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Parfois je manque de persévérance. Heureusement IL est là…. Amen

Je me souviens du Sieur de Maisonneuve

 
 

 
Il y a une ou deux lunes, à l’occasion de je ne sais plus quelle commémoration de l’histoire de Montréal – et de la Nouvelle-France – des groupes de pression ont proposé que Jeanne Mance,  la fondatrice de la communauté féminine des Hospitalières de Saint-Joseph et de notre Hôtel-Dieu, soit nommée «cofondatrice» de la métropole du Québec – notre chère Ville-Marie – pour la mettre sur un pied d’égalité avec Pierre de Chomedey sieur de Maisonneuve.

Toujours aussi «bien-pensant» et accommodant le maire de Montréal, M. Trembay, en a tremblé de compassion et il a fait montre de sa légendaire largesse. Jeanne  Mance, nous a-t-il fait découvrir, a de grands mérites – ce qui n’est pas faux. Il  a même poussé sa souplesse, au cours d’une entrevue, jusqu’à laisser entendre qu’il raserait ce monument à De Maisonneuve  qui était jusqu’à aujourd’hui le fondateur de Montréal; on élèverait ainsi Mlle Mance au rang de «fondatrice» officielle la Ville de Montréal. La place d’Armes d’aujourd’hui serait donc éventuellement transformée, (elle qui vient de subir une grande cure de jouvence) et le chef d’œuvre du sculpteur Louis-Philippe Hébert devra dorénavant avoir deux têtes et quatre bras.

Cela devra poser certains problèmes de créativité comme on dit, et cela devra en poser d’autres, des problèmes – encore plus inextricables – du simple point de vue du symbolisme.

Tout le monde sait que le symbolisme est l’expression  de l’âme. L’âme de nos prédécesseurs disait les choses comme elles étaient.  Le sieur de Maisonneuve était gouverneur de Montréal. Cela ne fait pas de doute. L’historien de Montréal, Robert de Rumilly l’a bien expliqué : «Le choix de Maisonneuve, fait par Jérôme de la Dauversière, à la suggestion du Père Lallemant, (comme gouverneur de Montréal)  se trouve ratifié en suivant la voie hiérarchique DEPUIS L’AUTORITÉ ROYALE». C’était lui, Maisonneuve, le chef et le responsable devant l’État.

Mais oui, de Maisonneuve, un militaire au talent reconnu, n’a eu cesse de représenter  l’État français à Montréal. Il a manœuvré toute sa vie durant pour la défense des idéaux de la Société de Montréal, l’administratrice de ce difficile avant-poste ouvert en 1642. Son activité comprend les périlleux voyages qu’il a entrepris à  trois reprises pour aller chercher des recrues et ses efforts pour protéger ses alliés algonquins et tenter d’établir une paix avec les adversaires iroquois armés par les Hollandais d’Albany et les Anglais de la côte atlantique. C’est une histoire remarquable et impressionnante. Il a combattu et il a gagné, ce qui n’arrive pas souvent en terre québécoise. Cela avec son mandat officiel.  Il n’a pas été un flibustier.

Le monument que nos prédécesseurs ont choisi d’ériger, sur la Place d’armes de Montréal (oui d’armes) représente une réalité historique qui ne fait pas de doute. Elle nous montre un M. de  Maisonneuve qui porte le drapeau de la victoire et une épée, elle-même victorieuse. Et puis en contrebas, les quatre autres réalités du récit de la fondation, celles de l’agriculture, des Indiens, des combattants et… de Jeanne Mance.

Oui Jeanne Mance est la contrepartie féminine de notre réalité, de par sa bienveillance, de sa solidité et de son amour pour l’humanité. Et elle est là sur la place, comme il se doit.

C’est elle, lit-on partout, qui soignait «les sauvages et les colons». Et c’est bien pourquoi, nos prédécesseurs ont nommé une rue pour reconnaître sa valeur; et c’est pourquoi l’Hôtel-Dieu existe, cet hôpital sur les bases duquel notre État actuel  du Québec aurait dû construire le méga-hôpital nouveau (le français). La communauté des hospitalières, ne l’oublions pas, vit encore là, 400 ans après la fondation! Et ses mérites ne sont pas discutables; elle a rendu service à notre communauté nationale. Jeanne Mance, jadis, portait son drapeau devant l’Hôtel-Dieu d’aujourd’hui, avant que nos bons médecins ne s’accaparent du jardin pour y stationner  leurs Mercedes! Il faudrait le lui redonner.  Et cela suffirait.

Mais le monument de Louis-Philippe Hébert, sur la Place d’armes, nous dit tout cela, et encore.  Il nous le dit suffisamment. Il est la synthèse de notre histoire montréalaise. Il a été réalisé par un grand artiste (dont les 25 grandes œuvres remarquables ont une valeur internationale).  L’hommage que le sculpteur Hébert a rendu à de Maisonneuve est sans contredit son plus grand chef d’œuvre. La raison de cette beauté réelle est suffisante pour que nous proposions le statu quo intégral en la matière.

S’il advenait que des maires complaisants ou des militants en robe ou pas s’avisent de vouloir infléchir l’histoire pour promouvoir des intérêts particuliers passagers il est certain que ceux-là trouveront beaucoup de monde pour se mettre en travers, y compris votre serviteur. «Over my dead body» comme disent les anglais! La beauté, faut-il le rappeler, même en matière de monuments, ne se trouve pas en surabondance à Montréal. Aussi faut-il lui rendre hommage quand on la voit, quand elle a été répandue par un génie comme Louis-Philippe Hébert.

Jean-Pierre Bonhomme

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La métropole abandonnée

Il y a des Québécois qui s’étonnent. Ils constatent que la ville de Montréal – c’est-à-dire la ville centrale, la vraie ville – est devenue anglaise. Ils pleurent, parce que cet environnement ne leur plait pas; ils ne se sentent pas ‘chez eux’ et dépriment : c’est la faute au maire de Montréal, lancent-ils, c’est la faute ‘aux gouvernements’ et c’est la faute «au destin».

Mais il n’y a rien de surprenant en cette affaire. L’anglicisation de Montréal, qui est en cours et qui bloque le chemin de l’affranchissement des Québécois, était prévue. C’est la société québécoise elle-même – jadis un peu française – qui, par ignorance ou par négligence – par veulerie? – en a décidé ainsi.
Devant la pression – énorme – des forces anglo-américaines qui procédaient à l’intégration des huit millions de Québécois à la société de consommation que l’on sait, il y avait deux attitudes possibles : combattre ou fuir. Les Québécois ont choisi la fuite.

