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Discrimination, racisme, xénophobie et autres confusions

Par Renart Léveillé

[Avertissement : lorsque vous lisez un texte, si vous n’êtes pas assez intelligent pour l’analyser et en comprendre les sens et les subtilités, comme l’ironie et le sarcasme, abstenez-vous donc de le commenter…]

 

C’est bien connu, je suis le pire des racistes. Puisque « pro-laïcité » et « athée » en sont des synonymes avérés, paroles de quelques génies autoproclamés. Dans son habitat naturel, qu’il voit sombre alors qu’il est en vérité rose nanane sucé longtemps, le raciste remet en question maladivement tout ce qui touche à la religion, ce qui est mal, par définition. Le Mal.

La preuve, je trouve vraiment très drôle l’image qui suit (en fait, je ne la trouve pas juste drôle) :

(Traduction maison, sujette à caution : La religion, c’est comme un pénis. C’est bien d’en avoir un. C’est bien d’en être fier. Mais S’IL VOUS PLAÎT, ne le sortez pas en public pour le montrer à tout le monde, et, DE GRÂCE, ne tentez pas de le faire avaler de force à mes enfants.)

Aussi, à la place d’écrire que quelqu’un est pour la défense du français au Québec, on peut écrire qu’il est raciste, ça va plus vite. Ça va moins vite d’écrire « xénophobe », mais ça fonctionne aussi. Petit tuyau, les chasseurs de racistes devraient regarder du côté de Charles Castonguay, un traître anglophone ontarien, qui avoue bien candidement qu’au Québec le français dégringole! alors qu’en vérité il n’y a vraiment, mais vraiment aucun problème (ce que je suis incapable de me rendre compte, comme tout bon xénophobe, ça va de soi).

En plus, je suis pour la discrimination (ici, il faut vraiment bien suivre). Je serais d’accord pour qu’on écrive « une loi qui prohibe la discrimination » arbitraire (Arbitraire : « Qui provient de la volonté, du caprice, du bon plaisir de qqn. » « Qui ne tient pas compte de la réalité, de la raison. » « Qui est choisi sans règles précises; qui ne relève d’aucune règle. »). Donc, pour ce qui est du marché du travail, je suis d’accord qu’à l’embauche il y a toujours lieu de faire de la discrimination, puisqu’il faut faire des choix et y aller par élimination. Par exemple, je crois que le critère de beauté est acceptable pour un patron de bar lorsqu’il a à choisir une nouvelle serveuse, et même de choisir exclusivement des femmes pour ce travail, comme des hommes pour le travail de « bussboy ». Et encore, et c’est là que ça rejoint le racisme comme c’est pas possible, je crois que « cela justifierait d’emblée le refus par l’État d’engager des gens incapables de ne pas arborer des signes religieux ostentatoires pendant qu’ils travaillent », dans le sens où l’État choisirait la laïcité stricte (mais bon, il serait raciste, alors…). Je sens vos regards froids en direction de ma turpitude.

Afin de finir de mettre la table à l’opprobre général en ma direction, je vous avoue avoir lu un article relatant une étude qui indique que l’adolescence (le règne de l’impulsivité) se termine à l’âge de 22 ans, et de tout de suite avoir fait un lien avec le sujet des permis de conduire délivrés à partir de l’âge de 16 ans. J’ai aussi pensé à la petite Bianca Leduc, fauchée par un testostéroné adolescent en 2007. Qu’est-ce que c’est si ce n’est pas un heureux mélange de discrimination et de xénophobie, alors qu’en plus j’entame la quarantaine? Et, si on pouvait trouver le moyen de classer les tranches d’âge par races, je serais encore plus raciste!

Mais le comble de mon ignominie, c’est d’avoir le goût d’acheter le livre du scientifique Stephen Hawking, « Y a-t-il un grand architecte dans l’Univers? », qui explique sans rire que « L’Univers n’a pas besoin de Dieu pour exister ». C’est raciste parce qu’il a des gens de toutes les races, la mienne incluse, qui croient le contraire et qui ne veulent surtout pas se faire contrarier, ce qui est bien normal. C’est aussi de la xénophobie parce qu’il y a des étrangers qui sont croyants. C’est discriminatoire, parce qu’en m’acoquinant de cet avis (minoritaire en plus!), je fais une séparation entre un groupe social et un autre, j’ostracise les croyants.

Je ne devrais même pas avoir le droit d’offrir gratuitement mes écrits sur le web.

