Les Francs-Maçons de la Nouvelle-France!!!

S’il est un sujet sur lequel on ne peut que se faire une opinion personnelle, c’est bien celle d’une possibilité d’implication des Francs-maçons dans la conquête du Canada. Voici les informations s’y reliant.
Lors de mes recherches généalogiques, j’ai dû lire un nombre incroyable de textes écrits sur la guerre de sept ans. J’y ai recherché la présence de l’un de mes ancêtres pendant quatre ans, tous les jours. Il me fallait donc lire des écrits contemporains de cette époque dans lesquels on mentionne certains noms.
Quatre ans plus tard, il m’était devenu impossible de croire que le Canada ait pu tomber sous la pression militaire anglaise. Cette farce ne tient tout simplement pas debout. La raison est toute simple : les Anglais et les « Bostonnais » se font donner des raclées partout, toujours, durant toute la guerre de sept ans par les « Canayens ». Comment une escarmouche, au pied des murs de Québec, peut-elle avoir résulté en conquête du pays? On ne peut certainement pas l’attribuer à la traîtrise d’un seul homme; c’est impossible.
La seule réponse possible est : par l’influence divine de Dieu qui a travaillé en sous-main. Car le fait tient absolument du « miracle ». Cependant, comme je ne crois pas que Dieu fasse de la politique, je suis bien obligé de tenter de trouver une autre influence qui « ait pu travailler en sous-main » pour arriver à ce résultat inexplicable.
La première qui me vient à l’esprit est, évidemment, ce complexe élitiste imbécile et aveugle que manifeste Montcalm et les officiers français envers les miliciens canayens qui, eux, gagnent la plupart des combats. Il est bien évident, par contre, que ce complexe de Montcalm ne diminue aucunement l’efficacité guerrière de ces même Canayens. Donc, la raison doit être autre.
Et puisque l’efficacité des miliciens canayens est indiscutablement en cause dans cette « conquête », il faut que cette influence se soit manifestée, en partie, chez nos miliciens. Ajoutons que, pour qu’une influence se manifeste « en sous-main », il faut nécessairement qu’elle soit d’origine discrète, sinon secrète.
Avouons que les influences secrètes, à l’époque de la guerre de sept ans, sont assez limitées. En fait, il n’en existe qu’une seule : c’est celle de la Franc-maçonnerie. Plusieurs réagiront, comme je l’ai fait moi-même, en disant :
– Arrêtes-moi ça tout de suite; ça n’a aucun sens et ne commence pas à tomber dans la notion de « complot ». Au départ, la Franc-maçonnerie n’avait aucune influence importante à l’époque.
Ce qui est loin d’être exact puisque déjà, en 1738, Le Pape Clément XII fulmine contre la franc-maçonnerie dans sa bulle In éminenti apostolatus specula.
Donc, après plusieurs mois de dénie et d’évitement, il a bien fallut que je me décide et que j’adresse le sujet une fois pour toute. La question était : par où commencer?
Ma réponse fut :
– Aucune importance, pourvus que tu commences.
1) 68 ans après les faits, lors de la pose, avec les honneurs maçonniques, de la pierre angulaire du monument de Wolf et de Montcalm, le 15 novembre 1827, le sergent James Thompson (95 ans), survivant de la bataille de 1759, est présent à côté des dignitaires Francs-maçons; lui-même Franc-maçon depuis 1757. On peut évidemment se demander comment il se fait que ce soit des Francs-maçons qui érigent ce monument (dessiné par le capitaine Young soutenant James Thompson lors de l’évènement)?
2) Sur une murale du temple maçonnique de Montréal on peut identifier les participants à la première « réunion » maçonnique fait à Québec le 28 novembre 1759. Les participants sont le Lieut. John Price Gunett, le Capt Span, un certain Huntinford, le Lieut Prentice, le Col. Simon Fraser, le Sgt. Saunders “Sandy” Simpson et le Sgt James Thompson mentionné plus haut.