La fuite en banlieue. On ne le dit pas tout haut, mais toutes les familles québécoises (je parle de toute la société francaise du territoire) ont fui dans les champs de patate périphériques. Il y en a même qui sont allées vivre au-delà de Repentigny en allant vers Trois-Rivières et au-delà de Terrebonne pas trop loin des mouches noires!

Si les Québécois avaient choisi de vivre en ville, ils se seraient créé une sorte de civilisation particulière, parfumée de culture francaise et sympathique à ce que l’Europe produit. Car on sait fort bien que la civilisation se crée en ville; pas dans les jardins maraichers! Pour créer une civilisation intéressante et particulière les Québécois auraient donc dû combattre. Et voici comment.

René Lévesque, qui n’était pas bête, l’avait expliqué dans son premier programme politique : celui de 1970 nommé «La solution». Le sol urbain, avait-il proclamé est «un bien commun»; et, ainsi, les pouvoirs publics devront-ils procéder à la «nationalisation progressive du sol en périmètre urbain». On sait que c’est la spéculation sur le prix du sol qui rend l’accès à la propriété inaccessible au commun des mortels. Il aurait fallu combattre!

Ce n’est pas tout. M. Lévesque, que nous aimons tant, avait proposé que les projets de rénovation urbaine se fassent en introduisant «des formules de gestion communautaire où les occupants pourront accéder progressivement à la propriété de leur logement par le versement de loyer mensuel ». Et pour harmoniser tout cela «il aurait fallu «élaborer une véritable politique de l’habitation sous l’initiative première de l’État».

Je n’ai pas besoin de vous expliquer comment les ingénieurs et les spéculateurs ont réussi à bloquer tout ca! Je n’ai pas besoin de vous dire aussi que nous sommes loin, ici, des modestes réclamations relatives à la hausse de certains frais de scolarité! Il aurait fallu combattre!

Car aujourd’hui le territoire est parsemé d’«élites» qui se sont construits des «monster houses» «au milieu de nulle part» ridiculement pompeux ou qui se sont enfermés dans des ghettos pour «upper middle class», au milieu du Saint-Laurent ou dans les rangées de carottes.

Si nous avions suivi le leader Lévesque, il est probable que le pouvoir sur l’aménagement urbain aurait été donné davantage aux bons architectes et moins aux grands ingénieurs des routes. Il y aurait un ministère de l’aménagement ou de la Ville ici, comme dans les pays évolués! Au lieu de cela, nous avons des villes comme Montréal et Québec dont le cœur est transformé en tombolas pour les touristes de… banlieue et pour quelques américains qui s’ennuient.

Alors vous, les banlieusards, arrêtez de pleurnicher s’il vous plait. C’est vous qui avez fui. Et qui avez voté pour mieux consommer. Si nos villes sont éparpillées et… laides c’est que notre société a manqué de combattants!

La métropole, en ce moment, est faite pour les riches, dont ceux qui vivent dans la ville ‘indépendante’ de Westmount, car la richesse, la vraie, est encore anglo-américaine; c’est une société à laquelle la masse des immigrants veut s’associer en envoyant ses enfants dans les gigantesques universités anglaises de la vraie ville d’aujourd’hui. Et qui aura son gigantesque hôpital anglais à elle tout seule.
La fuite c’est un choix permis, mais ce n’est pas toujours bon pour l’âme.

Jean-Pierre Bonhomme

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La poussée NPD : un réflexe illusoire

 

 

 

 

Pierre Drouilly, le sociologue et sondeur bien connu a donné cette semaine  une explication raisonnable au phénomène de la spectaculaire poussée NPD québécoise lors de la dernière élection fédérale. L’expert a fait son commentaire lors d’une réunion du Mouvement démocratie souveraineté dans un restaurant d’Outremont.

C’est une hypothèse, a reconnu l’expert… mais une hypothèse fondée sur des faits, sur des sondages. L’intérêt des Québécois pour le NPD et pour son chef, M. Jack Layton, ce fameux  «décollage», a commencé à surgir au Québec après le débat des chefs fédéraux tenu le 14 avril 2011.  Lors de ce débat, a rappelé M. Drouilly, le chef NPD a promis aux Québécois de transformer la constitution canadienne dans un esprit de «fédéralisme asymétrique»; c’est-à-dire de réaliser une sorte de réforme du fédéralisme, de renégocier la constitution pour répondre aux besoins spécifiques des Québécois.  Cette dernière option aurait tout emporté car celle-ci est centrée sur une «réforme» constitutionnelle laquelle est effectivement l’option la plus populaire au Québec par les temps qui courent; les propos de M. Layton auraient ainsi fait réagir les citoyens qui souhaitent régler le différend anglo-francais du pays.

Justement, a-t-il expliqué, le décollage s’est produit juste après ce mémorable  débat des chefs,  donc juste après ce qui aurait été perçu comme une ouverture au Québec, par un personnage perçu comme bon enfant et «respectueux» de la nation québécoise.  Après ce débat, a-t-il précisé, trois sondages ont montré que le NPD commençait à progresser dans l’opinion. On connait la suite.

Un virage électoral aussi brusque est unique dans l’histoire des sondages a-t-il signalé. L’explication de ce phénomène très particulier ne se trouve pas dans les idées reçues. La conversion radicale ne résulte pas d’une intention «fédéraliste», ni d’une intention de virer à gauche, pas plus que d’une valorisation de la qualité des candidats… La bonhomie de M. Layton, elle, est un second facteur qui a pu charmer l’électorat, il est vrai. Quoi qu’il en soit l’aventure, selon lui, n’est pas idéologique et n’est pas politisée.

En tout cas M. Drouilly  a souligné fortement que le NPD est et restera le parti le plus centralisateur de tous, et que le Québec ne peut attendre son salut de l’intervention du Nouveau parti démocratique. Le malheur, en tout cela, si j’ai bien compris, c’est que le Canada anglais n’engagera pas de dialogue et que les Québécois s’illusionnent s’ils croient que le NPD les protégera. C’est à eux d’agir!

