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Quand la Boussole électorale ne va pas dans le même sens pour le Québec et le Canada…

Par Renart Léveillé

Lors de la dernière élection fédérale, la Boussole électorale ne semblait pas faire l’unanimité. Quoi qu’il en soit, les résultats sont maintenant en ligne, et « plus d’un million de Canadiens ont répondu » à ce sondage, ce qui semble un échantillonnage assez important. Il faut quand même regarder ces résultats avec prudence, mais il y a tout de même des tendances importantes qui en ressortent.

Ce qui ressort le plus, c’est que le Québec est sans conteste une société distincte. Chaque question est illustrée par une carte du Canada où les couleurs de chaque région démontrent dans quel sens vont les opinions. Et dans la majorité des cartes, on voit que les Québécois pensent différemment du ROC, cela dit en ne dissimulant pas la diversité d’opinion des Québécois eux-mêmes. Je le répète, il est bien sûr question de tendances.

Là où les Québécois sont vraiment différents de la majorité des Canadiens, il n’y a pas d’équivoque. Ils sont beaucoup plus contre la mission afghane, contre la présence militaire en Arctique, contre les dépenses militaires tout court. Aussi, ils sont pas mal les seuls à vouloir d’avantage de relations économiques avec les États-Unis et à vouloir se doter d’une taxe sur le carbone. Pour continuer dans les enjeux environnementaux, le Québec est vraiment plus du côté de croire que l’industrie des sables bitumineux d’Alberta cause des dommages, contrairement au ROC qui pense plus que c’est de l’exagération. Encore, le Québec partage avec une infime partie du Canada un désir plus grand de normes environnementales plus sévères, « même si elles entraînent une augmentation des prix pour les consommateurs ».

Pour ce qui est de la question de la place du secteur privé dans le système de santé, le Québec partage une préférence minoritaire pour davantage de place avec certaines autres régions. Pour ce qui est de l’immigration, le Québec est le plus favorable avec le fait d’exiger l’anglais ou le français comme condition d’admission pour les immigrants. Encore à ce sujet, et ce n’est pas très surprenant, ce sont les Québécois qui ont le plus, et de beaucoup, répondus « Préférence pour moins » à la question : « Combien d’efforts devrait-on faire pour accommoder les minorités religieuses au Canada? »

Encore, ils sont les plus modérés quant à juger comme des adultes les « jeunes délinquants qui commettent des crimes violents », les moins d’accord avec l’abolition du registre des armes à feu et plus en accord avec « le droit de mettre fin à leur vie avec l’aide d’un médecin » des « patients en phase terminale ». Du côté politique, ils sont le plus contre le Sénat, les moins d’accord avec des coupures au niveau du financement public des partis politiques et, la différence est extrême, pour que seules les personnes bilingues (anglais et français) puissent être nommées à la Cour suprême.

Pour ce qui est des questions constitutionnelles et du rapport entre le Québec et le Canada, à contrario du Québec, le ROC pense que « Le gouvernement fédéral devrait avoir son mot à dire dans les décisions concernant la culture au Québec », n’est franchement pas favorable à ce que « Le Québec [soit] formellement reconnu en tant que nation dans la Constitution » et, bien sûr, à ce que « Le Québec [devienne] un État indépendant ».

Et, pour terminer, les Québécois sont plus amplement d’accord que « Les travailleurs devraient contribuer davantage à leur régime de pension (RPC/RRQ) pour avoir des pensions plus généreuses », et que les plus riches devraient payer plus d’impôt, idem pour les entreprises.

À la lumière de tout cela, et avec les résultats de la dernière élection fédérale où le Québec a placé le NPD comme opposition officielle, il n’y a pas de doute que le Québec fait cavalier seul et ne se retrouve pas dans cette fédération centralisatrice, qui sera menée par un gouvernement conservateur, ce parti très impopulaire dans la belle province. Est-ce que les Québécois pourront continuer de faire du déni alors que le ROC est farouchement contre le caractère particulier du Québec? La quintessence de cette hypocrisie étant, pour les Canadiens hors Québec, le total refus de reconnaître la nation québécoise alors que le parti qu’ils ont porté au pouvoir se vante de l’avoir reconnu (bien que ce soit en réalité de la poudre aux yeux!).

Dans ces conditions, le statu quo qui prévaut encore en ce moment est une insulte à l’intelligence. Si le Québec était un individu, franchement, comment peut-il se regarder dans le miroir? L’amour-propre, cela veut-il encore dire quelque chose?

(Photo : topsteph53)

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Suicide d’infirmière : les assassins invisibles

Gaëtan Pelletier

Au prix de quels bonheurs et de quelles douleurs, enfin, le salarié fabrique, résiste, crée, s’épanouit ou craque ? « Le travail est un carrefour de valeurs différentes et de finalités divergentes ». Nous faisons face a une déshumanisation presque totale du monde du travail : peur du chômage, isolement dans l’entreprise, compétition avec les collègues… tout ce qui, en fait, réduit doucement mais sûrement l’individu à « sa seule dimension économique.   Salade niçoise

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Un sac vide tient difficilement debout.

Benjamin Franklin

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(Québec) Une infirmière du Centre hospitalier universitaire de Québec (CHUQ) qui s’est donné la mort avait été forcée de retourner au travail, alors que son entourage constatait qu’elle était inapte à le faire. Dans une lettre laissée à ses proches, la femme de 58 ans soulignait elle-même que son retour précipité au travail constituait une des difficultés qu’elle vivait.

