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La théocratie implicite américaine, mais ça suffit…

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Ceux qui comprennent l’anglais onctueux et phraséologique prendront connaissance de ce récent discours du président Obama qui déclenche ma réflexion du moment. Cela porte sur cette tuerie « cinématographique » d’Aurora (Colorado) où, comme d’habitude, on ne nous signale ni l’origine du flingue, ni celle des munitions et des explosifs, ni l’identité de l’armurier (pourtant aussi sciemment coupable que le tireur). Sur un ton qu’il n’adoptait jamais en 2008, celui du prêcheur hautain et faussement tranquille, le président nous pose le fait divers criminel du moment comme un mal absolu, insondable, impalpable, une fausseté indicible. On nie ouvertement et frontalement que l’Amérique soit cela. Aucune analyse sociétale de ce genre de criminalité-spectacle en augmentation ne nous est fournie. Obama nous avait pourtant –pour un temps– habitués à mieux. Pot de fleurs flexibles, comme ses prédécesseurs, il commence à vraiment bien plier sous le faix de sa civilisation. Et, ultime insulte à la vérité, il comble ce qu’il n’analyse pas et, de ce fait, n’avoue pas, par du préchi-précha sur le mal, les «humains» qui font «acte de terrorisme» les uns sur les autres, et ses angoisses paternes pour ses filles «qui elles aussi vont au cinéma» (sous bonne garde, dans leur cas, ce qu’il se prive bien de mentionner). Quand je dis que l’espace citoyen est sur-religionisé, en voici un exemple de plus, tiens. Il est patent ici que le flux irrationnel est un écran de fumée pour masquer cette vérité véreuse face à laquelle les petits pouvoirs en place sont impuissants. Toute la vision sociopolitique que l’Amérique a d’elle-même se canalise dans cette intervention présidentielle sidéralement creuse. Et pourtant, la brèche ouverte il y a peu par Obama lui-même prouve (encore un peu) que ce caramel mensonger systémique ne va pas durer. Un beau jour, les américains cesseront de se comporter comme s’ils vivaient sous une théocratie implicite leur allouant tacitement et comme magiquement ce monopole moral parfaitement usurpé dont ils se croient tant les dépositaires exclusifs. Seulement alors comprendront-ils vraiment la politique et corollairement l’impact terrible et tangible de leur pays sur les multiples vallées de larmes bien réelles de ce susdit vaste monde mystifié. Sauf que, pour le moment, la politique intérieure et la politique étrangère américaines sont, de concert, un angélisme meurtrier et un manichéisme infantile. Car ce qu’ils fantasment « pour » eux-mêmes, ils le fantasment aussi « contre » le reste du monde. Dans leur ignorance complète du terrain, ils font l’erreur impardonnable de croire à leur propre propagande de pasteurs pour alcooliques en sursis. Donner les commandes du monde à des ignares ethnocentristes de ce baril, c’est encore toujours bel et bien lui, le grand danger géopolitique de l’heure. Mais cela commence à flancher sérieusement. Toute la crise de la conscience « intérieure » américaine est synthétisée sur le théâtre des pays que les USA occupent. C’est que même le petit peuple bon teint est fortement indisposé par le flafla des folliculaires propagandistes des oligarches US. La morale cucul ricaine n’est somme toute pas très impressionnée par le mensonge, le tripotage et les combines. Or là, en plus, sur cette sempiternelle question-ritournelle des armes à feu, c’est meurtrier, sordide et les nouveaux théolâtres mentent en pleine face de leurs petits commettants. Tous les mensonges, toutes les magouilles de l’administration américaine palpitent dans la blessure belliciste comme une migraine longue et lancinante. Tout le paradoxe moral de ces gogos qui veulent contrôler les chambres à coucher s’étale sous le nez des petits saints besogneux qui leur faisaient jadis tant confiance. Ça ne marche plus, ne vend plus, ne colle plus. Il y a une saturation. Le monopole de la sainteté est fissuré comme une vieille outre gangrenée. Bon an mal an, Obama fait déjà ouvertement fracture, en ceci. Et les gamins qui vont jouer du flingue au ciné parachèvent douloureusement la prise de conscience estomaquée qui se vrille, sans oublier de laisser force machines infernales en chausse-trappes dans leurs appartes, en prévision de la visite d’autorités militaro-constabulaires dont ils bousillent, ouvertement et en toute sociopathie sereine et méthodique, le système de valeur implicitement ou explicitement neuneu-patriotard…  Bon, euh… est-ce si évident, que c’est « nous », les bonnes gens dans toute cette histoire?