Le conférencier a regretté que le Bloc québécois ait été rejeté de la manière que l’on sait car, dit-il, ce parti et son chef M. Duceppe ont rendu de bons services à la nation et ne méritent pas le sort qui leur a été réservé. Ce serait, croit-il, un «exemple d’automutilation» caractéristique et le Québec «s’en sort plus faible que jamais».

Dans tout ce contexte M. Drouilly se dit «modérément optimiste» car «tout réside dans la capacité du Parti québécois de rallier des forces. Il note que le PQ, vues les dissensions, «risque d’imploser» et dans ce cas il indique que les choses seraient gravissimes pour le destin national des Québécois. Il note que les Québécois sont «trop mous» en matière d’identité ethnique… le nationalisme d’ici est «réactif»;  Il indique que ceux-ci cherchent (trop) à ce que les choses se fassent dans le calme.

Fait intéressant le conférencier dit savoir que parmi les 150 référendums relatifs à la souveraineté nationale (tenus en Occident) il n’y en a que trois qui ont été perdus par les gouvernements. L’un des trois a été tenu à Chypre, mais dans des circonstances particulières et les deux autres… au Québec!

M. Drouilly, enfin, rappelle que certains gouvernements (occidentaux) ont proclamé leur indépendance sans tenir de référendums et que d’autres ont fait suivre leur action par des référendums subséquents. Il indique que, dans les circonstances présentes du blocage politique, le Québec pourrait oser poser des gestes d’affranchissement politique (de son propre chef).

Ce compte rendu, j’en suis conscient, ne donne pas le portrait complet des chiffres présentés par M. Drouilly. Les impondérables en matière politique, du reste, sont nombreux. Et la capacité de compréhension du journaliste a ses limites; les nuances ne peuvent être toutes décrites. Mais j’ai pour ma part entendu, dans ces propos, que les Québécois se trouvent dans une sorte d’impasse politique et que sans un brin de sagesse et d’habileté rationnelle l’État du Québec risque de devenir bien plus provincial qu’il ne l’était dans sa période de réforme dite de révolution tranquille. A bon entendeur salut!

Jean-Pierre Bonhomme

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Quelques bons voeux nationaux


Bien des gens, par les temps québécois qui courent, se demandent si la nation française d’Amérique, qui a son centre politique au Gouvernement du Québec, pourra vivre correctement pendant les décennies qui viennent; ou bien celle-là ne se transformera-t-elle pas en quelques fragments historiques disséminés sur les rives du Saint-Laurent. La Laurentie, en somme, ne deviendra-t-elle pas l’habitat d’une communauté qui a perdu son âme et qui ne sera plus qu’une caricature des États-Unis? Le français n’ayant plus la valeur civilisatrice qui lui est actuellement propre…?

Eh bien moi aussi, en ce début d’année, je le crains et je crois pouvoir dire que certains gestes radicaux doivent être nécessairement posés qui pourraient changer le cours des choses si tant est qu’il reste un brin de volonté communautaire dans l’âme collective. Je vais en nommer quelques uns, ici, qui ne sont pas excessifs mais qui sont tous nécessaires pour que le Québec ait une présence qui compte dans la réalité des trois Amériques et dans le monde. Ce sont des actions qui pourraient être entreprises avant que je ne meure, ce qui n’est pas une question de décennies, et qui seraient porteuses d’espoir ici et ailleurs. Elles sont raisonnables et raisonnées :

–       Le Gouvernement du Québec et son Assemblée nationale doit créer un ministère de l’aménagement, de l’architecture et de l’urbanisme afin de mettre de l’ordre dans le développement urbain. Jusqu’ici le développement urbain du Québec se fait au profit d’intérêts particuliers insensibles et voraces. L’intérêt commun n’est pas pris en compte; l’imagination créatrice et rassembleuse, en ce domaine, n’y trouve pas son compte. Les énormes sommes d’argent dépensées pour former les aménagistes et les architectes ne servent qu’à peu de choses et ceux-ci pourraient raisonnablement mieux servir la nation; il faut se rappeler que l’initiateur de la soi-disant révolution tranquille, René Lévesque, avait proposé, dans son premier programme, de «municipaliser les sols…»; il est nécessaire que le Québec se donne les moyens d’être exemplaire dans le domaine de la conception des villes, ceci pour rendre service. Il n’est pas bon qu’en ce domaine nous soyons de simples imitateurs des États-Unis, eux qui nous donnent Detroit et Cleveland.

–       La ville de Montréal, la vraie ville, celle de l’île de Montréal, n’est pratiquement plus québécoise. Elle est devenue Canadian par l’intégration des immigrants à la culture anglaise. Si la tendance persiste le Québec perdra la moitié de sa force culturelle et le gouvernement du Québec deviendra celui d’une gentille province insignifiante (irrelevant en anglais). Si ce n’est pas cela que la collectivité veut, il y a des gestes à poser. L’État doit donner son enseignement en français au niveau des collèges et au niveau des universités. Donner l’enseignement en anglais à la progéniture des 50,000 immigrants (qui s’installent tous à Montréal à chaque année) c’est suicidaire. En tout cas il n’est pas raisonnable qu’un peuple permette ainsi sa déconfiture;

–       Le seuil au-delà duquel la population française de Montréal n’est plus capable d’intégrer la masse actuelle des immigrants est dépassé. Cela a été démontré dans des études récentes. Il suffit du reste de raisonner raisonnablement pour le percevoir à l’œil nu. Alors il devient évident que le nombre d’immigrants à Montréal doit être réduit de moitié, environ, – c’est le chiffre avancé dans les études – pour permettre une relative intégration de ceux-ci à la nation d’ici;

–       La minorité anglaise de Montréal (de souche) compte pour à peu près dix pour cent de la population du Québec. Or celle-ci est desservie par deux gigantesques universités anglaises alors que la population française, elle, n’en a que deux. Et l’une d’elle, l’UQAM, à l’architecture repoussante, est confinée à l’est de la ville; l’autre, est cachée derrière la montagne. Le geste à poser est d’intégrer l’université Concordia du centre-ville, qui dessert les immigrants, au réseau des Universités du Québec et de franciser les cours. Une université anglaise – gigantesque – au centre-ville c’est assez! Deux ce n’est pas raisonnable. Et puis, après tout, c’est la collectivité française de Montréal qui a payé pour Concordia… La brasserie  anglaise Molson a bien contribué à l’essor de Concordia, c’est vrai, mais qui sont les buveurs  – jusqu’à maintenant – si ce n’est pas nous?