(Image du haut trouvée là : http://www.webdesigncore.com/2009/12/15/30-unusual-and-incredible-surreal-artworks/)

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La défense du français comme catégorie de racisme

Par Renart Léveillé

Le sujet de la défense du français est clairement un sujet glissant. Parce que dans la défense, il faut absolument prendre parti, avoir un parti-pris, et ainsi en quelque sorte délaisser. Mais est-ce que ce délaissement, cet abandon est pour autant un aveu de « détestation »?

C’est ce que semblent penser beaucoup de gens, dont l’attaché politique Pierre Morin, très présent sur Twitter, déclarant que le Parti Québécois (dont on connaît son implication pour la défense du français) « fait de la détestation des anglos un dogme ».

De l’accusation de détestation à l’accusation de racisme, il n’y a qu’un pas. Et il a presque franchit ce pas dans la mesure où il a fait un rapprochement pas même subtil entre le PQ et le Front national (parti à l’aura raciste, s’il faut le préciser). À mon avis, nous ne sommes pas loin de ce que j’ai appelé dernièrement la « godwinisation des débats », « l’aveuglement volontaire », « la lecture assistée par la mauvaise foi ». S’il faut que je le décrive aujourd’hui autrement, j’irais avec cette formule : la triste pratique de l’« extrémisation » des positions de l’adversaire.

Mais le plus bel exemple de ce glissement, c’est une discussion que j’ai eu sur Twitter à la suite du passage des deux natifs montréalais unilingues anglophones d’Epic Meal Time à TLMEP, que j’ai vertement critiqué dans mon billet « Epic Fail Time ». En réaction aux réactions très négatives des gens sur le fil #TLMEP face à ces unilingues anglos, une « Franco-Ontarienne contre l’indépendance du Québec! » a essayé de me convaincre que c’était du racisme :

ceux qui se pensent supérieurs aux anglais (dont une majorité de Québécois) sont racistes

Ce à quoi j’ai rétorqué, pour pointer le ridicule de la chose :

À ce compte-là, est raciste quiconque est en désaccord avec un autre.

La discussion a durée assez longtemps, mais, entre autres, pour tenter de gagner son point, elle m’a référé à une partie de la définition du racisme selon l’Office Québécois de la langue française (ce qui est assez ironique, puisque, en arrivant sur la page d’accueil du site, à la Une il y a un article s’intitulant « Faire du français « la langue prioritaire »). Finalement, après quelques recherches, je me suis rendu compte que la partie qu’elle me copiait-collait (visiblement de ses notes de cours) ne se retrouve plus dans la définition du grand dictionnaire terminologique de l’OQLF (?), mais seulement sur le site du Mouvement estrien pour le français, sur une page qui date de 2001 :

on qualifie de raciste toute personne qui ne croit pas à l’égalité en droit des êtres humains

Il serait intéressant de savoir pourquoi cela ne se retrouve plus dans le dictionnaire terminologique. Cela serait-il donc sujet à caution? À la place, on pointe une remise en question du concept même de « race humaine », ce qui dirige un peu, il faut l’avouer, les suppositions. (Màj : finalement, le passage en question se retrouve dans la section « Note(s) » à la suite de la définition du terme « hégémoniste ».) Quand même, il faut vraiment faire une extrême contorsion mentale pour réussir à faire un lien entre cette définition et la critique contre l’unilinguisme anglophone au Québec, ce qui n’est vraiment pas une critique générale contre les anglophones, et il faut vraiment que je le spécifie pour ceux qui n’auront pas encore compris. Si je voulais me faire un peu d’argent, je parierais que je vais encore me faire dire en commentaire que je suis anti-anglophone…

Je ne dis pas, s’il était question de faire la promotion du retrait du droit de vote des anglophones (ce qui serait bien sûr une absurdité), mais là, il est seulement question de donner son opinion, de ne pas être d’accord avec un état de fait. Est-ce que la notion de « l’égalité en droit des êtres humains » empêcherait toute possibilité de critique, même très négative, envers les Québécois anglophones qui ne parlent ni ne comprennent le français? Non. Parce que la notion de « l’égalité en droit des êtres humains » concerne seulement la discrimination, ce que la critique n’est pas, étant assujettie à la liberté d’expression. De toute façon, les francophones n’ont pas besoin d’ostraciser les unilingues anglophones, ils le font très bien par eux-mêmes dans un sens.