3) Jacques Lacoursière, historien, laissent entendre que Montcalm et Wolf étaient Francs-maçons. Je ne pense pas qu’il faille s’appuyer trop fortement sur ces rumeurs, car les preuves manquent; du moins, je ne les ai pas trouvées. Par contre, il est peut-être bon de souligner que de Bougainville fit un stage à Londres en1754/55 et fut promu à la Royal Society de Londres en 1756, avant d’être nommé au service de Montcalm en 1757. Cependant, on constate un fait absolument confirmé : le recrutement de la Franc-maçonnerie chez les « canayens » prend de l’ampleur au Canada aussitôt après la conquête.
Quand on connaît le caractère des « coureurs de bois » canayens répandu dans la population, l’adhérence à un mouvement de « libre penseur » indépendant est définitivement attrayante; et plusieurs de nos ancêtres deviennent francs-maçons. Le premier recrutement maçonnique officiel se fait en 1764, lors de LA FÊTE MAÇONNIQUE DE LA ST-JEAN. Les Francs-maçons sont les précurseurs de la société St-Jean Baptiste; du moins au niveau chronologique. John Knox, rédacteur de « Journal of the campaigns of North América » mentionne, lui aussi, cette fête de la St-Jean organisée par les Francs-maçons. C’est également lui qui écrit que lors de la bataille de Ste-Foy, si les « Canayens » n’avaient pas reçu l’ordre de revenir, ils entraient dans Québec et reprenait la ville en 1760. On peut se demander de quel officier venait cet ordre. Il faut quand même avouer que durant les années 1759 et 1760, cela est la troisième fois que les Canayens sont empêchés de se débarrasser des Anglais. 1) À Beauport juillet 59 avec Langlade, 2) Au plaine d’Abraham sous Montcalm (s’il avait attendu) et 3) à la bataille de Ste-Foy qu’on vient de voir.
4) Ce n’est qu’en 1771 que le clergé prend conscience de cette influence sous-jacente. Étienne Montgolfier, supérieur des sulpiciens à Montréal, écrit : « Nous avons un grand nombre de Francs-maçons dans cette ville. Il y en avait quelques-uns, mais en petit nombre et cachés, sous le gouvernement français… ». À partir de cette époque, l’Église démontre une vive inquiétude au sujet de la Franc-maçonnerie et encourage même les dénonciations.
Déjà, le renseignement fourni par Montgolfier prend de l’importance : Il y avait des Francs-maçons en Nouvelle-France, et ceux-ci s’efforçaient de rester cachés. Mais quelle influence réelle peut bien avoir cette « association »?
5) Encore là, c’est l’Église elle-même qui répond à la question :
« Il ne peut échapper à personne que la franc-maçonnerie, sous les diverses formes qu’elle prend pour mieux tromper, exerce une influence sur notre pays : influence ténébreuse, voilée, déguisée, hypocrite, qui s’infiltre dans des associations en apparence bien inoffensives », peut-on lire dans les Mandements des évêques du diocèse de Québec du 18 juillet 1898.
D’accord; donc l’influence est très importante. La question suivante devient : Depuis quand cette influence s’exerce-t-elle sur notre pays?
Jusqu’au milieu du XXe siècle, l’histoire de la franc-maçonnerie est exclue du champ de l’histoire universitaire classique. Par contre, il est difficile de ne pas soupçonner que la philosophie maçonnique, étant « révolutionnaire » depuis ses tous débuts, ne soit pas une force sous-jacente qui assurément, a eu un certain contrôle au cours de l’histoire. Il ne suffit que de comprendre, malgré tout l’imaginaire des textes écrits par ses membres, que la Franc-maçonnerie défend les valeurs sociales qui accordent la liberté à l’individu, effacent les valeurs « élitistes » de l’époque de la Monarchie et prônent le pouvoir aux mains de l’économie pour assurer la qualité de vie de tous et chacun. Ces valeurs sont les mêmes que celles prônées par “les Lumières”. Ce sont également celles que vivent les Acadiens avant 1755 ainsi que nos « coureurs de bois » installés en Louisiane depuis le XVIIe siècle jusqu’en 1785.
Il semble, cependant, ou plutôt, on constate assez facilement aujourd’hui, que les buts d’autrefois furent « déviés » pour servir une certaine « élite » du commerce qui contrôle cette économie. Mais cela n’a pas toujours été le cas.
