Depuis plus d’un an, nous sommes envahis quotidiennement par les présidentielles américaines. Depuis septembre, nous avons vécu nos propres élections canadiennes qui nous ont ramenés à la case départ. Et nous repartirons de plus bel avec une élection pour tenter d’élire un gouvernement majoritaire au Québec.

Tsunami économique
Si des élections avaient eu lieu la fin de semaine dernière, le Parti libéral l’aurait emporté avec 42% des votes, contre 34 % au Parti québécois, révèle un sondage réalisé par Léger Marketing pour le compte du « Journal de Montréal » et de TVA. L’ADQ s’effondre littéralement avec un maigre 14% des votes.
Les enjeux sont simples. Les sondages montrent que Jean Charest a le vent dans les voiles pour se retrouver à la tête d’un gouvernement majoritaire. La conjoncture économique désastreuse, s’il tarde à déclencher des élections, pourrait le mener vers un gouvernement minoritaire ou une défaite électorale en raison de l’insatisfaction avec laquelle la population accueillera progressivement les mauvaises nouvelles.
Vaut mieux donc profiter des bonnes nouvelles maintenant et s’armer davantage pour les catastrophes à venir.
Le « Parti québécois » et l’« Action Démocratique du Québec » ont tout à perdre. Dans le cas de cette dernière, Mario Dumont paraît moins bien que son parti. Les électeurs qui avaient voté massivement pour ce parti – parce qu’ils étaient insatisfaits de Jean Charest – pourraient revenir tout aussi massivement aux origines traditionnelles. Après Jean Charest, la colère des insatisfaits se tourne maintenant vers Mario Dumont.
Selon le directeur général des élections, le Parti libéral a engrangé plus de sept millions $ dans ses coffres. Le Parti québécois traine encore un déficit de 800 000 $. L’Action démocratique vient à peine d’éponger son déficit. Il faut dès lors comprendre pourquoi les partis d’opposition crient et se démènent comme des diables dans l’eau bénite. Si le Parti libéral risque de vivre plus tard le tsunami économique, les partis d’opposition, eux, risquent de vivre maintenant le tsunami électoral. Déjà que le dollar canadien s’échangeait à 77,17 cents US mardi, à l’ouverture des marchés, en baisse de 0,42 cent par rapport à la clôture de lundi.
Il ne faut pas se laisser berner par les déclarations de Jean Charest selon lesquelles le gouvernement serait devenu ingouvernable. Seule la conjoncture politique au Québec, qui lui donnerait un gouvernement majoritaire, motivera sa décision de déclencher ou non des élections. Au risque d’indisposer une partie de l’électorat, un peu lassé par les discours électoraux, Jean Charest fait le pari de remporter haut la main les prochaines élections, si elles ont lieu à court terme. À très court terme. Pourquoi Jean Charest s’en priverait-il puisque deux Québécois sur trois sont satisfaits de son gouvernement ?
Cette allusion, au cours du week-end, à un gouvernement « ingouvernable », s’appuie bien évidemment sur cette coalition des deux partis d’opposition pour faire élire François Gendron à titre de président de l’Assemblée nationale. D’autre part, les messages d’hostilité lancés par les deux partis au cours du week-end sur une défaite possible à l’Assemblée nationale donnent un prétexte en or à Jean Charest pour évoquer l’urgence de déclencher des élections face au tsunami économique qui guette les Québécois.
Les partis d’opposition ont marqué le terrain. Pour Pauline Marois, si la population se fie sur la gestion de « crise du fromage », le gouvernement ne fera pas mieux pour gérer la crise économique. Est-ce la trouvaille du siècle ce rappel du dernier week-end des velléités autonomistes des adéquistes ? « Il faut continuer de parler de Constitution, mais c’est clair que nous n’entamerons pas ce débat durant une crise financière », déclarait Mario Dumont.
Les partis d’opposition sont pris de court, point ne pas dire de panique : « Les citoyens sont préoccupés par les soubresauts de l’économie et pendant ce temps Jean Charest ne pense qu’à assurer son propre avenir de premier ministre, c’est totalement irresponsable », commentait la présidente régionale du Parti Québécois pour le Bas-Saint-Laurent, madame Carole Boucher. « C’est la pire chose qui peut arriver pour le Québec », déclarait à Québec la députée de Lotbinière, Sylvie Roy, déléguée par le chef de l’opposition officielle Mario Dumont pour réagir à la tenue probable d’une nouvelle campagne électorale.
