Profitez-en, car vous ne me verrez pas souvent donner raison à Nathalie Elgrably. Je dois avouer que sa chronique du 13 novembre dans le Journal de Québec (ou de Montréal si vous y habitez) tombait en plein dans le mille. Enfin presque.
Madame Elgrably reprend une à une des promesses faites par les chefs des trois partis politiques et trouve qu’elles insultent l’intelligence des électeurs. Je n’ai pas analysé ces promesses du point de vue de leur impact sur le budget et l’économie du Québec, j’en serais bien incapable. Je m’abstiendrai donc de réagir à son analyse. J’aimerais bien que des économistes ne partageant pas ses opinions économiques le fassent.
Vous avez bien lu : opinions économiques. Depuis le temps que l’on tente de me convaincre que les économistes possèdent la vérité innée, j’ai beau avoir été nul en économie dans mes études, je demeure profondément sceptique. Vous connaissez la blague : demandez à une salle remplie d’économistes de vous donner un avis, vous en aurez un de plus après que le dernier vous aura donné la sienne parce que le premier aura complètement changé d’idée.
Sur quoi donc madame Elgrably a-t-elle raison ? Sur son appréciation de ce que pensent de nous les politiciens. Ils nous prennent tellement pour des imbéciles qu’ils mériteraient qu’on les renvoie à la même situation politique qu’avant les élections.
Peut-être même est-ce ce qu’il va se produire d’ailleurs.
Car madame Elgrably n’a pas que raison. Elle a tort aussi. Au tout début de sa chronique, elle écrit «Les Québécois ont pardonné à Jean Charest d’avoir déclenché des élections par opportunisme politique ». La seconde partie de sa phrase est tout à fait correcte, c’est la première partie qui pose problème.
Les Québécois ont-ils vraiment pardonné à Jean Charest d’avoir déclenché des élections? Permettez-moi d’en douter. Tout ce que je lis et entends va exactement dans le sens contraire. Il n’y a pas eu pardon, et je doute fort qu’il y en ait.
Le sentiment qui anime les électeurs du Québec n’est certes pas de la colère, mais cela est pire : de l’irritation. Au moins, la colère les ferait sortir en masse le 8 décembre prochain pour la manifester dans les urnes.
L’irritation aura un effet malheureusement contraire : le taux de participation va passer à l’histoire comme le plus bas de mémoire de Québécois.
Comprenons-nous bien, il faut aller voter même si cela nous irrite profondément. Je ne raterais pour rien au monde ce geste citoyen qui est bafoué dans tant de pays ailleurs dans le monde. La mascarade à laquelle s’adonne en ce moment le parlement russe nous montre bien à quel point la démocratie est difficile à gagner et tellement facile à perdre si nous ne nous occupons pas de la défendre en refusant, justement, de donner raison à des politiciens aussi tordus que Jean Charest.
Prenez une grande respiration au moins une fois par jour d’ici-là, et allez voter le 8 décembre prochain.