Archives quotidiennes : 15 décembre 2008

En hommage a l’argent

 Harper se repose, Charest se repose, même Obama est à placer ses pièces avant de mettre la main sur le timon. La politique est au neutre, le temps de nous laisser déballer les cadeaux. Si on en profitait pour parler de l’important ?   L’important : l’argent.

 

Bien sûr, il y a en politique de débats idéologiques de fond. Ce sont ceux qui reposent sur des principes sacrés ou des préjugés acquis par conditionnement avant que se développe le jugement chez l’enfant – la distinction entre les deux n’étant pas toujours faciles à faire – mais le plus clair des vraies luttes vise à mettre la main sur le butin.

 

Ces vraies luttes se faisant entre ceux qui ont le pouvoir, il n’est évidemment pas question d’inviter le monde ordinaire au festin, au-delà de ce qu’on a jugé bon de lui accorder pour qu’il soit tranquille et rende certains services. Tout ce qui a trait au partage de la richesse dans un État de droit moderne développé et démocratique est donc sagement tenu en marge de la démocratie.

 

Ici, au Canada, un Gouverneur de la Banque du Canada – qui n’est pas élu, mais nommé par le Premier Ministre – est en fait coopté par les institutions financières et avise le gouvernement des paramètres qu’il devra respecter : masse monétaire, conditions du crédit, taux d’intérêts. C’est çà l’important. Pour les autres trivialités, comme l’éducation, la santé, et tout ce qui peut concerner le bonheur des gens, le gouvernement est souverain.  Tant qu’il reste dans son enclos, il peut gambader en toute liberté.

 

Nos institutions financières ne peuvent pas en dire autant, car ce qu’elle font ici d’autres institutions le font dans tous les autres pays et, depuis Bretton-Woods (1944) c’est en se concertant qu’elles conviennent des paramètres mondiaux qui encadreront  leurs paramètres nationaux. « Conviennent »  est ici un euphémisme.  En fait, ces institutions de taille et d’importance inégales, chacune appuyée des forces militaires et paramilitaires des pays dont elles contrôlent le pouvoir politique, ne cessent de s’entredéchirer que pour opposer un front commun aux revendications  des populations économiquement exploitées.

 

La gestion de ces revendication se fait en créant la zizanie au sein des exploités, les prétextes les plus futiles étant les meilleurs, puisque les chances sont qu’ils ne frôleront même pas une remise en question du partage de la richesse.  Tout ça n’a pas changé depuis que les Verts et les Bleus en décousaient à Byzance,  sur fond de scène de courses de chars à l’hippodrome…

 

Maintenant on est Rouge ou Bleu en pensant que ça changera quoi que ce soit, ou, encore plus pathétique, on rêve d’un « état souverain », s’imaginant sans doute que la Québec pourrait fonctionner sur cette planète, sans une Banque centrale qui irait a Washington et à Bâle se faire dire ce qu’elle peut et ne peut pas autoriser son gouvernement à faire.

 

La plus triste c’est quand on dit du mal de l’argent… C’est une habile parade de ceux qui bénéficient d’un partage inacceptable de la richesse d’en faire porter l’odieux  au rôle dévolu à l’argent dans la société.  « A chacun selon, ses besoin »… On veut bien, mais aussi longtemps que les moyens de les satisfaire ne seront pas surabondants, il faudra arbitrer en bout de ligne l’allocation des ressources entre besoins  équivalents.

 

Quand on  arrive à ce moment de vérité, il faut bien s’en remettre à des critère et il n’en est pas en théorie de plus équitable que l’argent, puisqu’il est totalement externalisé et ne doit rien à une qualité de la personne même qui conférerait à celle-ci  un privilège. 

 

À mesure que la compétence déplace le « capital » comme premier facteur de production, on verra s’imposer le talent comme un discriminant beaucoup plus cruel que la richesse et on regrettera sans doute le « bon vieux temps » où l’on se plaignait du pouvoir de l’argent. Ne cherchons pas à lui enlever ce pouvoir, ce serait une erreur ; cherchons plutôt à en assurer la meilleure distribution.

 

Si nous ne faisons pas de bêtises, la crise actuelle devrait grandement nous faciliter la tâche

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Classé dans Actualité, Pierre JC Allard