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Les partis politiques comme freins à la démocratie

Par Renart Léveillé

Ce que la crise au Parti Québécois a bien fait ressortir, ce sont les problèmes qui viennent avec les partis politiques et la question de la ligne du parti. Encore plus avec un parti comme le PQ où ce qui cimente les membres est le parti-pris pour la souveraineté du Québec. Alors, il est bien normal qu’à tous les autres sujets ils ne fassent pas bloc (sans jeu de mots…).

Parce qu’un parti, quel qu’il soit, reste une difficile tentative d’équilibre entre des individus dissemblables, malgré les points de convergences. Et le fait de son système hiérarchique n’est pas sans ajouter au problème. L’opinion d’un chef de parti est toujours possiblement discutable et c’est à sa discrétion d’en discuter ouvertement, voilà dans quoi se plongent ces femmes et ces hommes chez qui l’opinion est aussi importante (cela va de soi).

Alors, amusons-nous à détruire les partis politiques pour qu’il ne reste que des députés indépendants. À la place des partis, il pourrait y avoir des coalitions, destinées surtout à afficher les couleurs des candidats lors des élections. Ensuite, les députés seraient évidemment libres de voter lors des travaux et de se regrouper à leur guise selon leurs affinités, selon les questions soulevées.

Et j’y pense, pourquoi ne pas aussi abolir le poste de chef du gouvernement? De toute façon, comme partout, il y aura des députés qui réussiront à se démarquer pour être des meneurs pendant de courtes ou de longues périodes, selon les sujets. Et les élections se tiendraient à date fixe, bien sûr. Sans oublier qu’il faudrait que les coûts qui touchent à tout le processus démocratique soient partagés par tous, donc du domaine public.

Pour ce qui est de la finalité du processus de votation des lois, c’est là où la démocratie directe entrerait en jeu. Le peuple ferait office de Sénat. Chaque loi à adopter aurait à passer par un référendum. Et bien sûr, le processus devrait reposer sur une utilisation judicieuse, rapide, peu coûteuse et sécuritaire de la technologie (et tout citoyen devrait pouvoir exercer son droit de vote; donc, le gouvernement devrait aider le plus possible les analphabètes du numérique). Le pourcentage de participation ne serait pas important dans le sens où la décision appartiendrait à ceux qui se sont donné la peine d’y participer (et donc de s’y intéresser assez pour vouloir y participer — il n’y a pas très loin aussi l’idée du permis de voter). Ce qui de toute façon devrait être la même chose pour ce qui est des élections…

Je n’entrerai pas dans les détails du fonctionnement d’un tel gouvernement, cela donnerait un bouquin et le temps me manque, mais je crois que les talents des députés élus pourraient être mis à contribution de la meilleure manière possible par un processus hautement démocratique. Il me semble qu’un gouvernement de la sorte travaillerait pour (et avec) le peuple. Il me semble aussi que l’opportunisme n’y ferait pas son nid, comme on le voit actuellement.

Si la politique est le royaume du possible et n’a pas toute évacué sa part de créativité, il devrait être concevable de faire évoluer le système qui supporte la pratique, et ce, en phase avec les perspectives actuelles. La crise au Parti Québécois n’est qu’un symptôme du cynisme qui est aussi une crise en soi. C’est la preuve qu’il faut que les choses changent radicalement.

Je ne veux lire personne me dire que c’est impossible, puisque l’impossible est le dernier retranchement du cynisme.

(Photo : mcgraths)

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Quand la Boussole électorale ne va pas dans le même sens pour le Québec et le Canada…

Par Renart Léveillé

Lors de la dernière élection fédérale, la Boussole électorale ne semblait pas faire l’unanimité. Quoi qu’il en soit, les résultats sont maintenant en ligne, et « plus d’un million de Canadiens ont répondu » à ce sondage, ce qui semble un échantillonnage assez important. Il faut quand même regarder ces résultats avec prudence, mais il y a tout de même des tendances importantes qui en ressortent.

Ce qui ressort le plus, c’est que le Québec est sans conteste une société distincte. Chaque question est illustrée par une carte du Canada où les couleurs de chaque région démontrent dans quel sens vont les opinions. Et dans la majorité des cartes, on voit que les Québécois pensent différemment du ROC, cela dit en ne dissimulant pas la diversité d’opinion des Québécois eux-mêmes. Je le répète, il est bien sûr question de tendances.

