De Victor Jara à Guantanamo : la même CIA (16)

op_corribglengadLéon Panetta va-t-il restaurer au sein de son organisme une pointe d’éthique qui lui fait cruellement défaut ? Rien n’est moins sûr. L’historique de la CIA penche pour elle, pas pour son dirigeant. Récemment encore, en Amérique du Sud, deux exemples bien précis laissent entrevoir que la bonne vieille technique de l’assassinat ciblé présidentiel n’a pas été abandonné. Si on s’en doute pour l’inénarrable Chavez, au Venezuela, on en est moins conscient semble-t-il pour la Bolivie, ou Evo Morales se bat contre ce qui n’est rien d’autres que des nostalgiques du nazisme, soutenus sans faille aucune par la CIA. L’Amérique du Sud qui verse à gauche, c’est toujours impossible à avaler pour les américains, même si aujourd’hui le discours de façade est différent. Les intérêts économiques et la zone d’influence est telle que les Etats-Unis feront tout ce qui est en leur pouvoir pour ralentir le processus. L’aile droite de la politique américaine considère toujours les Andes comme une chasse gardée. Je n’en veux pour preuve que la visite inopinée de McCain en Colombie, deux jours seulement avant l’opération pour libérer Ingrid Bétancourt et les trois otages de DynCorp retenus par les Farcs. Une opération où la CIA a participé de bout en bout, malgré les dénégations d’Uribe à cet égard.

En Afghanistan, on est donc bien confronté à un fait : Barack Obama ayant reçu en cadeau de son prédécesseur une situation inextinguible a donc du trancher rapidement. L’option des bombardements massifs, ces « Guernica hebdomadaires » étant désormais à exclure, il a bien dû se trouver une solution de repli pour ne pas voir le spectre du départ honteux de Saïgon à la fin de la guerre du Viet-Nam. Sa présidence n’y résisterait pas, et il le sait. Les américains ne veulent jamais perdre un conflit, on le sait. Il a donc fallu trancher, et sélectionner l’option la plus efficace et la moins désastreuse aux yeux de l’opinion publique. Celle du retrait en douceur, facilité par la traque de l’ennemi par des services spéciaux dédiés, ou par… la CIA. Obama, en ce sens est bien traditionnaliste : il impose à nouveau une énième version de l’opération Chaos, à peine relookée par des moyens techniques nouveaux, drones et capteurs GPS attractifs. Les symptômes en sont évidents, déjà et nous allons les voir en détail, pour bien prouver nos dires. Un homme l’avait pourtant enjoint de ne pas s’y aventurer, dans une vidéo magnifique que je conseille à tous de regarder. C’est un démocrate qui se permet de lui faire la leçon, et non un républicain comme on aurait pu s’y attendre. Mais pas n’importe quel démocrate : c’est le sénateur Georges McGovern, celui qui avait perdu l’élection contre Nixon (la seconde de Nixon, en 1972), celle gagnée à coups de coups tordus comme le Watergate. A l’époque, il était opposé à la guerre du Viet-Nam : il sait donc de quoi il parle ! L’homme avait un jour comparé Obama à un second Lincoln, mais il n’a pas pour autant gardé sa langue dans sa poche. Il représente depuis toujours l’aile gauche des démocrates, c’est une évidence à l’entendre fustiger un conflit qui s’éternise et qui risque assez vite de ternir l’étoile de son héros. Pour mémoire, l’affaire du Watergate c’était quatre « plombiers » venus installer des micros dans les bureaux de campagne de McGovern, alors l’adversaire de Nixon à la présidentielle. Le récent décès d’un de ses quatre sbires, Bernard Leon Barker a été annoncé for récemment (le 7 juin). Barker avait été enrôlé en 1961 dans la désastreuse affaire de la Baie des Cochons à Cuba : c’était bien un agent de la CIA !

Quant à savoir si Barack Obama laissera la CIA réactiver ou plutôt poursuivre les assassinats d’homme politique, c’est encore une autre histoire. Il semble bien que son prédécesseur ait été tenté de le faire à l’encontre d’Hugo Chavez… La révélation est récente est à été faite par Chavez lui-même à la télévision, ce qui permet aussi de la mettre en doute, Chavez découvrant en moyenne un complot contre lui par semaine.(*1). Mais ce qui l’est moins, c’est l’explication que donne Hugo Chavez de l’organisation du complot contre lui… car au passage, il ressort un homme très connu des placards de la CIA (*2). Luis Posada Carilles, un cubain partisan de la dictature… au lourd passé de membre de la CIA.