Et, bien sûr, je ne joue pas à l’autruche en niant qu’il existe des gens que l’on peut réellement traiter de « racistes» envers les anglophones. Je sais très bien qu’ils existent, et je ne me gênerai jamais pour les dénoncer. Mais il faut savoir de quoi on parle. Et de ne pas mélanger les cartes. Par exemple, qu’on soit d’accord ou non avec l’idée d’étendre les dispositions de la loi 101 aux cégeps, cette idée n’est pas du racisme dans le sens linguistique.

En fait, la sauvegarde du français ne prend pas du tout sa source du racisme, d’un rejet de l’autre. Mais c’est bien pratique d’essayer de le faire croire pour ceux qui sont contre l’idée d’être proactif dans ce sens. Ça me surprend toujours de le constater, parce que la défense du fait français est un projet positif. C’est ce qui devrait tous nous lier. C’est ce que nous devrions tous défendre jalousement pour espérer durer dans ce monde carré qui tend à nous avaler tout rond.

L’anglais comme langue mondiale commune est une bonne chose. Mais comme toute bonne chose, il y a de mauvais côtés. Est-ce que de les pointer est pour autant raciste?

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Les langues : derniers remparts de l’uniformisation culturelle?

Par Renart Léveillé

Le blogue Antagoniste publie de temps en temps des statistiques concernant le poids média des nouvelles au Québec et dans le ROC ainsi que des « Top 5 Twitter » des mots, noms et « hashtags » (mot-clic?) les plus populaires au Québec, au Canada, aux États-Unis et dans le monde. Mais je ne pointerai ici que la partie concernant Twitter.

Pour la semaine du 15 au 21 mars 2011, pour le Canada, les États-Unis et le monde, la première et la deuxième position sont, dans l’ordre, occupées par « Rebecca Black » et « #threewordstoliveby ». « Nate Dogg » est en troisième position pour ce qui est du Canada et des États-Unis et se retrouve en quatrième position dans la section « Monde ». « #supermoon » est en cinquième au Canada, quatrième aux États-Unis et troisième dans le monde. Les États-Unis et le monde partagent « #ificouldiwouldbringback » en cinquième position alors que cet « hashtag » ne se trouve pas dans le « Top 5 » du Canada, mais bien plutôt « #100factsaboutme », en quatrième position.

Pour ce qui est du Québec, les cinq positions sont occupées, en ordre, par « Lachute », « Ryan White », « Justin Trudeau », « Subban » et, finalement, « Jean Lapointe ». Comme vous pouvez le constater, il n’y aucune concordance avec le Canada, les États-Unis et le monde. Et si on regarde d’autres billets de cette série, parues auparavant sur le même blogue, c’est pratiquement toujours le même genre de concordances entre le Canada, les États-Unis et le monde, et de non-concordances avec le Québec.

Ne me dites pas que ça ne vous sonne pas une cloche? Qu’il n’y a pas de lien à faire entre l’anglais comme langue de la mondialisation et l’uniformisation culturelle? Cela dit, en prenant bien sûr l’idée du culturel dans son sens le plus large, soit ce qui est « Relatif aux comportements sociaux » (via le dictionnaire du programme de correction Antidote).

C’est certain que cette comparaison se fait dans le contexte d’une plateforme qui ne rend pas compte de toute la teneur de ce qui intéresse les gens, et des échanges d’informations au Québec, au Canada, aux États-Unis et dans le monde. Par contre, cela reste un bon indicateur de ce que nous réserve l’avenir. La langue anglaise sur le web semble vibrer au diapason du monde alors que, par exemple, le français cultive les particularismes, enfin, encore. Parce que c’est bien évident que les cinq positions québécoises relatées plus haut ne représentent pas grand-chose pour nos cousins de l’Hexagone et des autres pays francophones.

Est-ce que c’est une bonne nouvelle ou est-ce que c’est une mauvaise nouvelle? Pour ma part, dans l’optique de la diversité culturelle, ce n’est pas une très bonne nouvelle, enfin, surtout pour ce qui est des pays de langue anglaise. S’il se développe une culture anglo-saxonne monolithique de plus en plus en phase avec les États-Unis, son poids deviendra de plus en plus lourd dans le contexte d’une mondialisation s’appuyant sur le caractère utilitaire de cette langue. Et on peut se demander si c’est profitable pour tout le monde, culturellement.

