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Miséricordia: l’ABC de la mode équitable

«Comment, avec un groupe de jeunes couturiers péruviens, faire une marque internationale haut de gamme avec tout notre cœur, en sachant très bien qu’on n’atteindra jamais le niveau technique des autres marques, mais par contre avec une émotion et une implication indestructible qui ferait le charme du projet?» Grande question que se sont posée au départ Aurelyen et Mathieu Remaux, cofondateurs du projet Misericordia. La réponse est pourtant courte: avec beaucoup d’humilité.

Guillaume Brodeur Dossier Commerce équitable

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«On se doit de comprendre des gens qui sont complètement différents de nous. Ne pas les transformer en quelque chose d’autre, mais essayer de les faire évoluer pour qu’ils avancent dans la vie. Et surtout, changer aussi soi-même.» Aurelyen a ainsi dû abandonner ses préjugés, s’impliquer dans la communauté et s’immerger complètement dans la culture populaire du Pérou, lui qui ne baragouinait pas un traître mot d’espagnol à son arrivée.

Un pas vers l’autonomie

«On a commencé dans un bidonville au nord de Lima, dans la maison d’une prof de couture, avec seulement 4 machines à coudre et deux tables à couper. La production était très petite, mais on commençait déjà à vendre dans de belles boutiques en Europe.» Une percée due en partie à la chance, en partie aux contacts des fondateurs de Misericordia, et surtout au travail colossal de toute l’équipe. «Au fur et à mesure, le projet a grossi, poursuit Aurelyen. On s’est acheté d’autres machines, on a eu un atelier à Gamarra, l’infernal marché du textile de Lima, pour ensuite s’installer dans nos nouveaux locaux de Lince, un quartier historique de la ville.»

Les ateliers au Pérou ressemblent en général à des soues à cochons où les employés travaillent des journées interminables. «Après quatre ans de travail, les vêtements de Misericordia sont maintenant confectionnés dans un bel atelier propre avec des fleurs, se réjouit Aurelyen. Tout le monde est bien organisé, tout le monde a son petit uniforme et tout et tout. Mais il ne faut pas oublier que ça a pris des semaines, des mois d’efforts et de sacrifices pour pouvoir se les payer.» Une patience qui paye, car aujourd’hui des grands de la mode comme Lutz, Bernard Willhelm ou Colette se bousculent au portillon pour prêter main forte aux designers de Misericordia.

Rester terre à terre

À moyen terme, Aurelyen espère ouvrir des boutiques Misericordia pour éliminer les intermédiaires. En parallèle à ses activités commerciales, il participe bénévolement à la création d’un atelier de couture en pleine jungle et encourage divers projets parascolaires au Pérou. Le designer demeure cependant discret sur ces actions, lui qui ne veut ni projeter l’image d’une Mère Térésa, ni celle d’un «kid kodak» opportuniste.

Malgré une progression du chiffre d’affaires d’environ 25% par année -qui pourrait d’ailleurs aller bien au-delà-, Aurelyen préconise un modèle développement graduel et modeste pour l’entreprise. «On ne peut pas doubler notre production du jour au lendemain tout en respectant notre idéologie. Le défi est d’assurer la formation de nouveaux couturiers.»

Pour la plupart initiés aux rudiments de la mode sur place, les 27 employés jouissent de conditions enviables par rapport à leurs compatriotes: paye 35% supérieure au salaire minimum péruvien, sécurité d’emploi, congés de maternité… et même de paternité! Une exception dans ce pays aux mœurs conservatrices. L’entreprise pourvoit également une assurance maladie à ses employés. Un traitement semblable à celui d’un professeur d’école.

«Ce n’est pas énorme, mais c’est suffisant pour mener une vie “normale’’.» Si les conditions sont meilleures chez Misericordia que dans les autres ateliers, Aureleyn assure que «ce n’est pas par charité, mais parce que nos couturiers sont des professionnels qui font des vêtements de qualité.»

