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Islam. Le songe d’une nuit d’été

Mon billet d’aujourd’hui est résolument aoûtien.  J’ai voulu laisser en suspens pour un moment l’analyse factuelle de la crise financière globale, l’indignation concernant  les vicissitudes de la politique française – avec ses sondages et sa corruption – et mon apitolement sur  la stagnation de la pensée politique au Québec.  J’ai voulu plonger dans l’imagination.

Donc, il ne faut pas voir ce texte comme une prophétie – encore moins comme un voeu ! – mais simplement comme un petit scherzo  onirique en mineur, dans la symphonie tragico-pathétique qui est la musique de fond de cet été. Une saison qui, pour notre civilisation, semble hélas prémonitoire d’une fin du monde…

Parlons religion-fiction. On parle beaucoup de l’Islam qui va changer l’Occident, mais que se passerait-il, si c’est l’Occident qui changeait l’Islam ? Avec la science qui n’explique pas tout et la possibilité bien réelle que tout aille de mal en pis, il n’est pas exclu que le monde se refugie dans le fondamentalisme religieux pour se lover tranquille dans un nouveau Moyen-Âge.  Si l’on prend cette voie, sont-ce les preachers  à l’Américaine qui prendront charge d’âmes en Occident…?  Ou n’est ce pas l’islam qui serait, même chez-nous, le bon véhicule d’un retour à la foi ?  L’Islam, peut-être, s’il changeait un peu…

Qu’est-ce qui devrait changer dans l’Islam pour que l’Occident y trouve ses réponses ?  A première vue, TOUT. Mais, si on y regarde de plus près, on peut voir dans l’Islam les germe de transformations qui en ferait une religion universelle au goût de l’Occident d’aujourd’hui. Des transformation guère plus radicales que celles qui ont permis jadis au judaisme de quitter ses oripeaux d’origine pour devenir christianisme.

Si on pose au depart que l’Occident, déçu et meurtri, voudrait  revenir à un monothéisme rassurant, celui de l’Islam est plus pur que celui des Juifs ou des Chrétiens. La notion fondamentale de l’Islam est celle d’un Dieu ineffable. Le reste est culturel… et donc négociable.  Tenez, si on interprète un peu cette notion de Mahomet, « sceau des prophètes », il n’est pas difficile d’en faire le message qu’il n’y aura plus en effet de prophètes, puisque l’humanité, déjà éduquée et informée de Dieu, n’a plus qu’a obéir à sa conscience et au Livre…

Mais le Livre lui-même peut s’interpreter… Ainsi le prosélytisme n’a plus a être une conquête par les armes, mais  peut en être une par la connaissance.  Et toutes ces sagas guerrières du Coran, comme celles de la Bible, n’ont pas à être plus littérales que la création du monde en 6 jours. Elles peuvent n’être que des paraboles, des histoires dont il faut trouver le sens. Un sens qui correspond aux besoins du XXIe siècle.

Quand on VEUT interpréter, Il peut ne rester du Coran et de l’Islam que le Dieu (Allah) … et des conseils judicieux.  Prenons la prière, 5 fois par jours. Pourquoi ne deviendrait-elle pas un “moment de communion” avec Dieu ?  Une remise en question  fréquente qui permet de remettre les pendules à l’heure, de ne pas laisser le passé determiner l’avenir – ce qui est la notion de karma –  mais de repartir base-zéro sur qu’on croit la volonté de Dieu ?  Briser le karma. Pardon des offenses. Changer d’avis. Renoncer a l’entêtement… Et le front par terre n’est qu’une simple coutume locale: on peut communier avec Dieu debout…

Ramadan ?  Un autre symbole à interpréter. Le jeûne devient la decision de se priver pour ne pas abuser du pouvoir que l’abondance a donné a l’Homme sur la nature.  Du pouvoir que la Nature a donné au fort sur le faible.   La vertu cardinale d’une société d’abondance  devient la simplicité volontaire. L’obésité est un péché et le symptôme du déséquilibre. La manifestation de l’avarice.