Cet esprit fondamental d’équité sociale, prôné par la Franc-maçonnerie, apparait pour la première fois, dans la « Magna Carta » des Barons d’Angleterre rédigée en 1215. C’est là, la première manifestation embryonnaire d’une volonté d’égalité pour tous les hommes. Cette notion d’équité pour tous se développe et, par la suite, étend ses racines progressivement partout en occident. Elle finira par instaurer la démocratie. La source en est donc l’Angleterre.
Elle défend les caractéristiques sociales suivantes : la fraternité, l’égalité, la tolérance, la vertu, la liberté et la bienfaisance. On ne peut refuser de reconnaître que cette notion est celle responsable des révolutions importantes de l’histoire du XVIIIe et du XIXe siècle.
Par la suite, au cours du XXe siècle, il semble qu’une petite « clique » ait pris le contrôle de la « partie politique » du mouvement et laisse la majorité Franc-maçonnique s’amuser à ses rituels qui n’ont plus aucune incidence sur les évènements historiques. Cette partie « politique » du mouvement maçonnique est évidemment celle des finances et du commerce qui installent la « mécanisation ».
La révolution française est la deuxième révolution occidentale reliée à la notion d’équité maçonnique; la première est la révolution américaine. Au Canada, la propagande révolutionnaire française arrive via les USA par la complicité d’Henry-Antoine Mézière, adjoint de l’ambassadeur français aux États-Unis; et la propagande américaine, de Fleury Mesplet sous le parrainage de Benjamin Franklin, franc-maçon notoire. Il est à remarquer également, que Georges Washington est aussi franc-maçon.
À noter que la Franc-maçonnerie est beaucoup plus facilement décelable dans la révolution américaine que dans la révolution française. Mais il est incontestable que la notion essentielle de ces deux révolutions est exactement la même, tout en étant celle de la franc-maçonnerie qui l’avait adopté plusieurs années auparavant. Constat obligatoire, la Franc-maçonnerie est beaucoup plus influente dans l’histoire de cette époque qu’on ne l’aurait cru préalablement.
La Franc-maçonnerie spéculative fut créée à Londres en 1717. Elle serait arrivée en France en 1725 ou 1726.
En Nouvelle-France, les Francs-Maçons francophones se seraient réunis dans la Loge des Francs-Maçons régénérés, dont la date de fondation nous est inconnue mais qui doit être postérieure à 1743. Cette loge ayant été parrainée par la Loge Amitié et Fraternité, fondée à Dunkerque cette même année, l’an 1752 marque donc, pour nous, le début de la Franc-maçonnerie au Canada et l’année 1759 est celle de la naissance de l’obédience dont est issue la Grande Loge du Québec.
Ceci dit, voici une liste de certains militaires Francs-maçons de la Nouvelle-France :
Pierre-Charles Daneau de Muy, Louis-Nicolas Duflos, Antoine Foucher, Jacques Gichaud, Pierre Hertel de Beaubassin, Joseph Marin de La Malgue, P.-A. Rameau de La Roche de Granval, Jean-Baptiste Testard de Montigny , le gouverneur marquis de Duquesne (qui prône la défense du Canada et est muté en France en 1755) et un Français d’adoption, le baron de Dieskau (Il fut fait prisonnier en 1755 lorsque Montreuil l’abandonna à l’ennemi. Montreuil est celui qui arrêta son armée à la rivière Jacques Cartier lors du combat des Plaines d’Abraham, refusant de suivre Vaudreuil), François Picotté de Belestre, chevalier de Saint-Louis, Michel Chartier de Lotbinière, Joseph Le Moine (celui impliqué dans la guerre de sept ans), l’avocat Michel Amable Berthelot d’Artigny, Jean-Baptiste Céloron de Blainville, Benjamin-Mathieu d’Amours de Cligancourt, Charles Curot, Jean Dumoulin, Louis Ermatinger, Jean-Baptiste-Melchior Hertel de Rouville, Joseph-Guillaume de Lorimier, l’avocat Simon Sanguinet, Louis Verchères.
La plupart de ces « Frères » sont certainement initiés à l’époque du régime français. De plus, on peut facilement comprendre qu’ils sont tous pour la suppression de l’autorité monarchique telle qu’on la subissait avant la conquête. Il y a assez de militaires dans cette liste pour faire réussir la conquête, on doit l’admettre. De plus, ils sont répartis partout au Canada incluant dans l’Ouest; et il est certain qu’on ne possède pas tous les noms des adeptes.