Quatre infirmières du CHUQ se sont suicidées depuis un an et demi, a confirmé jeudi la direction du centre hospitalier (lire l’encadré). L’une d’elles, que nous appellerons Diane, avait 37 ans d’expérience et était à un an et demi de sa retraite. Le Soleil a parlé avec l’une de ses proches, qui a confirmé de nombreuses informations obtenues d’abord de la part d’une collègue.

Diane était en congé de maladie lorsqu’elle a dû rencontrer le médecin du bureau de santé du CHUQ pour une contre-expertise.

À sa sortie du bureau, «elle avait les larmes aux yeux parce que le médecin la retournait au travail. Elle m’a dit qu’elle n’était pas prête», a raconté la collègue qui l’a rencontrée à ce moment. Cyberpresse

Le bonheur….

Sois heureux avec le moment. Tout bonheur qui dure est malheur. Aie du respect pour tous les moments, et ne fais point de liaisons entre les choses. N’attarde pas le moment : tu laisserais une agonie. Vois : tout moment est un berceau et un cercueil : que toute vie et toute mort te semblent étranges et nouvelles.
Schwob, Le Livre de Monelle, 1894, p. 19.

Le travail n’a jamais tué personne… Jusqu’à maintenant. Jusqu’à ce qu’il devienne un « but » dévié  pour une société où les travailleurs sont piégés  dans une toile d’araignée tissée par des bureaucrates aux mains d’un beige lavabo.

Faire le bien et se faire mal. Avoir mal au travail. Ça n’en finit plus.

Ce  « fait divers » passera… Mais on prolongera la durée de vie d’un mode de « vie » où les chiffres parlent, les mots se taisent, et les cris de désespoirs étranglent bien des travailleurs.

Il faut bien le dire en mots crus : notre société en est une où on mensonge à coups de propagandes de deux faussetés :

  1. Plus on a ( matériel) ,  plus on est heureux.
  2. Faites carrière et réalisez-vous.

Jetez un œil dans votre entourage. Vous serez étonné de voir le nombre de personnes dites en « détresse psychologique ».

L’énoncé est aussi raffiné que l’histoire de l’aveugle devenu « non voyant ». La réalité est passée au savon… Un monde ou tout est frelaté. Dans quelques années les morts deviendront des « non-vivants».

Le bonheur de grand-mère…

C’était chaque jour le même paysage d’eau et d’herbe, le même bruit de machine et d’eau : mais nous aimions qu’un seul matin ressuscitât de matin en matin, un seul soir de soir en soir. C’est ça le bonheur : tout nous était bon.
S. de Beauvoir, Les Mandarins, 1954, p. 423.

Dans les années 50, dans un petit patelin, de maisonnettes, de bois, de rivières, grand-maman était sans doute la plus pauvre des femmes. Mais elle avait quelque chose pour vivre en harmonie avec la nature et les êtres : un jardin, une famille, des rires, 17 enfants, et un peu de gin…

Elle vivait l’hiver parce que c’était l’hiver. Elle vivait l’été, parce que c’était l’été.

Dans son potager, avec sa robe fleurie, elle se fondait à la terre.

Elle est décédée dans notre maison, à l’âge de 86 ans.

C’était en 1966, je crois.

Pas une seule seconde de sa vie, elle a pensé au suicide. Tout simplement parce qu’elle connaissait la nature et ses lois.

Elle égrenait un gros chapelet noir chaque jour. Aujourd’hui, on fait du yoga, de la méditation transcendantale, des thérapies, et on commence à penser au sexe à 14 ans.

Elle a fait tout ça, sans l’aide de l’État.

Je pense qu’elle m’a appris à être heureux avec presque rien. Même pas de papiers, de formules à remplir.

Elle n’a jamais su ce qu’était qu’un psy.

Et c’est pour ça que je me dis que la misère compliquée est bien pire que la simple.

Le tapis et la poussière

Aujourd’hui, un art de vivre (sic) consiste à cacher les misères créées en les enfouissant sous un gros tapis de formulaires, de complexités, d’analyses, de spéculations, de pilules, d’hyper organisations, de spécialistes faisandés,  pour en arriver à un résultat inférieur et à une vie dénaturée . La nature, ce n’est pas seulement les plantes… C’est nous. Nous dans nos relations, notre quotidien. La race humaine…

Le coupable est dans le « papier »… Tout est complexe, et de la tête du haut fonctionnaire, jusqu’aux petits exécutants, les ordres étant les ordres, on obéit. Il n’y a pas de procès à faire. Ni personne à blâmer…

C’est un déni de nos l’échec de notre société… On peut analyser  autant  qu’on voudra pour connaître des « pourquoi » des « raisons », et du reste… Les formules et les artifices  ne remplaceront jamais la Vie. Nous sommes devenus tout simplement hypocritement des assassins invisibles.

La manière de faire a tout dépassé. Même ce qui serait le but ultime : l’humain.

Humanisme. Un mot… Un mot enseveli sous la couche trop épaisse du circuit complexe entre la « machine » et l’être humain.

Tant et si bien que l’on ne comprend plus rien.

C’est la fondue totale des humains par un système de bureaucrates qui font leur boulot.

On meurt donc en court « de feuille » ou de rapports…

Les travailleurs sont maintenant enterrés dans une fosse commune : le tapis.

On veut bien être boss, mais pas nettoyeur…

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P.S. : Elle avait un beau chapelet la grand-mère… Je me demande si cela ne remplace pas tous les formulaires, les états d’âme piteux, la vanité,  et n’éloigne pas les diables qui nous fournissent des formules de bonheur.

Si elle avait été une infirmière de carrière… Je ne l’aurais peut-être pas connue…

Et certains enfants ne connaîtront pas leur grand-mère.

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