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Les œuvres sans la foi

L’Occident, qui gère le monde depuis quelques siècles, le fait de droit divin.  Vous  ne saviez pas ?  C’est que vous n’avez pas prêté attention au discours en sourdine derrière les bruits de bottes. Parce que nous avons conquis le monde au son d’une musique militaire, vous avez vu comme un simple prêchi- prêcha, l’antienne de la mission civilisatrice qui fait alterner la croix et le sabre.

Erreur.  Car si on ne croit pas que Dieu est avec nous, Chrétiens, et qu’a défaut de faire du bien aux corps qu’on maltraite on fait du bien aux âmes, bien des gestes héroïques apparaissent comme d’assez répugnantes saloperies.

Voyez comment, après les règlements de compte entre hérésies qui ont été les premiers divertissements de l’Occident chrétien, on a eu les schismes, les croisades, les guerres de religions puis la colonisation des colorés de toutes teintes sous couvert d’évangélisation. Voyez comment, christianisme bien en place sur la planète, on est passé à nos guerres entre Chrétiens, toujours menées au nom de notre éthique chrétienne, par des « bons » contre des « méchants ».

Ces guerres se sont toujours terminées par la victoire des « bons », puisque le certificat de bonne conduite était délivré au gagnant avec le reste du butin.  C’est ainsi que, de victoires en victoires – Dieu  toujours solidement avec eux –  les « bons » se sont enrichis au détriment des autres en ne faisant que du bien et que le droit divin s’est imposé. Le droit de l’Occident chrétien à gouverner le monde et celui des riches à gouverner l’Occident.

Tout se passait bien. Mais là, sans réfléchir, on a tué Dieu ! Grave erreur.Des philosophes brillants, honteux d’avoir l’air sot, ont tué la notion de Dieu, parce qu’elle avait été jointe à des religions reposant sur des tissus d’absurdités. Triste coquetterie, car on a ainsi jeté le bébé avec l’eau du bain.

En enlevant la notion de Dieu, d’un Dieu qui soutenait les Chrétiens – et que Dieu existe ou non n’a ici aucune importance –  on a enlevé le « droit divin » qui légitimait la gouvernance de l’Occident et celle des riches.

Dieu parti, les yeux humblement  fermés s’ouvrent et l’on voit tout sous un jour nouveau. Aujourd’hui, par exemple, on voit comme une répugnante saloperie – parmi tant d’autres, mais c’est la plus récente – la « geste héroïque » d’avoir été tuer chez eux des milliers de Libyens sans défense et qui ne nous avaient rien fait.

Dieu parti, on s’enhardit et on regarde de plus près comment quelques familles milliardaires, gérant quelques douzaines de consortiums, ont pris non seulement la gouvernance, mais la PROPRIÉTÉ du monde… On voit tout à coup comme une impardonnable couardise de les laisser continuer. Il y a donc des gens dans la rue pour protester, à Wall Stret et ailleurs. Simple question de temps avant qu’on ne passe des cordes aux lanternes.

La vieille morale apprise par cœur et acceptée comme divine apparaît soudain humaine, trop humaine… et contestée. On pense à d’autres solutions… Rien de mal à y penser, mais n’oublie-t-on pas l’essentiel ?  De quel droit va-t-on gouverner, si ce n’est pas de « droit divin » ?

Démocratie ? On sait bien que la démocratie n’est PAS une valeur absolue, seulement un mécanisme.  Quelqu’un croit-il que, dans un groupe de trois (3), deux (2) aient le droit de se mettre d’accord pour décider de la vie du troisième ?  Pense-t-on qu’une génération qui se proclame de « purs Aryens » puisse légitimement, parce qu’ils sont une majorité, décider de l’extermination d’une minorité de Juifs ?

Il faut un « droit divin ».  Il faut une éthique transcendante, quel que soit le nom qu’on lui donne  – Constitution, contrat social, etc ... –  qui encadre et limite la démocratie, puisse évoluer avec le temps selon sa propre dynamique…  mais qu’on ne s’accorde pas la liberté de modifier au gré des engouements et des caprices !