Là où les Québécois sont vraiment différents de la majorité des Canadiens, il n’y a pas d’équivoque. Ils sont beaucoup plus contre la mission afghane, contre la présence militaire en Arctique, contre les dépenses militaires tout court. Aussi, ils sont pas mal les seuls à vouloir d’avantage de relations économiques avec les États-Unis et à vouloir se doter d’une taxe sur le carbone. Pour continuer dans les enjeux environnementaux, le Québec est vraiment plus du côté de croire que l’industrie des sables bitumineux d’Alberta cause des dommages, contrairement au ROC qui pense plus que c’est de l’exagération. Encore, le Québec partage avec une infime partie du Canada un désir plus grand de normes environnementales plus sévères, « même si elles entraînent une augmentation des prix pour les consommateurs ».

Pour ce qui est de la question de la place du secteur privé dans le système de santé, le Québec partage une préférence minoritaire pour davantage de place avec certaines autres régions. Pour ce qui est de l’immigration, le Québec est le plus favorable avec le fait d’exiger l’anglais ou le français comme condition d’admission pour les immigrants. Encore à ce sujet, et ce n’est pas très surprenant, ce sont les Québécois qui ont le plus, et de beaucoup, répondus « Préférence pour moins » à la question : « Combien d’efforts devrait-on faire pour accommoder les minorités religieuses au Canada? »

Encore, ils sont les plus modérés quant à juger comme des adultes les « jeunes délinquants qui commettent des crimes violents », les moins d’accord avec l’abolition du registre des armes à feu et plus en accord avec « le droit de mettre fin à leur vie avec l’aide d’un médecin » des « patients en phase terminale ». Du côté politique, ils sont le plus contre le Sénat, les moins d’accord avec des coupures au niveau du financement public des partis politiques et, la différence est extrême, pour que seules les personnes bilingues (anglais et français) puissent être nommées à la Cour suprême.

Pour ce qui est des questions constitutionnelles et du rapport entre le Québec et le Canada, à contrario du Québec, le ROC pense que « Le gouvernement fédéral devrait avoir son mot à dire dans les décisions concernant la culture au Québec », n’est franchement pas favorable à ce que « Le Québec [soit] formellement reconnu en tant que nation dans la Constitution » et, bien sûr, à ce que « Le Québec [devienne] un État indépendant ».

Et, pour terminer, les Québécois sont plus amplement d’accord que « Les travailleurs devraient contribuer davantage à leur régime de pension (RPC/RRQ) pour avoir des pensions plus généreuses », et que les plus riches devraient payer plus d’impôt, idem pour les entreprises.

À la lumière de tout cela, et avec les résultats de la dernière élection fédérale où le Québec a placé le NPD comme opposition officielle, il n’y a pas de doute que le Québec fait cavalier seul et ne se retrouve pas dans cette fédération centralisatrice, qui sera menée par un gouvernement conservateur, ce parti très impopulaire dans la belle province. Est-ce que les Québécois pourront continuer de faire du déni alors que le ROC est farouchement contre le caractère particulier du Québec? La quintessence de cette hypocrisie étant, pour les Canadiens hors Québec, le total refus de reconnaître la nation québécoise alors que le parti qu’ils ont porté au pouvoir se vante de l’avoir reconnu (bien que ce soit en réalité de la poudre aux yeux!).

Dans ces conditions, le statu quo qui prévaut encore en ce moment est une insulte à l’intelligence. Si le Québec était un individu, franchement, comment peut-il se regarder dans le miroir? L’amour-propre, cela veut-il encore dire quelque chose?

(Photo : topsteph53)

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À la santé d’une nouvelle Amérique !

À 7h05, le 24 décembre 2009, le Sénat américain a adopté le projet de loi proposé par les Démocrates pour la réforme du programme de couverture maladie aux USA. Il y a, je crois, trois (3) choses à dire de cet événement.

Il faut dire, d’abord, que ce qui est présenté comme une victoire de la solidarité qui pemettrait de voir enfin les USA comme un pays avec une conscience sociale, apparaît, quand on y regarde de plus près, comme un très complaisant compromis avec le lobby des assureurs – lisez les grand groupes financiers – dont le résultat est surtout d’obliger les individus à s’assurer. Il oblige aussi les entreprises – lisez, les petites entreprises, les grandes le faisant déjà – à contribuer au paiement des primes pour cette couverture assurance.

Quand on comprend que ce qui est en jeu n’est pas une faveur à faire au peuple, mais une OBLIGATION pour Quidam Lambda et une charge pour les millions de petits entrepreneurs américains, on comprend que le soutien public à cette mesure ne soit pas aussi fort qu’il le serait s’il agissait vraiment d’accorder des DROITS.

Il faut dire, ensuite, que ce qui est présenté comme une affaire reglée ne l’est pas du tout. « House » et « Senate » ont approuvé deux projets différents qui doivent maintenant être conciliés et fondus en un seul, après les recommandations d’un Conference Committee où se réuniront pour en jaser des représentants de ces deux volets de la gouvernance amricaine. De nouveaux sommets y seront sans doute atteint dans la menace et la corruption.  Il y a trois ( 3) points où il doivent s’entendre.

