent chacun chez eux, par petits groupes.

Nous avons, évidemment, perdu un grand nombre de prisonniers durant le trajet du retour. Nous n’en avions plus que 64 à notre arrivé à Montréal. Les prisonniers apprennent à Frontenac que les Bostonnais se préparent à attaquer Québec à l’été; mais c’est la troisième fois qu’on entend la même rengaine depuis deux ans. Ce n’est pas très inquiétant. Il semble plutôt, que les Anglais répandent ces rumeurs pour encourager les Iroquois à venir nous défier, sous la fausse impression de leur appui. Les Bostonnais ne pourront pas leurrer leurs sauvages de cette façon bien longtemps, je pense.

-Et toi, Bourgchemin; tu t’en es tiré dans quelles conditions?

-Pas trop mal. J’ai ramené Robutel de la Noue à Montréal sans trop de difficultés, mais nous étions à la limite de nos forces. Je ne pense pas qu’il restera longtemps avec les Montréaliens. Il préfère, et de loin, vivre parmi les sauvages.

Après deux semaines de repos, j’étais prêt à recommencer. Il faut dire qu’Élisabeth s’est occupée de moi et que, déjà, après une semaine de ses soins, j’aspirais à sortir de la maison pour échapper aux « remarques » d’affection de mon épouse. Juste Dieu! La bouteille est vide!  

-Viens à la maison, on va terminer avec une bonne bière d’épinette.

-Toi et ton foutu jus d’épinette!!!

Les deux amis prennent la direction de la maison.

À suivre

André Lefebvre

 

 

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Un article qui sert de relais à deux types de témoignages qui ouvrent sur ce grand inconnu qu’est le destin de l’être humain et de l’humanité. Il faut se donner le temps de visionner les vidéos et d’y lire les textes qui les accompagnent. Des références à approfondir un jour de pluie ou à l’occasion d’une nuit d’insomnie. Une chose est certaine c’est que l’humanité est à la croisée des chemins.
1.      SOIT DES ROBOTS SANS ÉMOTION ET UNE OLIGARCHIE SANS CONSCIENCE
 
Je viens tout juste de lire cet article d’Alex Jones et de Paul Joseph Watson qui nous plonge dans un futur tout proche où les oligarchies mondiales transforment l’humanité en robots sans émotion et se l’asservisse sans conscience.
Dans un documentaire, en deux parties, Alex Jones nous conduit progressivement sur la voie de cette transformation de l’humanité toujours plus robotisée et de l’avènement de la gouvernance mondiale entièrement sous contrôle oligarchique.
À voir absolument : « End Game » d’Alex Jones (sous-titrages en français) après avoir lu « article plus haut mentionné. Très certainement le meilleur documentaire de Jones à ce jour, sûrement son plus accompli.
2.      SOIT DES HUMAINS RESPONSABLES ET SOLIDAIRES VIVANT EN PAIX ET HEUREUX
On peut dire, sans risque de se tromper, que la majorité des peuples de la terre souhaitent en arriver à une situation où tous les êtres humains pourront vivre en paix dans un climat de justice et de vérité.  Qu’il n’y ait plus de cette cupidité qui conduit certains groupes à des ambitions les plus criminelles d’exploitation et de domination. Que la terre redevienne un grand jardin permettant à tous et à toutes d’y trouver leur pain quotidien et d’y développer la grande solidarité donnant accès à la conscience des consciences.
Ceux et celles qui s’affirment sur cette voie se reconnaissent par leur engagement en faveur de la liberté des peuples, de la justice sociale, de la vérité dans les communications entre les personnes, de la solidarité humaine et de la compassion à l’endroit des plus affligés.
Au nombre de ces derniers, il y a ceux et celles qui se regroupent dans la foi en un Dieu dont la volonté est que l’humanité soit transformée en sa ressemblance la plus parfaite. Ce sont les croyants des trois grandes religions monothéistes que sont le “judaïsme, le christianisme et l’islam.”
Dans les trois cas, une transformation radicale de l’humanité doit se produire à la fin des temps dans la foulée d’une grande confrontation entre les forces d’anéantissement et celle de renouvellement. Pour le judaïsme, ce moment se produira avec l’arrivée du Messie promis par les prophètes et qui disposera de toute la puissance de Dieu pour apporter la paix et le bonheur sur la terre.
Pour le christianisme, le Messie est Jésus de Nazareth qui s’est présenté à l’humanité non pas sous les dehors d’un roi et d’un puissant, mais de celui qui est là  pour servir et non pour être servi et dont le message de paix, de vérité et de justice le conduit à la condamnation d’une mort atroce sur la croix. Ses témoins et disciples rendirent témoignage qu’au troisième jour de sa mort, il ressuscita et l’apôtre Paul précisa que son Père lui donna tous les pouvoirs sur la terre et dans les cieux pour juger les peuples du monde.
Pour l’islam, Jésus est reconnu comme un grand prophète et doit revenir à la fin des temps pour établir la paix sur la terre.
Je laisse en référence deux témoignages, le premier venant d’un des plus grands rabbins qu’ait connu Israël au XXe s.
 