En Occident, cette éthique transcendante se confond avec la morale chrétienne qui a servi de tuteur à la croissance de notre culture. Cette morale chrétienne est dans toutes nos fibres. Elle a évolué depuis des siècles pour intégrer des concepts plus raffinés de justice, d’égalité, de liberté  – et, paradoxalement, de laïcité !    C’est la seule éthique qui puisse faire  consensus chez-nous.  Ce qui s’y opposerait serait  rejeté comme un greffon incompatible…  à moins de parvenir à faire mourir l’arbre lui-même.

Attention, pourtant, de ne pas confondre cette éthique avec l’un ou l’autre des salmigondis de croyances plus ou moins ridicules que des meutes de clercs ont érigé en dogmes au cours des siècles, pour marquer leurs territoires de prédation et d’extorsion !  On ne parle pas ici de religion, car l’éthique est affaire de comportements. St-Jacques, dans une Epître qui a fait une belle carrière, dénonçait « la foi sans les oeuvres » . Faisons un pas de plus et parlons d’une éthique où la foi n’a même pas sa place. Une éthique qui ne juge que des œuvres.

On pourrait définir ici cette « morale chrétienne »  comme « le plus grand commun diviseur » des interdits que s’imposent et des contraintes auxquelles s’astreignent tous ceux  qui adhèrent au précepte du Christ de s’aimer les uns les autres.  Que celui qui respecte cette exigence se définisse ou non comme chrétien est sans importance ; ce sont ses « œuvres » qui importent.

Sans importance aucune, non plus, pour la société, que celui-ci ait une foi, une autre, ou aucune en un dieu quelconque : il peut avoir les œuvres sans la foi… Il peut bien, en son for intérieur, croire en tout ce qu’il veut et même créer ses propres superstitions… mais sans embêter personne, C’est ça le vrai sens de la laïcité.

Quand le corps social fait consensus et que cette morale chrétienne, expurgée de tout dogme et de toute croyance, est acceptée comme l’éthique transcendante qui détermine en dernier ressort de la légalité des règles, il y a harmonie entre l’ordre civil et cette morale dont le respect joue alors le rôle de l’appartenance à une religion sans en avoir les défauts.

C’est cette « religion » sans dogme, tout entière définie par une éthique et où il n’y a plus que les oeuvres qui comptent, qui serait la seule acceptable en société. Ne serait-il pas opportun que tous les Chrétiens de toutes obédiences s’y rallient, libre à chacun de croire aussi tout ce qu’il veut, mais sans l’imposer à qui que ce soit ?

Les Chrétiens – en fait tous ceux qui veulent témoigner de la parole du Christs pour l’amour et la charité – constitueraient alors une force énorme pour le bien dans le monde. Ils pourraient, ensemble, se choisir un « Pape », lequel  n’aurait aucun pouvoir matériel, mais une autorité telle, grâce à ce mandat universel qu’il aurait reçu, que sa parole pèserait lourd pour séparer le bien du mal au palier des consciences … là où des individus libres doivent décider des gestes qu’ils posent.

Pourquoi un synode épiscopal universel, auquel seraient invitées à participer aussi les églises protestantes et orthodoxes,  n’élirait-il pas le prochain homme – ou la prochaine femme – qui siègera sur le trône de Pierre ?   Le monde changerait si nous avions ce pape-guide, avec pour seul objectif que ce qui est BIEN soit clairement énoncé au profit de tous les hommes de bonne volonté… même ceux qui ne croient en rien.

Pierre JC Allard

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Le rap religieux, nouvelle vision du Hip hop

 

Louanger Dieu avec des termes comme «C’est messed up» ou «J’m’en fous», est-ce possible? Il semble bien que oui! Bienvenue dans l’univers du hip-hop chrétien. Entrevue avec le rapper Minister G.

Murielle Chatelier Dossier Dossier Rap, Spiritualité et Hip hop

hip-hop-chretien-spiritualite-spirituel-rap-music «En tant que personnalité publique, je suis conscient de représenter un modèle pour les jeunes. J’ai donc une responsabilité envers eux quand je chante et c’est ce qui me distingue des rappeurs plus mainstream», dit le chanteur Minister G., anciennement connu sous le nom de Gundei.

