Les médias traditionnels se cherchent un nouveau modèle d’affaires du côté de la convergence. Les deux derniers conflits de travail chez Québécor, Journal de Québec et maintenant Journal de Montréal, sont nés de cette volonté d’imposer ce nouveau modèle d’affaires. Or, selon moi la convergence est un concept commercial qui vise d’abord et avant tout à tenter de sauver les meubles dans une maison qui brûle.
Et si nous retournions le phénomène à l’envers pour l’observer du point de vue de nous que nous appelons les «récepteurs» depuis les premières théories de la communication, une image longtemps demeurée comme paradigme de la consommation des médias commerciaux et qui continue à les aveugler?
Par exemple pour moi qui suis un «récepteur» modèle baby-boomer, la convergence ce n’est surtout pas de profiter sur plusieurs plateformes de mon «média préféré». Je vais chercher sur de multiples sources ce que je veux connaître, savoir, comprendre, et je fais converger le tout vers les deux lieux où je m’abreuve de tout cela : mon Mac et mon iPod (exit télé, journaux, magazines). Dans ma convergence à moi, les Québécor, Gesca, Radio-Canada et autres sont plutôt en périphérie de mes sources, devenues mondiales et multiples.
Encore hier, alors que je suivais la couverture RDI de la visite d’Obama sur le Web, celui-ci a disparu pendant quelques minutes du radar de Radio-Canada. De mon côté, je savais où il était grâce à Twitter (near:Ottawa,On within:50km): @MichaelMcKay: Obama visits Byward market right below my office!
Mes bonnes analyses de la scène internationale, je les trouve ailleurs que sur les sites des médias commerciaux où j’entends, la plupart du temps, des platitudes (avec des exceptions, évidemment).
J’aime bien, par exemple, Planète Terre, une nouvelle émission hebdomadaire d’affaires internationales produite par le Centre d’études et de recherches internationales (CÉRIUM). C’est Jean-François Lisée qui l’anime. Pendant que Gesca envoie sa vedette Web Patrick Lagacé faire des reportages (que je n’ai pas vu, mais dont j’ai assez pris connaissance de la nature par des blogueurs pour pouvoir juger) sur le conflit à Gaza, démontrant à quel point ses choix éditoriaux sont désormais animés par le fric, il est rassurant de voir de telles initiatives se produire. Nous en avons grandement besoin.
Remarquez que j’écoute aussi d’excellentes émissions d’information provenant de médias non commerciaux de partout à travers le monde grâce à la baladodiffusion. Je vous recommande notamment les émissions de France culture, mais aussi de radios publiques tel KPFA du réseau américain alternatif Pacifica. Sur iPod, il y a aussi l’application Stitcher qui me permet de trouver d’excellentes émissions d’information et d’affaires publiques.
Je ne sais pas combien sont comme moi. Je ne sais pas non plus combien parmi les jeunes publics [pas les ados, les jeunes adultes] et les moins jeunes sont et seront de plus en plus ailleurs que sur le champ de bataille de la convergence commerciale.
À bien y penser, ne faudrait-il pas plutôt parler de divergence pour décrire ce phénomène de décrochage vis-à-vis des médias commerciaux?
L’archétype de cette divergence est le iPhone (ou iPod touch dans mon cas, mais cela revient au même). Sur cet appareil, mon «fil médiatique» se forme à mesure des morceaux provenant de diverses applications (les app développées pour le iPod, mais aussi des app Web fonctionnant avec le iPod). En ça, je diverge complètement du modèle de «consommation» des contenants écrits, audios, vidéos qui ont dominé mon «paysage médiatique» entre, grosso modo, 1950 et l’ère inaugurée par iPod.
Même sur mon ordinateur, je n’ai pas le réflexe d’aller m’informer en visitant les médias commerciaux. Pourtant jadis, j’étais un lecteur assidu du journal Le Devoir et je fréquentais régulièrement les émissions d’information de Radio-Canada (devenu aussi commercial que les autres, sauf heureusement à la radio).
Bref, je suis devenu l’antithèse du «consommateur» de médias. Conséquence indirecte : je ne vois pratiquement plus de publicité. S’il m’arrive d’avoir besoin de quelque chose, ce n’est pas parce que j’aurai été matraqué de pubs sur toutes les plateformes par des médias convergents.
En prime, je n’ai été aussi informé que depuis que je ne fréquente plus les médias commerciaux.
Suis-je une exception? Peut-être aujourd’hui, mais demain…