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Un changement de paysage

L’élection du 2 mai 2011 passera certainement dans l’histoire. Je dois admettre moi-même que jamais je ne me suis autant amusé au lendemain d’une élection. De ma mémoire, il n’y a jamais eu une élection qui ait autant changé le paysage politique du Canada que celle-ci. C’est une élection qui a en effet eu deux vagues complètement distinctes, une orange et une bleue, qui ont mis deux partis politiques à l’article de la mort, le Parti Libéral et le Bloc Québécois. La carte ci-dessus en porte témoignage.

Depuis lundi, on a parlé beaucoup de la vague orange du NPD qui a balayé le Québec et qui a complètement annihilé le Bloc Québécois, laissant ce parti moribond avec seulement 4 des 47 députés qu’il avait à l’origine et raflant également plusieurs sièges au Parti Libéral et au Parti Conservateur, mais au Québec surtout, nous avons tendance à oublier que pour que le Parti Conservateur arrive à récolter une majorité des sièges sans aucun appui du Québec (ils auraient été majoritaires même sans les 5 sièges qu’ils ont conservé au Québec), Il aura fallu qu’ils balaient la plus grande partie du reste du Canada. C’est ce qu’ils ont réussi à faire, largement au dépens du Parti Libéral. J’interprète les résultats comme ceci: le Canada anglais, las des gouvernements minoritaires instables, ont voté pour élire un gouvernement majoritaire, et s’assurer ainsi quatre années de quiétude. Le Québec, en revanche, souffrait d’une écoeurantite aigüe du débat constitutionnel et a résolu de voter pour un changement en votant pour un parti relativement jeune au chef charismatique et punissant les autres partis qui étaient au centre de ce débat, principalement les libéraux et les bloquistes.

Peu importe ce qu’on peut en penser, ce nouveau paysage politique nous aura permis de retrouver une polarisation gauche-droite dans la politique fédérale que nous n’avions pas vu depuis la fin des années 1960. Il y a très longtemps que nous avons vu une dichotomie gauche-droite plutôt qu’une dichotomie fédéraliste-souverainiste. Je m’en réjouis. Il est temps que nous passions à autre chose. Cette nouvelle configuration opposant un parti de centre-droite à une opposition résolument sociale-démocrate nous permettra peut-être enfin de débattre d’autres enjeux. Ça devrait être très sain pour notre démocratie et aussi très divertissant et rafraichissant.

Jack Layton du Parti Néo-Démocrate aura un défi de taille à relever. Il devra dans un premier temps encadrer un très grand nombre de députés néophytes. Qu’ils soient néophytes n’est peut-être pas si mal en soit, mais certains d’entre eux n’ont jamais eu d’emploi à temps plein et d’autres n’avaient qu’à peine mis les pieds dans leur circonscription et auront sans doute besoin d’un appareil GPS pour la retrouver. Ensuite, il devra aussi s’appliquer à jongler avec le fait que 60% de ses députés proviennent du Québec et qu’il devra tenter de représenter cet électorat particulier sans se mettre à dos ses autres supporteurs du reste du Canada. Je peux vous dire qu’il trouvera ça particulièrement difficile à gérer puisque le NPD est le parti le plus centralisateur et que la Province de Québec et très jalouse de ses juridictions. Il aura grand peine à maitriser le tout, mais ce sera certainement drôle de le voir essayer.

Pour Stephen Harper, le défi sera de faire mentir ses critiques qui appréhendent un virage radical vers la droite. La pire chose qu’il pourrait faire pour ennuyer ceux-ci est de ne pas s’éloigner trop du centre. S’il réussit à ne pas générer trop de controverses, il pourrait se retrouver avec un autre mandat et donner à son parti la réputation d’un « natural governing party », attribut longtemps donné aux libéraux.

Pour le Parti Libéral et Le Bloc Québécois, le défi sera de simplement rester en vie. Ce sera probablement possible pour les libéraux, mais j’ai de sérieux doutes pour le Bloc. N’ayant plus le statut de parti en chambre, avec les conservateurs qui veulent abolir le financement public des partis politiques, il risque de perdre près de 80% de son financement. C’était plutôt ironique, mais ce parti dévoué au démantèlement du Canada était majoritairement dépendant des contribuables du pays qu’il cherchait à détruire. N’ayant presque plus de financement, il est difficile de voir l’utilité d’essayer de garder ce parti en vie.