Le premier, c’est la mise en place par l’État d’un système d’assurance public qui ferait concurrence aux assureurs privés. « OUI » dit la Chambre, plus Démocrate, « NON » dit le Senat, plus Républicain. Ce point est crucial, car il va marquer la ligne des hautes eaux de la vague « socialiste » que représente l’élection d’Obama, symbole d’une volonté de changement de l’Establishment.

Sur ce point, on en arrivera sans doute à un compromis qui permettra au gouvernement fédéral de créer un tel programme – avec autant de restrictions qu’on pourra – puis en donnant à chaque État de l’Union le droit de ne PAS permettre le fonctionnement de ce système public sur leur territoire. Des heures de plaisir en famille, quand chaque individu devra en voir les effets pour lui et les siens, selon qu’ils habitent New-Yoy, Houston ou Topeka.

Le second point concerne le fardeau fiscal et les laisssés pour compte. Le plans des congressmen propose de couvrir 96 % de la population, pour 1 trillion tout net ( USD$ 1 000 000 000 000) sur dix ans, et d’en faire les frais par une surtaxe de 5,4% sur ceux qui gagnent plus de USD $ 500 000 par année ( USD$ 1 000 000 par ménage).

Le plan des sénateurs n’en couvre que 94% (pour 871 milliards de dollars durant ces 10 ans) et va chercher des sous plus bas chez les contribuables, avec une surtaxe de 2,35% pour ceux dont le revenu individuel annuel excède USD $ 200 000 (USD $ 250 000 par ménage). On choisira ici sans doute cette deuxième option. Une petite victoire de principe pour le Senat… et prendre l’option la moins chère est toujours la décision la plus facile.

Le troisième point en litige est l’un de ces amalgames bizarres qui laissent penser que le Chinois vont vraiment nous remplacer. Le lobby fondamentaliste insiste pour que les frais d’avortement ne soient pas inclus au plan de couverture des soins de santé. On fera sans doute plaisir à la fois à Eustace et à la « vieille dame de Dubuque » en laissant à chaque État d’en décider. On aggravera ainsi encore un peu la scission entre une Amérique branchée et celle qui ne l’est vraiment pas, mais on reglera ça plus tard…

La troisième chose à dire de cet événement, c’est l’importance, justement, du « plus tard ». Sur le plan de la toute petite politique, ce plan « Obama » ne sera vraiment opérationnel qu’en 2013 ou 2014.  Or, il y aura une présidentielle en 2012 et il n’est pas sûr que les démocrates la gagneront. Ce plan de couverture des soins de santé en sera un facteur crucial ; le corollaire est que, si les Républicains la gagnent, ils se sentiront mandatés pour y apporter des changements majeurs, avant même qu’il n’ait été complètement appliqué….

Dès novembre 2010, d’ailleurs, les élections de mi-terme pour  la Chambre et le Senat pourront en modifier la composition. On pourra donc peut-être, alors, changer déjà des pans entiers de ce plan avant même que l’on n’ait commencé sérieusement à le mettre en place !

N’est-il donc pas trop tôt pour chanter victoire ? … C’est qu’il y a aussi un aspect,  de « grande » politique, celui-là. Quelle que soit la version finale du plan qui sera acceptée incessamment – avant le discours traditionnel sur l’État de l’Union à la fin janvier – le principe d’une intervention de l’État pour gérer le volet social de la société aura été accepté aux USA. A partir de là,  le gouvernement qui a le pouvoir peut vite bouger ses pions, poser des gestes irréversibles et se rendre indispensable.

Les Républicains ont sans doute tort de lutter contre cette évolution, mais ils ont parfaitement raison de la prévoir ! Cette avancée de l’État dans le champ du social va d’ailleurs de paire avec son occupation de celui de la production industrielle, dont la reprise de Chrysler et de GM ont été les faits saillants.  Stratégiquement, cette campagne pour la santé est une grande manœuvre qui devrait réussir et raffermir le pouvoir de ceux qui veulent le changement aux USA.

Et pendant ce temps, la pendule tourne… l’Amérique continue sa décadence sur son erre. Elle recule devant la Chine à Copenhague et son argent ne vaut plus rien.  Il est urgent que ça change. Simple question de temps et d’opportunité, avant que l’État ne doive nationaliser les banques et reprendre le contrôle de la monnaie.  Ce projet apporte une pierre et on bâtit pierre par pierre une nouvelle Amérique. Pour le meilleur ou pour le pire.

Pierre JC Allard

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