Misericordia en chiffres

  • 15 000 vêtements fabriqués par année
  • une griffe présente dans 17 pays
  • 27 employés réguliers
  • 1 couturier fabrique à lui seul 10 vestes par jour
  • 250 nouveaux modèles par an
  • rémunération 35% supérieure au salaire minimum péruvien
  • chiffre d’affaires de 700 000 $CAN

Mode équitable au Québec

Loin des bidonvilles du Pérou, dans un atelier de couture du boulevard Saint-Laurent à Montréal, des femmes immigrantes, isolées et sans emploi sont formées aux réalités du travail. L’organisme de réinsertion Petites-Mains confectionne des vêtements de travail et des articles promotionnels équitables.

«Nous aidons les immigrantes à se trouver du travail tout en leur fournissant les bases nécessaires pour vivre ici», explique la coordonnatrice du projet, Hamida Mukarurangwa.

À l’opposé de Misericordia, Petites-Mains, qui bénéficie de subventions gouvernementales, a choisi de créer des vêtements équitables bon marché. Pour Mme Mukarurangwa, la raison est simple: «Notre but n’est pas de faire de l’argent, mais de rendre accessible à ces femmes un milieu d’apprentissage adéquat.»

À ses débuts en 1994, 7 immigrantes prennent part au projet. Outillées de 4 machines à coudre, elles confectionnent les premiers morceaux. Depuis, l’entreprise ne cesse de grossir. En juillet dernier, Petites-Mains déménageait pour une 3e fois afin de répondre à la demande commerciale grandissante et permettre à plus de femmes de côtoyer l’organisme.

Avec un programme d’accompagnement pour nouveaux arrivants, des cours de francisation et une possibilité de faire des stages dans d’autres métiers, les Petites-Mains du Québec font aussi de grandes choses!

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Classé dans Actualité, environnement, Raymond Viger

Amérique du sud: Prochaine cible de l’Empire

(Photo Flickr de Josemascona)

François Marginean

Un conflit militaire n’est pas initié du jour au lendemain. Il s’agit d’un processus qui implique en premier lieu d’influencer la perception et l’opinion publique – la diabolisation de la personne ciblée ou d’un gouvernement dans le but de justifier une agression. Subséquemment, des forces armées sont déployées dans la région pour assurer une action militaire efficace. Des tactiques, telles que les opérations de subversion et de contre-insurrection, sont utilisées afin d’affaiblir et de déstabiliser la nation visée de l’intérieur, augmentant sa vulnérabilité et causant un affaiblissement de ses défenses. (Source)

Une méthode qui a fait ses preuves

Cette méthode a été utilisée pour vendre la guerre d’agression contre l’Irak dans les mois avant mars 2003. On a diabolisé L’Irak et Saddam Hussein, pourtant arrivé au pouvoir à l’aide de la CIA, en faisant la promotion de trois mensonges intentionnels: qu’il était relié à l’Al Qaïda et donc au 9/11, qu’il cherchait à se procurer de l’uranium pour fabriquer des armes nucléaires enfin, que Saddam possédait encore des armes de destruction massive pouvant être déployées en 45 minutes vers Londres. Les armes de destruction massives n’existaient plus de 1991, un fait connu des inspecteurs de l’ONU et des services du renseignement américain; l’administration Bush a admis elle-même que Saddam Hussein n’avait aucun lien avec Al Qaïda et le 9/11 et finalement, les informations utilisées par la Maison Blanche pour terroriser la planète avec la perspective de voir l’Irak utiliser l’arme nucléaire provenaient d’un plagiat d’un travail d’étudiant. Cette guerre d’agression n’avait aucune base légale dans la loi internationale.

Identique application de la méthode qui avait aussi servit à diaboliser les Talibans de l’Afghanistan qui, eux aussi, avaient pris le pouvoir avec le consentement de Washington. Mais avec le 9/11 en poche, les néocons ont simplement eu à accuser les Talibans de protéger Ossama Bin Laden (Tim Osman), de maltraiter leurs femmes et d’être des radicaux extrémiste pour arriver à justifier l’invasion d’un des pays les plus pauvres de la planète.