–        Pour rester dans le domaine de l’éducation, justement, il est nécessaire d’établir de vastes programmes d’échange d’instituteurs et de professeurs avec les pays de langue française du monde  – des programmes bien financés – pour enrichir le vocabulaire des enseignants au contact du français international. Pour élargir l’horizon de la compréhension, aussi. Ce sera un moyen concret de stopper la glissade vers le dialecte et les farces plates.

–       Nous avons bien glosé sur le fait que l’entraîneur de l’équipe de Hockey Canadien ne parle pas la langue officielle du Québec. Moi je me suis dit que là n’était pas l’essentiel. Les propriétaires de l’équipe MM. Molson, ont tout fait pour que les joueurs de l’équipe ne soit pas de la nation québécoise; il n’y en a pratiquement plus. Le scandale, dans tout cela, ce n’est  pas le fait qu’un employé de Molson ne parle pas la langue du pays. Le scandale c’est que les joueurs ne soient pas eux-mêmes du pays et que l’équipe, dans les faits, soit devenue – avec la complicité des médias – une équipe Canadian, une équipe étrangère au lieu où elle se trouve. C’est comme s’il n’y avait pas de brésiliens dans l’équipe brésilienne! Est-ce raisonnable? Le geste à poser? C’est de cesser de boire la bière Molson, pour commencer; ensuite c’est d’obtenir, par la force de persuasion de l’État, une participation gouvernementale dans la propriété de l’équipe. Tout ce symbolisme, qui nous fait disparaître de la carte sportive doit changer.

Ces moyens et bien d’autres doivent être pris pour que notre nation  vive et déploie son âme collective dans l’univers. Si cela ne devait pas être possible par manque de volonté ou par simple indifférence, les conséquences seront très graves. Il s’agira de la disparition d’une culture qui aurait pu propager des valeurs de bon goût, de compassion et de persévérance. Je sais que ma perception des choses est radicale. Et je me méfie du nationalisme; du mien pour commencer. Mais mon long parcours journalistique m’a donné un point de vue qui perçoit la nécessité de débloquer bien des choses; ceci sans présumer des formes que pourrait prendre la vie politique.

Bonne année.

Jean-Pierre Bonhomme

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Un Noël de lumière et de service

Le temps de Noël est l’occasion pour chacun de prendre contact avec l’Enfant qui se trouve en nous. Lorsqu’on prend conscience de ce fait – ce n’est pas donné à tout le monde – Noël n’est plus un fardeau, un remède contre la peur, une fuite en avant par les plaisirs de la consommation. C’est la joie de constater que la naissance, la renaissance ce n’est pas que pour « les autres ». C’’est pour soi et cela a des conséquences sociales!

Ceci dit ce grand symbole de l’Étoile qui veille à la venue de l’enfant dans l’Étable doit bien vouloir dire quelque chose de concret pour ce qui concerne la vie ordinaire. Cette grande image doit bien vouloir nous aider à corriger le tir, à enrichir la vie dans la mesure de ce qui est possible?

C’est en m’interrogeant sur cette question que je me suis arrêté à une phrase surprenante de l’Évangéliste Mathieu. (La chrétienté en son entier, il est bon de s’en rappeler, est fondée sur les trois Évangélistes synoptiques Mathieu, Marc et Luc et sur cet autre, Jean, qui écrit d’une manière plus personnelle; cela devrait donner un certain poids à leurs propos!). En me posant la question, donc, j’ai lu ceci au chapitre 23 Verset 10 : « Refusez le titre de guide, vous n’avez qu’un seul guide, c’est le Christ! », nous enjoint Mathieu. (nouvelle traduction Bayard).

Je me disais que naître au monde à l’occasion de Noël , soit prendre contact avec mes forces nouvelles, toutes pimpantes, ce serait me transformer en « super guide » de l’humanité et amener ainsi tout le monde au paradis de la perfection. Il parait donc que j’avais tort.

Le témoin de l’existence de Jésus nous exhorte plutôt à devenir des serviteurs de l’humanité. Il nous recommande de ne pas nous mettre à la place de Dieu – dont les stratégies nous sont inconnues – et de nous mettre à l’écoute des besoins de chacun.

C’est une perspective différente de celle d’un général Pinochet, « catholique » affiché, qui se permettait, en guide absolu, de déterminer ce qui était « bon pour le peuple » même s’il fallait torturer 30,000 dissidents et en jeter autant à la mer.

Les personnes qui ont beaucoup souffert  résistent souvent à l’idée de devenir « serviteurs »; ils ont été parfois blessés par des « maîtres » et ils veulent devenir « leaders » à leur tour, peut-être pour mieux se protéger contre « les Grands ». L’Évangéliste semble nous dire que cette attitude n’est pas pratique. Elle mènerait plutôt à l’impasse. Il conseille la modestie comme règle de conduite. Et ce n’est pas facile à accepter. Pas plus que le message précédent un peu plus haut dans la page,  qui conseille d’aimer son prochain : il n’est pas facile d’aimer ceux qui nous méprisent!

Je me souviens que les Chinois, ces vieux sages, vont dans le même sens. « Allez à la réunion, nous disent-ils, exprimez votre message, et si ledit message n’est pas entendu, retournez sur vos terres ». Il est bon de se rappeler cette expérience ancienne : imposer les idées mène à la guerre; on en a des exemples par les temps qui courent…

Ceci dit Mathieu cite des paroles de Jésus selon lesquelles la modestie, l’absence d’orgueil ne signifie pas la pauvreté de la culture. « Vous êtes la lumière du monde! », nous rappelle-t-il. La lumière, justement, c’est ce que nous célébrons à Noël :la lumière « qui éclaire vos semblables ». Ainsi donc, il nous faudrait songer, à Noël, à devenir de meilleurs « éclaireurs », pas des despotes qui s’imposent, qui imposent des idées.

Je deviens un meilleur luminaire, justement, si je me nourris de connaissances et si je prends contact avec l’ « Enfant en soi » – celui de Noël – qui représente l’amour. Dans la vie pratique cela peut consister, pour commencer, à bien se renseigner, à bien se former. L’étude c’est l’huile qui nourrit la mèche!