Des impôts ?  Concept dépassé: tout le monde triche. Pas d’impot, mais la confiscation progressive au-dela du seuil de satiété determiné par un consensus populaire. Avant ce seuil, c’est l’aumône qui exprime une volonté de partage. Celui qui ne contribue pas sa part est identifié au mepris populaire et sa fortune sera reprise à sa mort, ce qui sera l’equivalent émotif déshonorant de faire payer ses dettes par ses héritiers.

Quand le prêt à intérêt est un péché, d’ailleurs, la thésaurisation a peu d’attraits et le capitalisme lui-même change de sens. La crise financière que nous connaissons est impossible, quand c’est la pensée islamique qui prévaut. Comme est impossible tout nationalisme, tout racisme, dans un monde global qui se confond avec l’Oumma, la communauté des croyants….

L’Islam en Occident. Rêve ou cauchemar?  Vision paradisiaque ou dantesque ? Je n’en sais rien. Juste un songe d’une nuit d’été…. Mais on aurait tort de ne pas même penser à cette hypothèse

Bonne vacances

Pierre JC Allard

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La Chine éveillée

Napoléon, puis Peyrefitte… on nous l’avait bien dit qu’elle nous ferait trembler… Si vous avez moins de 50 ans, je vais vous annoncer une mélancolique nouvelle.   Cette idée d’être les meilleurs en tout, parce qu’on est blanc, judéo-chrétien, gréco-latin, Occidental, quoi, n’a plus beaucoup d’avenir.  Vous croyez qu’on aura toujours les meilleurs sièges au spectacle du monde, parce qu’on est créatif, aventureux, rationnel, qu’on a inventé la liberté et la démocratie, la science et la technologie, l’altruisme et la charité ?  Vous allez être déçus.  Le résultat le plus permanent de la crise actuelle, c’est que, lorsqu’elle sera terminée, l’Occident ne sera plus dans le fauteuil, mais sur le strapontin.

La Chine prend le volant. Tragique ? N’exagérons rien.  Sur le plan cosmique, sub specie aeternitatis, une vaguelette imperceptible. Sans importance pour Gaïa et un détail pour ce qui, on l’espère, sera la longue histoire de l’humanité.  Mais peut-être éprouverez-vous une vague nostalgie, dans vos vieux jours, à penser que vous aurez été les derniers dans le siège du conducteur.  Un rétablissement psychologique à faire, aussi, pour la génération de vos enfants qui ne seront plus la Race des Seigneurs.

On écrira certainement des livres sur la longue décadence de notre civilisation, mais bornons nous ici au dernier chapitre. La double déconstruction, depuis deux générations, d’une part  de nos valeurs et, d’autre part, de notre structure  de production.

Pour nos valeurs, on a accepté qu’elles soient cyniquement remplacées par un égoïsme pur, menant à la perte de confiance en tout et en tous qui est la conséquence logique de la projection sur les autres de cet égoïsme que l’on ressent en soi. Fatal pour une société, puisque celle-ci repose économiquement sur la division du travail, politiquement sur la délégation réciproque de tâches et de l’autorité pour les accomplir et que le concept même de bonheur, qui sert de justification à tout effort commun, repose sur l’hypothèse que l’on est plus heureux lorsque l’on n’est pas seul…

Pour la production, la recherche d’un optimisation du profit sur un horizon n’excédant pas celui d’une vie humaine a conduit l’Occident à exporter sa capacité même de production industrielle, lâchant la proie pour l’ombre et n‘en gardant que le contrôle des variables financières. Contrôle précaire qui ne vaut que si est respecté un consensus que seule la force militaire peut imposer à ceux qui n’en profitent pas.

Sans autre valeur que son cynique égoïsme, l’Occident, qui a bradé les outils de creation de la richesse réelle, se retrouve avec des symboles monétaires qui ne valent plus rien et une force militaire qui peut encore détruire, mais dont il a été amplement prouvé, au Vietnmam et en Irak, que ses effectifs n’auraient ni la motivation ni la vertu, au sens romain du terme, de gagner une véritable guerre.  L’Occident est devenu ce « tigre en papier » dont parlait Mao.

