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Pour que l’anarchie soit un plat digeste

Ne fais pas à autrui ce que tu estimes déraisonnable qu’un autre te fasse.

Thomas Hobbes 1588-1679

(J’introduis mon texte avec cette phrase en gonflant le sens du verbe « faire » jusqu’au verbe « penser ».)

Parlons politique et philosophie, tien!

Mon expérience blogosphérique fait évoluer ma pensée dans quelques sens, et l’anarchisme est un de ceux-là. Si je suis anarchiste, j’invente ce sobriquet pour me décrire : anarcho-futuriste. C’est que je considère l’anarchisme au-delà de l’utopie, puisque le futur semble déjà plus gravé dans le réel que l’utopie. Mais l’humanité a des devoirs à faire, très longs et même pénibles, c’est tout ce que je peux concéder.

C’est que depuis quelque temps, il me semble que je suis un aimant à anarchistes de tout acabit. Et même moi qui suis bien ouvert à leurs concepts, je ne réussis pas à m’y glisser, même seulement pour le plaisir! Ça bloque puisque mon air et le leur ne semblent pas avoir la même consistance. Je considère que la réalité est une matière qui ressemble à de la pâte à modeler, pour eux c’est un mur à casser et ils s’arment de théories-bulldozers.

C’est bien agréable de jouer aux petites autos et aux camions dans un carré de sable, mais il faudrait bien regarder ce qui se passe plus haut et plus large… Ce qui m’amène à des concepts comme le « parentage » (sorte de diabolisation du lien naturel entre l’enfant et ses parents), à des positions contre la procréation et à l’extinctionnisme (le terme est assez clair!), concepts que me fournit la lecture d’un blogue qui se qualifie d’anarcho-pragmatiste. Leur logique masque à peine l’odeur… À la base, tout ça me donne l’impression d’être les résultats angoissés de quelques individus mal dans leur peau, asociaux, tant au niveau amical qu’amoureux, qui justifient leur mal-être en échafaudant des théories abracadabrantes, et en prenant soin d’avoir toutes les réponses aux contre-arguments avec la tactique qui consiste à essayer de prouver à l’interlocuteur l’illusion absolue dans laquelle il est plongé. On pense obligatoirement à l’allégorie de la caverne de Platon…

Comment sérieusement considérer avoir à coeur le concept de liberté quand tu proposes des théories qui confrontent extrêmement la liberté de la très grande majorité des êtres humains, tant au niveau du bonheur simple de désirer un enfant en connaissance de cause que de celui essentiel de simplement vivre? J’avoue qu’il y a quand même un émerveillement à observer ces conceptualisations, mais pour faire un parallèle avec une oeuvre d’art, c’est très très coûteux. Et ça ne me dérange pas qu’ils soient assez conséquents pour en payer individuellement le prix : qu’ils crèvent vieux et seuls ou même tout de suite si le poids de notre monde est si insoutenable!

Je ne peux pas m’empêcher de penser aux sectes où les gourous réussissent à entraîner leurs disciples dans la mort à force de persuasion. La différence avec les anarchistes, c’est que pour eux la persuasion se trouve dans la titillation de l’intelligence. La pensée gravite dans des sphères bien plus agréables que les simples considérations domestiques, pour ne nommer que celles-là, et leur monde s’en trouve changé : le problème c’est que l’écart entre ce nouveau monde et celui effectif est énorme, d’où le déficit de liberté individuelle qu’on nous rabâche de toutes les manières.

Et c’est bien là où ma vision est différente de la leur : je crois que la liberté individuelle se doit d’être en équilibre avec la liberté collective; et si la liberté collective a encore besoin majoritairement de l’État, il faut individuellement le respecter (d’où l’idée de l’anarcho-futurisme). On a beau vouloir faire avancer la liberté individuelle, il y aura toujours la collective pour la freiner de quelques manières que ce soit. Et à tenter de faire entrer l’anarchie par la gorge en forçant, il y a de fortes chances qu’on la vomisse, ce que je suis pas mal en train de faire…

(Photo : gillespineault)

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L’éducation comme arme contre le capitalisme sauvage

Sur le blogue de David Gendron, je suis tombé sur le terme « PARECON », via un commentaire de François Tremblay. J’ai cherché un peu et j’ai trouvé un texte sur Zombie qui en explique les grandes lignes. En gros, c’est un système économique basé sur des principes anarchistes (pas libertariens); « y sont bannis le marché (capitalisme), la planification centrale (social-démocratie, communisme centralisé, etc.), toute hiérarchie du travail (patron vs employé) et le profit. » C’est « un système décentralisé, démocratique, participatif et égalitaire. » Et c’est en fait une réponse aux critiques de la pensée anarchiste (du côté libertaire), question de donner du concret, de la chair autour de l’os.