Le rayonnement qui s’ensuit montrera les choses. Il montrera qu’il y a des laideurs dans les coins de notre vie et dans notre ville; l’ignorance empêche de voir! La connaissance montrera à tous quelles sont les choses à changer.

Dans notre quartier, par exemple, ce serait de montrer à chacun que les stationnements de Radio-Canada, exagérément expropriés, devraient servir à loger des gens. Cela permettrait d’enrichir le quartier par la construction d’immeubles nouveaux destinés aux classes moyennes ordinaires tout en aidant certaines familles moins riches à y avoir accès. Mais un accès à un beau quartier; pas à un quartier tout croche. Les concours d’architecture aident ainsi à améliorer les choses. La beauté, il faut le redire,  fait du bien et la beauté… c’est pour tout le monde!

Ce serait, autre exemple, de montrer que les fils (électrique et téléphoniques),  suspendus un peu partout dans le quartier doivent être enlevés. On se rappellera que, lors de la fameuse crise de verglas, le ministre Chevrette avait annoncé que « les fils seraient dorénavant enfouis ». Ils ne le sont pas encore! C’est dangereux d’une part, et cette laideur, d’autre part, diminue la valeur des propriétés.

C’est ça,  à mon humble avis, être chrétien : montrer les choses qui ne vont pas, en soi et dans la ville; faire la lumière par amour.

Jean-Pierre Bonhomme

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LE DUR CHEMIN DES ÉTATS GÉNÉRAUX

 
 

 

Le président du Conseil de la souveraineté du Québec, M. Gérald Larose, a vigoureusement plaidé, cette semaine, pour que le Québec s’engage résolument dans le chemin qui mène à l’indépendance nationale.  Et les États généraux prochains pourraient en donner l’occasion.

M. Larose estime que les États généraux devant se tenir vraisemblablement dans l’année qui vient (de janvier à juin) pourraient être l’instrument qui sortira les Québécois du désengagement politique et du cynisme qui caractérisent selon lui les attitudes actuelles. M. Larose s’exprimait devant les membres d’un petit groupe de réflexion, le Mouvement démocratie souveraineté, dans un restaurant du quartier Outremont.

L’ancien leader syndical ne s’est pas fait prier pour décrire la sombre situation politique des années qui courent et il a reconnu que l’avenir du peuple québécois est parfaitement précaire;  et il a donné maints exemples d’une régression de l’État. Par exemple il a noté que le Québec est  absent sur le plan international, que la vie sociale et celle des médias sont en phase de «marchandisation» et que la société se trouve «sans vision» économique. Par ailleurs l’État fédéral, lui, avec ses projets de revalorisation de la monarchie britannique et son approche répressive eu égard aux droits civils, produisent «un cynisme inégalé» qui ne promet rien de bon sur le plan collectif. Ceci sans parler de la langue qui est «malmenée» et de la gouvernance québécoise actuelle qui est celle de «tricheurs». Pour tout dire la vie politique se déroule «sans nous» et il nous vivons avec «un déficit d’intelligence stratégique».

L’attitude de retrait collectif est pour une part le résultat des  politiques de Pierre Elliot Trudeau lesquelles, a-t-il indiqué, a favorisé l’individualisme forcené des jours présents; c’est Trudeau «qui a dénationalisé la langue» et cette politique est appuyée  par le premier ministre du Québec actuel, M. Jean Charest, lequel «nous désapproprie» collectivement. Cette mentalité individualiste est fort ancrée dans l’esprit des Québécois actuels et elle ne sera pas facile à éradiquer reconnait-il.

Il résulte de ce sombre tour d’horizon que la révolution tranquille des années 60 n’a pas abouti et que cette révolution «reste à finir». Quant au temps celui-ci «est compté» si l’on veut que la collectivité française d’ici perdure : « 50 ans, 20 ans» peut-être?… Nous sommes «au dernier acte».

Mais alors que faire si l’on constate que la ville de Montréal s’anglicise rapidement? Faut-il songer à obliger les immigrants à poursuivre leurs études collégiales et universitaires en français, a demandé un participant? M. Larose répond à cela qu’on ne peut imposer aux immigrants de choisir le francais par ce moyen. Ceux-ci sont choisis par le Canada et ils viennent au Canada; ils choisissent donc la langue du Canada. Ce qu’il faut, dit-il, c’est de créer un pays et c’est par ce moyen que toute ambiguïté cesserait à cet égard.  Notre posture, en l’instance doit être d’obtenir «toute la gouvernance, tout le pouvoir…». C’est ainsi croit-il, que les immigrants choisiraient la culture franco-québécoise ambiante.

Quoi qu’il en soit la posture à prendre c’est celle qui consiste à exercer «toute la gouvernance, tout le pouvoir», à passer au dernier acte. Les Etats généraux, pour y voir, examineront «le pourquoi et le quoi» de l’existence collective. Le pourquoi c’est de percevoir qu’il est «normal de se faire connaître et d’en être fier». Le quoi c’est d’établir que les citoyens sont tous égaux et que le pouvoir vient d’en bas, pas d’en haut comme dans une monarchie. Quant aux autochtones il sera impérieux, a-t-il insisté, sur la nécessité de procéder à leur émancipation. La politique actuelle – fédérale – d’apartheid est inacceptable. Par ailleurs il faut veiller à la protection du territoire québécois et proposer un développement économique «multipolaire» qui ne prend pas uniquement en compte les centres urbains de Montréal et de Québec.

Les États généraux a-t-il conclu, se dérouleront sur trois niveaux. Ceux de l’identité, du développement et de l’État. Des «chantiers» seront constitués qui se rapporteront à une «grande réunion» qui se tiendra vraisemblablement en juin prochain.

Jean-Pierre Bonhomme

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Les empires et notre destin

Ces jours-ci les Occidentaux dont nous sommes se demandent, sans trop l’exprimer tout haut, si l’empire américain a de l’avenir. Cela touche nos nerfs sensibles certes, car il s’agit de notre argent. Les Québécois, nous le savons, sans le dire trop haut, ne sont pas tous des idéalistes comme votre serviteur. L’argent domine. L’économie américaine, on l’oublie, aide beaucoup à payer nos hypothèques. S’il fallait que Washington s’effondre!