Madame Carole Boucher s’interrogeait bien candidement : « Soyons sérieux, à peine une année et demie plus tard, il faudrait utiliser 80 millions de fonds publics pour retourner aux urnes ? C’est ça la priorité pour les libéraux ? » Que la présidente régionale du Parti Québécois pour le Bas-Saint-Laurent le veuille ou non, il est clair que la raison principale du Parti libéral du Québec est de gagner la prochaine élection puisque les sondages lui sont favorables. Quel qu’en soit le prix à payer.
Selon ce même sondage Léger Marketing réalisé pour le compte du « Journal de Montréal » et de TVA, à la question « Qui ferait le meilleur premier ministre du Québec ? », Jean Charest profite d’une avance considérable avec 40 pour cent, contre 26 pour cent pour Pauline Marois et 12 pour cent pour Mario Dumont. Françoise David termine la marche avec 4 pour cent. Par contre, chez les francophones, Pauline Marois est favorite, avec 40 pour cent, suivie de Jean Charest, avec 37 pour cent, et 12 pour cent pour Mario Dumont.
Qu’entendait faire madame Pauline Marois, si des élections ne venaient pas contrecarrer ses plans ? Simple : prendre son bâton de pèlerin pour convaincre la population de la nécessité de faire du Québec un pays. Mme Marois a, au cours du dernier week-end, rappelé son objectif de mobiliser la population autour du projet souverainiste. La conférence du week-end devait porter sur la souveraineté mais la crise économique est venue modifier les plans des péquistes. Faut-il s’en surprendre ?
Le déclenchement des élections au Québec aura le mérite, avant l’arrivée du tsunami économique, de connaître qui, des trois partis, sera en meilleure position pour gérer cette crise appréhendée. Les trois partis devront rendre publiques les mesures qu’ils entendent prendre pour rassurer la population québécoise et protéger leurs acquis. Fait à noter : depuis l’annonce à peine voilée de Jean Charest d’éventuelles élections au Québec, ni Mario Dumont ni Pauline Marois n’ont eu le courage d’affronter eux-mêmes la presse pour donner leur point de vue. Ils l’ont exprimé au Salon bleu de l’Assemblée nationale.
Bernard Drainville a beau répéter qu’aller en élection serait « irresponsable » en raison de la situation économique, le Parti québécois n’a rien fait pour montrer qu’il pourrait être plus efficace en termes de gestion de crise que l’actuel gouvernement minoritaire. En ce qui concerne l’Action démocratique, il en va de même. Avec raison, Jean Charest conclut que les priorités des partis d’opposition sont loin de l’économie. Ils l’ont amplement démontré lors du dernier week-end.
Un lecteur du quotidien Le Devoir commentait en ces termes l’annonce d’une prochaine élection au Québec : « le week end dernier, le PQ et l’ADQ ont décidé d’aligner leur priorité sur la constitution… et de harceler le parti au pouvoir… Le Parti Libéral lui propose un alignement sur l’économie, le développement du nord, et a besoin d’un mandat fort à cet effet. Que choisiront les citoyens ? Un gouvernement majoritaire centré sur l’économie ou relancer les stériles débats constitutionnels et favoriser l’incertitude économique ? »
Et notre collègue François Marginean en profitait également pour poser la question des SLAPP : « Si on est pour s’en aller en élections, aussi bien en profiter pour questionner nos élus et reprendre le contrôle de ce système hyper-capitaliste hors de contrôle ».
Pierre R. Chantelois
Débat des chefs : nul!
Bien cacophonique ce débat. Jean Charest m’a réellement tapé sur le petit nerf, il me semblait que son visage se déployait en plusieurs tons de rouge tout au long des deux heures. Peut-être que la population trouve Pauline Marois snob, mais Jean est fendant comme pas possible. À choisir entre quelqu’un de snob et quelqu’un de fendant, je choisi le snobisme, ça me semble plus doux à l’oreille et à l’oeil.
Justement, Pauline m’a bien fait rire avec ses commentaires aux paroles de Jean, malgré le fait qu’elle poussait la note réactive parfois un peu trop fort. Ses réactions étaient bien humaines pour une dame que l’on accuse de se placer sur un piédestal… En tant que spectateur, c’est bien à elle que je m’identifiais.
Mario Dumont m’a aussi bien impressionné par son sérieux. Moins pour ses idées, ça, c’est sûr! Dommage pour lui et ses partisans que son bilan comme chef de l’opposition soit si catastrophique, sa performance au débat l’aurait grandement aidé.
En réaction au titre d’un article de La Presse, « Match nul », Steve Proulx trouve que « c’était nul ». Je ne suis pas d’accord, parce que si je me suis amusé en le regardant, je ne peux pas trouver ça nul… Et puis, donner comme pronostic « match nul », c’est un peu trop faire gagner le chef du Parti Libéral à mon goût!
(Photo : Jérôme Mercier)
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