La première loge maçonnique formée de civils est celle d’Annapolis Royal, en Nouvelle-Écosse, qui reçoit ses patentes de la loge des maçons modernes de Boston en juin 1738.
Puis, ce fut l’établissement de loges à St. John (1746 et 1766), à Halifax (1750 et 1751) et à Québec (1764). Au moment de la conquête de la Nouvelle-France par l’Angleterre, Montréal compte déjà une loge de Francs-maçons d’expression française.
Deux des plus anciennes loges de la Nouvelle-France qui existent encore aujourd’hui, l’Antiquity Lodge no.1 et la loge Albion no.2, sont créées respectivement à Montréal et à Québec en 1752.
Il est définitivement impossible de nier l’existence d’une organisation maçonnique importante en Nouvelle-France et en Acadie anglaise.
À part les loges des Frères du Canada, entre 1759 et 1791 la Province de Québec compte 37 loges dont sept à Montréal. Après la prise de Québec, le lieutenant John Price Guinnett est proclamé Grand Maître le 28 novembre 1759, alors qu’est fondée une Grande Loge provinciale qui groupe six loges des régiments de Wolfe. La Grande Loge d’Angleterre ne reconnut jamais l’élection de Guinnett, la considérant irrégulière. La situation est régularisée lors de l’installation du colonel Simon Fraser comme Grand Maître le 24 juin 1760; deux mois avant même la capitulation de Montréal.
En 1762, il y a dans la province 13 loges militaires et une de marchands à Québec, relevant toutes de la Grande Loge provinciale du Québec ; en 1767, Edward Antill est nommé représentant du Grand Maître de la Grande Loge provinciale à Montréal. Sous la Grande Maîtrise de sir John Johnson, le siège de la Maçonnerie est transféré de Québec à Montréal en 1788 : Thomas McCord, un membre de la St. Peter’s Lodge, est nommé Grand Secrétaire et William Grant, Représentant du Grand Maître à Québec.
Passons maintenant aux choses sérieuses :
Simon Fraser : est un colonel sous les ordres de James Wolf lors de la conquête. Ensuite, il conduit les « Fraser’s Highlanders » lors de la révolution américaine. Il parle couramment le Français. Il est le père du marchand de fourrures de la Compagnie du Nord-Ouest Simon Fraser. Ce dernier n’est pas Franc-maçon; mais son fils Paul Fraser le fut. L’important est de remarquer, ici, le lien entre la Franc-maçonnerie, la conquête et la révolution américaine.
Sir John Johnson est un colonel loyaliste qui se réfugie au Canada en 1776 lors de la révolution américaine. Il possède une seigneurie à Argenteuil.
Thomas McCord Irlandais de naissance, arrive à Québec avec sa famille en 1764. Il devient un homme d’affaire et une figure politique importante dans le Bas-Canada.
William Grant Parlant parfaitement le Français, arrive à Québec à l’âge de 15 ans comme représentant de la compagnie de Robert Grant, un parent. Il se lance dans la traite des fourrures et prête de l’argent à des marchands de Québec. Il s’intéresse également aux pêcheries de phoques et de saumons. À son arrivée, il achète plusieurs maisons de Québec et de Montréal pour spéculer. Il devient Seigneur de St-Roch après un tour de passe-passe avec des notaires. Il achète même le Château Ramezay qu’il loue au gouvernement pour cinq ans et qu’il revend en août 1778. En 1775, durant la Révolution américaine, les aspirations financières de Grant se heurtent à la menace de l’invasion et au spectre de la ruine. « Déterminé à rester debout ou à tomber avec le gouvernement du roi », Grant se joint à la milice des « citoyens indisciplinés », mise sur pied pour défendre Québec. Il condamne publiquement les rebelles et déclare, en septembre, que « la façon la plus courte et la meilleure » de juger les prisonniers américains « serait de les tuer sur-le-champ ».