 
 et le second d’un des Cheikhs musulmans les plus écoutés.
 
 
Oscar Fortin
Québec, 19 septembre 2012
 

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La richesse du pays en 1692!!!

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Batiscan fait partie du gouvernement de Trois-Rivières. En 1692 cette région gouvernementale comprend 1142 maisons, 24 églises, 23 moulins, 13,768 arpents en culture, 1856 arpents en pâturage, 316 chevaux, 4539 bêtes à corne, 294 moutons et 2,234 cochons. C’est là, beaucoup plus que tous ce qui se retrouve dans les gouvernements de Montréal et Québec réunis. Par exemple, dans le gouvernement de Montréal on dénombre 586 maisons,  7,109 arpents en culture et 46 chevaux; dans celui de Québec 201 maisons,  5,792 arpents en culture et 38 chevaux. Cela n’a rien de comparable à la région de Trois Rivières.

Par contre, nous découvrons dans le gouvernement de Trois Rivières, 260 hommes mariés, 281 femmes mariées, 555 hommes non mariés et 425 femmes non mariées. Cela représente deux fois moins que la population du gouvernement de Montréal et cinq fois moins que la population du gouvernement de Québec (Statistique Canada de 1692).

Comment cela peut-il être possible? La réponse est assez simple. Plusieurs individus de Québec et de Montréal sont des Canayens « de passage ». Ce sont des Français affectés en Nouvelle France et qui retournent éventuellement dans leur pays. Ils viennent ici comme soldats ou pour le commerce, faire un magot et repartent ensuite dans leur pays. Chaque année un va et viens constant de ces individus se fait entre l’Europe et la Nouvelle France. Ces personnes s’installent temporairement à Québec ou à Montréal; aucun ne s’établit dans le gouvernement de Trois-Rivières où les amérindiens pullulent et où les défenses sont pour le moins déficientes. Donc, les vrais Canayens des gouvernements de Québec et de Montréal sont un peu moins nombreux que leur population statistique. Pour les Canayens de ces deux gouvernements, une majorité de ceux de Montréal se livrent exclusivement à la traite des fourrures et la majorité de ceux de Québec vivent principalement de leur participation au commerce venant de France. Il ne faut pas oublier également qu’une bonne portion d’ecclésiastiques habite à Québec et à Montréal.

Il est donc évident que la prospérité réelle et autonome du pays se retrouve dans le gouvernement de Trois Rivières. Il est également indéniable que les autorités officielles du pays, qui font surtout partie des « Canayens de passage », résident à Montréal et à Québec. Il devient maintenant facile de comprendre pourquoi l’histoire des « Canayens » n’est pas reconnue officiellement, puisque ce sont ces « Canayens de passage » qui ont écrit l’histoire officielle du Canada.