La Chine va sortir grande gagnante de cette crise.  Elle a tous les atouts.  D’abord, elle a celui évident d’une capacité de production en plein essor, ostensiblement tournée vers l’exportation, mais dont la fusion du politique et de l’économique a permis l’éclosion en Chine d’un nouveau “capitalisme d’État” qui pourrait réorienter rapidement cette capacité vers la consommation domestique.

La réorienter sans les arguties auxquelles une tentative de ce genre donnerait lieu, dans une démocratie occidentale mandataire d’un capitalisme privé.  Si la Chine était contrainte de cesser d’exporter — ou choisissait simplement de le faire — elle ne ferait que des heureux dans sa population, dont elle pourrait mieux satisfaire la demande de consommation depuis longtemps réprimée. La Chine produit.

Que des heureux ? À quelques exceptions près… dont on pourrait attendre la plus grande discrétion. Cette discrétion est le deuxième grand atout de la Chine. La Chine est une dictature que sa population Han considère majoritairement bienveillante et éclairée et que ses minorités tibétaine, ouigour et autres n’ont pas la masse critique de contester. La Chine est gouvernée.

Elle n’est pas, comme l’Occident, tombée dans le piège tendu par le Capitalisme d’une pseudo démocratie totalement soluble dans une omniprésente corruption et donc complètement manipulée par le pouvoir financier. On a compris en Chine que, dans une économie monétaire, l’État n’est pas vassal de l’argent. Celui qui a le pouvoir politique CRÉE la monnaie et y ajoute à sa convenance le pouvoir économique.

Dans une Chine quasi-autarcique, le pouvoir d’opposition d’un pouvoir économique distinct de celui de l’État n’est pas une véritable menace. Ce qui manque à l’autarchie chinoise, d’ailleurs, elle peut, avec ces milliers de milliards de dollars US qu’elle a accumulés, l’acheter sans problème de tous ceux qui croient encore que cet argent vaut quelque chose… Et ce ne sera pas les USA qui les détromperont.

Avec une gouvernance bien en selle, une structure de production réelle solide et même un ligne de défense dans le virtuel monétaire, la Chine poursuit un plan impeccable, comblant rapidement les quelques retards technologiques qui lui restent. Dans dix ans ce sera fait et même ses transferts de connaissances avec l’Occident se feront d’égal a égal…  D’égal à égal … en théorie.

En pratique, sa force d’attraction industrielle permettra à la Chine de faire venir à elle tous les experts qui lui manqueraient, même dans les filières du tertiaire où elle ne se serait pas hissée au premier rang. L’équilibre des forces basculera alors de plus en plus vite vers la Chine… .

Les dirigeants chinois semblent modestes. Ils parlent de construire une société de « prospérité moyenne », en rattrapant dans 20 ans le PIB par habitant du Portugal, un parent pauvre de l’UE. Mais le modeste PIB par habitant du Portugal, pour 1,3 milliards de Chinois, c’est plus que le PIB combiné des USA et de Europe incluant la Russie !

Quand son économie aura complété sa transformation vers la demande domestique et que son PIB aura ainsi augmenté, la Chine ne voudra plus  – en fait,  ne POURRA plus – vendre à l’Occident les biens industriels que nous accoutumons chaque jour davantage d’acheter d’elle. Si nous n’avons pas alors reconstitué chez-nous une structure industrielle complète, pour remplacer celle que nous avons démantelée, notre niveau de vie s’effondrera… et la population mécontente tirera ses conclusions.

La population, aigrie, comparera les vessies qu’auront apportées une démocratie bidon et un capitalisme exploiteur, avec les lanternes magiques de l’enrichissement accéléré et de la paix sociale « à la chinoise », sous l’égide d’une oligarchie en possession tranquille de la richesse et trouvant sa seule satisfaction dans la dominance.