D’ailleurs, qui plus est, pour filer la catastrophe, on n’en peut plus justement que les américains tendent à fusionner théocratisme et patriotisme. Ils ont Dieu de leur bord, comme le disais autrefois Bob Dylan. La question devrait donc être: les américains sont-ils prêts pour un nouveau regard critique face au patriotisme? Les américains sont-ils prêts pour (et conséquemment méritent-ils enfin) une vision sociopolitique du monde qui remplace la docilité cocardière vidée de son idéal par une analyse relativiste et lucide de la place de l’Amérique dans le monde? Les américains sont-ils capables d’accéder à la distinction entre patriotisme et impérialisme que cherche à insuffler la réflexion politique actuelle dans leur conscience? La caricature patriotarde et la hideur de ses marionnettistes accède-t-elle enfin à la conscience des américains de par le nouvel ordre du monde? Sont-ils mûrs pour ce rendez-vous autocritique auquel les aurait par exemple convié le Barack Obama de 2008 (similaire mutadis mutandis à celui auquel Gorbachev avait convoqué les soviétiques circa 1985-1990) s’il n’avait pas, lui aussi, fini par flancher sur sa droite et bel et bien se pendre avec le ruban jaune? Le New Deal patriotique du ci devant monde multilatéral est-il en selle? Au matin d’un éventuel second mandat, Obama, désormais hautement plastronneur et soporifique, est-il encore assez visionnaire pour réformer le patriotisme américain et leur faire piger qu’aimer son pays c’est voir au bien être de ses citoyens, pas à la promotion de ses détrousseurs meurtriers enveloppés dans le fanion et enrobés dans la tartuffade patriote de droit divin? Tous les indicateurs le montrent: l’Amérique est un empire en déclin. Et, personnellement, Je suis 100% pour ce « déclin ». Londres est une ville bien plus agréable depuis qu’elle n’est plus la capitale d’un empire. Le déclin de l’empire ce n’est pas le déclin de l’Amérique, seulement d’une meute d’oligarches qui se sert de la société civile comme d’un paravent en dilapidant les ressources dans des guerres pharaoniques et ineptes. Quand l’empire est devenu nuisible pour tous, incluant les impériaux, c’est qu’il est plus que temps que tout ça vire de bord.

La théocratie implicite américaine, ça suffit. Ça va faire. Ça ira. Basta. Y en a marre. Écoeurement. Saturation. Surdose. Dans une république laïque, les décisions politiques des dirigeants sont indépendantes et séparées de leurs représentations religieuses privées. Quand Léonid Brejnev consultait des astrologues, tout le monde se payait sa poire et à raison. J’en pense autant de nos dirigeants qui niaisent à la messe, à la mosquée, à la synagogue, au temple, quel qu’il soit. Je n’ai absolument aucun respect pour quoi que ce soit qui sorte de ce tonneau là et le fait que qui que ce soit, personnage public ou personne privée, doive laisser chuinter sa religion, notamment en bénifiant/sanctifiant les troupes impériales comme on présente patte blanche, me parait aussi fallacieux et hors sujet que s’il devait déclarer la marque de sauce tomate qu’il met sur ses nouilles les soirs pluvieux. Cessez de nous cacasser de nous aimer les uns les autres au premier coup fourré sociétal faussement fatal, de prier niaiseusement pour les enfants cinéphiles d’Aurora (Colorado), et mettez vous au plus vite à mettre les flingues à la casse une bonne fois, bondance de la vie.

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Classé dans Actualité, Paul Laurendeau

L’athéisme doit-il militer?

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Disons la chose sans mettre de gants: Dieu, être spirituel engendrant et assurant la cohésion du monde matériel, n’existe pas. C’est une catégorie philosophique erronée, une légende populaire montée en graine, une vue hyperbolique de l’esprit bonifiant et magnifiant un ensemble de caractéristiques abstraites fondamentalement incompatibles et incohérentes. La persistance faussement universelle de ce mythe vieillot s’explique assez simplement par le fait qu’il est une projection intellectuelle magnifiante de l’être humain ou du monde (et l’être humain et le monde sont partout dans le monde humain), un peu comme le serait, par exemple, un fantôme ectoplasmique ou un mirage visuel au bout d’une longue route par temps sec. Toute culture où il y a des hommes et des femmes de tailles différentes, des enfants et des adultes, des malingres et des balèzes, produira inévitablement des légendes de géants et de nains sans se consulter entre elles, de par un jeu de projections logiques constantes et similaires du plus petit et du plus grand. L’universalité de ces propensions mythifiantes ne garantit en rien l’existence objective des titans, des lutins et de leurs semblables de tous barils ethnoculturels.

Le dieu (vaguement masculin et débonnaire ou intégralement inerte, neutre et inactif) n’existe pas. Aussi, privée de cette catégorie fondamentale irrecevable, la légitimité tant descriptive que morale des religions s’effondre comme un château de carte. Ne disposant pas réellement des fondements effectifs autoproclamés qu’elles se sont attribuées au fil de l’Histoire sans débat ni critique, les religions et leur perpétuation n’en reposent pas moins sur d’autres fondements qui, eux, n’ont absolument rien de divin. J’en dénombre quatre:

Peur: la panique, l’épouvante face à la maladie, la mort, le danger de perdre un enfant, l’instabilité politique, les cataclysmes naturels, l’incertitude face à l’avenir d’une vie douloureuse sont des carburants puissants de la religiosité. Il est connu qu’une personne en situation terrorisante, dans un accident ou dans des circonstances climatiques compromettant la survie, régresse mentalement et appelle son dieu comme un enfant appellant un adulte à l’aide. Loin de garantir quelque caractère fondamental ou universel à ce dernier, ce fait démontre plutôt à quel point croyance religieuse et déséquilibre ou délabrement mental sont proches l’un de l’autre.