Donc, pour les quatre prochaines années, nous aurons droit à un match de boxe de première classe entre la gauche et la droite. Que le premier round commence!

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L’ange et la bête

Un dicton dit que qui veut faire l’ange, fait la bête. C’est souvent le cas de certains bien-pensants comme Jack Layton. M. Layton trouve que les taux d’intérêts des cartes de crédit sont trop élevés et propose que s’il est porté au pouvoir, il règlementerait ces taux pour qu’ils ne puissent dépasser le taux préférentiel des banques plus cinq pour cent. Pourquoi cinq pour cent? Aucune idée, c’est probablement juste un beau chiffre pour Layton. Ça semble bienveillant de la part de M. Layton puisqu’avec les taux actuels variant de 14% à 19%, il semblerait que les banquiers s’en mettent pleins les poches au dépens des pauvres simples d’esprit qui son incapables de gérer leur crédit et doivent souffrir ces taux d’usurier.

Je pourrais vous fournir une explication selon laquelle les taux de cartes de crédit sont ainsi pour répartir le risque et pour compenser pour les mauvais payeurs, et tout ça serait vrai, mais je suis absolument certain que vous n’avez aucune sympathie pour les banquiers, et aussi surprenant que cela puisse vous paraitre, je n’en ai rien à cirer moi non-plus. Ce qui me concerne plus est le fardeau de la famille moyenne et de réduire artificiellement les taux d’intérêts des cartes de crédit ne leur rendrait pas service à long terme. Au contraire, je vous soumettrait que ce serait nuisible.

Je suis toujours surpris de constater comment la gauche manque de cohérence. D’un côté, ils se plaignent de la surconsommation effrénée et de l’autre, ils prônent des mesures qui encouragent cette surconsommation. Il est à noter que la plupart des canadiens sont sur-endettés. Selon les dernières statistiques, le fardeau d’endettement des canadiens est de 148% de leur revenu disponible, ce qui signifie qu’un ménage canadien qui dispose de $60 000 par an après impôt a typiquement $90 000 de dettes. C’est énorme. Dans ce contexte, je vous soumettrait que le problème n’est pas que les taux d’intérêts des cartes de crédit sont trop élevés, mais qu’ils ne le sont pas assez.

Les cartes de crédit sont supposé être un prêt gratuit avec une échéance de 30 jours. Si vous payez dans ces délais, vous n’aurez jamais à payer un sou d’intérêt. C’est donc dire qu’une personne responsable doit gérer ses dépenses de façon à rembourser son solde à chaque mois, ce qui implique de vivre selon ses propres moyens. Ça devrait aller de soi que si vous travaillez au salaire minimum, vous n’avez peut-être pas les moyens de vous offrir une télé plasma géante, à moins d’économiser scrupuleusement pendant un an ou deux. Si vous sortez votre carte Visa et que vous faites un achat de $2000 en sachant pertinemment que vous n’aurez jamais ce montant à la fin du mois, ni à la fin de l’année, vous devriez également être influencés par le fait que vous allez payer $300 ou $400 d’intérêts en trainant un solde de $2000 sur votre carte de crédit pendant un an. Si vous n’arrivez pas à résister à cette tentation, c’est probablement parce que vous estimez que ces intérêts ne sont pas assez important, ou que du moins, ils sont un sacrifice acceptable. Si ce sacrifice vous est acceptable alors que votre taux est de 18%, qu’est-ce que ce serait si on forçait les banques à plafonner leur taux à 10%. Consommeriez-vous plus ou moins?

C’est bien beau vouloir alléger le fardeau des pauvres. Les cartes de crédit ont toujours eu l’effet d’encourager la surconsommation, en particulier pour ceux qui en ont le moins les moyens. Le crédit peut être un outil très utile, mais il peut facilement vous amener à dépenser bien au-delà de vos moyens s’il est trop facilement accessible. Le crédit ne donne pas de la richesse, il ne fait qu’en donner l’illusion. Nos grands-parents n’utilisaient que très peu le crédit. Mon grand-père a toujours acheté des autos en payant comptant. S’ils n’avaientt pas l’argent pour se payer quelque chose, nos grand-parents s’en passaient. Demandez-leur s’ils en étaient si malheureux. Des taux d’intérêts plus élevés, loin d’être un fardeau, seraient probablement le meilleur outil pour amener les gens à consommer responsablement. En ces jours où il est aussi facile de payer avec un carte-débit, il n’est pas vraiment nécessaire de payer avec une carte de crédit. Vous avez le choix.

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