Parfois, l’actualité ne cesse de nous titiller. Après avoir fait des démarches sur un sujet, j’ai abandonné, et puis là, je m’y remets, armé de quelque chose comme une coïncidence.
Gilbert Lavoie du Soleil soulève un doute sur le contrôle que ferait Quebecor de l’information. À la base, il s’agit d’une chronique d’Éric Duhaime « dénonçant la position d’Amir Khadir sur le Plan Nord ». Les faits :
Ce même doute, je l’ai eu voilà pas si longtemps alors que je cherchais à retrouver une vidéo d’un segment d’une émission de Jean-Luc Mongrain. Cet extrait avait fait le tour de la blogosphère et des médias sociaux, même Patrick Lagacé en avait parlé :
Là où le bât blesse, c’est que la vidéo a été retirée du site YouTube depuis. Et, pour avoir fait le tour du site de l’émission Mongrain, j’ai pu remarquer que toutes les vidéos sont maintenant hébergées directement sur le site (ce qui semble le rendre plus lent, en plus), mais aucune trace du populaire extrait, ni de toute vidéo hébergée sur YouTube (il y a maintenant plutôt de très courtes capsules, sortes de pubs pour l’émission, ainsi que des entrevues). J’ai pris la peine de faire une demande de renseignement via un formulaire sur le site, sans autre réponse qu’un message formaté me promettant une réponse.
Je sais que c’est bien mince, mais on parle quand même d’un changement advenu pas très longtemps après la montée en épingle virale de ladite vidéo. Oui, il reste encore une entrée de blogue en date du 7 avril où les propos de l’émission sont synthétisés, mais il n’y a rien comme des images pour convaincre du sérieux d’un propos. Justement, je la cherchais, à la veille de la dernière élection fédérale, pour prouver à un utilisateur Twitter que le Parti Conservateur s’appliquait manifestement à contrôler les médias.
Personne ne tombera des nues si j’écris que le lien est facile à faire avec le penchant idéologique que prend Quebecor, via ses médias, vers la droite. Alors, magnifier la parole d’Éric Duhaime en supprimant la réplique va tout à fait dans ce sens. Et, à moindre mesure, supprimer du web cet extrait d’émission rend un tout petit petit service à notre nouveau gouvernement canadien de droite, quelle que soit la raison d’effacer ces archives disponible pour le public. Parce que ce n’est pas rien de le faire, dans un contexte où la transparence est de plus en plus importante, socialement.
Je le répète, mon doute ne tient pas sur grand-chose. Et c’est bien pour cette raison que j’avais décidé de ne pas écrire là-dessus. Mais cette histoire soulevée par Gilbert Lavoie agit comme le faisceau d’une lampe de poche pour mettre cette autre en lumière.
Les doutes ne sont bien sûr pas des faits, mais s’ils continuent de s’accumuler, ça deviendra de plus en plus inquiétant.
La défense du français comme catégorie de racisme
Par Renart Léveillé
Le sujet de la défense du français est clairement un sujet glissant. Parce que dans la défense, il faut absolument prendre parti, avoir un parti-pris, et ainsi en quelque sorte délaisser. Mais est-ce que ce délaissement, cet abandon est pour autant un aveu de « détestation »?
C’est ce que semblent penser beaucoup de gens, dont l’attaché politique Pierre Morin, très présent sur Twitter, déclarant que le Parti Québécois (dont on connaît son implication pour la défense du français) « fait de la détestation des anglos un dogme ».
De l’accusation de détestation à l’accusation de racisme, il n’y a qu’un pas. Et il a presque franchit ce pas dans la mesure où il a fait un rapprochement pas même subtil entre le PQ et le Front national (parti à l’aura raciste, s’il faut le préciser). À mon avis, nous ne sommes pas loin de ce que j’ai appelé dernièrement la « godwinisation des débats », « l’aveuglement volontaire », « la lecture assistée par la mauvaise foi ». S’il faut que je le décrive aujourd’hui autrement, j’irais avec cette formule : la triste pratique de l’« extrémisation » des positions de l’adversaire.