En avril 2007, lors du Gala de la musique urbaine, il a reçu le prix du Meilleur album anglophone pour son œuvre Ghetto Gospel, aux côtés d’artistes comme Manu Militari, Accrophone et le groupe CEA. Figure connue dans le milieu du hip-hop québécois, il ne chante pourtant que des morceaux évangéliques. Pour Minister G, il est clair que le populaire gangsta rap, qui vante les «bienfaits» de la drogue, du sexe, de l’alcool et du banditisme, véhicule des messages plus destructeurs qu’autre chose. L’artiste croit tout de même que cette forme d’art a sa place dans la société, à l’instar du sien.

«Chaque artiste provient d’un milieu différent et ce qu’il véhicule dans ses messages, c’est ce qu’il vit au quotidien. On peut difficilement empêcher qui que ce soit de parler de son vécu. C’est d’ailleurs ce que je fais moi-même : témoigner de ma réalité.», raconte le jeune homme.

Élevé par des parents chrétiens, Minister G. n’a pas toujours respecté les principes qui guident aujourd’hui ses pas. À l’adolescence, il évoluait dans un environnement criminalisé où les vols et les invasions de domiciles étaient monnaie courante. Mais à 33 ans, ce passé est loin derrière lui. Il se consacre maintenant à promouvoir un rap positif, où la parole de Dieu prend toute la place.

Vrai ou faux rap hip-hop?

523673_when_a_cowboy_dies Loin de se définir comme une chrétienne, Marième Ndiaye, membre du groupe hip-hop québécois CEA et animatrice de l’émission Les Arshitechs du son à Canal Vox, une revue hebdomadaire couvrant l’actualité de la culture hip-hop québécoise et internationale, est catégorique: il n’existe pas de vrai ou de faux hip-hop. «Je trouve que c’est une drôle de formulation que les gens, et même les artistes, aiment utiliser. Pour moi, dans la mesure où tu rappes, que tu as un background hip-hop et que tu respectes les sonorités et le rythme qu’il faut, tu fais du hip-hop. Par contre, ce qui existe, c’est le bon ou le mauvais hip-hop.»

Le rap provient d’un contexte de dénonciation d’inégalités sociales et de rébellion. Cette musique, aux propos incendiaires, représente le moyen d’expression des jeunes des ghettos. Marième Ndiaye est d’avis que plusieurs artistes composaient déjà, à l’époque, des morceaux d’un autre acabit, plus festifs. «Il faut être capable de voir qu’il y a d’autres types de rap que le seul traditionnel. Il y a encore des artistes qui militent, comme Imposs, mais le hip-hop s’est beaucoup diversifié depuis ses débuts.»

Le hip-hop et l’Évangile: deux révolutions

D’après le responsable spirituel de l’église Nouvelle Espérance de Rivière-des-Prairies, le révérend Jean Lépine, le hip-hop «va très bien» avec l’Évangile, et c’est sans hésiter qu’il aide les jeunes de son assemblée à promouvoir cette culture urbaine. «Le rap est une musique révolutionnaire qui s’apparente parfaitement à l’Évangile, qui, lui aussi est complètement révolutionnaire. Rappelez-vous, Jésus a bouleversé les pratiques sociales de son époque, notamment en faisant une place aux enfants et aux femmes, alors considérés comme des «choses» négligeables.»

Le cheval de bataille de ce pasteur coloré et mélomane – impossible de ne pas remarquer sa guitare qui trône sur un trépied dans son bureau – est justement de donner une place aux jeunes dans son église. Mais plus que ça, il souhaite les voir mettre en valeur leurs talents naturels.

«Dans notre assemblée, on s’engage à entendre les jeunes, à les aider et à les accompagner. On évite donc d’être des sermonneurs, préférant jouer le rôle d’accompagnateurs ou de grands frères. Et ici, on ne donne pas préséance à un style musical sur un autre.»

Régulièrement, des artistes chrétiens du monde entier se produisent sur la scène de son église, comme le missionnaire Patrice Derrouche, un reggae man de nationalité française vivant en Haïti. Cet ancien toxicomane, dont la vie a radicalement changé «d’une minute à l’autre» lorsqu’il a rencontré Dieu en 1985, était en tournée au Québec au mois d’août dernier.