Luis Posada Carilles, malfrat surnommé Bambi par ses amis cubains, encore lui, car cité dans notre longue enquête dans l’épisode premier… le tueur d’ Orlando Letelier, à Washington, en 1976. Posada formé lui aussi à Fort Benning et devenu au Venezuela d’avant Chavez le chef de la CIA locale, la DISIP…. ! Autrement dit, c’est un sérieux client au poste d’assassin présidentiel ! Posada est un extrémiste, à un point difficilement imaginable : il avait tenté d’assassiner Kissinger quand ce dernier n’était plus assez de droite pour lui… Il est responsable d’avoir posé la bombe qui a détruit l’avion du vol 455 à Cuba qui a fait 83 morts en octobre 1976. Avec l’assentiment de la CIA (*3). On le retrouve encore en train de poser des bombes en 1997 à Cuba afin d’y empêcher l’extension du tourisme ! Des documents récents rendus publics ont révélé son extrême dangerosité (*4) La panoplie complète du parfait comploteur ! Au passage, on apprend que des agents du FBI se baladent toujours, aujourd’hui encore, à Cuba !

Trois ans après, rebelote, c’est Castro qu’il visait (*5)  Arrêté puis libéré en 2004 au Panama par la présidente corrompue Mireya Elisa Moscoso Rodríguez de Arias, il s’était réfugié… aux Etats-Unis, où il a bénéficié d’une incroyable mansuétude de la justice, qui n’a jamais voulu l’extrader vers le Venezuela d’où il s’était évadé. En 2007, il avait été quand même été arrêté pour entrée illégale sur le territoire US, au nom du Homeland Security… en prison, on sait aussi qu’on peut tout apprendre…sur de nouveaux projets d’assassinat…. surtout si ce n’est que sous bracelet de surveillance, ce qu’on lui avait forcé à mettre. Dès juillet 2007, une autre juge le relâchait déjà et lui retirait son bracelet électronique. Au début de cette année un nouveau procès était mené contre lui pour les attentats de 1976. Avec cette fois un nouveau grief (*6). Trente-trois ans qu’on lui reproche la même chose, à savoir d’être un terroriste international de haut vol, et l’homme se promène toujours librement dans le pays ? Même Ben Laden n’a pas fait mieux ! Un tel obsédé de la bombe, si protégé par la CIA ferait effectivement un très bon client pour assassiner Chavez, finalement… s’il n’était il est vrai âgé aujourd’hui de 71 ans…

Chavez raconte-t-il des bobards, où la large mansuétude américaine à propos de Posada ne pourrait-elle pas s’expliquer par cette nouvelle tentative ??? La découverte d’une véritable armurerie il n’y a pas si longtemps à Caracas est là pour raviver les thèses complotistes en tout cas : au milieu des activistes arrêtés, des Dominicains, on trouvait également un français… Laurent Frederic Bocquet, 38 ans, de nationalité franco-suisse, accusé d’être le tireur d’élite du lot alors que le gouvernement français lui octroie une pension d’invalidité… (reconnue par l’ambassadeur français) le spectre de l’activisme d’extrême droite, de l’ancien militaire pensionné réapparaissait…(*7) . Bocquet aurait-il été militaire et envoyé en Bosnie ? Il nous a été impossible de le vérifier. Aucune trace visible de l’individu. En tout cas, chez lui, il y avait du monde et du matos  : « Les forces de l’ordre affirment avoir découvert un véritable arsenal dans un logement dont il serait propriétaire à Caracas : treize fusils à longue portée, deux mitrailleuses, trois carabines, des silencieux, des viseurs télescopiques, des gilets pare-balles, 5.000 cartouches, des grenades, des uniformes militaires et 500 grammes d’explosif C4. «  Cela dépasse un peu le simple goût pour les armes, non ? Même si selon Franck Cognard de France-Info l’homme était aussi informateur de la police, ou plutôt du responsable précédent limogé par Chavez, le stock de munitions est tel qu’on a du mal à croire à sa seule collectionnite… c’était un véritable arsenal de guerre dans un appartement ! Il y en avait pour plusieurs milliers de dollars, à 6000 euros le fusil spécial longue portée. D’où provenait l’argent du pensionné de l’état français ? « La présence d’armes lourdes dans la chambre d’hôtel et surtout celle de mercenaires étrangers, dont les services sont coûteux, soulignent que cette cellule bénéficie d’appuis logistiques et financiers importants » affirme devant les caméras le ministre de l’intérieur.

Et ce n’est pas fini en Amérique du Sud : Le 29 avril dernier, c’était le président Evo Morales qui était visé par une tentative d’attentat (*8) «  Il y aura deux morts, lors de leur arrestation, et les détails qui vont suivre vont renforcer l’idée d’un travail typique de la CIA, via des tueurs interposés d’origine bien particulière, ou plutôt politiquement déterminés. Une fine équipe de tueurs qui se la jouaient, comme l’attestent les photos prises par eux-mêmes dans leur hôtel. Des fanfarons, comme tous les mercenaires.

