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John Galt traduit dans la vraie vie

Dans son roman Atlas Shrugged (bientôt en français sous le titre « La Grève »), Ayn Rand fait l’éloge de l’entrepreneur idéal qu’elle incarne dans la personne de John Galt. Il était un brillant inventeur qui refusait de laisser exploiter son génie par d’autres. Il était un homme pour qui tout était possible et il réussit à convaincre d’autres comme lui a faire la grève et démontrer à tout le monde l’importance des ces hommes et femmes qui innovent sans cesse. Il existe dans ce monde un grand nombre d’entrepreneurs, mais je dirais qu’aucun ne ressemble plus à John Galt que Steve Jobs. C’est un homme qui d’une façon très réelle, a transformé le monde et notre monde aurait été passablement plus pauvre sans lui.

Le prototype du Apple 1, tel qu'initialement présenté à un groupe de hobbyistes.

En 1975, lui et son partenaire Steve Wozniak ont été les premiers à offrir un ordinateur pour la maison à un prix qui était à la portée de tous, le Apple 1. C’était un kit à assembler qui se branchait à un téléviseur et qui se vendait à l’époque pour la modique somme de $666. 66. Wozniak et Jobs les construisaient eux-mêmes dans le garage de Steve Jobs. Jusque là, les ordinateur étaient généralement des machines énormes qui remplissaient souvent plusieurs pièces et qui n’étaient accessibles qu’au grosses compagnies. Le Apple 1 fût l’inspiration pour une foule d’autres compétiteurs comme Texas Instruments, Commodore et Tandy. Le Apple 1 fût ensuite suivi du IIe et du IIc. L’ordinateur personnel était officiellement né grâce au génie de Jobs et Wozniak.

Les années 80 virent l’entrée d’IBM dans l’arène des ordinateurs personnels, qui devint vite la compagnie dominante, forçant un grand nombres de compétiteurs à imiter son fameux PC pour survivre. Jobs, de son côté, plutôt que d’imiter, décide plutôt d’innover avec le MacIntosh. Le premier ordinateur personnel à incorporer une souris et une interface graphique. Interface graphique qui sera l’inspiration pour tous les autres systèmes d’opération similaires comme Windows et le défunt OS2. Encore une fois, c’est Jobs qui transforme l’industrie complète. Même si Apple ne rapporte pas autant qu’IBM, cette compagnie arrive à établir une domination dans le domaine du design et de l’éducation. Le Mac continuera d’évoluer dans les années qui suivront et sera caractérisé par une élégance et un style inexistants dans le reste de l’industrie. En l’espace de dix ans, Apple est passée de seulement Jobs et Wozniak travaillant dans un garage à une compagnie valant 2 milliards et employant plus de 4000 personnes.

L’impact de Jobs sur Apple est indéniable. La période la plus difficile de la compagnie fût lorsqu’elle l’a évincée. Pendant ce temps, Jobs ne s’est pas laissé abattre et a fondé deux autres compagnies: NeXT et Pixar. Pixar continue d’innover dans le domaine de l’animation, ayant un grand nombre de long métrages pour enfants à son actif. La compagnie NeXT n’a pas rencontré un gros succès commercial, mais les technologies que Jobs a développées avec elle sont à la base de la renaissance d’Apple.

Depuis son retour à la barre de sa première compagnie, Steve Jobs n’en finit plus de révolutionner le marché. Il a mis les walkman et les discman au rancart avec ses iPods. Il a réussi à convaincre les gens à payer pour leur musique, plutôt que de la télécharger avec iTunes. Il a révolutionné le marché des téléphones portables avec le iPhone, supplantant le vénérable Blackberry et tourné sans dessus dessous le monde des ordinateurs portables avec son iPad. Tous ces produits qui ont fait avancer l’industrie par bonds.

Alors qu’il a annoncé sa retraite la semaine dernière, il est difficile de s’imaginer ce que aurait été le monde sans l’apport de Steve Jobs. Ses innovations ont rendu la vie de milliards de personnes plus agréable et on permis à des millions d’autres personnes à bien gagner leur vie à travers le monde. À lui seul, le iPhone est fabriqué en utilisant des centaines de composantes manufacturées dans des centaines de pays différents. À lui seul, Steve Jobs aura nourri et enrichi plus de gens que tous les politiciens de la planète. Était-il animé par la poursuite du bien commun? Probablement pas, mais il a néanmoins sorti bien plus de personnes de la pauvreté que n’importe quel gouvernement.