Est-il assez évident que même si les « pères de la constitution américaine » sont, pour la plupart Francs-maçons (comme Benjamin Franklin par exemple), les intérêts de chacun des partis Canadiens/Américains se confrontent et décident des loyautés? Mais il est impossible de ne pas comprendre que si la Franc-maçonnerie est responsable de la révolution américaine, elle est également en position, d’être responsable de la conquête de la Nouvelle-France tout autant. Il ne suffit que de se rappeler que ceux qui décident et influencent les habitants de Québec à ouvrir les portes de la ville aux Anglais (même si Lévis a donné instruction à Nicolas Roch de Ramezay de tenir jusqu’à son arrivée), sont les marchands de Québec. De plus, 13 officiers sur 14 recommandent à Ramezay de capituler.
La biographie de William Grant est des plus significatives. Malgré qu’on y parle de ses « intérêts privées », il ne faut pas perdre de vue qu’il était Franc-maçon représentant du Grand Maître à Québec.
http://www.biographi.ca/009004-119.01-f.php?&id_nbr=2428&&PHPSESSID=ychzfqkvzape
Voici quelques officiers de Montcalm supposément présent à Québec, après la Bataille des Plaines d’Abraham.
Jean Baptiste d’Aleyrac. C’est lui qui est désigné sous le nom de « lieutenant Dulairac » dans la liste des tués et blessés du 28 avril 1760. Il est blessé et ne participe pas au vote sur la reddition de la ville.
Pierre-Philippe Aubespry de la Farelle. Chevalier de St-Louis, il fut l’un qui conseille de rendre Québec. Sur la liste de ceux qui votent la reddition de Québec, son nom est Daubepry.
Michel-Marie-Charles Avice, chevalier de Montgon de Surimeau Capitaine du régiment du Berry. Le 3 février 1759 Montcalm l’envoie à Montréal avec une lettre pour Lévis. Le chevalier compte loger chez M.de la Roche-Vernet. Il est possible qu’il ne soit pas à Québec lors de la reddition.
Jean-Pierre Bachoue de Barraute Chevalier de St-Louis, capitaine du régiment de Béarn, époux de la veuve de De Jumonville, est blessé lors du combat des plaines d’Abraham. Il n’est pas pris par les Anglais à l’hôpital et est ensuite blessé à la bataille de Ste-Foy. Il n’est pas de ceux qui conseillent officiellement la reddition de Québec. Il doit, probablement, s’échapper de l’hôpital. Par son mariage il est parent avec Vaudreuil qu’il appuie.
Michel Guillaume Jean de Crèvecoeur (Il n’est pas mentionné officiellement, mais il est certainement à Québec lors de la reddition) lieutenant français à Québec 1759. Il s’arrange pour ne pas être rapatrié en France et passe aux USA où il est naturalisé en 1765 sous le nom de John Hector St. John. Il sera soupçonné d’espionnage au profit des rebelles par l’armée britannique à New York lors de la révolution américaine. Il parvient à se rendre en France en 1781 et retourne aux USA en 1783 à titre de consul de France jusqu’en 1790. Ceci confirme qu’il est du côté des rebelles (tout comme la France d’ailleurs). Il échappe à la révolution française mais y retourne en 1792 quand commence le règne de la Terreur. Il est alors démis de ses fonctions.
S’il en est un qui dégage une odeur de Franc-maçon c’est bien lui. De Lieutenant à Québec (où il peut avoir conseillé de capituler), pour ensuite aller aux USA jusqu’à la révolution et revenir en 1783 comme « Consul de France » jusqu’à l’instauration de la Terreur, on peut se poser quelques questions. D’autant plus qu’il n’est pas du tout mentionné dans l’histoire de la Nouvelle-France. Par contre, il s ‘avère, selon plusieurs commentateurs, que le bref séjour de St. John de Crèvecœur en Nouvelle-France constitue un des principaux tournants de son existence.
Ce séjour aurait déterminé l’orientation que devait prendre son œuvre.
Quelque chose se serait passé alors que l’auteur est en Nouvelle -France : des événements qui l’auraient conduit à tourner le dos à ses origines françaises, à rejeter les valeurs de ce qui est appelé l’Ancien Régime et à embrasser les idéaux républicains d’une nation naissante, les États-Unis d’Amérique. Il rédige une œuvre dans laquelle les États-Unis actuels voient « la première expression littéraire d’une conscience nationale américaine».