L’importance de l’argent, chez nous, du reste, a bien été soulignée cette semaine lors d’une banale élection dans un comté  qui s’appelle du beau nom de Bonaventure. Les bonnes gens du lieu ont donné leur appui à un parti qui gouverne le Québec depuis trois mandats et qui baigne dans des mares insondables de collusions. C’est plus pratique comme cela. Il y a des routes à paver et des ponts à construire. Foin du destin collectif!  L’on dira, après, que les Québécois ne sont pas des Américains comme les autres…

Mais l’intérêt pour le destin de «notre» empire dépasse nos frontières bien entendu. S’il y a quelque chose de mondial c’est bien cette question-là. Et pour y répondre je me suis payé la lecture d’un bouquin fort bien documenté, un ouvrage qui étudie tous – tous – les empires de l’univers, à partir du premier, celui des Achéménides (les Perses) jusqu’au «nôtre» et qui nous dit pourquoi ceux-ci se sont effondrés. Rien que cela!

C’est un livre en anglais. Cela ne veut pas dire que je suis anglicisé! Les Suédois parlent tous anglais; cela ne veut pas dire qu’ils sont moins suédois pour autant. Allez y faire un tour, vous verrez que la Suède est bien scandinave! Je me souviens qu’au journal La Presse où je travaillais, j’avais soumis une critique d’un livre canadien anglais. Le chef de pupitre m’avait dit que La Presse ne publiait que des recensions de livres publiés en français;  il avait fallu que je me batte pour que le texte paraisse. Cette attitude n’est pas prudente; il faut aller voir ce qui se passe ailleurs. Personne ne m’empêchera de lire en anglais ou en espagnol et d’en traiter.

Toujours  est-il que le livre est celui d’une… chinoise; mais d’une chinoise américanisée, Amy Chua, qui a réussi à se faire nommer professeur à la faculté de droit de l’université Yale. Essayez de faire pareil pour voir! Le livre porte le titre «Day of Empire».

Eh bien si vous voulez savoir, tous les empires – tous – se sont effondrés parce qu’ils ont cessé, à un moment donné de leur histoire, d’intégrer les peuples conquis à leur structure propre. Ils se sont fermés sur eux-mêmes, un bon jour, et ils ont implosé en commençant par la périphérie. Le cas de l’empire romain est lumineux à cet égard.

Et «notre» empire alors?

Eh bien les choses ne sont pas rassurantes. Le livre de Mme Chua porte le sous-titre «How hyperpowers rise to global dominance and why they fall». L’auteur met les Américains en garde. Ceux-ci ne sont-ils pas en train de s’isoler et de rejeter les peuples qui ne leur ressemblent pas? Elle le craint et espère que cela ne s’avèrera pas.

Pour ma part je m’aperçois que les Américains anglo-saxons sont en train d’élever un mur à la frontière sud, celle qui sépare les puissants des pauvres Mexicains et des autres latins des autres Amériques. Et j’estime, comme Mme Chua, que cela n’est pas un bon signe. Et puis ici, les Américains ne sont-ils pas en train de faire des chichis à nos propres postes frontaliers? L’autre jour un douanier de la république a voulu me faire peur avec sa carabine. J’étais potentiellement un barbare en train d’infiltrer l’empire! Mme Chua fait valoir que la force des États-Unis vient de la diversité de sa composition.

Il est vrai qu’en ces matières-là les vérités peuvent être nuancées. Les Américains – Mme Chua ne le souligne pas trop – n’ont vraiment pas intégré les Indiens! Ils les ont spoliés. Une mauvaise note. Mais il est vrai qu’ils se sont ouverts à tout l’Europe et cela leur a été profitable. Aujourd’hui, voit-on, par contre, la droite américaine et sa populace sont en train de fermer la porte. La méfiance s’installe. Cela durera-t-il? En tout cas l’histoire montre que les Empires peuvent facilement être remplacés. La nature a horreur du vide impérial.

Quelle leçon tirer de ces choses pour le Québec? Intégrer l’autre à sa propre collectivité est bénéfique. Mais toute la question est de savoir dans quelle proportion. Y a-t-il des seuils d’accueil au-delà desquels il n’est plus possible d’exister par soi-même? C’est une question à laquelle l’État, ici, devra répondre. Autrement il y a risque de devenir un vieux fragment de l’histoire.

Jean-Pierre Bonhomme

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Les beaux airs de «nos» avions

 
 

 
 J’achète un billet d’avion de la ligne aérienne Cubana à destination de Holguin (c’est à l’est de l’île de Cuba, en allant vers Haïti) et je suis content.  Ce sera une pause-santé pour combattre la grisaille du Québec au grand soleil des Caraïbes. Ce n’est pas la première fois que je fais cela et c’est probablement pourquoi je deviens vieux…

Or, quand j’arrive à l’aéroport on me fait monter à bord d’un avion qui porte la marque Flair Air. Y a-t-il méprise? Au lieu de me trouver dans un avion cubain je me trouve dans un avion Canadien…anglais de… Toronto.

Ce n’est pas une catastrophe. Il y a des combattants arabes à qui le gouvernement américain a fait faire des tours à Cuba moins agréables que les miens… passons. Tout de même, ce qui devait arriver arriva!  L’équipage de ce grand Boeing (400 places si j’ai bien compté) ne parle pas un traitre mot de la langue des passagers. Cela non plus n’est pas une catastrophe : le francais commence à passer de mode – dans les airs en tout cas – et les Québécois se résignent.

Tout de même! Lorsque je m’en vais à Cuba, je m’en vais dans un pays de langue latine et le francais du Québec l’est encore un peu… latin!  Par conséquent, je m’attends à ce que l’équipage puisse me comprendre dans l’un ou l’autre des dialectes issus de la Rome antique. Or ce n’est pas le cas. L’équipage ne parle pas français; il est bien obligé de faire semblant, néanmoins, et il baraguouine des mots incompréhensibles qui ont le sens approximatif d’un odre de bien attacher les ceintures. Le capitaine, lui, n’a pas cette obligation de faire semblant et il nous souhaite bon voyage en anglais. Nous sommes ainsi dans un avion anglo-saxon, payé par le régime latin des frères Castro, pour transporter des Canadiens francais – des Québécois si l’on veut – vers le Quart-Monde comme on dit.