Il n’est pas sûr que les Occidentaux ne renonceront pas à des bribes de liberté pour avoir la paix, la sécurité et la prospérité. S’ils font ce choix, l’ultime export de la Chine à l’Occident aura été être son mode de gouvernance… Une tyrannie efficace et qu’on souhaite bienveillante qui, d’ailleurs, a été le modèle par défaut de l’Histoire avant que ne viennent les Lumières.

À la victoire économique de la Chine s’ajoutera alors sa victoire idéologique, quand l’expérience démocratique, qui a été le rêve de l’Occident depuis deux siècles, ne sera pas violemment détruite, mais doucement effacée…  J’aimerais une autre fin au scénario.

Pierre JC Allard

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Un mauvais moment…

J’ai dit souvent récemment, sur mon blogue et ailleurs, que je suis bien satisfait de la façon dont l’Éstablishment américain est à réaliser sa conversion, d’un système capitaliste générateur de trop d’inégalités, vers un système plus paternaliste dont c’est la mission d’Obama de réaliser la mise en place sans effusion de sang.

Quand je dis satisfait, cependant, comprenons bien, que c’est la satisfaction d’un malade en phase terminale qui approuve les arrangements qu’on a fait pour ses obsèques. J’aime la créativité, l’initiative dans l’effort, la liberté d’expression et j’ai passé la plus grande partie de ma vie à fraterniser avec d’autres cultures. Pour ceux qui ont ces idéaux, il y aura un mauvais moment à passer.

Ce n’est pas de gaieté de cœur que je constate que le monde DOIT aller vers un forme de collectivisation, de normalisation, d’enrégimentement, accompagné d’un repli sur nos valeurs et nos frontières. Cette orientation m’attriste, mais je l’accepte, car je la vois absolument nécessaire : il n’y a pas d’autre moyen de corriger le mauvais virage que notre civilisation a pris il y a 60 ans.

On aurait pu, il y a 60 ans, prendre un autre virage. Au lieu de la Guerre Froide avec l’URSS, on aurait pu accepter, à la dimension de tout l’Occident, une lente évolution vers un plus grande présence de l’État dans la société, jointe à un respect des droits acquis et d’un nécessaire esprit d’entreprise. On aurait pu choisir de permettre de raisonnables inégalités, tout en faisant barrage à la misère.

Barrage à la misère que nous avions laissée s’installer chez-nous et aussi à celle que nous avions contribué à créer chez les autres. Au lieu de cette décolonisation sauvage qui a transformé les esclaves en serfs, libres surtout de se cannibaliser sous peine mourir de faim, l’Occident aurait pu assumer la responsabilité de conduire à l’autosuffisance et à une autogouvernance efficace les peuples dont nos prédations avaient interrompu le développement. Si, au lieu d’un Rideau de fer on avait bâti des ponts entre l’Est et l’Ouest, on aurait pu aussi en créer entre le Nord et le Sud.

Mais on ne l’a pas fait. On a choisi l’antagonisme. On a suivi, dans le monde dit « libre », l’attachement à courte vue à un néoliberalisme en forme de martingale pyramidale, ne pouvant survivre que par une création de richesse fictive dont l’irréalité serait tôt tard découverte. Dans le monde des république dites « démocratiques », on a suivi l’attachement doctrinal à des recettes que l’avènement de l’abondance rendait désuètes et à des politiques coercitives fatales à la liberté et à a la créativité.

Est et Ouest se sont enlacés comme les scorpions dans la bouteille, dans un conflit qui a perduré jusqu’à la chute du Mur de Berlin. Lorsqu’il est tombé, on s’est aperçu qu’étaient morts non seulement le «socialisme», qui aurait pu donner un idéal à l’humanité – pour dérisoire qu’on ait pu le juger – mais aussi le « capitalisme », déshonoré par le mal qu’il avait causé et qu’on n’attendait pour enterrer que la découverte de la supercherie de cette richesse factice dont il avait voulu faire une raison de vivre.