Le personnage est intéressant. Allons un peu plus loin dans les détails :
Il est blessé à la bataille des Plaines d’Abraham et fait prisonnier. Benoit-François Bernier est celui chargé de voir aux blessés de l’hôpital avec les Anglais. Le 4 octobre 1759, Bernier écrit à ses supérieurs dont le post scriptum dit: « Je ferai passer Crèvecoeur en France; je ne sais pas si d’autres le voudront ». C’est assez curieux car cela semble dire que Bernier peut envoyer Crèvecoeur où il veut et surtout que « les autres » pourraient ne pas vouloir qu’il le fasse. De plus, pourquoi parler de Crèvecoeur dans un post scriptum, comme s’il était un cas « particulier »? Bernier se casse la tête pour rien, Crèvecoeur lui-même n’est pas intéressé à se rendre en France pour l’instant.
Il y a des officiers qui sont considérés par Monckton comme « prisonniers » et d’autres comme « non-prisonniers ». Ceux qui sont blessés et reposent à l’hôpital ne sont pas considérés comme « prisonniers ». Les autres, en état de combattre les Anglais, sont des « prisonniers ». Voici la liste des officiers prisonniers :
La Ferté, Bellecombe, Saint-Alambert, D’Artigues, La Bruyère et Boucherville. Ils sont envoyés en Angleterre. Curieusement, on ne parle pas de Chaussegros de Léry qui était, supposément, également « prisonnier ». De Léry était ingénieur, tout comme Crevecoeur qui, lui, était Lieutenant et devait être sous les ordres de Chaussegros de Léry. II est à noter que De Léry fut fortement soupçonné d’avoir livré Québec. de Léry est un combattant « Canayen », évidemment. Par contre, aucun des noms de « prisonniers » ne figurent sur la liste de ceux qui votèrent la reddition de Québec. Comment cela est-il possible? Où sont La Ferté, Bellecombe, Saint-Alambert, D’Artigues, La Bruyère et Boucherville lors du « vote »??? Seule réponse possible: ils ont été fait prisonnier lors de la bataille des Plaines et non lors de la capitulation de la ville. par contre, comment d’Artigues peut-il être blessé aux plaines d’Abraham et l’être encore lors de la bataille de Ste-Foy, s’il est « prisonnier » de Monckton en 1759?
http://vailcourt.com/Chaussegros.html
Et voici celle des « non-prisonniers » : de Tourville, Deschambault, de Léry, de La Chevrotière, de St-Félix et de Crèvecoeur. Ceux-ci seront amenés à New York. Bernier demande ensuite à Bougainville un supplément d’espèce pour certains officiers dont, entre autre, Crèvecoeur qu’il mentionne par son nom. La somme donnée sera de 240 livres. Bernier ajoute : « Je ne pouvais faire moins pour nous en débarrasser ». Donc, Crèvecoeur a maintenant démissionné de l’armée pour ne pas retourner en France. Est-ce lui qui a ouvert les portes de la vile? On ne le sait pas; mais on se débarrasse de lui le plus vite possible sans mettre son nom trop à la vue dans les écrits. En complément, il faut savoir que Chaussegros de Léry est l’homme le plus important de Québec.
Curieusement, même si « officiellement » on dit Chaussegros de Lery « fait prisonnier », le rapport de celui en charge des Français après la reddition de Québec, le dit faire parti de ceux que Monckton considère comme « non prisonniers » et qu’il amène avec lui à New York.