Jobs et Wozniak dans leur garage en 1975

 

« Impossible est juste un gros mot lancé par des petits hommes qui trouvent plus facile de s’accommoder du monde qui leur a été légué que d’explorer le pouvoir qu’ils ont de de le changer. L’impossible n’est pas un fait, c’est une opinion. L’impossible n’est pas une déclaration, c’est un défi. L’impossible est un potentiel. L’impossible est temporaire. L’impossible n’est rien. » -Steve Jobs

Ceux en manque d’inspiration peuvent certainement en trouver dans cette citation. Le monde a besoin de plus de Steve Jobs.

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Classé dans Actualité, Philippe David

La haine de l’entrepreneuriat

Il existe un certain malaise au Québec et il nous a mis sur une trajectoire d’autodestruction. Si certains entretiennent encore l’espoir qu’un jour cette province puisse devenir un pays, il faudra un jour guérir cette maladie. Alors que l’entrepreneuriat, la prise de risque et l’innovation que ça entraine ont toujours été le moteur de toute économie, le Québec est anti-entrepreneurial. Doit-on être surpris que le Québec tire de la patte du point de vue économique.

Malgré plus d’un demi-milliard en aide à l’entrepreneuriat, le nombre d’entrepreneurs parmi la population de 15 ans et plus est passé de 3,4% en 1987 à 2,9% en 2008. La part des nouvelles entreprises dans le nombre total des entreprises a chuté de 14,6% en 1991 a 11,2% en 2006, pendant ce temps en Ontario elle passait de 13,9% à 11,2%. Moins des deux tiers des entreprises québécoises survivent plus de deux ans et seulement un tiers sont encore ne opération après cinq ans. En guise de comparaison, la moyenne de survie après cinq ans des pays de l’OCDE est de 50%.

Pire encore,il y a a deux fois plus d’entrepreneurs dans le reste du Canada qu’au Québec, et au Québec, il y a deux fois plus d’immigrants et d’anglophones qui choisissent de devenir entrepreneurs que de francophones et on surprend de constater une anglicisation des commerces à Montréal. Si tous les propriétaires d’entreprises sont anglophones, guess what? C’est l’anglais qui l’emporte!

C’est certain que la fiscalité plus progressive du Québec (taux d’imposition fédéral/provincial combiné jusqu’à 48%) et le fardeau règlementaire (473 lois et 2345 règlements pour donner respectivement 15 000 et 21 000 pages), sont des facteurs qui sont non-négligeables et qui expliquent pourquoi nous somme la caboose du train économique canadien, ça n’explique pas pourquoi si peu de francophones semblent vouloir se lancer en affaire. Je crois qu’il y a là une grosse question d’attitude d’ordre culturel. Peut-être est-ce nos racines catholiques qui nous donnent un certain dédain pour l’argent que les anglophones, majoritairement protestants et les immigrants n’ont pas? Pourtant, il y a eu de nombreuses entreprises dans notre histoire qui ont été démarrées par les religieux. Toujours est-il que selon certaines études, 19,2% des québécois reconnaissent l’ambition comme une qualité entrepreneuriale (32% dans le ROC) et le succès financier est perçu négativement par 40,2% des québécois contre 28% au ROC. Désolé, mais on ne pourra certainement pas devenir riches, si on croit que le succès financier est une tare!

Je crois certainement que notre système d’éducation y est pour quelque chose. Un système où l’enseignement de l’économie est étonnamment négligée, où on nivelle fréquemment vers le bas. Où on enveloppe les enfants de papier à bulle et on évite de trop les faire forcer de peur d’abimer leur estime de soi. Un système où le mot excellence est banni du vocabulaire. Ceux qui en sortent n’ont jamais été mis au défi, mais croient à tort qu’ils ont vraiment accompli quelque chose. On les a tellement couvé, qu’ils sont allergiques au risque. Comment voulez-vous qu’ils développent l’instinct pour démarrer une entreprise. Ils sont bien plus enclins à rester dans leur zone de confort sans vouloir en sortir.

Une culture, pour être préservée doit savoir produire et entreprendre. Il est triste de constater qu’au Québec, la culture entrepreneuriale est en train de mourir et que les québécois se contentent seulement de poinçonner leurs cartes de temps et faire leur petit 35-40 heures par semaine, plutôt que de devenir maitres de leur propre destinées. Il faudrait peut-être commencer à enseigner à nos enfants qu’il n’y a rien de mal à faire de l’argent.