Parmi eux, un Bolivien… au nom d’européen d’Europe Centrale : Mario Tadic, tué dans l’opération, ou Elod Toazo, un jeune hongrois, mais surtout Tibor Revsz, surnommé « Photosniper ». Le chef avéré du groupe… et membre éminent de la Légion Szekler, un groupe paramilitaire très particulier (*9). En Roumanie, effectivement, Szekler est bien un groupe fasciste. Avec comme fer de lance » l’Iron Guard », la Garde de Fer (*10) Difficile de faire pire. Très particulier comme mouvement : au début il s’appelait « La Légion de L’Archange » ! (*11) Le seul mouvement fasciste ouvertement religieux ! Nous revoici en tout cas chez les néo-nazis !

Tibor Revsz avait amené avec lui un irlandais, Michael Dwyer, tué lors de l’assaut de la Police bolivienne. Faisant partie du même groupe et responsable d’exactions sur la population bolivienne (*12) Une amitié qui le relie encore davantage à l’extrême droite (*13)  Eduardo Rozsa-Flores, surnommé en Croatie « Chico« , ayant donc participé au nettoyage ethnique en ex-Yougoslavie, un autre beau cas d’espèce d’extrême droite (*14) On est bien au milieu d’un creuset de néo-nazis voire de pro-nazis véritables, partisans chez eux de « l’élimination des Roms ». De véritables dangers pour l’Union Européenne, tant ils jouent en ce moment les trouble-fêtes électoraux !

Son parcours est saisissant, comme celui de ses amis, dont le dénominateur commun et la guerre dans les Balkans : « il a rejoint l’armée Croate et a participé à divers combats au cours desquels il a été blessé trois fois. Suspecté de trafic d’armes et de drogue, il a abandonné le territoire croate et est revenu en 1994 en Hongrie. De manière très étrange, Rozsa Flores réapparaît en 2003, affirme s’être converti à l’Islam et se prétend le porte-parole d’une faction « indépendante » iraquienne. Ensuite, il se rapproche des néo-nazis de Jobbik, un parti fasciste qui exige le rétablissement de la peine de mort et l’éradication des Roms (Gitans). Lui, et ces deux complices mènent à l’extrême droite encore : Arpad Magyarosi, tué lors d’un combat, Elod Toaso, emprisonné, sont des hongrois de Transylvanie (Roumanie) qui ont rejoint en 2002 la Székely Légio (Légion Siculus), une organisation paramilitaire qui a projeté des attaques de commandos contre le territoire roumain. De son côté, l’Irlandais Michael Martin Dwyer, « soldier of fortune », une gâchette facile obsédée par les armes, a été mercenaire dans les Balkans et y a sans doute rencontré le leader du groupe, en Croatie ». Dwyer l’irlandais était lui aussi nazi : son avant bras droit était tatoué d »une croix gammée. Le groupe avait eu des réunions avec Branko Marinkovic Gora Jovicevic, l’ ex-président du Comité Civique de Santa Cruz qui revendique l’indépendance de la région et la véritable tête du complot. Le fils du nazi Silvio Marinkovic Suarcic, autre partisan du nazisme, et avec Jorge Mones Ruiz, un ponte de UnoAmérica, un groupe fasciste lié à la CIA depuis longtemps, car cela remonte à l’époque de l’Opération Condor. Comme pendant l’époque de ces opérations, les futurs assassins possédaient un explosif qui représente la signature de la CIA : le fameux C4.

Comment ces activistes d’horizons aussi divers s’était-ils rencontrés ? Au Kosovo, en Serbie ? Même pas. Tout simplement chez Shell, en Irlande, au sein d’une de ces fameuses « sociétés de sécurité » appelée par la firme de pétrole pour lutter contre les activistes écologistes qui ne voulaient pas de l’exploitation d’une nappe de gaz par 355 m de profondeur et d’un pipe-line à haute pression le reliant à la terre ferme. Integrated Risk Management Services (IRMS) installée à Nass, County Kildare, et fondée par Terry Downes et James Farrell. Des mercenaires, à la Blackwater, obnubilés par les armes et leur déception de n’avoir jamais pu intégrer une armée pour la plupart, ou ayant été éjectés d’un régiment par leur comportement : de nouveaux légionnaires, mais civils en quelque sorte. Les logos de leur société, mi-celtiques mi morbides sont très significatifs : d’avoir fait de la coquille StJacques de Shell un symbole de mort est très représentatif de leur état d’esprit, à mi chemin entre les délires des Hells Angels et le groupe folklorique : en France on a les mêmes avec les fanfarons d’extrême droite de Terre Celtique par exemple ! Les deux patrons d’IRMS étaient eux d’anciens militaires appartenant au Irish Army Rangers. Des soldats d’élites irlandais ayant une particularité intéressante (*15) : il sont tous passés par… Fort Benning. On y revient à nouveau ! Décidément l’école a fait des petits, bizarrement souvent devenus des néo-nazis… et tous en tout cas devenus mercenaires, appointés par la CIA qui n’a cessé depuis des années d’externaliser ses crimes, en les faisant faire par des mercenaires extérieurs.