Mais encore plus curieux, dans la liste officielle des 14 officiers qui votent pour la reddition de la ville en 1759 on trouve les noms de Pellegrin, Dailleboust Cerry, Lusignan fils, Fiedmont, Mariet, Bigard, Parfouru, St-Vincent, Daubepry (celui-ci est dans la liste plus haut), De l’Estang de Celles, Le Cher, Doms et Joannes. Il est possible que certains soient mentionnés par Bernier, plus haut, mais les signatures ne concordent pas aux noms donnés par Bernier. Comment ont-ils pu conseiller la reddition de Québec parce qu’ils n’étaient pas blessés, sans être dans la liste de « prisonniers » de Monckton? Il est évident que certains noms furent passés sous silence parmi ces « votants » pour la reddition. Est-ce le cas de Chaussegros de Lery? La seule façon qu’il ne soit pas considéré comme « prisonnier » est qu’il était blessé. Et sa biographie indique qu’il fut effectivement blessé lors de la bataille des plaines d’Abraham. Par contre, il n’est pas « bien reçu » par la France lors de son retour là-bas. Il se tourne alors vers l’Angleterre qui le renvoie au Canada, où il est reçu très froidement par Murray. Un combattant « canayen » reçu « froidement » par Murray, lève d’énormes doutes sur de Lery. Le soupçon d’avoir livré Québec prend alors de l’importance; car Murray n’est pas de ceux qui puisse se faire ami avec ceux qu’il considère comme « traîtres » d’un parti ou de l’autre. De plus il démontre toujours, beaucoup de considérations envers les combattants « canayens ». Pourquoi pas envers Chaussegros de Léry? Ajoutons à cela que Chaussegros de Léry reste au Canada parce qu’il risquait d’être emprisonné s’il retournait en France.
Peu à peu, dans l’histoire de Crèvecoeur, certaines informations paraîtront, suite au fait qu’il est devenu un « célèbre fermier américain ».
En 1975, Marcus Cunliffe écrit que « Ses collègues officiers avaient quelque raison d’être impatient de le jeter hors du régiment français dans lequel il servait au Canada en 1759 ». A.M. Plumstead affirme « qu’il abandonna sa charge en octobre dans des circonstances mystérieuses, qui semblent liées à quelque disgrâce ». Rien ne prouve que cela soit le cas; par contre un fait demeure : Tous ce qu’il écrit après son départ de Québec, il le signe du nom de St-John pour un lecteur anglais et St-John de Crèvecoeur pour un lecteur français. Il a donc anglicisé son nom français.
Ajoutons quelques informations supplémentaires : En 1754, Crèvecœur effectue un séjour dans de la parenté à Salisbury, au cours duquel il apprend l’anglais avant de s’embarquer pour la Nouvelle-France où il sert. Après la capitulation de Québec, Il voyage beaucoup aux USA en prenant des notes et en travaillant comme arpenteur avant de devenir fermier, d’abord dans le comté d’Ulster puis dans le comté d’Orange à New York. C’est là qu’il prend la nationalité et adopte le nom de « J. Hector St John ». En 1766, il est accepté comme membre de la tribu des Oneida. Lorsqu’il est emprisonné à New York, soupçonné d’espionnage (parce qu’il est Français; ce qui n’a aucun sens), ce sont deux marchands, dont un William Seton, qui se portent garant pour lui, après trois mois de prison. Il se rend en France.
Lorsqu’il revient aux USA en 1783, sa femme a été assassinée et sa ferme brûlée par les indiens quelques semaines auparavant. Il reçoit des marques d’estime particulière de la part de Georges Washington. Il revient en France éventuellement.
En 1789, il retourne aux États-Unis, à nouveau comme consul, et publie une version en trois volumes des Letters en français. Il est élu à l’American Philosophical Society (Fondée par Benjamin Franklin) et publie, sous le nom d’« Agricola », des lettres dans divers journaux américains sur, entre autres, la culture de la pomme de terre, l’alimentation des moutons, l’huile de tournesol. Il introduit la culture de la luzerne en Amérique.
Après 1808, il passe plusieurs années à Munich, où son gendre, Louis Guillaume Otto, comte de Mosloy est ministre plénipotentiaire. En 1813, il est arrêté comme espion américain. Rentré en France, il meurt le 12 novembre 1813 d’une maladie cardiaque.
Dans son livre « Lettre d’un cultivateur américain, il dit qu’en 1781 il rencontre cinq américain sur la plage qui étaient prisonniers depuis deux ans et détenus au château de Forton près de Portsmouth d’où ils s’étaient évadés. Il les reçoit sur le rivage et les amène chez son père. Il les nourrit, les habille et les conduit à un vaisseau qui part pour Boston. Cette générosité sera ce qui sauvera ses deux enfants à Boston. Un certain G. Felowes (parent de l’un des cinq rescapés) récupère ses deux enfants et les garde chez lui à Boston. Celui-ci est membre de l’assemblée législative et échevin de Boston.