Ensuite de cela, comme la méthode le prévoit, des forces armées sont déployées dans la région. Ces équipements lourds et la grande quantité de troupes impliquent une soigneuse préparation de longue date. On ne déplace pas porte-avions, chasseurs, missiles, chars d’assaut, soldats en 24 heures. Cela prend des mois, sinon des années de planification et de mise en place. Pour le cas de ces deux derniers pays, le tout était planifié depuis au moins le premier jour du premier mandat de Bush, en l’an 2000. D’autres évidences montrent que cela remontait même à des années plus tôt. Le Pakistan avait été averti en juillet 2001 que des opérations militaires étaient pour avoir lieu en Afghanistan vers le mois d’octobre 2001 et les forces militaires se trouvaient déjà dans le Golfe Persique un mois avant le 9/11. Nous connaissons tous la suite.

Scénario identique dans le cas de l’Iran

Cette façon de procéder est en application contre l’Iran depuis quelques années. Même propagande et désinformation qui furent utilisées contre l’Irak et Saddam Hussein, diabolisation systématique des leaders, de leur culture, etc. Les États-Unis  financent des opérations de subversion et de déstabilisation pour affaiblir le pays de l’intérieur allant jusqu’à financer des groupes terroristes tel que les Djundallah. L’Iran chercherait à fabriquer des armes nucléaires et, selon Israël qui est fiévreuse de déclencher une attaque sur ce pays, Mahmoud Ahmadinejad serait la nouvelle incarnation de Hitler. Il est à noter que le rôle d’Israël dans le déclenchement de la guerre en Irak semble être de premier plan. L’Histoire se répète, de même que l’utilisation de la même méthode pour initier des conflits militaires.

L’Amérique du sud est dans la mire de l’Oncle Sam

De manière plus discrète et insidieuse, ce plan déviant est aussi activement mis de l’avant contre le Vénézuela depuis de nombreuses années. La consolidation de l’unité régionale ainsi que l’intégration de l’Amérique latine menace les possibilités américaines de reprendre le contrôle et assurer sa domination de l’hémisphère. Les avancées de la Révolution bolivarienne ont entravé son « auto-destruction », provoquée par la subversion interne financée et dirigée par des agences des États-Unis. Néanmoins, l’Empire ne va pas cesser ses tentatives d’achever son objectif final et un potentiel conflit militaire demeure toujours à l’horizon. (Source)

Depuis le coup-d’État piloté par Washington en avril 2002, les constantes agressions menées contre le Vénézuela ne font que se multiplier et s’amplifier. Les tentatives de déstabilisation contre la Révolution bolivarienne se couronnent avec la plus grande expansion militaire de l’Histoire dans la région, à travers l’occupation américaine de la Colombie, la réactivation de la Quatrième flotte de la US Navy, ainsi que l’augmentation de la présence militaire américaine dans les Caraïbes, au Panama et en Amérique centrale depuis la dernière année. Ceci peut être interprété comme étant une préparation à un scénario de conflit dans la région.

Les opérations de démonisation vont bon train. Durant les derniers mois, le Vénézuela a été accusé de ne pas assez combattre les opérations narcotiques, de violations des droits de l’homme, « de ne pas contribuer à la démocratie et à la stabilité régionale », et d’être le chef de file anti-américain de la région. Cela fait partie d’une campagne de relation publique pour fabriquer le consentement et manipuler l’opinion publique pour justifier une agression directe contre le Vénézuela. Bientôt, Washington va publier sa liste annuelle des États qui soutiennent le terrorisme. Si le Vénézuela était placé sur la liste cette année, la région pourrait être sur le bord d’un conflit militaire sans précédent.

Un document datant de 2009 produit par la US Air Force justifiant le besoin d’une présence militaire accrue en Colombie révèle que ces nouvelles bases militaires américaines vont donner au Pentagone « …une occasion pour mener des opérations de grande envergure à travers l’Amérique du sud… ». (Source)

Ce document démontre les véritables intentions qui se cachent derrière l’accord militaire entre les États-Unis et la Colombie: « Une présence (américaine) augmentera aussi notre capacité de mener des opérations du renseignement, de surveillance et de reconnaissance, d’améliorer notre portée globale, de soutenir des nécessités logistiques, d’améliorer des ententes, d’améliorer la coopération sur la sécurité régionale et de donner de l’expansion aux capacités de guerre expéditionnaire ».  (Source)

