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La Bourse et/ou la vie!?

 

Par Renart Léveillé

Les récents soubresauts de la Bourse donnent des sueurs froides à certains plus qu’à d’autres, mais au final le risque reste somme toute assez généralisé. Si le château de cartes s’effondre, les répercussions se feront sentir partout.

C’est pourquoi il serait intéressant de regarder la dynamique sociétale qu’accompagne le système de la spéculation boursière. Puisque justement ce jeu est plus qu’un simple jeu. On pourrait aller jusqu’à dire que la santé de la société en dépend : dans l’optique où l’économie y compte pour beaucoup, étant donné qu’elle est liée à la satisfaction des besoins essentiels. L’économie est bien sûr aussi très liée aux autres besoins (ceux qui ont entre autres été créés pour l’alimenter dans la fuite en avant de la croissance rapide) mais nous nous entendrons pour pointer l’importance de la survie (ou le confort) du plus grand nombre. Et avec en tête qu’une crise financière importante ne fait jamais en sorte que « les derniers seront les premiers »…

Alors, il est très facile de faire une ligne directe entre la spéculation boursière et l’équilibre sociétal, pour ne pas dire le bonheur social (selon le contexte actuel, sans pour autant occulter son imperfection et ses problèmes). Il serait donc honnête d’affirmer que la pérennité du bonheur social n’est pas entre les mains de tous, mais bien entre les mains d’une élite ayant les moyens financiers de mettre son poids dans la balance (de la Bourse). Parce qu’il faut se le dire franchement, ce qu’on pointe comme étant « la confiance dans les marchés » a tout à voir avec l’individualité, rien avec la collectivité.

À la base, les choix d’un investisseur ne concernent que son propre investissement. Il n’a pas de lien avec la causalité externe dans son cheminement décisionnel. Son but n’est que de préserver ou de faire fructifier son portefeuille, ce qui semble tout à fait légitime d’un point de vue individualiste. Pourtant, c’est l’addition de décisions de non-confiance dans les marchés qui est dangereuse pour le château de cartes (l’externalité que le spéculateur n’a pas en tête lors de sa prise de décision transactionnelle). Beau paradoxe.

Dans la possibilité d’un krach, suite à un effet domino, c’est là où la multiplication d’individualités ne va pas dans un sens positif pour le plus grand nombre : c’est par conséquent l’individu contre la collectivité. Devant ce paradoxe, serait-il utile de se poser la question à savoir pourquoi un pouvoir décisionnel aussi important est laissé à des individus qui n’ont qu’un intérêt individuel, et qui en plus n’ont aucunement conscience de son hypothétique portée collective? Sans oublier l’intrinsèque absence de coupables! (C’est à dire que le point de départ d’un effet domino ne pourrait être pointé, ni même accusé s’il pouvait être pointé; donc, aucune imputabilité possible.)

Mis à part la possibilité de faire de l’« investissement socialement responsable », il semble que l’éthique échappe tout à fait à cette activité. Et la morale de même. Il est toujours seulement question de profitabilité pure sans calcul de responsabilité. C’est pourquoi il serait bien difficile de culpabiliser qui que ce soit. Cependant, la question reste la même : sommes-nous à la merci d’un pouvoir extérieur à la société, puisque ce pouvoir n’a jamais en tête le bien de son ensemble (même si le système financier participe quand même à faire « rouler l’économie »)?

Toute cette analyse donne à penser que le système actuel n’a jamais pris en compte dans sa construction ses incohérences. C’est comme si le château de cartes avait un système d’autodestruction activé par un levier que personne ne voit, mais que quiconque peut accrocher par inadvertance (l’inadvertance étant ici la peur de tout perdre). Nous pouvons sérieusement nous demander si ce système est déjà désuet dans son évolution quand même récente. Au lieu d’un système d’autodestruction, il lui faudrait un système d’autorégulation. L’on pourrait pointer comme solution l’État ou son absence, mais cela serait beaucoup trop facile…

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Journal de Montréal : l’équilibre des forces

Le conflit qui se passe au Journal de Montréal n’a pas fini de susciter des débats, c’est bien certain. Alors, concernant le débat en lien avec le code du travail qui interdit « le recours aux travailleurs de remplacement par un employeur lors d’un conflit de travail », le blogueur Vincent Geloso soulève un point qui mérite réflexion. C’est la question de l’équilibre entre les forces syndicales et patronales dans un conflit.

Selon lui, « la question de l’équilibre est mal posée » :

Premièrement, il ne faut pas oublier que le code du travail contient des dispositions qui permettent à des travailleurs en conflit de travailler ailleurs (ce qui se passe avec Rue Frontenac). Uniquement sur ce point, on peut constater que la partie patronale entame la négociation avec un désavantage important. Ce désavantage est encore plus important si on considère que les « salaires » versés à même les fonds de grève sont déductibles d’impôts (ce qui peut leur assurer un revenu assez stable advenant un conflit).

Donc, selon cette logique, il faudrait que la peur du travailleur de ne plus pouvoir subvenir à ses besoins primaires, de perdre sa maison, etc. soit égale à la peur du patron de voir fermer son entreprise, dans le pire des cas. On compare carrément une personne morale à une personne vivante sans faire de distinction éthique quant à la gravité des conséquences d’un conflit pour l’un et pour l’autre.

À mon sens, il se trouve que le risque d’un conflit de travail pour le travailleur est double. Si la compagnie ferme, il n’y a qu’une conséquence pour elle alors que pour le travailleur c’est une perte de revenu pendant le conflit (avec tout ce qui peut venir avec) et une perte d’emploi au final. Et puis, à la base, une personne morale a les reins plus solides qu’une personne vivante (entre autres parce qu’elle n’en a pas réellement, contrairement à un être vivant…). Alors, dans ce sens, qu’un travailleur puisse subvenir à ses besoins pendant un conflit ne me semble pas un avantage, mais bien ce qui participe de l’équilibre, justement.

Certains pourraient rétorquer qu’un conflit de travail cause aussi des dommages à une entreprise pendant que ça se passe et non seulement à la fin, dans le cas d’une hypothétique fermeture, mais je le répète, une personne morale n’est pas un être vivant. On ne peut pas se soucier éthiquement d’autre chose que des répercussions qu’aurait sa « mort » sur ses employés et ses dirigeants. Alors, s’il est clair que les pires répercussions se trouvent du côté des employés (en ajoutant à cela leur nombre) et non des dirigeants, quantitativement, je ne vois pas comment on peut prendre tant la défense des personnes morales, qui ne sont finalement que des bouts de papier en regard de la vie humaine.

Vous comprendrez que j’ai un regard humaniste sur cette question. Oui je crois les entreprises importantes pour l’humanité, mais pas au prix de laisser taire a priori les revendications des travailleurs ou de les placer dans une position d’infériorité.

Mais pour revenir au Journal de Montréal, où est la peur de voir fermer l’entreprise si le produit se fait et qu’il y a des profits à la clé? Quel que soit le fin fond des revendications des deux côtés (là n’est pas la question), Pierre-Karl Péladeau n’a qu’à être patient dans ces conditions pour arriver à ses fins. Ce qui n’est vraiment pas le cas des syndiqués : le temps et l’argent jouent contre eux.

Équilibre, vraiment?

(Image : modification d’une photo de foobear)

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