À la suite de ce billet, il y a quelques commentaires. Un de ceux-là m’a beaucoup parlé :

Je trouve louable l’initiative PARECON, née d’une recherche d’équité dans un esprit anarchiste. Je n’y adhère pas pour 2 raisons : 1) cette construction idéologique va à l’encontre de la tendance naturelle humaine à systématiquement se laisser guider par ses instincts, lesquels nous poussent vers la facilité et l’individualisme. 2) L’individualisme débridé que nous connaissons aujourd’hui détruira peut-être le monde qui l’a vu naître, mais il ne sera jamais remplacé par un système intellectualisé trop complexe. Le résultat de la destruction du système actuel résulterait plutôt d’une copie neuve et identique de lui-même, condamné à se répéter tant qu’il n’aura pas appris à se transformer de l’intérieur. Le capitalisme n’est pas une création de l’intellect, mais bien une « herbe sauvage » qui ne veut que croître sans cesse, tel l’ogre affamé dont l’estomac à été remplacé par une pompe au mouvement perpétuel. Le capitalisme ne demande pas l’éradication, mais seulement d’être bridé et contre-balancé (sic) par une force d’opposition. La solution ? Instaurons un système d’éducation publique qui donnera la chance à chacun de développer son plein potentiel sans limite (sic) aucune, qui développera l’indépendance d’esprit et la critique constructive, et qui permettra à tous de devenir ce qu’ils veulent vraiment, à l’intérieur d’un cocon protecteur, à l’abris (sic) des interventions extérieures de la société jusqu’à, disons, 25 ans. N’essayons pas d’imposer nos vues sur la jeunesse, laissons-là (sic) plutôt contrôler sont destin seule. Faites ça, et je vous garantis un monde meilleur en 2 générations. Ceux qui d’entre-nous (sic) valorisons l’appât du gain et l’amas de capitaux comme seuls moteurs de la vie quotidienne sont déjà trop atteints pour changer d’eux-mêmes. Et comme la nature s’opposera, et triomphera TOUJOURS des solutions forcées et compliquées, PARECON restera une autre belle idéologie condamnée à mort le jour même de sa naissance, et qui si elle se développe, le fera tel le cancer sur l’organisme qu’est la société, comme le communisme pur et dur avant elle.

Tout revient à ça, encore et toujours : l’éducation. Et qui dit éducation, dit évolution. Si on regarde en gros l’histoire, on remarque une lente évolution des systèmes qui régissent la société. La démocratie qui semble aujourd’hui prendre toujours de plus en plus d’ampleur était considérée par beaucoup de philosophes d’antan comme étant un des pires systèmes. Notre époque est propice à la démocratie, même si cet idéal est loin d’être atteint. Et pour ce qui est de l’anarchie, c’est du futurisme, ce vers quoi nous devons tendre.

Pour faire une comparaison simple avec la vie d’un humain, je crois que l’humanité est dans son adolescence. Elle est excitée par les gadgets, a encore besoin de se faire dire quoi faire par ses parents, et surtout, il lui manque encore un peu d’éducation pour s’affranchir. Donc, qui se demande encore quel devrait être le programme numéro un des anarchistes de toutes les tendances? Malheureusement, ce n’est pas demain la veille que l’État lâchera prise sur l’éducation.

Il faudra faire avec.

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Un plan vigilant pour gagner notre liberté

Toujours en lien avec le political compass, j’aimerais poursuivre mon commentaire sur les options politiques — qui se base sur les notions de l’autoritarisme, de l’anarchisme, de la gauche et de la droite — et ainsi projeter ma pensée vers le futur. Au départ, avec mon texte « Pourquoi je ne suis pas libertarien (maisque je suis quand même quelque peu sous le charme) », j’ai exposé une lecture quand même assez positive du libertarianisme (qui est beaucoup dans l’air du temps) et élaboré une critique qui s’appuie sur le problème à court terme de cette philosophie, s’il y avait un changement sociétaire radical dans cette voie, qui prend pour acquis la responsabilisation de la population et ne propose pas de plan autre que de l’optimisme aveugle : faites-nous confiance, tout va bien aller si on fait disparaître l’État!

Aussi, avec mon texte « Uppercut de la gauche vers la droite : un peu de philosophie politique », j’ai désigné l’ennemi à abattre, le néo-libéralisme, en le plaçant en contradiction avec les positions libertariennes, anarcho-socialistes et socialistes. Donc, deux textes sur les droites en guise de point de départ pour un projet de société que je vais vous exposer plus en détail dans les lignes qui vont suivre.