Le premier rapport définissant les priorités en matière de défense et du renseignement de l’administration Obama a dédié une attention substantielle au Vénézuela. Le Rapport annuel d’évaluation des menaces de la communauté du renseignement américain a spécialement signalé le président Hugo Chavez comme posant une « menace » majeure aux intérêts américains, le classant aux côtés de l’Iran, de la Corée du nord et d’Al Qaïda. « Le président vénézuelien Hugo Chavez s’est établi comme des principaux détracteurs international des États-Unis, dénonçant les États « libéral-démocratiques » et le » super-capitalisme », et opposant des politiques et intérêts américains dans la région ».

Quelques jours après que le rapport soit publié, le Département d’État a présenté dans son budget de 2011 au Congrès, demandant une augmentation de financement de l’ordre de $15 millions pour la USAID (U.S. Agency for International Development) et la NED (National Endowment for Democracy) dans le but de financer des groupes d’opposition au Vénézuela, en plus de $48 millions pour déployer des équipes de « promoteurs de la démocratie » dans des pays où la démocratie est menacée. Lors de sa dernière tournée de l’Amérique du sud, Hillary Clinton n’a pas manqué d’attaquer le Vénézuela à travers différentes déclarations s’inquiétant de la question de la démocratie, des droits de l’homme et de ne pas contribuer de façon constructive au progrès régional.

La surveillance électronique à partir de la base du US SOUTHCOM à Aruba fonctionne depuis plusieurs années et on se prépare pour de sérieuses opérations contre le Vénézuela. Le Pentagone se prépare pour une offensive éclair contre ce pays.

Haïti, la nouvelle base des opérations américaines

Sous le beau vernis d’aide humanitaire, une tout autre situation se développe en Haïti. Une situation qui reflète la longue histoire de cette nation surexploitéeFox News a révélé qu’un autre lucratif contrat sans appel d’offre a été octroyé à un lobbyiste et ami de haut profile « politiquement connecté » à l’ancien président Bill Clinton. La USAID qui est un cheval de Troie, tout comme pour la NED, permet différentes opérations américaines sur le terrain, sous le couvert d’aide humanitaire. On a appris qu’il est prévisible que les troupes américaines demeurent en Haïti pour un temps considérable. Selon les sources, du 20 000 soldats américains présents suite au terrible tremblement de terre du 12 janvier, il en reste entre 6 500 et 10 000. Ce qui est planifié pour le moment, c’est de plus en plus de personnel de la USAID et de moins en moins de troupes. Il semble que toutes prétentions à l’effet que Haïti est un pays indépendant ont été évacuée par le gouvernement américain.

Dans les médias, on se demande ouvertement quel rôle les États-Unis devraient jouer, allant jusqu’à considérer une annexion d’Haïti dans le style de Puerto Rico. On propose de reconstruire le pays et sa structure gouvernementale à partir de zéro. Obama a indiqué au cours d’une conférence de presse, confirmé par le président haïtien, que la présence militaire américaine en Haïti continuera indéfiniment. On peut alors considérer que le pays est de facto sous contrôle des États-Unis. En plus de lui conférer une position géostratégique dans la région, tout près de ses plus grands ennemis, Cuba et le Vénézuela, cela a beaucoup à voir avec des arrangements complaisants pour mettre la main sur les ressources naturelles d’Haïti et pour préserver les conditions de travail des ateliers de misère dans les usines d’Haïti. Et les réelles conditions de vie épouvantables que la plupart du peuple haïtien endure ne s’amélioreront jamais: c’est ainsi conçu.

Conclusion

L’Amérique du sud est à nouveau la cible de l’Empire. Pas à pas, si nous n’y prenons pas garde et ne montons pas une féroce opposition à une nouvelle conflagration et déstabilisation de tout ce continent, il y a fort à parier que nous allons assister à un autre front de la guerre pour assurer l’hégémonie américaine. Il est grand temps d’instaurer une ère de paix véritable et d’emprisonner les interventionnistes.

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