Pour récupérer une partie de notre histoire réelle, il faut se pencher sur la population du gouvernement de Trois-Rivières. C’est elle qui nous peint la force, la détermination et le courage de tous les Canayens de l’histoire réelle du Canada. Le gouvernement de Trois Rivière est celui où les « Canayens de passage » se sont le moins exprimés pour « recouvrir notre histoire de leur propre histoire ». Les vrais Canayens de Montréal subsistent comme ceux de Trois-Rivières; mais ne parviennent à ressortir que très peu dans l’histoire officielle. Les vrais Canayens de Québec vivent  plutôt dans l’entourage des autorités françaises; ce qui développent chez eux des caractéristiques un peu différentes des autres « Canayens », mais qui sont loin à être dédaignées dans l’histoire réelle du pays. C’est derniers sont cependant beaucoup mieux intégrés dans l’histoire officielle. Ce qui les marginalise un peu de notre histoire réelle.

Pour déterminer un dernier point, ce sont surtout les jeunes Canayens du gouvernement de Trois Rivières et quelques autres de Montréal qui essaimeront pour s’installer dans tout l’Amérique du Nord. Ce sont eux qui sont les vrais explorateurs et les vrais découvreurs de territoires inconnus. Ce sont eux qui établiront les villages, futures villes du centre et de l’Ouest Canadien et Américains. Ce sont, malheureusement, eux également qui passeront sous le radar de l’histoire officielle de ces deux grands pays nord-américains. À mes yeux de Canayens, c’est tout à fait révoltant!

-Louise; allons nous reposer un peu à l’ombre sous les arbres. On travaille au jardin depuis ce matin; on a bien mérité une petite relâche.

Gabriel-Nicolas Lefebvre travaille le jardin avec la houe, puisqu’il a laissé la binette à sa femme enceinte qui ne peut  pas tellement se pencher pour travailler. Les deux déposent leur outil et se dirigent vers les arbres où ils s’assoient cote à cote. Gabriel passe la gourde à Louise qui boit une lampée.

Mon père m’a apprit que sa truie va mettre bas sous peu. Il me propose un couple de cochon. Il va falloir leur bâtir un enclos.

-C’est une excellente idée. J’ai même le bois nécessaire. Je vais m’y mettre cet après-midi.

-Le bébé va arriver dans quelques semaines; j’aimerais bien que tu m’amènes à Québec avant. J’ai l’impression que l’accouchement ne sera pas facile et je voudrais aller à l’hôpital, chez les sœurs, pour accoucher.

-Tu m’alarmes ma femme. Pourquoi l’accouchement ne serait pas comme d’habitude?

-Je ne sais pas; mais je me sens comme « pas normale ». Y’a quelque chose de différent avec ce bébé. C’est une impression de femme. Tu ne comprendrais pas.

-Ce que je comprends c’est que ça m’inquiète en joual-vert. Quand penses-tu que nous pourrions nous rendre à Québec? On devra faire le voyage en canot. Seras-tu assez en forme?

-La semaine prochaine devrait aller. Tu sais que j’aime le canot; mais je ne pourrai certainement pas avironner.

-Pas question pour toi d’avironner. Je vais demander à ton frère Nicolas ou François de nous accompagner. Ils ne refuseront pas d’aller quelques jours à Québec. Pour l’instant, c’est fini le travail de jardin pour toi. Tu vas te reposer. Je vais aller chez tes parents demander si Madeleine ou Marguerite ne peut pas venir rester chez nous jusqu’à ce qu’on parte pour Québec.

-Demande Marguerite; elle est plus jeune et elle m’écoute mieux que Madeleine.

-C’est l’inconvénient d’avoir des femmes de caractère dans une famille; mais je préfère Madeleine; elle pourra t’obliger à te reposer. Ce que tu ne feras pas avec la jeune Marguerite.

Tout se passa comme prévu et Louise accoucha à l’hôpital de Québec. Elle avait eu raison de s’inquiéter; parce que le bébé s’était présenté avec le cordon ombilical autour du cou. Quoiqu’un peu plus difficile, la naissance s’était bien déroulée et la maman revenait chez elle en pleine forme avec sa nouvelle petite fille qu’elle appelle Catherine comme sa voisine, son amie Cadotte.