Ignorance: un lourd et archaïque relent de cosmologie simpliste et d’anthropologie délirante gorge les religions, tant dans leur élévation dogmatique que dans leurs recommandations pratiques. Ignorant les causes du tonnerre, des éclairs, de la guerre et de la maladie, l’enfant humain imagine des colères, des illuminations, des déterminations politiques issues d’un cosmos anthropomorphisé. Le recul de l’ignorance et une meilleure connaissance du fonctionnement effectif du monde et des sociétés éloignent la religiosité comme représentation descriptive et explicative du monde. Tout progrès social entraîne de facto une révolution des savoirs qui fait reculer l’esprit religieux

Conformisme: la résorption des peurs irrationnelles et de l’ignorance face au monde ne suffit pas pour terrasser les religions institutionnalisées. Celles-ci s’appuient sur un autre ressort particulièrement insidieux et puissant: le conformisme social et familial. Combien de gens perpétuent des croyances qu’ils n’endossent plus chez leurs enfants, simplement pour ne pas contrarier leurs parents ou leurs ancêtres? Ce genre de soumission de masse, reposant sur des critères émotionnels peut perpétuer des pratiques dévidées des ferveurs censées les fonder pendant des générations. La tradition est une forte d’inertie mécanique dont il ne faut pas négliger la pesante portée réactionnaire.

Pouvoir social d’un clergé: si, en plus de ce lot de plaies, une des castes de votre société se spécialise dans l’intendance de la choses religieuse, là vous avez un puissant facteur de perpétuation sur les bras. Les clergés oeuvrent exclusivement à leur propre perpétuation et, pour ce faire, ils se doivent de voir au maintient en circulation de la camelote qu’ils fourguent. Ils analysent donc très finement la peur, l’ignorance et le conformisme qui mettent le beurre sur leurs tartines malodorantes et déploient de formidables énergies à les perpétuer, les maintenir, les solidifier. Tous les clergés dans tous les cultes sont des agents de freinage des progrès sociaux et mentaux. Les cléricaux sont des ennemis pugnaces et acharnés de la connaissance objective et informée du monde et de la vie sociale.

La religion est une nuisance intellectuelle et morale. C’est une force sociale rétrograde misant sur des pulsions individuelles régressantes. Tout progrès social significatif se complète d’une rétraction et d’une rétractation des religions. Ce long mouvement historique ne se terminera qu’avec la décomposition définitive de toute religion institutionnalisée ou spontanée. Ce jour viendra. Voilà.

Le voilà notre bon et beau manifeste athée. Il est clair, net, balèze, béton, superbe. Je l’endosse avec la plus intense des passions et la plus sereine des certitudes. J’éduque mes enfants en m’appuyant solidement sur ses fondements. Je vis par son esprit et dans la constance de sa rationalité supérieure. Banco. Bravo. On fait quoi maintenant? On l’imprime en rouge sang sur des feuillets grisâtres et on le distribue au tout venant? On en fait un beau paquet de tracts incendiaires que l’on met en circulation dans tous nos réseaux de solidarité? On fait pression sur un parti de gauche ou un autre pour qu’il en fasse une composante intégrante de son programme politique? Mieux, on crée la Ligue Athée du [épinglez le nom de votre contrée favorite ici]. Ce ne serait pas la première formation politique à plate-forme étroite et hyper-pointue. Il y a bien des Partis Verts  et des Parti Marihuanas pourquoi pas des Partis Athées? Bon sang que c’est tentant, surtout dans la conjoncture lancinante et interminable de pollution d’intégrisme religieux actuelle. Je vois d’ici notre premier slogan:

LA RELIGION N’EST PLUS L’OPIUM DU PEUPLE,

ELLE EST LA COCAÏNE DES EXTRÉMISMES

Ce serait pétant. Sauf que… La Commune de Paris et le bolchevisme léninien n’ont pas cédé à cette tentation miroitante de l’athéisme militant. Lucides, ces projets politiques se sont contentés de fermement restreindre la pratique des religions à la sphère privée et de forclore toute propension théocratique dans l’administration publique de leur république. C’est certainement une chose à faire et bien faire. Sauf que pourquoi donc, mais pourquoi donc en rester là?

Tout simplement parce que le déclin de la religion, la déréliction, ne se décrète pas, elle émerge. On ne proclame pas plus la fin de la religion qu’on ne proclame la fin de l’enfance. Il faut éradiquer la peur, l’ignorance, le conformisme et bien circonscrire la vermine cléricale dans ses tanières (qui deviennent lentement ses musées). La religion tombera alors, inerte et inutile, comme une feuille d’automne. L’athéisme ne doit pas militer, il doit laisser l’effet des progrès sociaux échancrer la religiosité comme une vieille étoffe devenue inutile. Militons directement et sans transition pour les progrès sociaux à la ville et l’athéisme militera bien pour lui-même dans les chaumières.

Frapper la religion au tronc plutôt qu’à la racine c’est la faire bénéficier d’une intensité d’attention qu’elle ne mérite plus. Cela l’alimente en jetant de l’huile dans le feu de son bûcher. Fabriquer des combattants de dieu en creux c’est alimenter le fanatisme et l’intégrisme des martyrs en plein. Laissons aux cagoules leurs procédés de cagoules et limitons le débat théologique à la ferme intendance de la tolérance multiculturelle et à la circonscriptions de la rigueur doctrinale à la sphère privée. Les enfants des croyants se débarrasseront à leur rythme et selon leur logique et leur modus operandi des croyances éculées qui leur nuisent. Ils les convertiront en ce qu’ils voudront. Nous ne sommes pas ici pour éradiquer la religion mais pour empêcher son héritage mourant de continuer de nuire à la société civile. À chaque culte de construire le mausolée, le sarcophage ou le cénotaphe de sa doctrine à sa manière.