Mais le plus bel exemple de ce glissement, c’est une discussion que j’ai eu sur Twitter à la suite du passage des deux natifs montréalais unilingues anglophones d’Epic Meal Time à TLMEP, que j’ai vertement critiqué dans mon billet « Epic Fail Time ». En réaction aux réactions très négatives des gens sur le fil #TLMEP face à ces unilingues anglos, une « Franco-Ontarienne contre l’indépendance du Québec! » a essayé de me convaincre que c’était du racisme :
Ce à quoi j’ai rétorqué, pour pointer le ridicule de la chose :
La discussion a durée assez longtemps, mais, entre autres, pour tenter de gagner son point, elle m’a référé à une partie de la définition du racisme selon l’Office Québécois de la langue française (ce qui est assez ironique, puisque, en arrivant sur la page d’accueil du site, à la Une il y a un article s’intitulant « Faire du français « la langue prioritaire »). Finalement, après quelques recherches, je me suis rendu compte que la partie qu’elle me copiait-collait (visiblement de ses notes de cours) ne se retrouve plus dans la définition du grand dictionnaire terminologique de l’OQLF (?), mais seulement sur le site du Mouvement estrien pour le français, sur une page qui date de 2001 :
Il serait intéressant de savoir pourquoi cela ne se retrouve plus dans le dictionnaire terminologique. Cela serait-il donc sujet à caution? À la place, on pointe une remise en question du concept même de « race humaine », ce qui dirige un peu, il faut l’avouer, les suppositions. (Màj : finalement, le passage en question se retrouve dans la section « Note(s) » à la suite de la définition du terme « hégémoniste ».) Quand même, il faut vraiment faire une extrême contorsion mentale pour réussir à faire un lien entre cette définition et la critique contre l’unilinguisme anglophone au Québec, ce qui n’est vraiment pas une critique générale contre les anglophones, et il faut vraiment que je le spécifie pour ceux qui n’auront pas encore compris. Si je voulais me faire un peu d’argent, je parierais que je vais encore me faire dire en commentaire que je suis anti-anglophone…
Je ne dis pas, s’il était question de faire la promotion du retrait du droit de vote des anglophones (ce qui serait bien sûr une absurdité), mais là, il est seulement question de donner son opinion, de ne pas être d’accord avec un état de fait. Est-ce que la notion de « l’égalité en droit des êtres humains » empêcherait toute possibilité de critique, même très négative, envers les Québécois anglophones qui ne parlent ni ne comprennent le français? Non. Parce que la notion de « l’égalité en droit des êtres humains » concerne seulement la discrimination, ce que la critique n’est pas, étant assujettie à la liberté d’expression. De toute façon, les francophones n’ont pas besoin d’ostraciser les unilingues anglophones, ils le font très bien par eux-mêmes dans un sens.
Et, bien sûr, je ne joue pas à l’autruche en niant qu’il existe des gens que l’on peut réellement traiter de « racistes» envers les anglophones. Je sais très bien qu’ils existent, et je ne me gênerai jamais pour les dénoncer. Mais il faut savoir de quoi on parle. Et de ne pas mélanger les cartes. Par exemple, qu’on soit d’accord ou non avec l’idée d’étendre les dispositions de la loi 101 aux cégeps, cette idée n’est pas du racisme dans le sens linguistique.
En fait, la sauvegarde du français ne prend pas du tout sa source du racisme, d’un rejet de l’autre. Mais c’est bien pratique d’essayer de le faire croire pour ceux qui sont contre l’idée d’être proactif dans ce sens. Ça me surprend toujours de le constater, parce que la défense du fait français est un projet positif. C’est ce qui devrait tous nous lier. C’est ce que nous devrions tous défendre jalousement pour espérer durer dans ce monde carré qui tend à nous avaler tout rond.
L’anglais comme langue mondiale commune est une bonne chose. Mais comme toute bonne chose, il y a de mauvais côtés. Est-ce que de les pointer est pour autant raciste?
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Classé dans Actualité, Renart L'Eveillé
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