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Classé dans Actualité, Philippe David

Une encyclique pour finir en beauté

J’ai dit parfois du mal de l’Église et particulièrement de ce pape, dont la prophétie de St Malachie voudrait qu’il soit le dernier, avant un certain Pierre (le Romain) qui ne serait plus tout à fait un pape et aurait un tout autre agenda… Je veux donc me hâter de dire du bien de cette encyclique. Qui sait si ce n’est pas la dernière…

Un petit salut à Benoit, aussi. Par cette encyclique, Benoît XVI se mérite une place dans l’Histoire. D’abord par l’importance de ce qu’il dit – qui permet de penser que l’Église va prendre enfin la part des déshérités – ensuite, par le courage de l’avoir dit de cette façon. Car en disant que cette encyclique est la « Rerum novarum de l’époque contemporaine qui éclaire le chemin de l’humanité en voie d’unification », il va aussi loin dans la voie d’une révision des positions de l’Église que peut aller une organisation qui se prétend infaillible. Ce faisant, il nous permet de penser qu’elle peut parfois avoir raison

Laissons de côté ce qui est dogmes et ronds de jambes pour dire que rien n’a changé, et acceptons ce message actuel de l’Église. Les casuistes nous dirons s’il est ou non novateur, mais seuls d’autres casuistes s’en préoccuperont. Je ne répéterai pas le texte, il est disponible sur Google et ailleurs pour consultation. Je ne vais vous dire que ce que j’y lis.

1. Il faut repenser l’Économique

L’activité économique ne peut résoudre tous les problèmes sociaux par la simple extension de la logique marchande. Une activité financière mal utilisée – et, qui plus est, spéculative – ne soutient qu’une croissance artificielle liée à une consommation excessive. Vouloir séparer la gestion de l’Économique, dont le seul objectif serait de produire la richesse, de celle de la Politique, dont ce serait la seule mission de rechercher la justice au moyen de la redistribution, est une cause de graves déséquilibres

2. Il faut repenser le Politique

L’État vient de faire la preuve de son utilité, en s’attelant à corriger les erreurs et les dysfonctionnements de l’économique. La crise actuelle nous oblige à créer de nouvelle règles du jeu et c’est l’occasion d’élaborer et de mettre en place de nouveaux projets. Non seulement ceux qui ont donné la gouvernance de l’État pour désuète ont-il eu tort, mais il serait temps de mettre en place un autre palier de gouvernance: une véritable autorité politique mondiale.

3. Il faut repenser la justice distributive.

Même du point de vue économique, les pauvres ne sont pas à considérer comme un fardeau, mais au contraire comme une ressource. Pour fonctionner correctement, l’économie mondialisée a besoin de la logique du don sans contrepartie. Gratuité et don de soi sont des vecteurs de la prospérité et l’économie a donc besoin de l’éthique.

4. Il faut repenser l’entrepreneuriat

À côté des entreprises dont les objectifs sont économiques, il faut concevoir des entreprises dont le but soit social. Il faut concevoir des microprojets. Il faut créer des coopératives de consommation. Il faut consommer de façon plus sobre et assurer à tous ceux qui travaillent une rétribution décente. On pourrait même penser à la « subsidiarité fiscale » qui permettrait aux citoyens de décider de la destination d’une part de leurs impôts versés à l’État, de façon à aider les pays en voie de développement.

5. Il faut soutenir les réseaux de protection sociale

Benoît XVI suggère de favoriser davantage la liberté syndicale. « Plus pertinente encore aujourd’hui qu’hier», dit-il, car il faut «se donner comme objectif prioritaire l’accès au travail». C’est l’amende honorable pour Rerum Novarum.

Je ne croyais pas voir le jour où j’applaudirais une encyclique papale. Pourtant, non seulement suis-je d’accord avec tout ce qu’elle propose – même si le rôle dévolu aux syndicats parait aujourd’hui bien dépassé – mais, si je n’avais peur de rendre ce texte illisible, je pourrais faire un lien de chacune des phrases de ce petit résumé vers un texte soutenant la même idée, que j’ai écrit il y a 5, 10 ou 20 ans ! Dire que je suis d’accord est en-deçà de la vérité.

Je sais que beaucoup de ceux qui mènent les mêmes combats que moi y verront in piège, une manœuvre pour avancer l’agenda néolibéral de mondialisation. Mais je ne veux voir qu’à sa face même le message qui est ici livré: ce qui est ici écrit restera écrit et c’est un gain net pour la justice sociale.

Je ne suis pas naïf. Je sais que l’Église a son propre agenda – qui a été néolibéral quand il a été opportun qu’il le soit -mais je crois qu’elle a décidé que ce l’était plus. Bonne nouvelle, car l’Église est encore une force puissante. Ceux qui voudraient l’instrumentaliser – et je ne doute pas qu’ils seront nombreux – devront, avant de vitupérer l’Église qui vire à gauche, méditer sur la fameuse phrase le Lincoln. « When you have got an elephant by the hind leg, and he is trying to run away, it’s best to let him run. »

Pierre JC Allard

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Classé dans Actualité, Pierre JC Allard

Nationaliser l’industrie pharmaceutique

Porcine ou mexicaine,  la A H1N1 déçoit et a bien du mal a tenir son rang dans les priorités des nouvelles de 20 h.00. On a l’impression d’un succès annoncé qui ne lève pas sur Broadway et, à moins d’un coup de théâtre, comme une mutation qui la transformerait soudain en Peste Noire, elle passera sans doute à l’histoire comme la « grippe du cochon d’avril » dont on fera annuellement gorge chaude pour parler des refroidissements printaniers.