Souvenons-nous et méditons sereinement la profonde sagesse de L’Encyclopédiste Inconnu qui disait: la vérité n’engendre jamais le fanatisme.

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Classé dans Actualité, Paul Laurendeau

Les œuvres sans la foi

L’Occident, qui gère le monde depuis quelques siècles, le fait de droit divin.  Vous  ne saviez pas ?  C’est que vous n’avez pas prêté attention au discours en sourdine derrière les bruits de bottes. Parce que nous avons conquis le monde au son d’une musique militaire, vous avez vu comme un simple prêchi- prêcha, l’antienne de la mission civilisatrice qui fait alterner la croix et le sabre.

Erreur.  Car si on ne croit pas que Dieu est avec nous, Chrétiens, et qu’a défaut de faire du bien aux corps qu’on maltraite on fait du bien aux âmes, bien des gestes héroïques apparaissent comme d’assez répugnantes saloperies.

Voyez comment, après les règlements de compte entre hérésies qui ont été les premiers divertissements de l’Occident chrétien, on a eu les schismes, les croisades, les guerres de religions puis la colonisation des colorés de toutes teintes sous couvert d’évangélisation. Voyez comment, christianisme bien en place sur la planète, on est passé à nos guerres entre Chrétiens, toujours menées au nom de notre éthique chrétienne, par des « bons » contre des « méchants ».

Ces guerres se sont toujours terminées par la victoire des « bons », puisque le certificat de bonne conduite était délivré au gagnant avec le reste du butin.  C’est ainsi que, de victoires en victoires – Dieu  toujours solidement avec eux –  les « bons » se sont enrichis au détriment des autres en ne faisant que du bien et que le droit divin s’est imposé. Le droit de l’Occident chrétien à gouverner le monde et celui des riches à gouverner l’Occident.

Tout se passait bien. Mais là, sans réfléchir, on a tué Dieu ! Grave erreur.Des philosophes brillants, honteux d’avoir l’air sot, ont tué la notion de Dieu, parce qu’elle avait été jointe à des religions reposant sur des tissus d’absurdités. Triste coquetterie, car on a ainsi jeté le bébé avec l’eau du bain.

En enlevant la notion de Dieu, d’un Dieu qui soutenait les Chrétiens – et que Dieu existe ou non n’a ici aucune importance –  on a enlevé le « droit divin » qui légitimait la gouvernance de l’Occident et celle des riches.

Dieu parti, les yeux humblement  fermés s’ouvrent et l’on voit tout sous un jour nouveau. Aujourd’hui, par exemple, on voit comme une répugnante saloperie – parmi tant d’autres, mais c’est la plus récente – la « geste héroïque » d’avoir été tuer chez eux des milliers de Libyens sans défense et qui ne nous avaient rien fait.

Dieu parti, on s’enhardit et on regarde de plus près comment quelques familles milliardaires, gérant quelques douzaines de consortiums, ont pris non seulement la gouvernance, mais la PROPRIÉTÉ du monde… On voit tout à coup comme une impardonnable couardise de les laisser continuer. Il y a donc des gens dans la rue pour protester, à Wall Stret et ailleurs. Simple question de temps avant qu’on ne passe des cordes aux lanternes.

La vieille morale apprise par cœur et acceptée comme divine apparaît soudain humaine, trop humaine… et contestée. On pense à d’autres solutions… Rien de mal à y penser, mais n’oublie-t-on pas l’essentiel ?  De quel droit va-t-on gouverner, si ce n’est pas de « droit divin » ?

Démocratie ? On sait bien que la démocratie n’est PAS une valeur absolue, seulement un mécanisme.  Quelqu’un croit-il que, dans un groupe de trois (3), deux (2) aient le droit de se mettre d’accord pour décider de la vie du troisième ?  Pense-t-on qu’une génération qui se proclame de « purs Aryens » puisse légitimement, parce qu’ils sont une majorité, décider de l’extermination d’une minorité de Juifs ?

Il faut un « droit divin ».  Il faut une éthique transcendante, quel que soit le nom qu’on lui donne  – Constitution, contrat social, etc ... –  qui encadre et limite la démocratie, puisse évoluer avec le temps selon sa propre dynamique…  mais qu’on ne s’accorde pas la liberté de modifier au gré des engouements et des caprices !

En Occident, cette éthique transcendante se confond avec la morale chrétienne qui a servi de tuteur à la croissance de notre culture. Cette morale chrétienne est dans toutes nos fibres. Elle a évolué depuis des siècles pour intégrer des concepts plus raffinés de justice, d’égalité, de liberté  – et, paradoxalement, de laïcité !    C’est la seule éthique qui puisse faire  consensus chez-nous.  Ce qui s’y opposerait serait  rejeté comme un greffon incompatible…  à moins de parvenir à faire mourir l’arbre lui-même.