Le voile est tombé en octobre dernier, quand l’argent a perdu toute valeur. Nous sommes désormais dans un monde où il n’y a plus d’idéal politique crédible, ni de symboles financiers auxquels on puisse accorder confiance. Nous sommes dans une situation où il faudra rebâtir la société, tout en réglant au jour le jour des questions de survie. Il va falloir mettre en mouvement concerté une population désabusée.

On ne pourra le faire que si des directives cohérente sont données et suivies, ce qui ne sera possible que si la population est dirigée avec fermeté et qu’on ne lui laisse que bien peu de discrétion pour s’en écarter. Des gouvernement autoritaires vont donc se mettre en place, refermés sans doute sur des zones identitaires culturelles que leur homogénéité rendra plus faciles à gérer.

J’ai bien peur que la démocratie, déjà bien malade, ne parte en vacance pour la durée des travaux. Elle reviendra, car la liberté est le système par défaut, dans le monde d’interdépendance qui est à se créer et qui ne pourra vraiment fonctionner que par consensus. Elle reviendra, et ceux qui l’accueilleront à son retour vivront une vie meilleure dans un monde meilleur.

Il n’y en aura pas moins un moment à passer où les choses et les idées que nous aimons ne seront peut-être pas là… Un mauvais moment à passer, mais il sera moins long si nous gardons la volonté inchangée d’œuvrer pour l’avenir auquel nous croyons.

Pierre JC Allard

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Barack-le-Rouge

On a dit des choses terribles d’Obama, durant la campagne électorale américaine:  on a dit qu’il était socialiste. Des gens qui dorment dans leur vieille bagnole parce qu’ils n’ont plus de logement sont venus vociférer à ses meetings. On l’a accusé de vouloir redistribuer la richesse… ! 

Dans ce pays qui se veut de liberté, on a vu la servitude d’un lumpenproletariat conditionné depuis des générations par une petite élite fasciste à défendre l’idéologie libérale. On a touché du doigt l’abyssale ignorance, au sein de cette nation née sous l’inspiration des Lumières…. Mais les choses vont changer.

Ne pas croire que l’Amérique changera parce qu’Obama l’aura voulu. La béatitude dans l’injustice et l’inégalité est sur le point de prendre fin aux USA, mais ce ne sera par la volonté de personne, car ceux  qui auraient pu le vouloir étaient trop faibles et ceux qui en profitaient ne voulaient rien changer.

C’est l’évolution des technologies qui a fait que le capitalisme industriel atteigne son apogée, en apportant l’abondance en Occident, puis soit trahi par cette nouvelle réalité qu’il avait créée. Quand est venu l’abondance, y a maintenant 50 ans, le capitalisme a été confronté à la sursatisfaction des besoins matériels et donc au défi d’une société où la vraie demande devenait pour les services : l’éducation, la santé, les loisirs…

Dans une société tertiaire, le capital traditionnel perd de son importance au profit de la compétence, laquelle est un capital de connaissances qu’on ne peut s’approprier de celui qui l’a acquis, ce qui change la relation entre capitaliste et travailleur 

Le capitalisme à longtemps maintenu la primauté de l’industrie sur les services en créant une société de consommation factice, basée sur la possession de l’éphémère et de l’insignifiant. On a détourné la société de ses vrais besoins en lui offrant plus de joujoux, caméras, vidéos, télévisions, téléphones cellulaires, ordinateurs portables, des voitures surtout..

Mais la satiété est venue et avec elle  le dégoût de tout ce qui ne sert à rien, alors même qu’on s’apercevait que la demande réduite pour la production industrielle pouvait être mieux satisfaite par les importations d’Asie.

On savait bien qu’en y mettant des efforts, on pourrait mécaniser encore davantage l’industrie nord-américaine et produire à moindre coût toutes ces babioles, mais on savait aussi que ce serait reculer pour mieux sauter, car la société américaine en était repue et il faudrait la manipuler toujours plus  pour lui en redonner le goût qu’elle n’avait  plus alors qu’elle se mourrait d’avoir plus de services..