L’hystérie qu’on a créé avec cette grippe a eu l’effet salutaire, cependant, de ramener l’attention sur l’industrie pharmaceutique.  Ce n’est plus tant  le virus lui-même qui est important, que le problème qu’il met en lumière.  Quel est ce probleme ?

 Le problème, c’est qu’avec les moyens plus efficaces dont on dispose, la médecine est devenue une vraie science. On peut VRAIMENT guérir les gens et allonger la vue. La santé est donc devenue la première priorité de tout le monde et, les médicaments remplaçant les neuvaines, cette santé a son prix.  Qui dit prix dit priorités, une occasion d’injustice et d’immenses profits à faire. 

 Récupérant au passage celle de la drogue, qui  en est le prolongement naturel, l’industrie pharmaceutique sera, au XXIe siècle, le secteur de l’économie le plus important, le plus innovateur, le plus rentable.  Elle sera ce qu’a été  l’industrie des armements au XXe siecle et la religion auparavant : une activité dont découlent la vie et la mort comme des effets et dont la peur est une variable à instrumenter.

 La pharmacie est l’avenir de la médecine, car c’est elle qui porte l’effet multiplicateur de l’industrialisation et qui permet donc d’espérer une amélioration radicale des traitements sans une augmentation similaire du facteur travail – et donc des coûts – qui limiterait l’application concrète des avancés de la science. Il en découle l’exigence éthique de rendre disponibles au plus tôt les médicaments nouveaux, pour le traitement des pauvres comme des riches.

Le progrès de l’industrie pharmaceutique, toutefois, repose sur l’expansion exponentielle des connaissances. Elle ne peut se développer au meilleur rythme et ses résultats être appliqués au mieux que si elle s’appuie sur une recherche intensive.  La société a donc aussi l’obligation morale que les découvertes de la science soient diffusées sans restriction, permettant à tous d’aller plus loin plus vite, plutôt que de reprendre le chemin parcouru par d’autres.

Dans une optique d’industrie pharmaceutique appartenant à des intérêts privés, à cette obligation morale de divulguer tous les résultats de la recherche s’oppose le délai qui doit être consenti et les marges bénéficiaire qui doivent être permises pour permettre l’amortissement des coûts de recherche et une prise de profit raisonnable, tant pour le chercheur que pour l’investisseur qui lui sert de commanditaire.

 Cette opposition crée un dilemme qui ne peut être résolu que si la recherche est financée et gérée, non pas dans une perspective de prise de profit, mais dans celle d’un investissement à fond perdu dont le bénéfice se mesure en services. Cette réalité impose que l’industrie pharmaceutique passe au plus tôt du secteur privé au secteur public.

Cette prise en charge de la recherche par la collectivité  permet aussi, accessoirement, de faire l’économie des frais de marketing liés à une exploitation en mode concurrentiel de la vente de médicaments. Frais de marketing et publicité dont le coût peut excéder celui de la recherche elle-même !

Ne me voyez surtout pas comme un marxiste collectiviste doctrinaire ; je suis plutôt, au contraire, des zélateurs de l’entrepreneuriat : l’industrie pharmaceutique est  la seule branche d’activité du secteur secondaire dont je préconise la prise en charge par l’État ! L’intérêt public, le rôle et la nature même de cette activité ne laissent simplement pas ici d’autre solution. Le pouvoir qu’en confère le contrôle est trop grand, la tentation d’en abuser est trop forte.

Il faut nationaliser l’industrie pharmaceutique avant qu’on ne commence à se demander de chaque pandémie – comme on se demande depuis longtemps de chaque guerre – si sa seule raison d’être n’est pas le profit que peuvent en tirer ceux qui ont le pouvoir de les déclencher.

Nationaliser l’industrie pharmaceutique doit être une priorité, bien haut à l’agenda de tout parti politique qui se veut de gauche. Il est tout à fait possible, d’ailleurs, de concilier la responsabilité de l’État dans le domaine de la recherche avec la nécessité  de préserver la motivation des chercheurs et de leur fournir un cadre d’action entrepreneurial favorable à l’initiative et à la créativité.  Mais c’est une plus longue histoire et je la raconte ailleurs.

 

Pierre JC Allard

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Classé dans Actualité, Pierre JC Allard