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La fin des PPP ? Ô Felix Culpa… !

« O felix culpa quae talem et tantum meruit habere redemptorem »…

Beaucoup de théologiens on brodé sur le thème de l’ »Heureuse Faute » d’Adam et Eve, le péché originel, source de tous nos déboires, étant récupéré pour sauver la face de la divine providence et présenté comme une bonne affaire pour l’humanité qui y aurait trouvé l’occasion d’un sublime dépassement….

C’est le genre de raisonnement qui me donne le gout de frapper violemment des têtes de théologiens sur des murs de briques, mais ce n’est pas mon propos d’aujourd’hui. Je veux plutot parler ici de l’ »heureuse crise » actuelle, qui semble être arrivée à point pour éviter à la société québécoise une extraordinaire bêtise qui, à terme, nous aurait sans doute fait plus de mal que les virevoltes en Montagnes Russes des Bourses de Toronto ou de New York.

Heureuse crise, car la ministre des Transports, Julie Boulet, vient de confirmer que, la conjoncture n’y étant pas favorable, on annule le processus qui devait conduire au choix d’un consortium privé pour la rénovation/construction en PARTENARIAT PUBLIC-PRIVÉ. (PPP) de l’échangeur Turcot. Il semble bien qu’il en ira de même pour les autres projets du même genre dont nous étions menacés.

Pour comprendre que c’est une bonne nouvelle, il faut voir que, dans le contexte québécois, des PPP sont, disons… un peu incongrus

Il y a divers types de PPP, mais le plus connu est un projet mixte où l’État s’associe à des intérets privés, en apportant le contrat, la crédibilité, la clientele et une part non négligeable de l’expertise… tandis que la firme privée y ajoute aussi une expertise, mais surtout son nom et son désir sincère de faire du fric et de le distribuer avec générosité.

C’est dans le tiers-monde que ces associations ont permis les plus spectaculaires opérations. La variante la plus juteuse est celle ou une compagnie française, américaine, canadienne, etc. s’associe au gouvernement d’un pays-hôte étranger pour construire un port, un métro, un service public quelconque, en acceptant en paiement les revenus d’exploitation du dit service durant une période a négocier: 20 ans, 30 ans, 50 ans…

Bonne opération pour la compagnie, qui va faire pas mal de profits. Bonne affaire, aussi, pour le gouvernement du pays-hôte, lequel peut réaliser un projet qu’autrement il n’aurait pas eu les moyens d’entreprendre, parce que son partenaire privé – la firme étrangère- va lui apporter les fonds. Fonds qui, bien souvent, seront prêtés ou donnés par le gouvernement du pays d’origine de la firme étrangère.

Dans ce scénario, la population du pays-hôte va jouir d’un service qu’elle payera cher pendant longtemps, mais qu’autrement elle n’aurait simplement pas eu, tandis que son gouvernement se fera du capital politique et que ses politiciens et fonctionnaires toucheront souvent de généreux pots de vin. On pourrait dire que le dindon de la farce est le contribuable du pays donateur, mais il a généralement été informé de la politique d’aide au développement de son propre gouvernement; voyons-le donc plutôt comme un mécène.

Pourquoi ce scenario n’est il pas aussi intéressant si on pense à un PPP pour contruire une autoroute au Québec, par exemple ? Parce que ce n’est pas la compagnie, ici, qui dispose d’un source de financement dont son partenaire gouvernemental ne dispose pas. Au contraire, elle va chercher ses capitaux à la même source que ce dernier… et en les payant plus cher, car elle ne peut pas avoir une cote de crédit comparable à celle de l’Etat.

Pire, si on pense à aller chercher un revenu d’exploitation de la population locale cliente, car le but de l’État québécois ne devrait pas être de faire un profit sur la population québécoise. Alors pourquoi un PPP ? Un bénéfice politique pour le gouvernement ? Doit-on penser que notre gouvernement serait motivé par des considérations aussi mesquines ? Éliminons d’emblée cette hypothèse, comme celle de pots de vins et autres indélicatesses au profit de nos gouvernants et fonctionnaires.

Il semble bien qu’il n’y ait pas d’avantages à des PPP au Québec. Nous sommes donc ramenés à la seule solution possible: cette façon de procéder avait été choisie par inadvertance, dans un moment d’aberration. Felix culpa, donc, si la dégradation des marchés financiers a fait disparaître même l’illusion d’une possible économie à utiliser ce procédé. Veinards que vous sommes…

Pierre JC Allard

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