Avant tout, pour le bien de l’exercice, je me dois de nous placer collectivement dans le quadrant et, pour se faire, je m’appuierai sur le résultat le plus près de nous, c’est-à-dire notre Très Cher Premier Ministre Stephen Harper. Étant donné qu’il n’a pas été élu majoritairement et que le Québec semble assez différent du reste du Canada, je nous placerai donc tout près du centre (voir le graphique plus bas), dans la partie droite en haut, plus près du milieu par rapport à l’axe gauche-droite et assez haut par rapport à l’axe étatisme-anarchisme, parce que bien sûr l’État est encore très présent dans nos vies, au grand dam de plusieurs, dont moi.

Ce positionnement est le plus objectif que je peux fournir, étant donné l’absence de données fiables et l’impossibilité de faire passer ce test à la société québécoise (ou plus largement aux sociétés occidentales) comme entité personnelle unique… J’aurais pu placer le point de départ ailleurs, à peu près dans coin-là, j’en conviens, c’est hasardeux : je l’ai choisi en tenant compte des autres points déjà existants. Même si ça semble pour certains assez accessoire, je tiens à utiliser ce graphique majoritairement pour sa qualité démonstrative, même si le test et le site d’où il provient ne semblent pas faire l’unanimité. Par contre, je maintiens ce choix de positionnement dans cette partie du quadrant, car il est clair que notre système est contrôlé en grande partie par le corporatisme, plus près de la droite néo-conservatrice que de la gauche socialiste, il faut l’admettre; et les positions anarcho-socialistes et libertariennes ne trouvent aucune correspondance comparative dans des sociétés actuelles, encore moins dans la nôtre.

Donc, étant donné que les forces néo-libérales tentent de tirer la société de leur côté en se drapant pourtant de plus en plus de la philosophie libertarienne pour asseoir leurs acquis et leurs privilèges avec l’aide de l’État, ce qui est un non-sens, je crois qu’il serait urgent de se sortir de ce piège qui pourrait être fatal pour la cohésion économique, sociale et environnementale. Le plan que je propose, comme le démontre bien le graphique, serait de bifurquer à gauche tout en se débarrassant tranquillement de la coercition étatique, pour ensuite de se rendre vers une plus grande liberté.

Ce plan ne pourrait se faire à court terme, c’est évident, car il faut du temps pour armer la population du sens de la responsabilité. Alors, ce premier mouvement idéologique vers l’anarcho-socialisme modéré aurait pour but de mettre au diapason la population avec ses élites (débarrassées de ses avantages étatiques), si possible, de concerter les instances mondiales pour la survie de l’espèce humaine, en tentant aussi d’écorcher le moins possible la faune et la flore, et d’éduquer la population à une plus grande démocratie, à une conscience citoyenne, que la technologie permettra à coup sûr si la population s’en empare. C’est l’importance et la réussite de cette étape qui feront en sorte de nous mener ensuite vers la liberté.

Parce que si nous nous dirigeons trop rapidement vers l’anarchie et le libre marché, je crois que la tendance lourde des multinationales se poursuivra de plus belle (de par leur pouvoir déjà accumulé) et finira de gaspiller les ressources et d’engloutir les richesses dans l’inertie des coffres-forts, réels et virtuels. Sans la responsabilisation des citoyens (qui pourront par des mouvements de masse influencer l’éthique de l’entrepreneuriat et du commerce), il ne pourrait y avoir de justice dans l’anarchie, car l’accumulation de mauvaises décisions populaires et le laisser-aller ne pourront qu’avantager l’opportunisme des mieux nantis, armés de la convergence propagandiste des médias intéressés et prompts à se servir de la couardise des masses pour arriver à leurs fins. Notre société en est déjà un bon exemple : la course folle que nous impose nos élites afin de payer pour des désirs personnels très secondaires, en faisant fi des répercussions à long terme, avec l’intention implicite de maintenir artificiellement le système économique actuel en vie est un non-sens.

Pour ce qui est du but à atteindre, je le place au centre en bas, car il représente un équilibre sain à mon sens, et je ne saurais choisir entre les deux extrêmes anarcho-socialistes et libertariens dans une utopie si lointaine : chaque petit pas dans ce sens nous rapprochera d’une réponse plus pragmatique. Pour ceux qui me diraient qu’un vrai équilibre se trouverait dans le milieu de la cible, tout près de notre position actuelle, je leur dirais que le haut du graphique représentant les philosophies autoritaristes nous ont déjà bien prouvés leur inefficacité, et qu’il est temps de voir où l’humanité peut bien se rendre si on lui offre l’opportunité de se dépasser au niveau social avec l’alternative anarchiste. Qui voudra relever le défi?

Maintenant, la première tâche serait de changer la « mise en marché », l’imagerie de l’anarchisme, car je ne crois pas que le drapeau noir et le « A » entouré d’un cercle puissent plaire à la population en général…

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