Attention, pourtant, de ne pas confondre cette éthique avec l’un ou l’autre des salmigondis de croyances plus ou moins ridicules que des meutes de clercs ont érigé en dogmes au cours des siècles, pour marquer leurs territoires de prédation et d’extorsion !  On ne parle pas ici de religion, car l’éthique est affaire de comportements. St-Jacques, dans une Epître qui a fait une belle carrière, dénonçait « la foi sans les oeuvres » . Faisons un pas de plus et parlons d’une éthique où la foi n’a même pas sa place. Une éthique qui ne juge que des œuvres.

On pourrait définir ici cette « morale chrétienne »  comme « le plus grand commun diviseur » des interdits que s’imposent et des contraintes auxquelles s’astreignent tous ceux  qui adhèrent au précepte du Christ de s’aimer les uns les autres.  Que celui qui respecte cette exigence se définisse ou non comme chrétien est sans importance ; ce sont ses « œuvres » qui importent.

Sans importance aucune, non plus, pour la société, que celui-ci ait une foi, une autre, ou aucune en un dieu quelconque : il peut avoir les œuvres sans la foi… Il peut bien, en son for intérieur, croire en tout ce qu’il veut et même créer ses propres superstitions… mais sans embêter personne, C’est ça le vrai sens de la laïcité.

Quand le corps social fait consensus et que cette morale chrétienne, expurgée de tout dogme et de toute croyance, est acceptée comme l’éthique transcendante qui détermine en dernier ressort de la légalité des règles, il y a harmonie entre l’ordre civil et cette morale dont le respect joue alors le rôle de l’appartenance à une religion sans en avoir les défauts.

C’est cette « religion » sans dogme, tout entière définie par une éthique et où il n’y a plus que les oeuvres qui comptent, qui serait la seule acceptable en société. Ne serait-il pas opportun que tous les Chrétiens de toutes obédiences s’y rallient, libre à chacun de croire aussi tout ce qu’il veut, mais sans l’imposer à qui que ce soit ?

Les Chrétiens – en fait tous ceux qui veulent témoigner de la parole du Christs pour l’amour et la charité – constitueraient alors une force énorme pour le bien dans le monde. Ils pourraient, ensemble, se choisir un « Pape », lequel  n’aurait aucun pouvoir matériel, mais une autorité telle, grâce à ce mandat universel qu’il aurait reçu, que sa parole pèserait lourd pour séparer le bien du mal au palier des consciences … là où des individus libres doivent décider des gestes qu’ils posent.

Pourquoi un synode épiscopal universel, auquel seraient invitées à participer aussi les églises protestantes et orthodoxes,  n’élirait-il pas le prochain homme – ou la prochaine femme – qui siègera sur le trône de Pierre ?   Le monde changerait si nous avions ce pape-guide, avec pour seul objectif que ce qui est BIEN soit clairement énoncé au profit de tous les hommes de bonne volonté… même ceux qui ne croient en rien.

Pierre JC Allard

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Fondamentalisme

Par Renart Léveillé

J’ai toujours eu un préjugé favorable envers le bouddhisme étant donné qu’on me l’a toujours pointé comme étant « une philosophie plutôt qu’une religion ». Oui, vous le savez, je suis un condensé de mauvaise foi… Quoi qu’il en soit, le chef spirituel actuel du bouddhisme, le dalaï-lama, m’a fait déchanter dernièrement en prenant la part des religions et en repoussant d’autant la liberté d’expression :

Au sein de toutes les religions – y compris le bouddhisme -, il existe des fidèles qui portent en eux les germes de sentiments destructeurs, mais il faut se garder de condamner en bloc ces religions

Je comprends tout à fait son point, mais je me demande où se trouve la ligne entre pointer le débordement extrémiste d’un fidèle d’une religion – en soulignant obligatoirement celle-ci – et « condamner en bloc » cette religion? En serons-nous bientôt à demander aux médias d’exclure toute référence à la religion quand il est question d’un attentat terroriste, par exemple? D’autant plus qu’il y a divers degrés entre le fidèle modéré et l’extrémiste, et qu’il y a les paroles et les actes comme possibilités d’expressions de la dévotion, positivement ou négativement. J’ai l’impression qu’on tente de contenir la critique envers les manifestations du religieux dans un espace aussi propre que ce que tentent de nous imposer par la publicité les fabricants de produits domestiques : l’ultime stérilité. J’en comprends aussi qu’il est question de respect. Mais serait-ce que le respect est unilatéral?

Parce que la critique envers le phénomène religieux ne se résume pas à pointer les manifestations extrémistes. Elle est globale. Voudrait-on alors lui couper l’herbe sous le pied en passant par le chemin facile, celui de condamner ceux qui réprouvent les « fidèles qui portent en eux les germes de sentiments destructeurs »? Et, par ricochet, de bannir l’ensemble de l’oeuvre, comme le souligne Mathieu Bock-Côté : de tout bonnement enlever « Le droit au blasphème »?

Il ne faut pas oublier que les propos du dalaï-lama ont eu comme écrin la Deuxième conférence mondiale sur les religions du monde où on jetait dans la mare de la Déclaration universelle des droits de l’homme la proposition d’un nouvel article, 12.4, qui se lit comme suit :

Chacun a le droit que sa religion ne soit pas dénigrée dans les médias ou dans les maisons d’enseignement.