Ramener les jeunes à Dieu

Pour le révérend Lépine, cette musique originale est un excellent moyen d’attirer les jeunes. Non pas vers lui ou son église, précise-t-il toutefois, mais vers une relation avec Dieu: «S’il y a une société qui a besoin de la présence de Dieu, c’est bien la nôtre. Et les jeunes ont des antennes pour capter si ce qu’on leur dit est véritable ou pas. Si on leur joue la comédie, ils vont s’en rendre compte assez rapidement», croit-il.

«Contrairement aux idées reçues, les jeunes sont formidablement intéressés par la religion», ajoute Solange Lefebvre, titulaire de la Chaire religion, culture et société, de l’Université de Montréal, et auteure du livre Cultures et spiritualités des jeunes. Et selon la spécialiste, l’Église a été une des premières institutions à encadrer les jeunes.

«Aujourd’hui, les jeunes ont des pratiques religieuses à leur image. La musique est omniprésente dans leur monde et il existe toutes sortes de productions musicales chrétiennes, même du rock!». Elle ne s’étonne donc pas de la naissance du mouvement hip-hop chrétien, affirmant énergiquement que la culture populaire a toujours fait partie de l’Église.

«Les jeunes, c’est un monde en soi, et leurs spécificités appellent à la création de ministères adaptés à leur réalité. C’est vrai que les jeunes ne fréquentent plus vraiment les églises traditionnelles; ils se tiennent plutôt dans des lieux qui leur ressemblent.»

Selon des études récentes, des centaines de groupes de jeunes québécois se réunissent ainsi, dans des cafés par exemple, pour des célébrations religieuses. De plus, Solange  Lefebvre souligne que l’un des événements les plus courus par les jeunes sont les Journées mondiales de la Jeunesse, organisées par l’Église catholique. En 2002, le rassemblement international s’était tenu à Toronto et avait attiré plus de 800 000 jeunes.

Fait intéressant à noter dans cet univers en pleine effervescence: le premier rappeur millionnaire de l’histoire du hip-hop, l’américain Kurtis Blow, s’est lui-même tourné vers la spiritualité et a fondé la Hip-Hop Church, à Harlem. En 2007, il a lancé une compilation de rap chrétien, Kurtis Blow Presents: Hip Hop Ministry. D’autre part, selon le portail Top Chrétien, spécialisé dans la vente de musique évangélique, il y aurait actuellement plus de 40 groupes de rap chrétien en France.

Pour rejoindre les artistes du Café-Graffiti, (514) 259-6900.

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Classé dans Actualité, Raymond Viger

L’Évangile, après Michel…

Je vais reporter d’une autre semaine mon article sur l’affaire Robinson. Pas que je m’y intéresse moins, mais parce que je crois, au contraire, qu’elle pourrait marquer un tournant : une prise de conscience irréversible de la turpitude du système politique actuel – ses trois pouvoirs littéralement confondus – et que je me donne une semaine de grâce avant de dire des choses irréparables.

Je n‘avais pas non plus le coeur de faire suivre l’article inspirant de Yan Barcelo par un prosaique rappel de l’agonie de notre « État de droit ». Je vais plutôt, ici, faire moi aussi dans l’évangélique. Mais l’évangélique revu et remanié pour l’État néo-libéral.

J’ai assisté samedi aux obsèques de Michel Chatrand. Debout. On y a parlé des Béatitudes… Mais a-t-on pensé à ce que ça devient, les Béatitudes, dans un Monde où n’y a plus de Chartrand (s) ? Un temps où le syndicalisme est dans la corruption, la job de bras et les sociétés de placement ? Je vous propose cette version du Sermon sur la Montagne. Un peu modifiée, mais qui colle tellement mieux à la réalité…

***

Heureux les riches en esprit, car seul celui qui comprend la nature et la loi des choses peut s’en servir à son profit.

Heureux ceux qui sont forts, car ils posséderont la terre!

Heureux ceux qui ont énergie et ambition, car ils obtiendront le Succès.

