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Pas même la prière à Voltaire…

Par Renart Léveillé

Du côté de nos voisins « Politicoblogue », un dénommé Loup Kibiloki prend la défense de la croisade anti-laïcité du maire Jean Tremblay. Pour ce faire, il lui propose de s’inspirer de la Prière à Dieu de Voltaire, qui était lui-même un déiste anticlérical. Il pointe donc une prière « qui ne réfère à aucune religion en particulier » et qui pourrait rallier tout le monde, enfin presque… Serait-ce donc là la solution tant rêvée? Je suis loin de le croire. Encore moins quand cette idée prend sa source dans cette conception de la « fonction » de la prière :

Quoi qu’on dise, quoi qu’on pense, la prière demeure une fonction radicale, vitale, fondamentale, de la psyché humaine, elle existe sous une multitude de formes depuis la nuit des temps, elle existe aujourd’hui, continuera à exister dans l’avenir, elle ne s’éteindra pas.

Fonction radicale, ça se défend, si on y tient vraiment. Fonction fondamentale, c’est hautement subjectif. Et fonction vitale, c’est purement mensonger. Manger et boire, c’est vital, mais y’a-t-il un seul cas de mort pour s’être abstenu de prier? Mais bon, je vais peut-être trop loin, étant donné qu’il est seulement question de « psyché humaine ». Alors, une autre question plus réaliste : existe-t-il un seul cas prouvé de maladie mentale causé par le fait de s’être abstenu de prier? Encore plus, le fait d’être athée est-il à risque pour la santé mentale?

Si on lit tout le texte, il est très facile d’y voir aussi que la prière serait en quelque sorte l’assurance d’une société meilleure. Comme quoi une certaine idée de la perdition de la société passerait par l’abandon des rites traditionnels comme la prière avant les réunions, les repas, etc. Et, pour aller encore plus loin, on a l’impression que Jean Tremblay serait le porte-flambeau d’un mouvement de réhabilitation dans ce sens. Par la quantité de ses appuis et de ses détracteurs, on le désigne puissant comme le chef du village des irréductibles Gaulois qui résistent contre l’oppresseur romain, c’est-à-dire les méchants défenseurs de la laïcité dans le monde politique.

Mais si on revient à la question de base, que la prière soit la représentation d’une religion en particulier ou une confession de foi théiste ne change pas grand-chose. Une prière, quelle qu’elle soit, est une manifestation. On ne peut pas dire qu’une absence de manifestation (ce que les laïcistes demandent) est une manifestation. Comme on ne peut pas dire que l’athéisme est une religion. Idem pour ce qui est de la laïcité. Soyons sérieux et regardons ce que les mots veulent dire!

Je ne nie pas qu’une prière peut avoir du sens pour un croyant et participer à son bonheur. Ça serait de la malhonnêteté de ma part. Par contre, il faudrait que les croyants qui veulent l’imposer dans la sphère publique soient aussi honnêtes. À partir du moment où possiblement une seule personne se sentirait étrangère à cette pratique, c’est la base du civisme que de la mettre de côté. Et, pour moi, c’est de cette éventualité dont il est le plus question avec le mouvement laïc.

Et pour ceux qui comme Loup Kibiloki voient le sujet de la prière comme une question de vie ou de mort, j’espère que leurs prières personnelles en privé pourront contrebalancer la perte future des prières publiques pour leur équilibre mental…

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Questions d’habitudes

Hier, ma conjointe m’a posée une question et il s’en est suivi une bonne discussion à laquelle je me réfère pour écrire ce billet. À la base, cela est en lien avec une dame de l’âge d’or que l’on connaît bien, et qui a de gros problèmes de santé. Elle souffre de maux en rapport avec ses poumons et elle est branchée continuellement sur une machine à oxygène. Son médecin lui a sommé d’arrêter de fumer, elle a tenu le coup pendant un certain temps, a recommencée, mais hier elle est repartie à l’hôpital pour une deuxième fois depuis qu’elle a recommencée…

Alors, la question c’est de savoir si on devrait commencer à faire payer les gens pour les soins de santé, dans le cas où ce sont de mauvaises habitudes qui les rendent malades. Subjectivement, nous avons arrêté de fumer et changeons nos habitudes alimentaires, entre autres, pour améliorer nos chances d’être en santé le plus longtemps possible, et pour minimiser les chances d’être un poids pour la société, etc., mais objectivement, on ne peut pas le regarder de cette manière.

Ce que j’ai toujours pensé, c’est que le tabagisme est un problème culturel, point. Alors, comment pointer du doigt quelqu’un qui est pris par une addiction physique et psychologique, même si aujourd’hui les campagnes de dénigrement de cette culture vont bon train? Il n’y a que la bonne volonté comme moteur de changement, et ce n’est pas donné à tout le monde de voir le changement d’habitude comme un défi positif. Et encore moins de voir d’un bon oeil l’hypothétique, l’incertitude, dans cette quête de l’amélioration de sa santé.

Ça me fait penser à un reportage au Téléjournal. On y présentait une étude scientifique qui démontre un « lien entre la consommation de viande rouge et l’accroissement du risque de mortalité. » Au début, on voit un homme, bien joufflu, répondre à une vox populi :

— La viande rouge c’est bon en maudit. Je pense que ça fait partie de notre quotidien. Je changerai pas à cause des études… c’est plein d’études anyway astheure!

C’est écrit dans le ciel que cette personne avec cette attitude — et possiblement fumeur, se gavant sûrement de sel et de sucre — va nous coûter la peau des fesses collectivement pour ses soins de santé à la brunante de sa vie — et peut-être même bien avant. Et c’est à la vue de ce genre d’individu que me vient le désir de le voir payer de sa poche, de nous voir donner complètement le système public de santé aux dents du loup privé!

Mais non, on ne peut pas se baser là-dessus pour faire cette réflexion, parce que, tout comme le tabagisme, ces habitudes sont très culturelles, surtout ici, en Amérique, dans le cas de la viande rouge. Si on extrapole, est-ce que c’est trop fort de penser que toutes ces habitudes, qui nous paraissent aujourd’hui majoritairement mauvaises, viennent du fait de la conservation des aliments qui, anciennement, passait par le sel, le sucre et le gras? Sans oublier les traditionnels repas hyper caloriques qui servaient bien nos ancêtres ruraux. Donc, des habitudes qui étaient bonnes et qui sont devenues mauvaises avec le temps. Et même, encore plus que la donnée culturelle, que ces goûts sont inscrits en nous génétiquement? Surtout quand on remarque les avancées scientifiques dans le domaine de la génétique et les preuves que les gènes sont modifiées en cours de vie par les interactions avec l’environnement, tant du côté physique que psychologique.

C’est comme si notre culture, nos moeurs n’étaient pas en phase avec la réalité, qui est aussi le résultat d’un amalgame d’évolution culturelle. En regard de tout ça, toute la propagande en matière de santé me semble plus acceptable malgré le fait qu’elle est irritante, autant pour ceux qui l’acceptent positivement que négativement : quand tu fais déjà des efforts, ça devient lassant de te le faire répéter, et encore plus quand tu t’en contrefous… Sinon, comment s’y prendre personnellement, comme avec l’homme cité plus haut, pour influer sur l’attitude? Pour le cas de la dame dont je parle en début de billet, nous n’y sommes jamais résolus… En espérant que l’espoir de moins de souffrances lui donnera le coup de pouce pour suivre les conseils de son médecin. S’il n’est pas déjà trop tard.

(Image : David Asch)

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