Cette idée porte sans aucun doute pour moi la signature du fondamentalisme. Parce qu’elle fait la promotion de l’idée que la religion est fondamentale à l’humain, ce avec quoi je suis profondément en désaccord. Et le chemin n’est pas loin pour laisser de côté les droits des areligieux… C’est même implicite. On a beau essayer d’échafauder une structure démontrant que l’athéisme est une religion, il n’en est rien. Il est question d’absence, il est question d’opposition claire, si bien sûr on peut toujours s’entendre sur le sens des mots. L’agnostique, l’antireligieux, l’irréligieux, l’impie, l’incroyant, le non-croyant n’auraient pas ce droit, puisque son existence même est en soi du dénigrement.

Mais il n’est pas tellement besoin d’un nouvel article de la Déclaration universelle des droits de l’homme pour bâillonner. Les exemples fusent, et pas seulement du côté musulman, et pas seulement du côté critique. L’exemple qui suit est à classer dans l’anodin (et elle est classée sur Cyberpresse dans la section « Insolite »), et pourtant…

Le régulateur britannique de la publicité a interdit comme «irrévérencieuse» une caricature montrant Jésus le pouce levé et le clin d’oeil appuyé, utilisée par un opérateur téléphonique pour vanter ses «rabais miraculeux» à l’occasion des dernières fêtes pascales.

C’est déjà bien planté, et très profondément. Là où il y a de la (grande) noirceur.

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Pas même la prière à Voltaire…

Par Renart Léveillé

Du côté de nos voisins « Politicoblogue », un dénommé Loup Kibiloki prend la défense de la croisade anti-laïcité du maire Jean Tremblay. Pour ce faire, il lui propose de s’inspirer de la Prière à Dieu de Voltaire, qui était lui-même un déiste anticlérical. Il pointe donc une prière « qui ne réfère à aucune religion en particulier » et qui pourrait rallier tout le monde, enfin presque… Serait-ce donc là la solution tant rêvée? Je suis loin de le croire. Encore moins quand cette idée prend sa source dans cette conception de la « fonction » de la prière :

Quoi qu’on dise, quoi qu’on pense, la prière demeure une fonction radicale, vitale, fondamentale, de la psyché humaine, elle existe sous une multitude de formes depuis la nuit des temps, elle existe aujourd’hui, continuera à exister dans l’avenir, elle ne s’éteindra pas.

Fonction radicale, ça se défend, si on y tient vraiment. Fonction fondamentale, c’est hautement subjectif. Et fonction vitale, c’est purement mensonger. Manger et boire, c’est vital, mais y’a-t-il un seul cas de mort pour s’être abstenu de prier? Mais bon, je vais peut-être trop loin, étant donné qu’il est seulement question de « psyché humaine ». Alors, une autre question plus réaliste : existe-t-il un seul cas prouvé de maladie mentale causé par le fait de s’être abstenu de prier? Encore plus, le fait d’être athée est-il à risque pour la santé mentale?

Si on lit tout le texte, il est très facile d’y voir aussi que la prière serait en quelque sorte l’assurance d’une société meilleure. Comme quoi une certaine idée de la perdition de la société passerait par l’abandon des rites traditionnels comme la prière avant les réunions, les repas, etc. Et, pour aller encore plus loin, on a l’impression que Jean Tremblay serait le porte-flambeau d’un mouvement de réhabilitation dans ce sens. Par la quantité de ses appuis et de ses détracteurs, on le désigne puissant comme le chef du village des irréductibles Gaulois qui résistent contre l’oppresseur romain, c’est-à-dire les méchants défenseurs de la laïcité dans le monde politique.

Mais si on revient à la question de base, que la prière soit la représentation d’une religion en particulier ou une confession de foi théiste ne change pas grand-chose. Une prière, quelle qu’elle soit, est une manifestation. On ne peut pas dire qu’une absence de manifestation (ce que les laïcistes demandent) est une manifestation. Comme on ne peut pas dire que l’athéisme est une religion. Idem pour ce qui est de la laïcité. Soyons sérieux et regardons ce que les mots veulent dire!

Je ne nie pas qu’une prière peut avoir du sens pour un croyant et participer à son bonheur. Ça serait de la malhonnêteté de ma part. Par contre, il faudrait que les croyants qui veulent l’imposer dans la sphère publique soient aussi honnêtes. À partir du moment où possiblement une seule personne se sentirait étrangère à cette pratique, c’est la base du civisme que de la mettre de côté. Et, pour moi, c’est de cette éventualité dont il est le plus question avec le mouvement laïc.

Et pour ceux qui comme Loup Kibiloki voient le sujet de la prière comme une question de vie ou de mort, j’espère que leurs prières personnelles en privé pourront contrebalancer la perte future des prières publiques pour leur équilibre mental…

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Classé dans Actualité, Renart L'Eveillé

La laïcité, ou nettoyer l’ardoise

Par Renart Léveillé

Dans mon billet de la semaine dernière, concernant la lubie catholique du maire Jean Tremblay, par boutade, je soumettais un anti-souhait :

(Et je ne veux lire personne déclamer que la laïcité est un complot de la religion athée…)

Mon collègue des 7 du Québec, Yan Barcelo, l’a en quelque sorte brisé, en titrant un billet récent : « Le laïcisme, nouvelle religion ». Malheureusement, il ne creuse pas tellement dans cette direction dans son texte, mais promet de le faire en conclusion dans un futur billet.