C’est durant cette période à Québec que les Lefebvre/Duclos apprirent « l’exploit » de Madelon de Verchère. Celle-ci avait tenu tête pendant huit jours, avec un vieux soldat et quelques enfants,  à des Iroquois qui voulaient razzier le fortin de son père. Louise Duclos et Gabriel Lefebvre étaient heureux que la famille de Madeleine ait survécu; mais ne trouvaient pas tellement « hors de l’ordinaire » ce supposé « exploit ».

Madelon n’était plus une « petite fille » comme le disaient les gens de Québec; c’était une femme célibataire de 14 ans qui maniait le fusil aussi bien que n’importe lequel des Canayens. Le bruit courrait même qu’elle « s’amusait » à pratiquer  l’escrime avec la rapière de son père le Sieur François Jarret. Le fait est que la plupart des femmes auraient agit de la même façon qu’elle et plusieurs se retrouvaient dans la même situation assez souvent. Évidemment, pour les gens vivant à l’intérieur de la forteresse de Québec, l’évènement paraissait assez extraordinaire. Il va sans dire que lorsque le roi de France entendit ce récit, la noblesse en fit une montagne. L’heureux dénouement fut que Madeleine eut finalement droit à une petite pension royale qui aida sa famille.

Madeleine de Verchère épouse, plus tard, Pierre Thomas Tarieu de Lanaudière et vient vivre à La Pérade où elle fait la manchette à plusieurs reprises en sauvant son époux deux fois des Iroquois et en s’attaquant au curé Gervais Lefebvre de Batiscan dans un procès qui fit l’histoire. Une vie, finalement, assez ordinaire pour une Canayenne; mais pratiquement impossible pour les femmes d’une autre nationalité que la nôtre; on doit l’admettre.

On n’a qu’à se remémorer les aventures des débuts de Montréal où Mme Closse, Mme Daulac et Catherine Mercier se défendent contre les Iroquois avec des haches, semant l’épouvante dans les rangs Iroquois. Sans oublier la bonne femme Primot de Québec qui assaillie, pas très loin des murs,  par trois Iroquois, se défend des pieds et des mains, mais fut assommée par un tomahawk. Lorsqu’un des indiens se penche sur elle pour lui lever la chevelure elle reprend conscience et l’attrape à pleine main par ses bijoux de famille.  L’indien se met à crier de douleur et finit par l’assommer. Oubliant de la scalper, il réussit à fuir, le souffle très court, avant que les secours venus de la ville ne mette la main sur lui.

À l’arrivé des secours, les hommes relèvent la bonne femme, et l’un d’eux l’embrasse tellement il est heureux qu’elle soit encore vivante. La bonne femme se réveille au même instant et lui assène une gifle qui fait tomber le bienheureux sur le dos.

– Mais que faites-vous là madame? Cet homme est simplement heureux que vous soyez vivante!

Parmanda,! dit-elle; je croyais qu’il voulait me baiser.

L’histoire couru pendant des années dans la population qui ne cessait d’en rire.

L’enclos pour le couple de porcins donné par François Duclos, s’avère efficace et Gabriel doit consacrer une partie de son jardin à la culture de pommes de terre, considérée à l’époque comme de la « pitance pour les cochons ».

Il construit également un poulailler, rattaché à la maison, pour abriter les quatre poules et le coq qu’il avait rapporté de Québec avec sa fille  Catherine.  Il envisage de « greiller » sa terre d’une vache et même d’un bœuf, si possible, avec ses gains de traite de l’année suivante. Il lui faudra se rendre à Albany pour en tirer les profits suffisants; mais il n’y voit là aucun problème. Il ne lui suffit que  d’opérer avec sa discrétion habituelle. Son voisin Cadotte  et son beau-frère Nicolas accepteront bien de venir avec lui.

Un autre projet commence à poindre dans son esprit, mais ce n’est pas pour tout de suite. Nous aurons l’occasion d’en reparler plus tard.

À suivre

André Lefebvre

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