Moi je me suis senti humilié par l’insensibilité des responsables cubains. Et par l’incongruité de la situation. Il n’y a pas que le confort des sièges qui compte dans les avions. Il y a le confort psychologique et mon esprit n’était pas confortable. Car je me suis mis à songer à des jours meilleurs, des jours anciens où l’on pouvait comprendre le  pilote. C’était du temps de Québecair. On peut sourire mais j’ai parcouru le Québec dans des avions bien à nous – appartenant à notre peuple –  pas seulement pour faire le pont entre Bai-Comeau et Rimouski, mais pour aller à Paris – oui! – et dans le Sud mon cher!

C’est un gouvernement libéral qui a sabordé Québecair. M. Bourassa et son ministre Fernand Lalonde ont dit que cela coûtait trop cher… et qu’il n’y avait pas lieu de lever le petit doigt pour maintenir cet admirable instrument identitaire. Aujourd’hui tout le monde, sauf les Québécois ont leur compagnie d’aviation. Même les Eskimos on la leur! Et c’est sur les cendres de Québécair que Air Transat, une compagnie bien neutre et bien privée a pris une certaine relève mais sans nationalité propre. Celle-ci, du reste, devient en quelque sorte «bilingue» et tourne ses yeux vers l’ouest canadien…

Nous ne pouvons demander au régime Castro d’être plus nationaliste qu’un gouvernement libéral du Québec. Mais il me semble que le gouvernement cubain devrait avoir un peu plus de respect pour le peuple québécois. Il faut quand même se rappeler que ce sont les Québécois – et pas seulement parce que les prix étaient bas – les Québécois, dis-je, qui ont donné le premier coup de pouce au tourisme cubain. Ce sont eux qui se sont rendus en masse en ce lieu, il y a des lunes, contre l’avis et contre les interdictions des anglos du continent. Car il y avait une sorte de sympathie entre ces peuples minoritaires et soumis et les velléités d’affranchissement cubaines. Le communautarisme québécois du mouvement Desjardins et de bien d’autres  institutions semblables n’était du reste pas si éloigné que cela du socialisme de M. Fidel. Mais passons encore une fois…

En tout cas il me semble que Cuba devrait avoir un peu de mémoire et reconnaître notre peuple. Dans les circonstances présentes – celles de Flair Air et ce n’est pas la première fois que je le constate personnellement – ce peuple a été insulté, humilié.

Holguin, et sa côte de Guardalavaca, pour ceux qui ne le savent pas, est devenu un lieu de villégiature de grande importance. Il y a là une bonne douzaine de grands complexes de villégiature, des sortes de camps concentration pour nordiques – on dit des tout-compris où il n’est pratiquement pas possible de rencontrer un seul cubain de la rue ou de la ville, eux qui se trouvent bien loin du saumon fumé des buffets!

Lors de mon départ, cette fois-ci, il y avait deux grands avions qui renvoyaient les Européens chez eux :  un grand Condor s’en allant à Frankfort et  un autre à Milan  Je parie que dans le Condor on parlait allemand et Italien dans l’autre. Moi je m’attends à ce que mon peuple puisse se faire entendre dans sa langue, surtout quand il se dirige vers… Montréal.  A moins que tout soit à jamais perdu!

Jean-Pierre Bonhomme

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LA LAURENTIE, RÊVE OU CAUCHEMAR?

 
 
 

Quand j’étais à l’université de Montréal, pour étudier les lois, il y avait une réalité qu’il n’était pas bon de voir en face. C’était celle de la Laurentie! Oui la Laurentie était ce lieu dans lequel les Canadiens francais vivaient : celle des rives du Saint-Laurent  et leurs extensions vers le lac Saint-Jean et l’Abitibi. Les religieux avaient alors créé les Jeunesses laurentiennes, justement, pour essayer de laisser entrer un peu d’air dans la contrée très… provinciale d’ici. Et il y avait… la Flore laurentienne du Frère Marie-Victorin, celle-ci ne faisant pas l’objet de controverses : il était permis d’admirer les petites fleurs sur nos terres!

Mais le reste!  Le reste, c’était l’idée qu’aurait pu se faire la nation d’une forme d’affranchissement identitaire. Il fallait rester provincial et ne pas envisager de prendre le large. La bourgeoisie d’ici, en ces haut lieux du savoir, surtout la libérale, celle à laquelle s’accrochait un Robert Bourassa, par exemple, se moquait à gorge déployée des velléités laurentiennes des nationaleux comme ils disaient… et des patriotes aussi. Le statu quo était leur religion et leur destin…Et puis vous faudrait-il une armée laurentienne, une flotte laurentienne? lançaient ces apprentis avocats avec un féroce sarcasme et une violence inouie pour déprécier toute idée de prise de conscience. La Confédération canadienne – qui n’en était pas une – devait suffire comme destin et comme objectif.

Par conséquent le mot Laurentie, symbole d’une velleité d’affranchissement, est vite disparu de la scène publique, déprécié qu’il fut par les bien-pensants.  Il ne me reste plus, à moi, que la Banque Laurentienne toute moderne et efficace qu’elle soit pour me rattacher au passé d’il y a six décennies.Mais, au fond, il me reste le Québec; et c’est presque la même chose. Le sens du mot Laurentie, tout vieillot qu’il soit, est le même que celui du Québec d’aujourd’hui et c’est cette réalité-là, telle qu’elle est, que les cinéastes Mathieu Denis et Simon Lavoie ont voulu décrire dans leur film Laurentie présenté il y a deux semaines.

Le rêve laurentien, celui qui me chatouillait l’imaginaire, il y a tant d’années, est en train de virer au cauchemar, pour tout vous dire. Un cauchemar bien troublant, tragique, débilitant; un mauvais rêve qui donne un choc.

Ce choc cinématographique ne devrait pas changer la morne politique d’ici avec rapidité : il n’y avait que quatorze spectateurs dans la salle de ce cinéma spécialisé dit ‘d’auteur’;  comme si les autres cinémas n’avaient pas d’auteurs justement…! Le vide de la salle  par contre, traduisait cette autre réalité désolante et méconnue: le vide culturel québécois, soit le sujet du film et ce n’était pas loin de donner froid dans le dos.

Le protagoniste, le comédien principal, – talentueux –  ont avoué les cinéastes, est un jeune homme désemparé par ce Montréal aliénant d’aujourd’hui où les citoyens de culture francaise ne se sentent plus chez eux. Et ceci, cette réalité désolante nous représente tous, crument. Cette réalité me représente moi-même, effectivement. C’est mon ombre personnelle qui se trouve là sur l’écran et et celle-ci est bien encombrante.