Quoi qu’il en soit, quand le monde entier connaîtra la langue anglaise, il faudra espérer que les gens garderont jalousement leurs langues maternelles. Parce qu’à partir de ce moment-là, il faudra craindre l’unilinguisme anglophone, car tout sera en place pour qu’il gonfle et gonfle, jusqu’à uniformiser culturellement pour de bon l’humanité. En espérant aussi que la proximité physique entre les gens continuera d’influer sur la culture. Mais dans un monde où la communication se rit exponentiellement des frontières, vouloir en deviner davantage relève de la science-fiction.

(Image : bartvandamme)

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Le multiculturalisme pour les nuls (et autres considérations)

 

Par Renart Léveillé

 

Le multiculturalisme n’est pas synonyme de tolérance. L’anti-multiculturalisme n’est pas synonyme de racisme ni de xénophobie. Et en discuter ne devrait pas être tabou. Le multiculturalisme représente le message étatique de la politique d’immigration. Le message, en amont et en aval. Autant pour ceux qui accueillent que pour ceux qui sont accueillis.

Pour ce qui nous concerne, c’est la position du Canada, celle du Québec se retrouvant sous le vocable « interculturalisme » (et je n’essayerai pas de faire ressortir dans ce billet les différences entre les deux, et s’il y en a). Bien que l’État québécois ait son « mot à dire » sur l’immigration, les immigrants débarquent officiellement au Canada. Alors, le message multiculturaliste a toujours priorité.

Le multiculturalisme, c’est donner le message aux nouveaux arrivants qu’ils peuvent « conserver leur identité », ce qui, dans un contexte d’intégration, n’est pas très loin de l’absurdité (la citation qui précède provient du site « Citoyenneté et Immigration Canada »). Dans l’optique que l’identité d’une personne est en constante évolution, le message du multiculturalisme est donc de ralentir cette évolution, voire de l’empêcher — comme dans le cas des immigrants qui s’enferment dans des ghettos culturels et qui n’ont aucun lien avec la société d’accueil.

Et internationalement, les critiques se font de plus en plus entendre. Après Nicolas Sarkozy et Angela Markel, c’était au tour de David Cameron de fustiger cette politique :

Avec la doctrine du multiculturalisme d’État, nous avons encouragé les différentes cultures à vivre des vies séparées, séparées les unes des autres et coupées de celle de la majorité. Nous avons échoué en ne proposant pas une vision de la société à laquelle ces communautés auraient pu se sentir appartenir. Nous avons toléré des communautés pratiquant la ségrégation et se comportant de manière totalement opposée à nos valeurs.

 

Et il faut ajouter que ce discours se place dans un contexte autrement plus difficile que le nôtre, où, par exemple, les intégristes sont beaucoup plus proactifs qu’ici. Mais ce n’est pas parce que ça va beaucoup mieux ici qu’en Europe qu’il faut pour autant balayer la question sous le tapis.

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Mais ici, au Québec, le piège du multiculturalisme s’amplifie par la problématique du fait français. Dans ces conditions, il est aisé de faire un lien entre le multiculturalisme et le multilinguisme (synonyme de bilinguisme). On en vient même à se demander si c’est seulement un hasard si l’ancien Premier Ministre du Canada Pierre-Elliot Trudeau, celui qui est derrière la politique du multiculturalisme, a déjà tenu les propos suivants :

Quand tous les Québécois seront bilingues, ils ne verront pas d’objection à passer à l’anglais.

 

Il est clair pour moi que son idée a déjà fait un bon bout de chemin. Les exemples fusent, on ne compte plus les francophones qui préparent le terrain à ce possible changement de paradigme linguistique. Et P.E.T. ne se doutait même pas comment la mondialisation allait l’aider…

Parlant mondialisation et multilinguisme, cet extrait trouvé sur Wikipédia est assez représentatif du contexte actuel :

 

Il existe une politique officielle du multilinguisme dans l’Union Européenne. Cependant, les résultats de cette politique ne sont pas aujourd’hui à la hauteur de l’espérance : livrés à eux-mêmes, les Européens se sont tournés logiquement vers la langue la plus utile, l’anglais […]

Cette attitude, pourtant prévisible, a grandement contribué à faire progresser l’influence de cette langue sur le plan mondial. Ironiquement, le laisser-faire européen a surtout profité aux intérêts commerciaux des États-Unis d’Amérique, en leur permettant d’exporter leurs chansons, leurs films et leurs livres, aux dépens des langues nationales et régionales de l’Europe, mais aussi aux dépens de la richesse du patrimoine culturel européen.