Mécaniser davantage – en compressant la main-d’œuvre –  ne permettrait pas, d’ailleurs, de distribuer le pouvoir d’achat pour rendre effective la demande globale.  On irait vers un système de plus en plus dépendant de diverses formes d’assistanat… tandis que les relations avec les pays exportateurs se gâteraient et nous conduiraient vers une grave crise internationale, peut-être militaire.

On a donc jouer le jeu de satisfaire tout le monde en imprimant une monnaie de singe qui ne représentait aucune valeur, les riches ayant l’élégance de ne pas la dépenser pour consommer, mais seulement pour investir, évitant ainsi l’inflation. Pour un temps…

C’était gambader dans l’hyperespace, sur les bords d’un « trou noir ».  On y est tombé.  Il y a maintenant un crise financière à regler, avec tout cet argent qui ne vaut rien…  On verra à le faire disparaître: voyez la bourse comme un four à billets. On n’aura a dévaluer que ce qui restera quand on aura incinéré tout ce qu’on peut.

Il ne faut pas penser, toutefois, ce que le crise ne soit que financière. La crise monétaire n’est que le reflet de la réalité.  Le grand défi d’Obama, c’est qu’il devra changer les choses là où ça compte dans un pays industrialisé: au palier de la production.   Le mandat que lui confient ceux à qui ce pays appartient est de voir à ce que les USA produisent autre chose et le produisent autrement. Tout tient à ça.

Il faut sortir le travailleur du secteur secondaire et le mettre à la production de services. Produire des quantités énormes de services divers, allant de la médecine au tourisme et de la culture aux jeux videos. Il faut former et recycler, pour qu’elle s’orientente vers la production de services, la plus grande partie de la main-d‘œuvre qui travaille encore au secteur secondaire.

Ce qui n’est pas un simple recyclage, mais une transformation de la culture du travail, car  les nouveaux emplois exigent de l’initiative, de la créativité, souvent un talent de communicateur, la motivation, surtout, qui va de paire avec l’entrepreneuriat.  Plus souvent qu’autrement, les services qu’ils devront rendre le seront mieux si ce sont des travailleurs autonomes qui les offrent.

La relation du capital à la compétence doit donc changer et les entreprises industrielles géantes ne peuvent survivre que si elles se scindent en une multitude de petites entreprises de taille humaine, à sein de chacune desquelles  le travailleur  aura le comportement et la motivation d’un entrepreneur.

Le cas emblématique qui va faire la preuve de cette évolution sera l’achat et la prise en charge de General Motors et autres fabricants automobiles par leurs employés et la transformation de tout ce secteur en un vaste réseau de sous-traitance, s‘inspirant de la structure qui prévaut déjà dans le secteur tertiaire.  Pour éviter que toute économie ne sombre, l’État devra donner son aval aux engagements que prendront les travailleurs acquérants envers les propriétaires actuels.

Cette transformation des travailleurs salariés en entrepreneurs autonomes ne sera  possible, que si la sécurité d’emploi – devenue illusoire quand les technologies changent rapidement – est remplacée par une sécurité du revenu. Il faudra un filet sous le trapèze d’où les travailleurs seront forcés de bondir d’un emploi a un autre

L’État, pour garantir que la demande soit effective, devra aussi garantir la valeur indexée des fonds de pension et des paiements de transferts. Il faut donc aux USA un système de sécurité sociale comme ils n’en ont jamais connu.  Obama ne pourra le faire qu’en nationalisant les institutions financières et en contrôlant la monnaie et le crédit.

Les USA, vont devoir faire face au défi de gérer une économie dont tous les paramètres changent, sans que la population ne comprenne vraiment les subtilités des changement ni leur raison d’être. On voudra un système compatissant, mais sans complaisance. Sans indulgence envers ceux qui voudront en abuser.

C’est le défi de l’URSS au début des années 20.  On  peut penser, heureusement, que ce nouveau « socialisme » a appris que la liberté et l’initiative personnelle sont les compléments indispensables à la solidarité que l’interdépendance impose aux économies développées. Ceux qui parlaient de socialisme vont néanmoins devoir apprendre le sens des mots.

 

 PIerre JC Allard

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