Heureux ceux qui sont sans pitié ni compassion, car ils n’auront pas à dépendre de la pitié, ni de la compassion des autres;

Heureux ceux qui ont l’astuce de vaincre, car ils auront le pouvoir et la richesse.

Heureux ceux qui procurent défis, émulation et concurrence à leur prochain, car ils seront appelés « les outils du Progrès ».

Heureux ceux qui lutteront avec opiniâtreté pour devenir les meilleurs, car ils y parviendront.

Vous qui êtes riches, forts, intelligents, vous êtes le sel de la terre. Si le sel perd sa saveur, avec quoi la lui rendra-t-on? Il ne sert plus alors qu’à être jeté dehors et foulé aux pieds par les hommes. Ne renoncez donc jamais à vaincre et à dominer, car alors il en serait fait de vous.

Vous êtes, les maîtres, l’élite, la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée et on n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau; on la met sur le chandelier et elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison. Que votre lumière luise ainsi devant les hommes, afin qu’ils voient votre supériorité et qu’ils glorifient en vous l’oeuvre du Créateur

Ne croyez pas que je sois venu pour abolir la Loi et changer l’ordre naturel des choses; car, je vous le dis en vérité, tant que le ciel et la terre ne passeront point et jusqu’à la fin des temps, il ne disparaîtra pas un seul iota des lois de la nature. Je ne suis pas venu pour les abolir, mais pour qu’elles s’accomplissent.

Accomplissez la Loi de la nature, qui est que le fort se nourrisse et grandisse de la substance du faible. Car, je vous le dis, si votre intelligence et votre détermination ne surpassent celle des prêcheurs de morales et des faiseurs de bonnes oeuvres vous ne parviendrez pas au Succès.

Il a été dit aux anciens: « Tu ne tueras point « . Moi, je vous dis: si tu as un adversaire, débarasse-t-en promptement, avant qu’il n’en fasse de même avec toi; car personne ne sort d’un différend avant qu’il n’en ait payé la dernière obole ou que son ennemi n’ait été abattu. Et ne croyez pas que votre ennemi ait été abattu simplement parce qu’il a trébuché, mais tenez-le pour vaincu seulement lorsque ses cendres auront été dispersées par le vent.

Je vous le dis en vérité, quiconque laisse vivre son ennemi ou son rival le regrettera; quiconque laisse vivre celui qui n’a pas la force de vivre et de grandir mérite d’être puni par le destin; celui qui retarde la victoire des êtres supérieurs mérite d’être relégué au rang des êtres inférieurs et celui qui met en péril le triomphe de la force doit être condamné pour toujours à rejoindre le troupeau des faibles.

Si donc tu es à sauver la vie de ton frère et que t’apparaisse l’occasion qui te rendra plus vite plus riche et plus fort, laisse là ton frère et va d’abord faire ce qui te sera le plus profitable, puis reviens, s’il en est encore temps, terminer ce que tu avais entrepris auprès de ton frère. Car la vie de ton frère peut aider à ton Succès, mais n’en est pas assurément le gage et il se peut que tu aies mieux à faire.

Il a été dit: « Tu ne commettras point d’adultère ». Mais moi, je vous dis que quiconque regarde son prochain avec tendresse a déjà commis un adultère en son coeur, se rendant vulnérable à l’émotion, à la compassion et à la déraison. Si ton coeur est pour toi une occasion de faiblesse, arrache-le et jette-le loin de toi; car il est mieux pour toi de parvenir sans coeur au Succès que d’en rester à jamais privé. Et si quelqu’attachement est pour toi une occasion de faiblesse, mets-y fin sans tarder; car il vaut mieux pour toi d’arriver au Succès seul que de périr en restant attaché à ceux qui n’y parviendront pas.

Il a été dit: « Que celui qui répudie sa femme lui donne une lettre de divorce ». Mais moi, je vous dis: ne prenez jamais d’engagements que vous ne pourrez répudier sans dommage et ne donnez de lettre à personne. Il a été dit aux anciens: « Tu ne te parjureras point, mais tu t’acquitteras envers le Seigneur de ce que tu as déclaré par serment ». Mais moi, je vous dis de ne jurer aucunement; ni par le ciel, ni par la terre, ni par Jérusalem qui est la ville de David. Que votre parole soit « peut-être », et que même cela soit dit sans témoins, car un oui comme un non risque de vous causer des ennuis et de mettre en péril votre Succès.