Ce n’est pas moi qui le dis. Le journaliste François Lévesque résume le tout en rapportant les paroles du co-auteur Mathieu Denis :  Laurentie c’est «l’individualisme galopant qui a été érigé en religion de substitution d’ où cette absence d’appartenance débouchant sur un sentiment pernicieux d’isolement qui, ultimement, se meut en aliénation». Oui poursuit le jeune auteur, «Louis (le protagoniste) est un lâche, tout comme la société québécoise qui est incapable qui est incapable de prendre en mains son propre destin».

S’il y a un vérité dans tout ceci, il me semble que le film Laurentie, malgré toute sa crudité, ne devrait pas passer à l’oubli d’un coup sec, comme c’est prévisible. Il devrait être diffusé tous azimuts. Car c’est un objet de réflexion qui pourrait – pourrait – être salutaire. Je constate pour ma part que bien des Laurentiens – ces Québécois d’aujourd’hui – se prennent pour le nombril de l’Occident tandis qu’ils ont toute une âme à construire, une âme qui pourrait, un jour, – pourrait – produire de la beauté pour un univers qui en a bien besoin. Bravo.

Jean-Pierre Bonhomme

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LA RÉPUBLIQUE SERAIT-ELLE POPULAIRE?

 
 

Il y a des lunes j’avais osé, dans un journal très correct, parler de la république et de sa signification dans la vie collective. Au Québec, en ces moments-là, l’idée n’était pas dans l’air et je passais pour un idéaliste, ce qui était loin d’être un compliment. J’avais toujours pensé, pour ma part, que l’idée républicaine, sa réalité surtout, était la base même des libertés collectives et qu’il allait de soi d’en faire la promotion. Mais ca ne passait pas. La république se trouvait sous le tapis de la nation un point c’est tout.

La république, pourtant, dans mon vieux dictionnaire Quillet, n’est rien d’autre qu’un «État où le gouvernement est exercé par des représentants de la nation». Je ne voyais  pas ce qu’il y avait de dangereux là-dedans

La république, toutes les répubiques, toutefois, ont des couleurs qui ne sont pas décrites dans les dictionnaires. Elle a des couleurs de peuple, d’égalité, de service et de laicité qui ne rassurent pas les conservatismes, surtout ceux d’ici. En effet, la république est l’envers de la monarchie – constitutionnelle ou absolue! C’est elle qui dit – absolument – par son symbolisme et par sa réalité politique que le pouvoir vient d’en bas et que le citoyen – pas un sujet – peut bien faire ce qu’il veut de la collectivité, ne pas attendre des cadeaux du ciel, mais prendre le moyens de se tirer d’affaire.

C’est un peu subversif pour un pays comme le Canada il faut en convenir. Ici c’est la Reine ou le Roi qui poursuit un délinquant. C’est le procureur de la Reine qui agit. C’est la Couronne qui envoie les gens en prison. S’il fallait que ce soit «le public» qui le fasse, que ce soit le Ministère public, comme dans une république, qui agisse? Cela serait-il aussi sérieux, cela aurait-il la même gravitas? Et si l’armée, elle, n’était justement pas royale serait-elle aussi «grave»  que si elle était seulement l’instrument de la collectivité, du peuple?  Moi je ne suis pas loin de le penser.

Il y en a qui pensent le contraire. Il y en a beaucoup au Canada anglais, dans cette collectivité qui a justement refusé de se transformer en une république comme l’ont fait ses voisins du même sang. Mais quelle est la motivation du Québec de s’accrocher ainsi à une institution d’en haut et d’ailleurs au lieu de se donner une image collective à sa propre ressemblance?

Les journaux ont annoncé ces jours-ci la projection d’un film intitulé RÉPUBLIQUE . Certains ont pensé qu’il s’agissait d’une nouvelle idée exotique. J’ai voulu savoir et je me suis précipité pour aller  voir ça au Cinéma du parc. La république se trouverait-elle enfin dans le menu politique du Québec?

Eh bien il me semble que oui. Dans les nombreux propos que le film projette intelligemment, profondément, le mot république n’est prononcé qu’une seule fois. Mais c’est à un endroit-clef, central, où le destin républicain québécois est proposé à tous comme un instrument de vitalité; un moyen républicain qui est  le sine qua non de la liberté, l’équivalent de ce qui est de l’ordre du capable, du souverain, de la souveraineté d’ici, pas celle d’en haut.

Ce film, monté par M. Hugo Latulippe, va chercher ce qu’il y a de plus tabou dans notre âme et le porte à la conscience, sur la grande table de la nation. C’est pour tout dire une prière fondamentale. Je retiens pour ma part que la réalité républicaine pourrait –  pourrait – transformer la société d’ici en un lieu exemplaire où l’ordre, la beauté et la justice régneraient au point de devenir un exemple pour le reste de la Terre. Pourquoi, dit le film avec la plus grande justesse, nous contenter, ici, d’admirer, impuissants, les réalisations sociales de la Finlande ou de la Norvège? Pourquoi ne pas devenir nous-mêmes des novateurs et des exemples de solidarité humaine pour le reste du monde?

J’ai encore, sur mon bureau, cette petite plaquette où Régis Debray explique «La république» à sa fille. Cette lecture est rafraichissante mais elle engage. Le citoyen n’est pas seulement l’habitant d’une cité. «C’est plutôt celui qui S’ENGAGE de son plein gré à la vie de la cité».

La république, dit-il, «c’est beaucoup d’histoire, un peu de doctrine, mais avant tout UNE FAÇON D’ÊTRE; la république intérieure compte plus que la forme de gouvernement…». Au fond dit ce gauchiste de Debré, le patriote, le bon patriote, «reconnaît aux autres peuples le même droit à rester maître chez eux, et à se doter d’un État, qu’il réclame pour le sien. Car un peuple soumis à un autre ne peut être souverain. Si un peuple est soumis à un régime de ‘souveraineté limitée’ , par l’Empire du moment, en raison d’une occupation militaire ou culturelle, le peuple perd tout pouvoir sur lui-même». Oui, c’est bien cela! Et bravo pour le réalisateur Hugo Latulippe.

Jean-Pierre Bonhomme

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