(1) « I am not accusing Obama. I think the American president has good intentions, » Mr Chavez said. « But over and above Obama, there is the CIA, and all of its tentacles. I have no doubt US intelligence services are behind this.


(2) Behind the plot, according to the Mr Chavez, was former CIA operative, Luis Posada Carriles, who is currently under house arrest in Florida, but wanted in Venezuela for the downing of a Cuban airliner in 1976 in which 74 people were killed. He was also sentenced to eight years in prison in Panama for planning to kill Fidel Castro of Cuba, another Chavez ally, in 2000, but granted a surprise presidential pardon in 2004, which analysts insisted was the result of pressure from the US, perhaps the CIA. »


(3) Declassified FBI and CIA reports show that the agencies suspected his involvement in the airline bombing within days of its occurrence ».


(4) « On May 3, 2007 it was revealed that FBI agents traveled to Cuba in 2006 as part of an investigation into Posada’s possible role in the 1997 bombings in Havana. New FBI documents were also released revealing new details about Posada’s many terrorist plots, including concealing high explosives in shoes and shampoo bottles ».


(5) On November 17, 2000, Posada was discovered with 200 pounds of explosives in Panama City and arrested for plotting theassassination of Fidel Castro, who was visiting the country for the first time since 1959″.


(6) « Another new charge is obstruction of a U.S. investigation into « international terrorism ».


(*7) « Venezuela’s Interior Minister has given a presser this afternoon to name the group as a « terrorist organization ». Minister Tareck Al Aissami also said that Bocquet is known as an expert in military matters and a sharpshooter/sniper who saw action in Europe (the exact country wasn’t mentioned) ».


(8) LA PAZ, Bolivia – Bolivian police foiled an alleged plot to assassinate President Evo Morales, killing threemen in a 30-minute gunbattle with a mysteriousgroup that included suspects from Hungary, Irelandand possibly Croatia, government officials said Thursday. Police had attempted to arrest the men in the center of Santa Cruz, an eastern Bolivian city and hub of anti-Morales sentiment, but they fled to a hotel where an intense shootout took place. »


(*9) « The Szekler Legion have been implicated in violent incidents in Romania. The group openly promotes neo-fascism and race hate ».


(10) « The Iron Guard (Romanian : Garda de fier) is the name most commonly given to a far-right movement and political partyin Romania in the period from 1927 into the early part of World War II. The Iron Guard was ultranationalist, homophobic,antisemitic and fascist in character ».


(11) « Few European Fascist movements went so far as to proclaim that ’God is a Fascist !’ or that ’the ultimate goal of the Nation must be resurrection in Christ !’ Romania was the exception. Romanian Fascists wanted ’a Romania in delirium’ and they largely got one. The Legion of the Archangel Michael was founded in 1927 in honour of the archangel, who had allegedly visited Corneliu Codreanu, its chief ideologist, while he was in prison. It was the only European Fascist movement with religion (in this case Romanian Orthodoxy) at its core. In 1930 the Legion was renamed the Iron Guard ».


(12) « The same terror group which the Bolivians say Mr Dwyer (24) joined last October was suspected of carrying a series of attacks on the homes of Bolivian cabinet ministers, civil servants and politicians since 2006 when its leader, Eduardo Rozsa-Flores, sneaked into the country ».


(13) « Despite repeated claims that Mr Dwyer was an innocent party and had been associated with « adventurers », photographs released by the Bolivian authorities last week show he was heavily armed and close with the terrorist ring-leader Rosza-Torres, a man who has been implicated in ethnic cleansing in former Yugoslavia and who, at his own admission, was actively seeking the overthrow of left-wing Bolivian president Evo Morales. »


(14) « Eduardo Rozsa Flores, le chef d’origine hongroise de la conspiration pour assassiner le Président bolivien Evo Morales, appartient aux cercles de l’extrême droite hongroise proches du parti néonazi Jobbik qui entretient illégalement une organisation paramilitaire, la Garde Hongroise ».


(15) « ‎In the late 1960s and early 1970s a small number of Irish Defence Forces personnel attended the United States Army Ranger School at Fort Benning, Georgia, USA.. »


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Classé dans Actualité, Stéphane Bouleaux

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