Vous avez appris qu’il a été dit: « oeil pour oeil, et dent pour dent ». Mais moi, je vous dis: crevez le premier tout oeil qui est mal gardé, car le borgne vous fera moins de mal que celui qui a deux yeux et l’aveugle ne vous en fera aucun. Vous serez alors en paix, car il n’est plus nécessaire de résister à celui qui ne peut plus être méchant.

Si quelqu’un t’a frappé sur la joue droite, gifle toi-même ta joue gauche pour t’apprendre à être prudent. Si quelqu’un veut plaider contre toi, vois s’il n’est pas un juge qui te donnera raison, ou un terrain plus propice où lui livrer combat. Si quelqu’un veut prendre ta tunique, vois si, ce faisant, il ne s’est pas mis en position de faiblesse et si tu ne peux pas lui arracher sa tunique et aussi son manteau.

Si quelqu’un te force à faire un mille, fais-lui en faire ou payer deux à la première occasion. Demande aussitôt en retour à celui qui te demande, car c’est l’heure propice à laquelle il exaucera ta demande; ne te détourne pas non plus de celui qui veut emprunter de toi, car c’est le moment de le tenir en ton pouvoir.

Il a été dit: « Tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton ennemi ». Mais moi, je vous dis: n’aimez personne. Traitez vos amis comme s’ils pouvaient devenir vos ennemis. Car voyez le lion repu et la gazelle qui se côtoient au point d’eau, mais le lion, demain, aura faim à nouveau.

Remerciez le Créateur pour ceux qui vous maudissent, car ils ont ainsi la faiblesse de la franchise et il y a un profit à tirer de ceux qui avouent vous haïr; bénissez aussi ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent, car ils avivent en vous la force d’être impitoyables.

Si vous aimez ceux qui vous aiment, quel avantage en retirerez-vous ? Les plus gueux d’entre vous n’en font-ils pas autant? Et si vous aidez ceux qui vous aident, que faites-vous d’extraordinaire? Les pauvres et les misérables aussi n’agissent-ils pas de même? Mais n’aimez et n’aidez personne, ni même qui vous aime ou qui vous aide, mais profitez de chacun jusqu’à la limite de sa bienveillance; ainsi vous serez dignes d’atteindre au Succès.

Voyez l’agneau qui sert de pâture au loup. Et le petit poisson n’est-il pas aussi la pâture de celui plus gros qui le dévore? La force se repaît de la faiblesse et toute vie ne vit que de la vie qu’elle détruit en la consommant. Soyez donc parfaitement implacables, comme est implacable la Loi de la Nature.

Gardez-vous de chercher la réussite aux yeux des hommes en négligeant le vrai pouvoir, lequel est souvent caché. Ne vous laissez pas entraîner à placer votre argent sans égard à ce qu’il rapportera, pour la vaine gloriole de l’annoncer en sonnant de la trompette dans les synagogues et dans les rues. Je vous le dis en vérité, ceux qui agissent ainsi ont déjà retiré de leur vanité leur profit et n’en retireront pas d’autre. Quand tu transiges une affaire ou investis, fais plutôt que seule ta main gauche sache ce que fait ta droite et que ton placement se fasse en secret, dans un endroit discret et porte close; c’est ainsi que le Succès viendra à toi.

Ne pensez pas qu’en accordant de nouveaux avantages on puisse faire oublier les injures passées. Dans votre marche vers le Succès, ne pardonnez donc rien à personne car nul ne vous pardonnera quoi que ce soit et la nature elle-même encore moins que quiconque.

Si les événements font que la richesse vous manque, ne prenez pas un air triste, comme les faibles qui montrent un visage défait, pour inspirer la pitié. Parfumez alors plutôt votre tête et lavez votre  visage, afin de ne pas montrer aux hommes que vous jeûnez; ainsi ils vous garderont toute leur estime et le sort vous redeviendra favorable.