Quoi qu’il en soit, ce n’est pas bien difficile d’imaginer ce qu’aura l’air ce prochain billet quand pour lui le laïcisme est « un nouveau terrorisme intellectuel ». Pour arriver à une formule aussi chargée que celle-là, il faut visiblement être du côté, ou des croyants, ou du conservatisme moral, ou des deux.

En laissant quand même de côté les suppositions, j’en viens à me dire que les croyants (enfin certains) sont tellement pris dans leur monde qu’ils ne peuvent comprendre que les manifestations de leur foi peuvent être agressant pour d’autres, non-croyants et croyants d’autres confessions. À partir du moment où il est possible pour un croyant de prier en silence (même en étant en public), et que ce serait bien l’accommodement le plus raisonnable pour tous, crier haut et fort son supposé droit de prier à haute voix est le comble de la mauvaise foi…

Je vais prendre un exemple simple : le métal (dans le sens du style de musique). Si un maire décidait de faire jouer en début de réunion une pièce musicale de ce style, tout le monde serait d’accord pour dire que cela n’a pas sa place (même si personnellement le métal m’agresse vraiment moins qu’une prière, même pas du tout, d’ailleurs). Les amateurs de métal ont des occasions de se réunir pour en écouter ou ils le font en solitaire. La plupart sont des gens civilisés qui comprennent que leurs goûts musicaux ne doivent pas être imposés aux autres. Pourquoi certains croyants ne comprennent-ils pas cette évidence?

Je les entends déjà rétorquer que la prière est un héritage de notre passé, mais pas le métal, ce qui justifierait là toute cette croisade du maire (ainsi que ses forts appuis). Globalement, je ne nie aucunement cet héritage en pensant que la prière n’a pas sa place, puisque je vis sur cette planète : je sais que nous sommes en civilisation judéo-chrétienne, avec ses valeurs intrinsèques; valeurs que je ne peux nier en bloc, même si, séparément, elles me semblent avoir besoin d’un examen… Mais accepter le fait que c’est un héritage important veut-il dire pour autant qu’il faille cautionner ces manifestations de piété d’un autre temps, cette religiosité qui n’a plus sa place dans un monde (occidental) où adhérer à la religion n’est plus, heureusement! un préalable à l’acceptation d’un individu à la société?

Et encore, la tentative de lier par la force la laïcité (et même l’athéisme) à la religion dans son sens dogmatique est menée par la peur. C’est essayer de tout mettre sur un pied d’égalité pour espérer gagner des points. C’est chercher à imposer dans le débat un handicap à l’autre partie : c’est le réflexe de ceux qui se sont peinturés dans un coin, de ceux qui sont acculés au mur. La laïcité, c’est tout simplement nettoyer l’ardoise, repartir sur des bases plus propres, plus respectueuses de chacun, puisque chacun se « garde une petite gêne » en public quant à ses croyances, d’autant plus les personnes en situation de pouvoir, hein? Monsieur Tremblay!

Et puis, est-ce que le laïcisme a ses prières, son iconographie comme la religion? Idem pour l’athéisme? Oh! que non! Et ce n’est pas parce que le terme « doctrine » peut être utilisé pour nommer une religion ou un système de pensée qu’ils sont pour autant synonymes. Démagogie, quand tu nous tiens…

Dans le fond, qu’est-ce qu’on perd à réserver les affaires publiques aux affaires publiques? Absolument rien, les gens religieux sont bien libres de se pavaner avec leur foi avant et après les réunions. Si ça peut leur faire plaisir, je ne m’empêcherai pas en retour de ressentir à leur endroit un parfait mépris.

(Photo : analogian)

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La suprématie de Dieu

Dernièrement, j’ai appris qu’une Église du Connecticut, la Manifested Glory Ministries, s’adonnait à l’exorcisme. Mais pas n’importe lequel, celui contre le démon de l’homosexualité

On pourrait presque dire que l’« Église » évolue, puisque ce genre de pratique est assez inédit. Une manière d’aller récupérer quelques brebis sodomites égarées?

Parlant évolution, justement, saviez-vous que la constitution canadienne (dernière version : 1982) débute par « Attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu » alors que l’« ancienne version qui date de 1867 était parfaitement laïc »?

La lecture de la page Wikipédia au sujet de ce préambule est assez éclairante sur comment les religieux sont perdus dans leurs obsessions, ce qui peut donner, ultimement, des exorcismes du genre cité plus haut. Avec son aplomb légendaire, le Premier Ministre de l’époque, Pierre Elliot Trudeau, aurait dit : « Je crois que Dieu s’en fout d’être dans la Constitution ou non. » C’est plutôt rare, mais cette fois-ci je suis d’accord avec lui, même si par cette phrase il avoue croire en Dieu, à moins que ce soit simplement du sarcasme pur. Je n’irai pas jusqu’à vérifier, sa vie personnelle ne m’intéresse pas…

Mais ce que je constate, c’est que le Canada n’avait pas besoin de ce préambule avant 1982, puisque la vie religieuse a pu suivre son cours quand même. Par contre, à partir du moment où « la suprématie de Dieu » y est inscrite, cela ouvre des portes inquiétantes. Le Parti de l’Héritage Chrétien se sert de ce préambule pour appuyer sa propagande pro-vie et pro-famille (comme si les athées et agnostiques étaient tous des célibataires sans enfants…), essayant d’amputer moralement les droits et libertés selon leurs principes. La loi de Dieu avant la loi des hommes. Même logique tordue du côté des musulmans : ce préambule déroulerait le tapis rouge pour la loi islamiste au Canada. Et je n’ai aucun doute que les chrétiens ne sont pas très contents de ça. C’est d’un humour!