Crèvecoeur est ingénieur et géomètre, et il travaille dans toute la Nouvelle-Angleterre pour évaluer la rentabilité des sols. Ses écrits témoignent de sa philosophie d’équité pour chacun des colons américains. On apprend dans son livre qu’il parle Allemand couramment. Ce livre est une publicité médiatisée pour vendre la Nouvelle Angleterre à de nouveaux colons venant de partout.
Il raconte entre autre une discussion qui date de 1756 et qu’il traduit dans son livre, où cinq personnages (Allemand, Écossais, Français, Irlandais et Anglais) exposent pourquoi ils sont venus en Amérique. Cette histoire est probablement imaginaire puisqu’en 1754 Crèvecœur est à Salisbury et que l’année suivante il s’engage pour la Nouvelle-France. De plus, il mentionne à la fin que le document qu’il traduit, fut complètement détruit pendant la guerre de la révolution américaine.
Par contre, l’exposé de chacun des personnages indique exactement la philosophie des Francs-maçons incluant la liberté de culte qui, selon ses dires existe en Nouvelle Angleterre. Cette histoire vaut la peine d’être lue :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k737153/f63.tableDesMatieres
En conclusion, si la Franc-maçonnerie est impliquée dans la révolution américaine, et la révolution française, on peut fort bien y ajouter qu’elle est également impliquée dans la conquête du Canada. Ce qui explique finalement le fait que notre pays fut conquis suite à une escarmouche insignifiante au pied des murs de Québec. Escarmouche dont l’opinion de Lévis est la suivante :
« Il est inouï que l’on rende une place sans qu’elle soit attaquée ni investie, alors que cette campagne allait se terminer glorieusement. »
Il est clair que Lévis croyait qu’avec son petit nombre de soldats et ses nombreux et courageux « Canayens », il allait chasser les Anglais du Canada. Ce n’est qu’après la « traîtrise » de la reddition de Québec que les miliciens canayens laissèrent tomber et préférèrent le régime britannique à celui de la France, qui elle, venait de prouver incontestablement son indifférence envers les « Canayens ».
Ajoutons que les « Canayens » avaient appris, comme les assiégés de Québec d’ailleurs, de la part des « déserteurs » anglais, que l’amiral Saunders avait prévu le réembarquement des troupes à partir du 20 septembre pour ne pas risquer de rester pris dans les glaces et que, effectivement, dans les mémoires de James Murray on découvre que celui-ci est grandement étonné de voir, à partir de son bateau, les portes de Québec s’ouvrir et les habitants faire signe de venir prendre la ville. Les « Canayens » ne savaient peut-être pas écrire, mais ils savaient très bien que de garder Québec deux jours de plus que le 18 septembre n’était pas du tout « impossible » et que les Anglais allaient partir très bientôt. Et cela sans parler de l’armée de Lévis qui arrivait pour faire lever le siège de la ville de Québec qui ne devait pas être rendue. Encore une fois, cette reddition n’a vraiment aucun sens sauf si les « Canayens de Québec » veulent le régime britannique. Les autres « Canayens » accepteront le nouveau régime seulement après « la bataille de Ste-Foy ».
Dernière question à se poser:
Est-ce que l’historien officiel actuel peut défendre la possibilité que les « Canayens » acceptèrent volontairement de choisir le régime anglais pour diriger leur pays?
Je ne le crois pas; certainement pas au niveau politique du Québec en tous les cas. Car le résultat serait alors de réunir les Canadiens francophones et anglophones en une société identitaire canadienne autonome, ayant la possibilité de se lever contre les visées impérialistes anglo-américaines qui ne sont pas la caractéristique fondamentale de l’esprit des vrais Canadiens. Mieux vaut continuer de diviser, avec de fausses interprétations, pour mieux contrôler la population légitime du Canada. La recette date de 1837/38 et continue de fonctionner parfaitement.
Comme toute bonne sauce finit par se gâter, il est fort possible que la Franc-maçonnerie originelle, défendant l’équité et la démocratie des pères de la confédération américaine, ait pu évoluer jusqu’à nos jours pour devenir le groupe Bilderberg.
Ce n’est pas à moi d’en faire le lien; je me contente d’en souligner l’odeur.
Amicalement
André Lefebvre