N’amassez pas des trésors tangibles que l’on peut détruire et que les voleurs dérobent, mais amassez-vous des trésors intangibles, virtuels, que la teigne et la rouille ne détruisent point et là où les voleurs ne percent ni ne dérobent. Car là où est ton trésor, là aussi est ta force. Ta fortune est la lampe qui éclaire ta personnalité. Si ta fortune est considérable, toute ta personnalité en est mise en lumière, mais si tu es pauvre tu seras dans les ténèbres.

Nul ne peut servir deux maîtres. Vous ne pouvez servir la faiblesse et la force. C’est pourquoi je vous dis: ne vous inquiétez pas des illusions des prêtres et des poètes, mais de votre vie, de ce que vous mangerez et de ce dont vous serez vêtus.

Regardez les oiseaux du ciel: ils ne sèment ni ne moissonnent et ils n’amassent rien dans des greniers; il en est donc peut qui survivent à l’hiver. Ne valez-vous pas mieux qu’eux?  En vérité, je vous le dis, celui qui ne travaille ni ne file ne sera pas vêtu comme Salomon dans sa gloire, mais ira nu.

Cherchez la fortune et le Succès et le reste vous sera donné par surcroît. Mais cherchez dès aujourd’hui, car demain n’aura soin de lui-même que si la veille vous vous êtes donné la peine d’y pourvoir.

Évaluez votre prochain sans complaisance, car il vous jugera de la même façon. Mais ne dites pas: « Frère, laisse-moi ôter une paille de ton oeil », car ce n’est pas l’oeil de votre frère qui vous permet de mieux voir. Veillez d’abord à ce qu’il n’y ait pas en vous de faiblesse et votre frère en fera autant ou périra. .

Demandez avec assurance et l’on vous donnera; cherchez avec perspicacité et vous trouverez; frappez avec force et l’on vous ouvrira. Car lequel de vous refusera de donner ou d’ouvrir à plus fort que lui? Et qui peut si bien cacher que nul ne trouvera? Tout ce que vous savez que vous accepteriez de céder à la force, sachez que les autres vous le céderont également, si vous avec cette force. Car large est la porte, et spacieux le chemin qui mène à la pauvreté – et il y en a beaucoup qui entrent par là – mais étroite est la porte et resserré le chemin qui mène au Succès et peu s’y engagent. Entrez par la porte étroite.

Gardez-vous des moralisateurs et des prêcheurs de vertu, car ils vous prendront ce que vous avez par la ruse plutôt que la force et, si vous avez une excuse pour céder devant la force, vous n’en avez pas pour être naïfs devant ces gens. Jugez-les aux fruits qu’ils offrent; car cueille-t-on des raisins sur des épines, ou des figues sur des chardons? Celui qui offre le dénuement vous mènera-t-il à la richesse? Celui qui offre le renoncement vous conduira-t-il au Succès? Celui qui porte le cilice et parle de sacrifice vous enseignera-t-il le chemin du bonheur et de la joie?

Tout arbre qui ne porte pas de bons fruits doit être coupé et jeté au feu. Les prophètes qui disent: « Seigneur, Seigneur! » ne vous apporteront rien. Ceux-là seuls qui comprennent la faiblesse humaine atteindront le Succès, le bonheur et la joie.

Ceux qui ayant écouté ces paroles hocheront la tête béatement et retourneront à leurs errements antérieurs n’atteindront pas le Succès. Qu’ils ne croient pas faire de miracles en mon nom. Ceux-la atteindront le Succès qui s’astreignent à comprendre le miracle permanent qu’est la Vie. C’est pourquoi quiconque entend ces paroles et les met en pratique est semblable à un homme prudent qui a bâti sa maison sur le roc. La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé et se sont jetés contre cette maison, mais elle n’est point tombée, parce qu’elle était fondée sur le roc: l’égoisme de l’être humain.

Ce petit message aux Lucides leur est offert en memoire de Michel Chartrand. Pour qu’ils comprennent qu’on les a bien compris. Maintenant, on va les abattre.

Pierre JC Allard

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