 

Ici, il est bien clair que ce phénomène est beaucoup plus marqué, dans cette américanité du nord hautement anglo-saxonne. Et quand le multiculturalisme se propose « d’aider les immigrants à apprendre une des deux langues officielles », on se retrouve véritablement avec des citoyens qui baragouinent l’anglais lors de leurs rares excursions hors de leurs ghettos. Et bien sûr aussi ceux qui s’intègrent à la minorité anglophone. Une chance que ce n’est pas la totalité, et que ça tend à s’améliorer pour la génération suivante.

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Donc, je ne donne pas ici dans le fatalisme. Mais je me dresse contre ceux qui ne voient pas le piège, ceux qui font de l’aveuglement volontaire. Et je n’écris pas non plus en réaction à de mauvaises expériences personnelles avec des immigrants. C’est plutôt le contraire. La garderie de ma fille est tenue par un couple d’Arabes et tout va très bien. (Par contre, alors que nous magasinions les places de garderies, nous avons remarqué que toutes les garderies disponibles étaient tenues par des gens d’origine arabe. Serait-ce le signe d’une certaine peur de beaucoup de parents de notre région? En tout cas, le lien est facile à faire…)

Et, pour terminer ce billet, je vais me permettre de raconter une anecdote. Elle illustre très bien un exemple d’intégration réussie (en tout cas, pas vraiment dans l’optique du multiculturalisme…).

En revenant de la garderie, en sortant de la voiture, ma fille de deux ans pointe le ciel et dit : manjou nouné! (Elle dit « mangou » pour « manger » et « nouné » pour « lune »). J’ai trouvé ça drôle, mais n’ai pas compris le sens sur le coup. Juste avant de me coucher le soir, j’ai fini par comprendre : comme la lune n’était pas pleine, elle pensait que le bout qu’elle ne voyait pas avait été mangé!

Le lendemain soir, quand je suis allé la chercher à la garderie, j’ai raconté l’anecdote à la dame qui s’en occupe. Elle a rétorqué, avec le sourire :

— Non, non, non! Je ne parle pas aux enfants en arabe! Je ne parle même pas arabe avec mes propres filles, elles ne le parlent pas de toute façon!

(Elle vient d’un pays arabe qui a comme deuxième langue le français et son conjoint non, visiblement, avec son fort accent.)

Encore, pour ce qui est de la religion, si elle est croyante rien ne m’indique qu’elle soit pratiquante. Vous pourrez me lancer autant de tomates que vous le voudrez, mais je dois avouer que c’est la situation idéale. Si ma fille a un rendez-vous avec Dieu, j’aimerais qu’elle le rencontre en toute connaissance de cause… Et je ne veux personne pour lui apporter l’existence de Dieu comme une vérité toute faite, ce qui est bien sûr le modus operandi de la perpétuation du religieux.

Et c’est ici que ça se termine, enfin, pour l’instant.

 

(Photo : appoulsen)

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La loi 101 sur les dents

 

Je dois bien être le 101e (minimum) à pondre un texte en réaction à la sortie de Maxime Bernier, qui ridiculise la portée ancienne, actuelle et future de la loi 101 sur la sauvegarde et la pérennité de la langue française au Québec. Qu’à cela ne tienne, je vais ajouter ma brique au rempart qui continue de se bâtir entre les amants du je-m’en-foutisme et les gens capables de perspective dans ce monde linguistiquement chambranlant, pour ne pas dire bancal. Et, même si la tentation est forte, je vais m’abstenir de ridiculiser en retour ce charmant monsieur…

Dans les derniers jours, j’ai discuté à la suite d’un billet paru sur Anarcho-pragmatisme : « J’appuie totalement Maxime Bernier… » Tout comme l’auteur du blogue, je pense que l’abolition de la loi 101 ne pourrait logiquement se faire qu’à la suite de l’accession du Québec à la souveraineté. Si un jour le peuple a assez de courage pour faire le grand saut, nul doute qu’il prendra grand soin de sa destinée linguistique sans avoir besoin de la législation actuelle. Mais pour l’instant, on remarque plus une tendance à glorifier la mondialisation anglicisante, le franglais et autres discours d’ouverture qui balayent sous le tapis la précarité du français, pour ne nommer que cette langue-là, et pour ne pas réexpliquer encore et encore le contexte nord-américain dans lequel nous baignons.