Je ne m’inquiète pas pour vrai. Seulement si un jour le système de justice est gangréné par les ultras religieux, ce qui ne semble vraiment pas le cas pour l’instant. Mais quand même, est-ce qu’il faut s’attendre à voir prochainement des exorcismes pour déloger le démon athée?

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Liberté de conscience

Par lutopium – Cette semaine au Québec, deux évènements qui n’ont aucun lien mais qui utilisent le même principe pour défendre leurs positions: la liberté de conscience. Tout d’abord, le début de ce procès qui vise à rendre inconstitutionnel le nouveau cours sur l’éthique et la culture religieuse (ECR) et la résolution des membres de la Fédération des Femmes du Québec (FFQ) en ce qui concerne le port de symboles religieux pour les travailleurs et travailleuses de la fonction publique.

En ce qui concerne l’opposition au cours sur l’ECR, je n’en reviens toujours pas. D’emblée, je dois avouer que je suis agnostique et que les dogmes et l’approche monothéiste me laissent complètement indifférent. Cependant, j’ai toujours cru bon que mes deux enfants soient « exposés » au phénomène des religions et de la spiritualité, qu’elles découvrent par elles-mêmes ces mystères de la vie humaine et qu’elles choisissent leur propre cheminement. Évidemment, avant l’arrivée de l’adolescence, l’intérêt des enfants pour le phénomène religieux est, plus souvent qu’autrement, associé à la fête et aux cadeaux. Et vive le Père Noël et le Lapin de Pâques.

Les parents de la région de Drummondville qui ont porté leur opposition au palais de justice, appuyés par la Coalition pour la liberté en éducation, utilisent la clause de « liberté de conscience » afin de prouver le bien-fondé de leurs revendications. Quelle approche paradoxale! Chers parents évangélistes, ne me parlez pas de liberté de conscience si vous refusez aux enfants l’opportunité d’apprendre sur les autres dogmes de la planète… Soyez conscients que votre approche médiévale ne servira qu’à renforcer ce repli-sur-soi qui alimente la ségrégation et la méfiance des autres. Nos amis de l’ADQ et du Parti Conservateur seront probablement tentés de courtiser ces parents… Car, ce qui semble être un des éléments déclencheurs de cette inititative, c’est la sacro-sainte Autonomie et le rejet d’un ministère de l’Éducation qui conçoit les programmes scolaires. Si la Cour permettait aux parents de retirer leurs enfants du cours ECR, elle leur donnerait du même coup le droit de ne pas assister aux cours d’histoire. Ça leur permettrait d’endoctriner leurs enfants avec la théorie du créationnsime.

La défense des droits religieux est donc à la mode ces temps-ci. Que penser de la position surprenante de la FFQ sur l’idée de permettre le port de signes religieux pour les fonctionnaires de l’État? Encore une fois, l’importance qu’on donne à ces symboles me laisse complètement indifférent. Vous désirez porter un crucifix, un hijab ou un kirpan pour démontrer votre soumission aux Écritures? C’est votre décision. Cependant, si votre emploi exige une certaine « neutralité », je crois que vous devriez faire preuve d’un peu d’humilité.

La FFQ se veut avant tout un organisme qui fait la promotion de l’égalité des femmes et des hommes. Elle doit choisir entre un appui envers la liberté fondamentale des femmes ou leur soumission envers leurs époux. Les femmes musulmanes qui luttent contre l’oppression partout dans le monde veulent se détacher de l’emprise des hommes qui utilisent les Écritures, comme bon leur semble, afin d’assurer leur autorité patriarcale sur la famille et la société. On ne peut pas défendre un morceau de tissu, la polygamie ou la répression pour faciliter l’accès à un emploi. Lorsqu’on choisit de venir s’établir au Québec, ou dans toute autre société « moderne », on doit s’attendre à des compromis afin de faciliter notre intégration. Si les femmes-journalistes des pays occidentaux portent le voile lorsqu’elles nous offrent des reportages en provenance des pays musulmans et ce, en respect des traditions en cours dans ces pays, nous sommes en droit de nous attendre que les néoquébécois fassent preuve d’une ouverture similaire lorsqu’ils décident de venir vivre ici avec nous.

Si on suit le raisonnement de la FFQ jusqu’au bout, on pourrait justifier l’utilisation de la violence afin de permettre à un jeune garçon d’accéder à la ligue nationale de hockey…

Il y a une trentaine d’années, nos voisins du sud ont réussi à associer des revendications religieuses au programme politique du Parti Républicain. Serions-nous en train de vivre la naissance d’une droite religieuse qui vise à influencer le pouvoir politique et les choix de société?

Illustration: Frank Benson – Flickr

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