Un commentateur a soulevé un point qui ne semble pas avoir été soulevé ailleurs (enfin pas depuis la sortie de Colonel Jos Louis), soit les conséquences démographiques de l’adoption de la loi 101, donc le départ de beaucoup d’anglophones du Québec. Ce que j’en comprends, c’est que ce fait illustre en même temps une supposée dérive étatique et est un argumentaire se basant sur une victimisation à sens unique des anglophones, ce qui élude comme par magie ce qui a mené à ce mouvement de défense du fait français. Et il doit bien y avoir un fond de ce réflexe chez Maxime Bernier et les autres de sa trempe, à différents degrés, malgré un discours soi-disant pragmatique basé sur la sacro-sainte liberté de choix.

Ce que je crois, c’est que la dynamique linguistique au Québec devrait et aurait dû toujours être arrimée à l’idée de respect. Mais l’Histoire nous a démontré que le respect de la majorité linguistique francophone (dans une perspective provinciale) n’était pas de mise à l’époque, autant individuellement que collectivement du côté de la communauté anglophone. Cette communauté qui avait en plus le quasi monopole des pouvoirs économiques. Avec la loi 101, les francophones se sont « payés » du respect qu’ils n’auraient pu obtenir autrement. Si des anglophones sont partis parce que ce respect leur faisait trop mal, bon débarras! De toute façon, il y a pratiquement toujours des conséquences à un changement, il faut vivre avec. Et imposer le respect, ce n’est pas non plus comme imposer l’insupportable.

Du commentateur désigné plus haut, je retiens quand même ces propos, qui me semblent bien sages pour quelqu’un qui est contre cette loi :

Si vous êtes en désaccord avec la loi 101, svp, ne jetez pas le blâme sur la formation politique ayant fait passer cette loi. […] les élus ne sont qu’une interface entre le peuple et ses moyens publics. Les élus d’un peuple sont à l’image dudit peuple … et de sa volonté.

Et ce qui est clair, c’est que la volonté de préserver cet acquis est encore très forte. Mais il faut rester vigilant, on tente de salir ce respect par tous les moyens, surtout par la rhétorique. À ceux qui rétorqueront que le respect ne peut pas être décrété par une loi, je ferai remarquer que nous étions précédemment « tenus en respect » par le pouvoir monétaire, qui est tout comme une loi, mais en plus arbitraire.

 

(Photo – détail : tudor)

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L’anglomania chinoise

Chinese childrens

Je publiais dimanche dernier sur mon blogue un petit billet au sujet des langues, que je terminais comme suit :

ce sont de bonnes petites raisons, avec celles plus grandes culturelles, pour espérer que jamais la planète se contente d’une seule langue, que ce soit l’anglais ou le mandarin ou toute autre.

En commentaire, moi et Tym Machine nous discutions du taux de pénétration de l’anglais dans le monde. Il m’avait écrit :

l’anglais a pas mal atteint son niveau de pénétration maximal de nos jours et que si le mandarin était aussi facile à apprendre que l’anglais, ce serait la dernière chose “red hot”, le buzz de l’heure, tout le monde voudrait apprendre le mandarin parce que les chinois, économiquement parlant, tiennent les États-Unis et bien d’autres pays par les couilles. Le monde leur appartient quasiment à toute fin pratique.

Et je tombe, via un gazouillis (Twitter) de @altuslogic, sur une partie de conférence de l’entrepreneur Jay S. Walker qui explique que 2 milliards de personnes dans le monde apprennent en ce moment l’anglais. Mais le plus étonnant c’est quand il explique la situation chinoise, qui est en train de devenir, et par loi, la plus grande nation parlant anglais. Et il nous montre des cours d’anglais en plein air, avec des milliers de personnes qui répètent des trucs comme : i wanna speak perfect english! I wanna change my life!

Inutile d’écrire que cela serait pratiquement impossible au Québec, même si cela se passe, mais autrement, par la proximité. Et sur le web, nous sommes tous virtuellement proches. Je me demande aussi comment les Français voient la situation. Est-ce qu’il y en a pour avoir peur de la pénétration de l’anglais en France?

Pour ma part, et je le répète encore, c’est de l’unilinguisme anglophone dont j’ai peur, étant donné que le statut de l’anglais comme langue commune mondiale est une bonne raison pour un anglophone unilingue de ne pas apprendre la langue de la majorité, comme il y en a au Québec. Et quand la totalité (enfin, la presque…) du globe parlera anglais, gageons que les langues extra-anglophones seront de plus en plus folkloriques…si ce n’est pas déjà commencé.

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